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La gestion des déchets dangereux au Cameroun

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par Ruben Ludovic LONGO
Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC) - Universite de Yaoundé II  - Master en relations internationales, option diplomatie, spécialité contentieux international 2012
  

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Paragraphe II - Un droit faiblement appliqué et sanctionné

La règlementation de la gestion des déchets en général et des déchets dangereux en particulier souffre d'une insuffisante application (A), en plus d'être peu réprimée (B).

A. Une insuffisante application...

L'on note un faible suivi de la règlementation (1) qui s'explique notamment par une faiblesse des moyens d'action (2).

1. ... Du fait du faible suivi de la règlementation

Il s'agit là d'un problème qui, loin d'être propre à l'encadrement juridique des déchets dangereux (b), concerne le droit de l'environnement en général (a).

a. Quant au droit de l'environnement en général

Au Cameroun, le droit de l'environnement tout entier souffre d'un faible suivi. Les normes protectrices de l'environnement ne sont en effet que faiblement appliquées par les acteurs. Les raisons à cela sont nombreuses et certaines ont déjà été évoquées ici : l'éparpillement des textes, le manque de clarté et de précision desdits textes, le manque de moyens des acteurs ou tout simplement le non-respect délibéré. Ce constat de faible application vaut également pour la règlementation des déchets dangereux.

b. Quant à la règlementation des déchets dangereux en particulier

La règlementation des déchets dangereux, comme d'ailleurs celle des déchets en général, n'est pas suffisamment respectée. Certes, elle est peu fournie, mais les quelques règles et principes disponibles sont peu suivis. Le premier exemple est l'obligation de déclaration prescrite par la loi de 1989. Elle devrait amener les producteurs de ces déchets à déclarer les volumes et la nature des déchets dangereux générés par leurs activités au MINEP. Seulement, comme le révèle la Stratégie nationale de gestion des déchets, il y a peu de données statistiques, notamment sur les déchets hospitaliers495(*). De même, contrairement à l'obligation d'élimination des déchets sans préjudice pour la nature et la santé humaine, des déchets dangereux se retrouvent dans des sites de décharges pour ordures ménagères ou simplement rejetés dans la nature sans aucun traitement, surtout en ce qui concerne les déchets liquides et les eaux usées496(*). Loin d'être exclusivement fondée sur la mauvaise volonté des intervenants, ce faible suivi des règles tient aussi à la faiblesse des moyens d'actions.

2. ... Du fait de la faiblesse des moyens d'action

La faiblesse des moyens d'action est l'un des grands dilemmes de la gestion des déchets et particulièrement de celle des déchets dangereux au Cameroun. Il faut rappeler que de par leur toxicité, les déchets dangereux appellent un traitement spécifique. Or, plus que les déchets ordinaires, le traitement des déchets dangereux nécessite des installations particulières (stations d'épurations, filtre à gaz, incinérateurs, etc.) qui sont plus coûteuses et requièrent un personnel plus qualifié.

Cependant, la plupart des intervenants de la gestion des déchets, du moins ceux qui interviennent dans l'exécution, producteurs comme opérateurs, n'ont pas de ressources financières suffisantes à affecter à la gestion des déchets dangereux. Ils ne peuvent donc généralement pas se doter des équipements nécessaires au traitement desdits déchets497(*). En outre, ils ne disposent pas d'un personnel qualifié, c'est-à-dire maîtrisant les caractéristiques des déchets dangereux et les moyens les plus adéquats de les traiter au moins au niveau de la pré collecte.

De même, il n'existe que peu d'opérateurs spécialisés dans la gestion des déchets dangereux. Il n'y a donc pas de filière développée pour la plupart des déchets dangereux au Cameroun et surtout pour les déchets liquides et gazeux. Les déchets dangereux solides se retrouvent souvent pris en charge par l'opérateur classique de gestion des déchets urbains, HYSACAM, sans que celui-ci dispose nécessairement du personnel qualifié et d'installations appropriées.

Il n'en va pas différemment des CTD, qui même lorsqu'elles opèrent en régie, utilisent souvent du personnel saisonnier et n'ont assurément pas des moyens financiers leur permettant de se doter des équipements et installations appropriés, déjà pour les déchets banals et encore moins pour les déchets dangereux.

A cela s'ajoute également une faible capacité des administrations qui en ont la charge à contrôler et surveiller la gestion des déchets dangereux, faute de moyens humains ou matériels, s'ils ne font pas carrément l'objet de tentatives de corruption de la part des producteurs498(*).

B. Un faible recours à la sanction pénale

Aimé Dounian déplore l'absence d'apport jurisprudentiel sur la question de la gestion des déchets499(*). En effet, bien que les textes ne soient pas avares de sanctions pénales, celles-ci ne se trouvent que très rarement appliquées (1), en raison du recours à la transaction (2).

1. Une quasi inapplication des sanctions pénales

C'est là une problématique générale du droit de l'environnement au Cameroun et même plus précisément du droit pénal de l'environnement. En effet, les sanctions pénales sont présentes dans bon nombre de textes relatifs à l'environnement, y compris ceux relatifs à la gestion des déchets. Ce droit pénal de l'environnement s'avère même très sévère au vu de la rigueur des peines, mais aussi de par le régime de responsabilité et la multiplication des autorités chargées de la recherche et de la constatation des infractions500(*). Mais il est très peu appliqué501(*).

Déjà, ces officiers de police judiciaire à compétence spécialisée (agents assermentés de l'administration) ne sont pas toujours outillés pour le bon accomplissement de cette mission. De plus, il y a peu de poursuites et encore moins de sanctions pénales. Selon Bisseck, « si de temps en temps les tribunaux sont saisis en matière d'infraction sur la législation relative à la faune, les autres domaines ne semblent pas faire l'objet de poursuites peut être en raison de la primauté de la procédure transactionnelle, mais certainement en raison du défaut dans la recherche en la constatation des infractions environnementales »502(*). Quoiqu'elle puisse paraître un peu trop négative, cette affirmation n'est pas infondée, car les cas d'infractions constatées se gèrent assez souvent par la voie transactionnelle.

C'est dire que pour ne pas être la seule cause, le recours à la transaction n'en n'est pas moins l'une des causes de l'inapplication des sanctions pénales, dans les cas où des infractions sont effectivement constatées.

2. Un recours à la transaction

Aimé Dounian déplore le fait que bien que le régime de contentieux des déchets au Cameroun soit dense « ce cadre juridique, n'est pas encore mis en oeuvre par les parties qui préfèrent les voies transactionnelles et d'arbitrage prévus par le législateur »503(*). La loi-cadre donne en effet aux administrations chargées de l'environnement plein pouvoir pour transiger sur demande de l'auteur de l'infraction, sous réserve de ce que le montant de la transaction ne soit pas inférieur au minimum de l'amende pénale correspondante et que la procédure de transaction soit antérieure à toute procédure judiciaire504(*).

Cette originalité de la loi cadre permet à l'auteur de l'infraction d'échapper aux sanctions pénales505(*). Elle a en effet l'intérêt d'arrêter toute poursuite pénale susceptible d'être engagée contre l'auteur de l'infraction.

Cette possibilité de transaction est également ouverte à celui qui introduit des déchets dangereux sur le territoire camerounais, infraction qui relève d'un encadrement juridique des mouvements transfrontières de déchets dangereux lui aussi imparfait.

* 495 MINEP, op. cit., p. 71.

* 496 Id.

* 497 MINEP, op. cit., pp. 70-71.

* 498 Voir A. Dounian, op. cit., p. 375.

* 499 Ibid., p. 67.

* 500 La loi n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de l'environnement fait des agents assermentés des administrations impliquées dans la gestion des déchets des officiers de police judiciaire spéciale. Elle énonce en effet en son art. 88 (1) que « sans préjudice des prérogatives reconnues au ministère public, aux officiers de police judiciaire à compétence générale, les agents assermentés de l'Administration chargée de l'environnement ou des autres Administrations concernées, notamment ceux des domaines, du cadastre, de l'urbanisme, des travaux publics, des forêts, de la marine marchande, des mines, de l'industrie, du travail et du tourisme sont chargés de la recherche, de la constatation et des poursuites en répression des infractions aux dispositions de la présente loi et de ses textes d'application ».

* 501 Voir sur ce point D. Bisseck, Rapport de la Cour suprême du Cameroun le droit pénal de l'environnement, Le droit de l'environnement, Porto-Novo - 26 et 27 juin 2008, consulté sous le lien http://www.ahjucaf.org/Rapport-de-la-Cour-supreme-du,6715.html.

* 502 Voir sur ce point D. Bisseck, op. cit.

* 503 A. Dounian, op. cit., p. 427.

* 504 Art. 91 de la loi n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de l'environnement.

* 505 Voir sur ce point D. Bisseck, op. cit.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe