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Révisions constitutionnelles et leur impact sur la promotion du constitutionnalisme et de la démocratie en Afrique: cas de la RDC

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par Aimé NDAYA N'DAMYA FULBOB
Université de Kinshasa RDC - en vue de l'obtention d'une licence en droit public 2011
  

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II. PROBLEMATIQUE ET QUESTIONS DE RECHERCHE

L'Afrique après sa colonisation qui s'est soldée par l'indépendance de ses Etats, a connu beaucoup d'événements, entre autres les différents mouvements qui ont abouti à un rapprochement fondamental, voire à une uniformisation du droit constitutionnel non seulement régional mais aussi mondial. Ce rapprochement concerne aussi bien les institutions politiques que la proclamation et la garantie des droits fondamentaux. Ce mouvement unificateur a abouti à une forme de patrimoine constitutionnel non plus simplement européen, mais mondial. Toutefois, cette uniformisation s'accompagne quelquefois d'étranges paradoxes. Il en est ainsi du paradoxe de la notion de constitution en Afrique.

C'est depuis le début des années 90 qu'émerge en Afrique le constitutionnalisme, à la faveur des processus démocratiques et de l'adoption de nouvelles constitutions très généreuses en matière de droits et de libertés. Les Etats africains autrefois en proie à une cascade de coups d'Etat ont fini par disqualifier ce procédé comme moyen légitime d'accès au pouvoir. Même, l'Acte constitutif de l'Union Africaine (article 4p) a adopté le principe du rejet des gouvernements anticonstitutionnels, même si le cas des régimes constitutionnels qui pervertissent les constitutions et les utilisent pour tyranniser le peuple n'est pas en pratique réglé9 .

Cependant, seules les règles et la pratique de la révision des constitutions, question certes fondamentale en droit constitutionnel, mais pas unique, a semblé présenter un intérêt pour les juristes tant africains qu'occidentauxI0 . D'après Amougou, qu'en dehors de l'actuelle hausse des prix des denrées alimentaires, l'Afrique connait une autre inflation largement plus meurtrière à long terme en ce sens qu'elle bloque l'émancipation politique et économique de ses populationsII. Cette inflation de la révision constitutionnelle est actuellement devenue monnaie courante, une hémorragie et même un souffle de vie, dont elle constitue aussi l'unique offre politique des dirigeants d'un continent qui reste pourtant l'incontestable lanterne rouge du développement.

Les objectifs classiques de la révision constitutionnelle en Afrique ont cédé la place à des ambitions politiciennes des dirigeants africains. Cette révision est sortie de

9 Centre pour la gouvernance démocratique du Burkina-Faso (CGD), « Constitutionnalisme et révisions constitutionnelles en Afrique de l'Ouest : le cas du Benin, du Burkina-Faso et du Sénégal », http :// www .cgd .org, (Consulté le samedi I8 décembre 20I0) .

I0 GONIDEC, P-F ., Les systèmes politiques, LGDJ, Paris, I974, p . 86 .

II AMOUGOU, T ., « Afrique -- l'inflation de la révision constitutionnelle : La nouvelle pathologie politique africaine », http :// www.camerounmonpays.over-blog.com, (Consulté le mardi I4 décembre 20I0) .

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Cas de la République démocratique du Congo"

son caractère utile et normal, elle est devenue également un outil personnel de confiscation du pouvoir .I2 Ceci faisant état que lorsque les Etats africains avaient mimé le constitutionnalisme de leurs colonisateurs, ils croyaient au bonheur politique ou à un luxe. Pourtant, c'était une épée de Damoclès suspendue sur la tête des dirigeants qui devaient tenir bon à son respect. Malheureusement, il s'est avéré que la culture politique occidentale était tout à fait différente de celle de l'Afrique. Le constitutionnalisme ne pouvait pas être respecté puisque certains de ses critères faisaient défaut.

A l'origine, le recours à des pratiques traditionnelles de pouvoir africain, lequel pouvoir était « héréditaire, absolu »I3 . En effet, en Afrique, le chef traditionnel devait demeurer le plus longtemps au pouvoir sans restriction aucune. Or, avec ce mimétisme du constitutionnalisme, les dirigeants africains se voyaient limiter dans leurs prérogatives ; leurs compétences étaient limitées conformément à la théorie de la séparation des pouvoirs. Comme il y aurait l'absence de la culture constitutionnelle et ou du constitutionnalisme, ces chefs d'Etats devenus chefs coutumiers au sommet de l'Etat se sont illustrés dans la désacralisation des constitutions africaines.

Les chefs d'Etats africains ne se demandent pas : « que devons-nous faire pour nos populations et le développement de nos pays ? » ; ils se disent plutôt : « nous devons modifier la constitution pour rester longtemps au pouvoir » .I4

En effet, cette attitude révisionniste des constitutions a gangréné la situation politique du continent. La tendance générale est en faveur des modifications constitutionnelles. Ces révisions portent généralement sur les dispositions « jugées essentielles », en l'occurrence le nombre des mandats présidentiels et ou les limitations concernant leur renouvellement et même les modes de scrutin, l'indépendance de la magistrature, etc. Cette tendance « révisionniste » des textes constitutionnels a été qualifiée fort justement de « délinquance normative »I5, en raison de ce qu'elle participe à la négation absolue des droits essentiels à la démocratie.

Ce noble mécanisme d'adaptation, de créativité et de régénération de la constitution suscite aujourd'hui un tôlé sur la scène politique africaine. Ici, la constitution

I2 AMOUGOU, T ., Op. cit.

I3 KABUYA LUMANA, C ., Histoire du Congo. Les quatre premiers présidents, éd . SECCO-CEDI, Kinshasa, 2002, p .9 .

I4 AMOUGOU, T ., Membres du code, chercheur, coordonateur de territoire, développement et mondialisation, éd . Syllepse, Paris, 2008, p . I97 .

I5MAMADOU KONATE, « Les dirigeants africains et les constitutions : Tous des « violeurs », http :// www.altervive.com/cameroun/po/rev.htm, (Consulté mardi le I4 décembre 20I0) .

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est au coeur des débats et la révision de la loi fondamentale est sur toutes les lèvresI6 . Ces révisions sont porteuses des crises politiques, notamment la crise de la démocratie, la crise de la justice constitutionnelle, celle de légitimité de la norme constitutionnelleI7, voire les révolutions populaires en Afrique, lesquelles révolutions ont comme cause lointaine des révisions constitutionnelles. Ces revendications populaires se justifient par le principe du : « droit des peuples à disposer d'eux-mêmes », qui évoque une haute idée de la liberté d'un groupe et de la maitrise de son destin au regard de la Charte de l'ONU en son article Ier, paragraphe 2 .I8

Force est de constater que la révision constitutionnelle vise toujours à adapter la constitution à l'évolution des moeurs et des aspirations politiques et aussi à permettre aux institutions politiques d'être stables. Elle se fait toujours dans le cadre de l'intérêt supérieur de la nation et non pas pour consolider les pouvoirs des dirigeants. Mais malheureusement, les chefs d'Etats africains se cachent derrière la révision pour réaliser leur calcul politicien, et atteindre ainsi des objectifs personnels.

Or, la thèse ou la théorie de la stabilité constitutionnelle ne veut pas dire que les dispositions constitutionnelles sont immuables ; ces dispositions seraient immuables si elles devaient rester identiques. Sur ce, Jean GICQUEL pense que les constitutions ne sont pas des tentes dressées pour le sommeil. Elles subissent l'usure du temps, comme toutes les choses humaines. Vivre, n'est-ce pas s'adapter ! I9

D'où, les modifications ou les révisions constitutionnelles doivent se faire dans le but d'adapter les dispositions constitutionnelles à l'évolution de la vie humaine dans la société et non pour des intérêts égoïstes ou des calculs politiciens des dirigeants. La révision ne doit pas consister à la destruction ou à la désacralisation de la constitution.

Malheureusement, ce mécanisme constitutionnel tel qu'employé fait inéluctablement que les constitutions africaines deviennent, comme les qualifie le professeur Jacques DJOLI, des « constitutions de façade, une coquille vide, un panier à crabe » .20

I6 CHERIF OUAZANI, « La constitution au coeur des débats en Afrique », Jeune-Afrique l'inteligent, 48ème année, n°2466, du I3 au I9 avril 2008, pp . 62-63 .

I7 ASSANE MBAYE, Op. cit.

I8 Charte des Nations Unies, http://www .wikipedia .chartenationsunies .org, (Consulté le mardi I4 décembre 20I0) .

I9 GICQUEL, J ., Droit constitutionnel et institutions politiques, 20ème éd ., Montchrestien, Paris, 2005, p . I77 .

20 DJOLI ESENG'EKELI, J ., Droit constitutionnel congolais, Notes de cours polycopiées, me Graduat, Faculté de Droit, UNIKIN, 2007-2008, p . 25 .

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La constitution en Afrique n'est qu'une façade derrière laquelle se cache un régime politique peu soucieux du constitutionnalisme entant que technique de limitation du pouvoir. Et pourtant, le constitutionnalisme, hier chanté, loué et même canonisé par les dirigeants africains comme la voie royale pour leur développement économique, politique et culturel est en procès, accusé d'être responsable des difficultés que rencontrent les Etats, notamment l'instabilité gouvernementale et l'inefficacité du pouvoir politique. On l'accuse aussi d'être un héritage artificiel de la métropole complètement déconnecté des réalités africaines et d'être le ferment de particularisme qui cristallise les oppositions d'ordre ethnique, religieux ou culturel.2I

Les Etats ne se ressemblent pas mais les expériences des uns peuvent servir de modèle ou d'exemple pour les autres. Ainsi, la RDC a connu plusieurs textes fondamentaux qui ont régi le pays depuis son indépendance jusqu'à ce jour, avec la constitution du I8 février 2006 telle que révisée.

Pour rappel, la deuxième République a connu une histoire particulièrement mouvementée des révisions constitutionnelles, parce que la seule, la constitution du 24 juin I967 a connu un record de modifications, soit dix-sept fois au total. Ces incessantes révisions ont eu un impact négatif sur le régime politique qui a fatalement dégénéré en une dictature de triste mémoire.

Cependant, la philosophie de la refondation de l'Etat contenue dans le texte fondamental de 2006 voulait que celui-ci soit préservé des tripatouillages et des grenouillages22, comme l'a été la constitution de la deuxième république. Malheureusement, le vieux démon de cette dernière république et celui de certains Etats africains semblent toujours hanter la classe politique congolaise. Voilà qu'il y a de cela quatre ans que la constitution de 2006 vient d'être éventrée.

Cette révision à quelques mois des scrutins constituerait un test crucial sur le fondement moral de la démocratie au Congo .23 Ne serait-ce pas une manière d'entraver la démocratie dans ce genre de révision réputée d'urgence selon les dirigeants actuels du régime, ladite révision est sujette d'une frustration au sein de la classe politique congolaise.

2I BENGALY, A ., « Droit constitutionnel », http :// www .efccnigeria .org, (Consulté mardi le I4 décembre 20I0) .

22 DJOLI ESENG'EKELI, J ., cité par PUNGA KUMAKINGA, P ., Constitutions et constitutionnalisme en Afrique. Cas de la RDC, Mémoire de Licence, Faculté de Droit, Université de Kinshasa, 2005, p . 8 .

23 DIKEBELAYI, J .M ., « Tentative de révision constitutionnelle à quelques mois des scrutins : un test crucial sur le fondement moral de la démocratie », http :// www .congolex, (Consulté le dimanche, 30 janvier 20II) .

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Face à cette situation constitutionnelle que traverse les Etats africains en général et la RDC en particulier, il nous parait loisible, pour dégager quelques pistes de solution, de susciter des questions pouvant élucider ou orienter notre démarche scientifique.

De ce qui précède, on peut logiquement se demander quel impact les révisions constitutionnelles ont-elles sur la promotion du constitutionnalisme et de la démocratie en Afrique et plus particulièrement en RDC ? Ces révisions concourent-elles au développement et au bien-être des populations du continent ? Sont-elles un facteur de préservation de la paix ou simplement un facteur provocateur des tensions dans les Etats ? A qui profitent vraiment les révisions constitutionnelles en Afrique ?24 Enfin, quelles sont les motivations qui conduisent aux propositions de révisions constitutionnelles ?

Telles sont les questions principales auxquelles cette recherche s'évertuera à répondre.

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