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La gestion des déchets dangereux au Cameroun

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par Ruben Ludovic LONGO
Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC) - Universite de Yaoundé II  - Master en relations internationales, option diplomatie, spécialité contentieux international 2012
  

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SECTION II - UN CHOIX CONFIRME PAR L'IDENTIFICATION DES DECHETS DANGEREUX ET DES PRINCIPES GUIDANT LEUR GESTION

Du droit applicable à la gestion des déchets dangereux au Cameroun, se dégagent une conception extensive de ces déchets (paragraphe I), ainsi que l'application des principes du droit international de l'environnement à la gestion de ces déchets (paragraphe II).

Paragraphe I - La conception extensive des déchets dangereux

Le droit camerounais adopte une posture extensive dans la définition et l'identification subséquente des déchets dangereux se montrant ainsi assez ferme. Cela se déduit déjà de l'extensibilité de la définition légale de ces déchets (A), ce qui en permet une tentative d'identification selon le droit camerounais (B), complétée par la prise en compte de sources de déchets dangereux (C).

A. L'extensibilité de la définition légale des déchets dangereux

Le caractère extensible238(*) de la définition des déchets dangereux en droit camerounais se déduit d'abord de sa formulation en droit interne (1) avant d'être confortée par son articulation avec les définitions internationales (2).

1. La formulation de la définition en droit interne

Partant des textes de référence (a), l'on peut ressortir le caractère intégrateur et dynamique de l'option définitionnelle camerounaise (b).

a. Les textes de référence : les lois n° 89/027 du 29 décembre 1989 portant sur les déchets toxiques et dangereux et n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de l'environnement

Deux textes législatifs sont mobilisables dans la quête d'une définition des déchets dangereux en droit positif camerounais.

La loi de 1989 sur les déchets toxiques et dangereux est le premier texte à prendre en considération et pas seulement d'un point de vue chronologique. La loi de 1989 demeure en effet le seul texte de droit camerounais spécifiquement consacré aux déchets dangereux. C'est dire qu'il s'agit de la lex speciali du droit camerounais en matière de déchets dangereux. Elle n'a pas perdu de sa pertinence malgré l'avènement de la loi-cadre parce que celle-ci fait figure de lex generali, étant consacrée à un objet beaucoup plus large, à savoir la gestion de l'environnement et ne comportant que très peu de dispositions spécifiques sur les déchets dangereux. Il va cependant sans dire que celles de ses dispositions qui impactent la gestion des déchets dangereux peuvent être considérées comme abrogeant celles de la loi de 1989239(*). Ceci est d'autant plus pertinent que la loi de 1996 s'intéresse à la gestion des déchets et comporte à ce sujet des dispositions bien plus conséquentes que la loi de 1989. Cette dernière, bien qu'étant spécifiquement consacrée aux déchets dangereux, reste très laconique quant à leur gestion.

D'ailleurs, la loi de 1996 n'abroge expressément qu'une seule disposition de la loi de 1989, à savoir son art. 4 (1)240(*), pour le reste elle énonce elle-même que « la présente loi s'applique sans préjudice des dispositions non contraires des lois particulières en vigueur en matière de gestion de l'environnement »241(*). Ainsi, la loi de 1989, conserve sa pertinence, d'autant plus qu'elle est la seule à fournir une définition des déchets dangereux. En effet, au sens de cette loi, « sont considérés comme déchets toxiques et/ou dangereux, les matières contenant des substances inflammables, explosives, radioactives, toxiques représentant un danger pour la vie des personnes, des animaux, des plantes et pour l'environnement »242(*). Ainsi, le droit camerounais définit les déchets dangereux sur la base de deux critères : leur propriété dangereuse et leur impact négatif sur l'homme et l'environnement243(*). Cette définition peut souffrir de nombreuses critiques à l'instar de l'usage redondant des termes « dangereux » et « toxique ». Toutefois, en procédant par une définition basée sur des caractéristiques de danger plutôt que par une technique énumérative potentiellement restrictive, elle peut permettre une application souple de la qualification de déchets dangereux. La loi de 1989 a cependant une faille que l'on pourrait considérer comme lourde celle de ne pas définir la notion même de déchet.

La loi de 1996 vient combler dans le droit positif camerounais le déficit laissé par loi de 1989244(*) en procédant à la définition du déchet. A titre de rappel la loi-cadre le définit comme « tout résidu d'un processus de production, de transformation ou d'utilisation, toute substance ou tout matériau produit ou, plus généralement, tout bien meuble ou immeuble abandonné ou destiné à l'abandon ; »245(*). Il s'agit là d'une option définitionnelle qui se veut large et capable d'englober un maximum d'objets ou de matériaux non destinés à être réemployés quelle qu'en soit l'origine.

En effet, la formule permet d'englober les déchets d'origine aussi bien industrielle246(*) que ménagère ou de toute autre origine que ce soit247(*). Mieux encore, elle gomme le handicap premier de la notion de résidu qui mènerait à n'appliquer la qualification de déchets qu'à des restes ou reliquats des processus suscités, en ignorant les biens abandonnés ou destinés à l'abandon248(*). Ainsi, les biens usagés ou jetés constituent bel et bien des déchets en droit camerounais. En ce sens le droit camerounais se rapproche du droit français249(*) et même du droit béninois250(*) qui eux aussi visent les résidus, produits substances ou matériaux, y compris les biens meubles abandonnés par leur détenteur. La lecture combinée des textes de 1989 et 1996, révèle donc le caractère intégrateur et dynamique de la définition des déchets dangereux.

b. Le caractère intégrateur et dynamique de l'option définitionnelle camerounaise

La formulation de la définition des déchets dangereux en droit camerounais s'avère intéressante par son caractère intégrateur et dynamique. Il en résulte, en effet, que toute chose non destinée à être réemployée ou insusceptible de l'être peut être qualifiée de déchet dangereux, si elle présente les propriétés énumérées par la loi de 1989, à savoir inflammable, explosive, radioactive ou toxique. Sur la base de ces propriétés, un nombre virtuellement illimité de choses peuvent être considérées comme des déchets dangereux et donc faire l'objet d'un traitement spécifique. Loin d'être figée, la conception des déchets dangereux en droit camerounais est donc dynamique en ce qu'elle permet, sous réserve de la découverte d'une propriété dangereuse, d'intégrer et de traiter de nouveaux objets, matières ou substances selon les règles gouvernant la gestion des déchets dangereux. Ce faisant la définition camerounaise des déchets dangereux n'est pas déconnectée des définitions fournies par les instruments internationaux.

2. L'articulation avec les définitions internationales

La définition nationale des déchets dangereux concorde dans une certaine mesure avec les définitions opérées par les instruments internationaux intervenus dans le domaine à savoir les Conventions de Bâle et de Bamako (b). Par ailleurs, ces définitions sont applicables en droit camerounais (c). Mais il convient de procéder tout d'abord à un rappel de ces définitions (a).

a. Rappel des définitions internationales des déchets dangereux

Lorsque l'on parle de définitions internationales des déchets, l'on se réfère essentiellement à la Convention de Bâle au niveau universel et à celle de Bamako au niveau régional africain251(*). En effet, la Convention de Bâle définit les déchets comme « des substances ou des objets qu'on élimine, qu'on a l'intention d'éliminer ou qu'on est tenu d'éliminer en vertu des dispositions du droit national »252(*). La Convention de Bamako adopte juste une conception plus large, en employant le terme « matières » à la place de celui « d'objets », employé par la Convention de Bâle253(*).

Pour ce qui est de la définition des déchets dangereux, les deux instruments internationaux ne s'attachent pas à les définir à travers une formule comme celle de la loi de 1989254(*). Ils procèdent plutôt à une énumération des déchets dangereux et des caractéristiques de danger à travers des annexes. Dans le cadre de la Convention de Bâle les déchets dangereux sont identifiables principalement à travers les Annexes I qui liste des déchets à contrôler et III relative aux caractéristiques de danger255(*). Cependant, l'Annexe VIII256(*) peut servir de critère complémentaire pour l'identification des déchets dangereux.

b. La concordance entre les définitions nationales et internationales

La définition nationale s'articule assez aisément avec les définitions fournies par ces textes internationaux, qu'il s'agisse de la définition du déchet ou de celle du déchet dangereux. Comme cela a déjà été relevé, les définitions du « déchet » opérée par tous ces instruments se recoupent presqu'intégralement. Il n'y a pas de dissonances entre ces textes. Cependant, la loi-cadre s'avère plus précise, complétant les instruments internationaux. Ces différentes définitions s'inscrivent dans une logique complémentaire. A titre de confirmation, les deux conventions font référence aux définitions nationales257(*), ce qui est d'autant plus intéressant que celles-ci peuvent inclure des déchets dangereux ignorés par la règlementation internationale258(*). De plus cette référence a un triple intérêt : réduire le handicap dû à l'absence d'une définition universelle des déchets dangereux, faciliter l'application des mesures de ces conventions à d'autres déchets, résoudre les cas de doute sur l'applicabilité des règles des instruments internationaux à un déchet259(*).

Par ailleurs, parce qu'il donne une définition littérale des déchets dangereux260(*), le droit camerounais, s'avère un peu plus complet. La technique énumérative des textes de Bâle et de Bamako, vient alors s'articuler avec la définition nationale en lui apportant plus de précision.

c. L'applicabilité des définitions internationales

Le Cameroun étant partie aux Conventions de Bâle et de Bamako, il est lié par leurs dispositions qui par le biais de la ratification intègrent le droit camerounais. Il s'en suit que les déchets dangereux ou propriétés dangereuses énumérés par ces deux Conventions devraient également être considérés comme tels en droit interne261(*). Ils doivent donc faire l'objet des modalités de gestion des déchets dangereux prévues en droit camerounais, même si leur incorporation dans un texte de droit national n'est pas superflue.

Quoiqu'il en soit, il est possible à partir des lois de 1989 et 1996 de procéder à un essai d'identification des déchets dangereux en droit camerounais.

B. L'identification des déchets dangereux conformément au droit camerounais

Même si les textes n'opèrent pas formellement une telle identification262(*), il est possible à partir des textes sus-cités, mais également sur la base de la classification opérée par la Stratégie nationale de gestion des déchets d'identifier des déchets dangereux, conformément au droit camerounais. Il est ainsi possible tout d'abord de procéder à une catégorisation des déchets dangereux (1). Ces textes laissent également la possibilité d'identifier des déchets dangereux par assimilation (2).

1. La catégorisation des déchets dangereux

De manière générale, les déchets peuvent faire l'objet de plusieurs classifications263(*). Bien qu'elle opère elle-même ces différentes catégorisations264(*), la Stratégie nationale de gestion des déchets en retient une qui semble la plus appropriée et qui se fonde sur la source des déchets, les regroupant en trois grandes catégories : les déchets ménagers, les déchets industriels et les déchets hospitaliers265(*). Etant donné que les déchets dangereux sont d'abord des déchets, quoique dotés de propriétés dangereuses, ils n'ont pas de sources spécifiques266(*). Il conviendra donc de reprendre la classification de la Stratégie nationale de gestion des déchets, afin d'identifier les déchets dangereux d'origine industrielle et agricole (a), mais aussi ceux d'origine hospitalière (b) et ménagère (c).

a. Déchets dangereux d'origine industrielle ou agricole

Dans sa classification, la Stratégie nationale de gestion des déchets ne ressort pas clairement les déchets agricoles qui sont pourtant visés par la loi cadre267(*) et qui avec les déchets industriels constituent une bonne part des déchets dangereux268(*).

Les déchets d'origine industrielle sont issus de l'activité industrielle, mais aussi commerciale ou artisanale269(*). L'activité industrielle est certainement la plus importante source de déchets dangereux que ce soit sous forme solide, liquide ou gazeuse. Il ne faut cependant pas en conclure que tous les déchets d'origine industrielle sont dangereux, une bonne part de ces déchets n'ayant pas d'incidence néfaste particulière sur la santé humaine et l'environnement. Ceux-là sont qualifiables de déchets industriels banals270(*).

S'agissant de ceux qui se présentent sous l'état solide, il convient de mentionner les déchets industriels spéciaux (DIS)271(*). Les DIS sont des déchets industriels contenant de l'amiante, de l'arsenic, des métaux lourds ou leurs composés, des substances toxiques, explosives, des résidus d'hydrocarbures, peinture et autres huiles272(*). Ils proviennent généralement des dépôts pétroliers, garages, industries chimiques, etc. Il va sans dire qu'ils sont extrêmement toxiques. Leur production a d'ailleurs été évaluée à 18 400 t/an273(*).

A côté des DIS, il existe également des déchets industriels liquides nuisibles pour la santé humaine et l'environnement. Ils peuvent provenir des sociétés brassicoles, industries chimiques telles que les savonneries, etc. Il s'agit des eaux usées contenant des éléments dangereux, des huiles usagées et des solvants274(*), des eaux de ballast des navires275(*).

Enfin, il existe également des déchets industriels gazeux, qui sont pour une bonne part toxiques. S'ils ne s'accumulent pas dans la nature, ils s'échappent néanmoins dans l'atmosphère ou même dans l'environnement immédiat et peuvent nuire tout au moins à la santé humaine. Ce sont les fumées et émissions des industries énergétiques, manufacturières et autres, contenant des oxydes de carbone, d'azote, des Chlorofluorocarbones (CFC) et gaz précurseurs d'ozone276(*).

Enfin, s'y ajoutent les déchets provenant des activités agricoles, pastorales, de pêche.

b. Déchets dangereux d'origine hospitalière

Les établissements hospitaliers et assimilés277(*) sont également d'importants producteurs de déchets y compris dangereux, dans le cadre de leurs activités de soins, d'analyse ou de recherche. Bien qu'insuffisants pour couvrir les besoins nationaux, il existe un nombre conséquent de ces établissements sur le territoire national278(*), conduisant ainsi à une importante production de déchets solides ou liquides, parfois dangereux. Il est ainsi possible de citer ce que la Stratégie nationale qualifie de déchets hospitaliers spéciaux ou problématiques279(*). Ce sont des déchets dont la nature physico-chimique ou la fonctionnalité représente un danger. C'est le cas notamment des déchets chimiques dangereux (toxiques, inflammables, corrosifs, réactifs, génotoxiques), des déchets radioactifs, des lames et autres objets tranchants souillés ou contaminés, des déchets pharmaceutiques tels les médicaments périmés, des emballages sous pression.

A côté de ces déchets dangereux particulièrement identifiés, d'autres déchets hospitaliers solides peuvent être dangereux. C'est le cas de ceux susceptibles d'engendrer une contamination biologique parce que souillés par le contact avec du sang ou des excréments ou infectieux parce que contenant des agents biologiques280(*).

Enfin, les établissements hospitaliers et assimilés produisent également des déchets sous forme liquide. Il s'agit des résidus de sang, produits chimiques liquides et liquides médicaux281(*). Ceux-ci, peuvent également, à une échelle peut-être inférieure, présenter un danger.

c. Déchets dangereux d'origine ménagère

Le fonctionnement quotidien des ménages est une source importante de déchets sous forme aussi bien solide, liquide que gazeuse282(*). Les déchets ménagers encore qualifiés d'ordures ménagères sont visés par la législation283(*). Contrairement à ce que l'on pourrait penser, les ménages sont aussi des sources de déchets dangereux.

En effet, dans les ménages ou plus simplement dans la vie quotidienne, l'on est amené à utiliser des objets contenant des substances nocives qui après usage devront être gérés comme déchets. Il s'agit principalement des déchets toxiques en quantité dispersé (DTQD)284(*), catégorie qui regroupe notamment les déchets d'équipement électroniques et électroménagers (DEE), les piles et accumulateurs285(*). Les piles contenant du mercure et les accumulateurs286(*) contenant du plomb, sont en effet éligibles à la catégorie des déchets dangereux287(*). Il s'agit là de déchets ménagers solides. Mais, les ménages produisent également des déchets gazeux, issus du brûlage des ordures ménagères à ciel ouvert ou des émissions de gaz issues de déchets solides municipaux. Ces gaz sont notamment le CO2, le NO2 et le méthane, ce dernier étant particulièrement toxique288(*).

En terminant cet essai d'identification, il convient de dire que la qualification de déchets municipaux, sert à désigner les déchets dont la gestion incombe aux municipalités. S'il s'agit majoritairement d'ordures ménagères, on y englobe aussi les déchets considérés comme banals qui proviennent d'activités individuelles, industrielles ou même sanitaires.

2. L'identification de déchets dangereux par assimilation

L'analyse de la classification des déchets dangereux qui transparaît de la Stratégie nationale de gestion des déchets, laisse présumer de la possibilité d'une logique double d'identification des déchets dangereux.

En effet, dans un premier temps, la Stratégie désigne certaines catégories qu'elle identifie elle-même en tant que déchets dangereux conformément à la législation. C'est le cas des DIS qu'elle distingue bien des DIB ; des DTQD, clairement distingués des déchets ménagers ordinaires ; des déchets hospitaliers spéciaux ou problématiques, distincts des autres déchets hospitaliers. Leurs descriptions respectives ne laissent que peu ou pas de doute quant à leurs propriétés dangereuses.

A côté de cette identification claire, d'autres déchets relevant des catégories sus évoquées (industriels, hospitaliers ou ménagers) peuvent également être assimilés à des déchets dangereux quant à leur traitement. Ce sont des déchets qui peuvent également nuire à la santé humaine et à l'environnement. Il va s'agir notamment de certains déchets ménagers gazeux contenant du méthane ou des déchets hospitaliers liquides à l'instar de résidus de sang susceptibles d'entraîner des contaminations. On peut y voir des déchets dangereux de second ordre, à côté de déchets dangereux de premier ordre. Cette logique d'assimilation est présente dans la législation relativement à d'autres types de déchets289(*) et n'est pas une particularité du droit camerounais290(*).

Ainsi se décline l'éventail plus ou moins exhaustif de matières qui peuvent tomber sous la définition des déchets dangereux en droit camerounais et faire l'objet d'un traitement particulier.

C. La prise en compte des sources de déchets dangereux

Il est possible d'y procéder par référence à la règlementation des établissements classés291(*) (1) et des substances dangereuses (2).

1. Les établissements classés : potentiels producteurs de déchets dangereux

Il convient de s'intéresser aux règles relatives à leur identification (a) et au régime auquel ils sont assujettis (b).

a. Identification des établissements classés

La législation camerounaise désigne sous l'appellation d'établissement classé « les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations industrielles, artisanales ou commerciales exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui présentent ou peuvent présenter soit des dangers pour la santé, la sécurité, la salubrité publique, l'agriculture, la nature et l'environnement en général, soit des inconvénients pour commodité du voisinage »292(*). Il s'agit donc d'installations comportant des risques d'accidents ou rejetant des éléments dangereux. Ainsi, des établissements peuvent être catégorisés dangereux à cause de la toxicité de leurs rejets.

b. Les règles régissant les établissements classés

Le régime juridique des établissements classés est précisé par la loi n° 98/015 du 14 juillet 1998 relative aux établissements classés dangereux, insalubres ou incommodes et son décret d'application n° 99/821/PM du 09 novembre 1999 fixant les conditions d'agrément des personnes physiques ou morales aux inspections, contrôles et audits des établissements classés dangereux, insalubres ou incommodes293(*). En vertu de ces textes les établissements classés font donc l'objet d'une règlementation rigoureuse qui implique un régime d'autorisation pour leur ouverture, des consignes d'exploitation, des contrôles, etc. Leur autorisation d'ouverture est conditionnée par une étude de dangers294(*). Ils sont assujettis à la fiscalité environnementale et notamment à un prélèvement obligatoire fixé par l'administration et destiné à supporter les coûts de la pollution qu'ils génèrent295(*). Il faut préciser qu'il existe deux types d'établissements classés : les établissements de première296(*) et de deuxième classe297(*). La première catégorie est la plus pertinente en matière de gestion des déchets car s'y retrouve les installations de stockage et de traitement des déchets.

2. Les substances dangereuses

Il s'agit « des substances chimiques nocives et/ou dangereuses qui, en raison de leur toxicité, ou de leur concentration dans les chaînes biologiques, présentent ou sont susceptibles de présenter un danger pour la santé humaine, le milieu naturel et l'environnement en général, lorsqu'elles sont produites, importées sur le territoire national ou évacuées dans le milieu, sont soumises au contrôle et à la surveillance des Administrations techniques compétentes, en relation avec l'Administration chargée de l'environnement. »298(*) Il s'agit donc de substances qui peuvent se retrouver dans des déchets et donc leur conférer le caractère dangereux ou devenir après usage des déchets dangereux. Aussi leur fabrication et leur importation sont-elles soigneusement encadrées, en vertu des principes du droit international de l'environnement.

* 238 Ce caractère extensible lui est reconnu par Aimé Dounian. Voir A. Dounian, op. it., p. 29-30.

* 239 En vertu du principe général de droit « lex posterior, priori derogat », qui veut que la loi nouvelle prime sur la loi générale, et plus précisément qu'en cas de conflits entre des dispositions de deux lois portant sur le même objet, ce sont les dispositions de la loi la plus récente qui recevront application.

* 240 En effet, cette disposition relative aux peines encourues est expressément abrogée par l'art. 98 (2) de la loi de 1996.

* 241 Art. 98 (1) de la loi n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de l'eenvironnement.

* 242 Art. 2 de la loi n° 89/027 du 29 décembre 1989 portant sur les déchets toxiques et dangereux.

* 243 Voir A. Dounian, op. cit., p. 41.

* 244 Ceci ne signifie pas qu'il n'existait pas auparavant de définition juridique des déchets dans le droit camerounais. Cependant toute définition antérieure se trouve abrogée par celle de la loi-cadre.

* 245 Art. 4 (c) de la loi n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi-Cadre relative à la gestion de l'environnement.

* 246 A travers la formule « tout résidu d'un processus de production, de transformation ».

* 247 En incluant les résidus de processus d'utilisation.

* 248 La notion d'abandon est conçue comme « tout acte tendant, sous le couvert d'une cession à titre gratuit ou onéreux, à soustraire son auteur aux prescriptions législatives et règlementaires ». Voir MINEP, op. cit., p. 38. Cette définition reprend quasiment à l'identique celle du de l'art. 3(4) de la loi française de 1975 et ce qui est le plus important dans la notion d'abandon c'est le caractère volontaire du dessaisissement. Voir A. Dounian, op. cit., p. 28.

* 249 Précisément l'art. 1er de la loi 75/633 du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux qui définit le déchet comme : « tout résidu d'un processus de production, de transformation ou d'utilisation, toute substance, matériau, produit ou plus généralement tout bien meuble abandonné ou destiné à l'abandon ».

* 250 Art. 66 de la loi n° 99/030 du 12 février 1999 portant loi cadre relative à l'environnement.

* 251 Elles sont cependant loin d'être les premières définitions internationales des déchets et s'alignent de ce fait dans l'esprit de définitions plus anciennes. Il en va ainsi de celle élaborée au niveau des Communautés européennes à travers la directive 75/442/CEE du 15 juillet 1975 art. 1er : « toute substance ou objet dont le détenteur a l'obligation de se défaire en vertu des dispositions nationales en vigueur ». Cette définition sera modifiée par une directive 91/156/CEE qui définit le déchet dangereux à travers une catégorisation en annexe I. Voir A. Dounian, op. cit., p. 21.

* 252 Art. 2 (1) de la Convention sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et leur élimination.

* 253 Art. 1 (1) de la Convention sur l'interdiction d'importer en Afrique des déchets dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontières et la gestion des déchets dangereux produits en Afrique.

* 254 Il faut même dire ici que l'absence de définition est une tendance générale du droit des déchets, qui le plus souvent procède par énumération sous forme de liste. Voir A. Dounian, op. cit., p. 48.

* 255 Les listes de Bâle s'inspirent des tableaux Y et 5 de la décision C (88) 90 de l'OCDE.

* 256 Qui contient des déchets considérés comme dangereux selon l'art. 1er (1) (a) de la Convention de Bâle.

* 257 C'est le cas avec les art. 3 de la Convention sur l'interdiction d'importer en Afrique des déchets dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontières et la gestion des déchets dangereux produits en Afrique et de la Convention sur l'interdiction d'importer en Afrique des déchets dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontières et la gestion des déchets dangereux produits en Afrique. Il faut dire que ce renvoi s'accompagne d'une obligation de communication des informations concernant les définitions nationales de nature à garantir la sécurité juridique et à faciliter les contrôles. Voir A. Dounian, op. cit., p. 40.

* 258 C'est le cas avec les déchets radioactifs clairement pris en compte par la loi de 1989 sur les déchets toxiques et dangereux, mais ignorés par la Convention de Bâle.

* 259 Voir A. Dounian, op. cit., p. 40.

* 260 Art. 2 de la loi n° 89/027 du 22 décembre 1989 portant sur les déchets toxiques et dangereux.

* 261 Aimé Dounian faisant référence à l'art. 45 de la Constitution évoque l'applicabilité du droit international en droit interne, ce qui a ici pour effet que les définitions internationales des déchets sont des définitions nationales. Ceci indépendamment de leur transcription dans des textes nationaux. Voir A. Dounian, op. cit., p. 32.

* 262 En effet, il faut relever avec Aimé Dounian, que la législation camerounaise (loi de 1989 et de 1996) donne au premier abord une impression d'absence de systématisation des déchets, mais une lecture approfondie révèle une classification « embrouillée » des déchets selon leur origine (industrielle, ménagère, ...), leur nature physique (solide, liquide ou gazeux) ou selon qu'ils sont suscetibles de traitement ou d'élimination finale. Cette logique est proche de la législation européenne qui distingue les déchets par origine (industriel/municipaux) et par caractéristiques (dangereux/non dangereux/inertes), tandis que la loi française elle reste indifférente quant à la nature du déchet. Voir A. Dounian, op. cit., pp. 29-32.

* 263 Ainsi selon leur état, ils pourront être qualifiés de solides, liquides ou gazeux. Selon leur source, l'on distinguera entre déchets municipaux (déchets issus des ménages, des petits commerces, des activités artisanales qui sont gérés par la collectivité locale), les déchets agricoles (issus des exploitations agricoles et forestières, des activités de pêche), les déchets industriels (issus des activités industrielles, mais aussi commerciales et artisanales) et enfin les déchets spécifiques qui ne peuvent être rangés dans aucune des autres catégories. Selon leur nature l'on parlera aussi de déchets organiques (issus de végétaux ou d'animaux), de déchets inertes (matériaux qui n'évoluent pas dans le temps). Dans cette même logique, l'on distinguera aussi les déchets banals (ne présentant pas de danger particulier) des déchets dangereux.

* 264 MINEP, op. cit., p. 38. La stratégie prend également en compte dans cette typologie la situation nationale de la gestion des déchets, notamment les filières et capacités de traitement.

* 265 Il faut dire que cette classification, loin d'être arbitraire, se base sur un certain nombre de fondements textuels dans la législation camerounaise.

* 266 Les industries, les ménages et même les hôpitaux peuvent produire aussi bien des déchets banals que des déchets dangereux.

* 267 Dans sa définition des « effluents », l'art. 4 (i) de la loi-cadre mentionne « tout rejet liquide et gazeux d'origine domestique, agricole ou industrielle, traité ou non traité et déversé directement ou indirectement dans l'environnement ».

* 268 Selon Aimé Dounian, 15% des déchets produits par l'industrie et l'agriculture peuvent être considérés comme dangereux. Voir A. Dounian, op. cit., p.1.

* 269 Voir C. D. Beyeme, op. cit., p. 6.

* 270 Selon les termes de la Stratégie Nationale de Gestion des Déchets qui les assimile d'ailleurs pour leur traitement aux ordures ménagères. Voir MINEP, op. cit., p. 51.

* 271 Envisagés par l'art. 47 (3) de la loi cadre et l'art. 54 de la loi n° 98/015 du 14 juillet 1998 relative aux établissements classés.

* 272 MINEP, op. cit., p. 52.

* 273 Id.

* 274 Evalués respectivement à 70 000 t/an et 84 290 m3/an. Voir MINEP, op. cit., p. 57.

* 275 Id.

* 276 Ibid., p. 59.

* 277 Ce sont les cliniques, maisons de soins, dispensaires, centres intégrés et laboratoires biologiques, les services de soins à domicile, les activités résultant de l'exercice libéral de la médecine, les services vétérinaires et pharmacies. Ces déchets peuvent aussi provenir des activités de recherche, de dentisterie, d'enseignement et de production industrielle ou artisanale dans les domaines de la médecine humaine et vétérinaire. Voir MINEP, op. cit., pp. 60-61..

* 278 La Stratégie nationale des déchets recense officiellement au Cameroun, 02 hôpitaux centraux, 02 hôpitaux généraux et assimilés, 12 hôpitaux provinciaux et assimilés, 2 500 centres de santé et 162 hôpitaux de district. Si l'on y ajoute les cliniques et cabinets privés, laboratoires d'analyse, institutions de formation, pharmacies, centre vétérinaires, sans compter les activités informelles, le nombre n'est pas négligeable. Sur les chiffres officiels (2009), voir MINEP, op. cit., p. 61.

* 279 Ibid., p. 68.

* 280 Ibid., p. 60.

* 281 Ibid., p. 65.

* 282 Voir C. D. Beyeme, op. cit., p. 6.

* 283 Art. 46 de la loi-cadre.

* 284 MINEP, op. cit., p. 47.

* 285 On y range aussi les pneus, cadavres d'animaux et macchabés.

* 286 Alors que les piles sont à usage unique, les accumulateurs qui remplissent la même fonction sont quant à eux rechargeables.

* 287 MINEP, op. cit., p. 47.

* 288 Ibid., p. 50.

* 289 C'est le cas avec les DIB (déchets industriels banals) assimilables aux déchets ménagers aux termes de l'art. 54 de la loi n° 98/015 du 14 juillet 1998 relatives aux installations classées.

* 290 Le droit français fait référence aux DIB qu'il assimile aux déchets ménagers à l'effet de confier leur gestion aux collectivités locales. C'est au moyen de décret que ces déchets sont identifiés, notamment le décret du 23 mars 1990 sur les déchets industriels. Une circulaire n° 94-35 du 1er mai 1994 relatives aux déchets industriels assimilables aux déchets ménagers vient compléter la définition des DIB et insiste sur la nécessité de les traiter séparément des DIS. Le droit camerounais lui ne définit pas aussi clairement les DIB. Voir A. Dounian, op. cit., pp. 49-50.

* 291 Cette logique se retrouve également en droit français dans le cadre duquel une bonne part des règles applicables à la gestion des déchets dangereux se retrouvent dans la réglementation des établissements classés et notamment une loi du 19 juillet 1976. Voir A. Dounian, op. cit., p. 400.

* 292 Art. 54 de la loi n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de l'environnement.

* 293 Deux textes plus anciens sont intervenus : la loi du 8 juillet 1976 fixant les frais d'inspection et de contrôle des établissements dangereux, insalubres ou incommodes suivie du décret n° 76/372 du 2 septembre 1976.

* 294 Les modalités de ces études de dangers rentrent dans le cadre des études d'impact environnemental et les règles qui s'y appliquent se retrouvent dans la règlementation sur les études d'impact environnemental.

* 295 Sur ce point voir A. Dounian, op. cit., p. 342.

* 296 Etablissement dont l'exploitation est soumise à autorisation, dans le but de limiter les dangers où les inconvénients pour la sécurité, la salubrité, la santé humaine et l'environnement.

* 297 Etablissements qui sans présenter les dangers ou inconvénients suscités sont soumis à des prescriptions générales dont le but est de protéger de tels intérêts.

* 298 Art. 57 (1) de la loi n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de l'Environnement.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault