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L'enseignement de la lecture en Afrique noire. Cas de quelques collèges de Brazzaville

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par Martin GUIMFAC
Université Marien Ngouabi - Diplôme d'études approfondies 1999
  

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B. Les tests

Nous rappelons que le test est l'un de nos outils de collecte des données. Les résultats des tests que nous allons élaborer nous permettront de comparer les performances lectorales du test de pré-apprentissage à celles de celui de post-apprentissage des apprenants de la classe de 3ème et de vérifier l'efficience de notre protocole expérimental.

Nous faisons nôtre la définition que le Docteur Pierre Pichot (1990) en donne.

On appelle test une situation expérimentale standardisée servant de stimulus à un comportement. Ce comportement est évalué par une comparaison statistique avec celui d'autres individus placés dans la même situation, permettant ainsi de classer le sujet examiné50(*).

Cette définition insiste sur deux éléments qui conditionnent la valeur du test :

- les sujets doivent impérativement se trouver dans la même situation : la durée et le matériel du test doivent être les mêmes ;

- l'évaluation du comportement intervient selon les règles rigoureuses déterminées statistiquement.

Pour l'élaboration des tests, nous nous sommes inspirés des travaux de Noëlle Pardon (1993)51(*) et de ceux de Brigitte Chevalier (1986)52(*) qui ont traité toutes les deux des compétences de lecteur. Noëlle Pardon (1993) en a proposé quatre :

- la vitesse de lecture ;

- les composantes du savoir-faire fondées sur l'habileté de l'oeil ;

- le développement de la mémoire ;

- la capacité à anticiper, à reconstituer.

Brigitte Chevalier (1986) a amélioré cette proposition et préconisé trois compétences :

- oeil et esprit exercés ;

- capacité à anticiper, à reconstituer ;

- entraînement total.

Par la suite, elle a mis au point plusieurs types d'exercices d'entraînement progressifs pour l'installation chez l'apprenant de chacune des compétences suscitées. Nous considérons chacune d'elles comme une variable. Ainsi, nous avons trois variables définies ainsi qu'il suit : oeil et esprit exercés, capacité à anticiper, à reconstituer et entraînement total.

a)- Variable « oeil et esprit exercés »

Cette variable se compose d'une série de trois items : un oeil panoramique, un oeil habile, et un esprit agile.

OEil panoramique

Pour rendre la lecture plus rapide et plus performante, il est nécessaire d'accroître le nombre de signes graphiques perçus à chaque fixation. Grâce aux travaux du chercheur Emile Javal (1978) et de ceux de François Richaudeau (1997), il est tout à fait possible de décrire le processus de la lecture53(*). C'est vers 1900 que le premier, directeur du laboratoire d'ophtalmologie à la Sorbonne, a montré que l'oeil du lecteur ne progresse pas de façon continue le long de la ligne d'un texte. Au contraire, l'oeil opère par bonds successifs, c'est-à-dire par saccades.

Depuis, d'autres chercheurs - comme François Richaudeau (1997) qui a bâti la méthode qui porte son nom - ont pris la relève et, grâce à des techniques d'expérimentation fine ont poursuivi l'étude des mécanismes mis en jeu dans l'acte de lire54(*). Ils ont montré que d'un quart à un tiers de seconde, l'oeil du lecteur tout en étant immobile fixe un ensemble de lettres ou de mots puis il pivote en un quarantième de seconde, puis fixe à nouveau un ensemble de lettres ou de mots pendant un quart de seconde et ainsi de suite... L'oeil ne perçoit qu'en état d'immobilité.

Il convient de rappeler que le temps de déplacement et celui de fixation sont sensiblement identiques pour tous les lecteurs. L'oeil du lecteur entraîné ne se déplace guère plus vite que celui du lecteur lent.

En revanche, l'équipe du « Centre d'étude et de promotion de la lecture » a mis en évidence avec François Richaudeau (1997) le fait que le lecteur prodige perçoit davantage de signes en une fixation que le lecteur lent :

Plusieurs dizaines de signes (soit cinq à dix mots) pour le lecteur rapide, alors que le lecteur lent ne perçoit qu'une dizaine de lettres (un à deux mots)55(*)

L'item « oeil panoramique » est destiné à exercer le champ de vision de l'apprenant. La progression est assurée par le nombre de signes graphiques à percevoir lors de chaque fixation de l'oeil : trois à dix signes.

L'« oeil panoramique » comprend des colonnes de mots ou groupes de mots à parcourir de haut en bas, dans le sens d'une flèche. Après les avoir parcourues, les apprenants doivent répondre à des questions qui les amènent à mobiliser au maximum leur capacité de mémorisation. Cet item vise à exercer l'angle de vision du lecteur que les pédagogues appellent aussi empan perceptif. Une action sur l'empan perceptif d'un individu entraîne l'amélioration de sa vitesse de lecture.

L'agrandissement du faisceau de vision d'un apprenti lecteur est déterminant pour accroître son efficacité de lecture. Et nous faisons nôtres les propos de Brigitte Chevalier (1986) pour qui,

L'ampleur du champ perçu est, par ailleurs, directement en liaison avec la compréhension56(*).

OEil habile

Un bon lecteur se remarque notamment par son agilité visuelle. Celle-ci permet d'éviter la confusion des signes graphiques. En effet, l'agilité visuelle oblige le lecteur à revenir en arrière, à explorer plusieurs fois la même phrase.

L'item « oeil habile » se compose de colonnes de mots ou groupes de mots. Devant chaque colonne, un mot ou groupe de mots témoin est indiqué. Il s'agit de le photographier du regard et de vérifier rapidement s'il y apparaît. Cet item vise à amener l'apprenant à distinguer de plus en plus sûrement les différences et les ressemblances entre les mots. Des expériences ayant montré en France57(*) que l'oeil identifie chaque mot globalement et ne voit pas le dessin détaillé de chaque lettre, il s'agit d'accroître la précision et l'exactitude de la discrimination visuelle et, partant, d'améliorer l'agilité non seulement visuelle mais aussi intellectuelle.

Esprit agile

La lecture ne saurait se faire sans l'intervention de la mémoire car lire c'est aussi une manière de se rappeler. Au cycle d'éveil, les spécialistes de la science du langage distinguent plusieurs types de mémoire : la mémoire visuelle, la mémoire auditive, la mémoire intellectuelle, la mémoire verbale et la mémoire tactile58(*).

La mémoire visuelle s'attache plus spécialement aux physionomies, aux paysages, aux couleurs et à toutes les données concrètes qui frappent les yeux.

La mémoire auditive retrouve sans peine les sons, les airs, tout ce qui touche l'ouïe.

La mémoire intellectuelle emmagasine les idées, les raisonnements et les connaissances procédurales.

La mémoire verbale retient facilement la plupart des données par coeur. Elle est constamment sollicitée pour les comptines et les récitations, par exemple.

La mémoire tactile aide surtout les aveugles chez qui elle atteint un haut niveau de sensibilité. Chaque apprenant possède ces diverses mémoires à des degrés différents.

En revanche, au cycle secondaire les pédagogues distinguent deux niveaux de mémoire : la mémoire immédiate et la mémoire à moyen ou long terme.

La mémoire immédiate, dite mémoire de travail (ou mémoire phosphorescente), conserve les souvenirs quelques secondes. Elle permet de clarifier un geste ébauché quelques dizaines de secondes plus tôt.

La mémoire immédiate favorise également la rétention des groupes de mots ou de la phrase qu'un lecteur prononce après en avoir pris connaissance des yeux. Sans elle, aucun lecteur ne pourrait sortir les yeux du texte et regarder les auditeurs, en lecture à levée d'yeux ou en lecture communication. La lecture à levée d'yeux désigne, faut-il le rappeler, la lecture à haute voix au cours de laquelle le lecteur lève de temps en temps la tête pour fixer son auditoire afin de maintenir l'attention de celui-ci éveillée.

La mémoire immédiate est limitée à la fois sur le plan de la durée et de la capacité. C'est pourquoi, pour que de nouvelles informations soient assimilées, il faut que les données antérieurement stockées disparaissent par oubli ou par passage dans la mémoire à moyen ou long terme.

En lecture compréhension, c'est la mémoire immédiate qui est sollicitée. Elle favorise par exemple le repérage de la page d'un article dans un ouvrage grâce aux indications fournies peu avant par le sommaire ou l'index.

Par ailleurs, découvrant les derniers mots d'une phrase, le lecteur se souvient encore des premiers, sinon la compréhension ne saurait être possible. La mémoire immédiate conserve pendant quelques instants une suite de termes, puis le souvenir du mot à mot s'efface et seule la quintessence de l'information est transférée à la mémoire à moyen ou long terme. Les signes s'effacent devant le sens ; l'information linguistique remplace l'information visuelle.

Il convient de rappeler que l'empan du lecteur rapide est supérieur à celui du lecteur lent. Est appelé empan la capacité de la mémoire immédiate c'est-à-dire la quantité de données qu'elle est susceptible d'emmagasiner. Elle en enregistre environ sept, lorsqu'il s'agit d'une suite aléatoire de mots. Si les mots font partie des énoncés linguistiques dans lesquels ils sont unis par des liens sémantiques et syntaxiques, l'empan peut être beaucoup plus important.

Des expériences récentes ont montré qu'un lecteur peu entraîné retient huit mots environ dans un message signifiant59(*). Il est donc nécessaire d'inviter les apprenants à exercer leur empan.

L'item « esprit agile » comprend des listes de mots ou groupes de mots. Il s'agit de relever ceux qui désignent un référent précis ou s'y rapportent. Cet item vise à exercer l'agilité intellectuelle de l'apprenant.

b)- Variable « capacité à anticiper, à reconstituer »

Cette variable est composée de deux items : le texte à trous et le texte puzzle.

Le texte à trous

La lecture ne saurait être réduite à une activité visuelle. Elle est avant tout une activité de l'intelligence. Après avoir exercé l'habileté de l'oeil, élargi le champ de fixation, il convient de faire participer l'apprenant à la construction du sens. Cette dernière se fait grâce à l'anticipation : émissions d'hypothèses et leurs vérifications. A ce propos, Gérard Vigner (1979) affirme, et nous partageons ce point de vue, que :

Lire, ce sera formuler une hypothèse de signification, redéfinie constamment tout au long de la lecture, l'accès au sens totalement réalisé lorsque l'hypothèse de recherche, par réaménagements successifs déterminés par l'apport de données nouvelles prélevées dans le texte, coïncide totalement avec le projet de l'auteur60(*).

L'amélioration de la lecture passe par le développement de la capacité à prévoir le contenu de ce qui suit à partir de ce qui précède. Tout lecteur émet des hypothèses que la lecture effective permet de confirmer ou d'infirmer. C'est la raison pour laquelle la lecture est dite activité probabiliste sur l'écrit. En effet, les indices perceptifs et les indices de sens conduisent, pendant la lecture, à opérer un choix très rapide et non conscient que la lecture ne fait que confirmer dans la plupart des cas.

L'item « texte à trous », inspiré du test de Closure61(*), comprend un texte dans lequel certains mots ont été enlevés et remplacés par des numéros. L'apprenant est invité à compléter les mots manquants à raison d'un seul, par numéro, en tenant compte du sens général du texte. Cet item vise à renforcer ou à créer chez l'apprenant les comportements d'anticipation et à l'habituer à mobiliser l'information déjà recueillie pour prévoir celle à venir.

Le texte puzzle

Cet exercice consiste à remettre dans l'ordre logique des paragraphes et/ou des phrases dispersés : il s'agit de travailler à la fois sur l'anticipation et sur la structuration du texte. Il oblige l'apprenant à tenir compte de la cohérence sémantique et à appuyer sa recherche sur tous les éléments fournis par l'écrit : indices grammaticaux, indices visuels (majuscules, signes de ponctuation).

Le texte puzzle a pour but de faire passer l'apprenant du stade de « liseur » à celui de lecteur, conformément à l'échelle qui a été, comme nous l'avons précédemment indiqué, préconisée par Jean Foucambert (1980). Cet item se compose d'un texte dont l'ordre logique des paragraphes a été considérablement dispersé. Il s'agit de le reconstituer en restituant l'ordre initial des paragraphes.

c)- Variable « entraînement total »

Si les exercices précédents se proposent d'agir sur des aptitudes partielles entrant dans l'acte de lire, celui-ci place l'apprenant face à un texte entier. En effet, ce n'est pas par la combinaison de savoir-faire accumulés que l'apprenti lecteur atteint une compétence de synthèse car la lecture en est une, et mobilise généralement toutes les compétences requises : vitesse, compréhension et efficacité.

La variable « entraînement total » se compose d'un texte suivi soit de questions à choix multiples, soit d'affirmations à propos desquelles il faut répondre par vrai ou faux. Cet exercice vise à évaluer la capacité globale de lecture d'un apprenant car il ne s'agit pas de développer uniquement telle ou telle faculté pour prétendre être lecteur mais il s'agit de manifester sa compréhension du texte : lire c'est comprendre. Dans la présente étude, nous avons retenu un texte suivi des questions à choix multiples.

Une fois nos instruments d'enquête mis au point, nous devons les tester sur un échantillon relativement modeste afin d'éprouver leur validité et élaborer les dimensions de l'enquête proprement dite, c'est la pré-enquête.

* 50. Jean-Jacques, LARAME (1992), Les tests de sélection dévoilés, Paris, Editions de l'Ecrit, p. 10.

* 51.Noëlle, PARDON (1993), « Lecture : les compétences à développer », Diagonales, Paris, EDICEF, n° 25, janvier 1993, p. 34.

* 52.Brigitte, CHEVALIER (1986), Bien lire au collège, Textes et exercices d'entraînement progressifs, Niveau 2, Paris, Nathan, p. 15.

* 53.Emile, JAVA L (1978), Physiologie de la lecture et de l'écriture, Paris, Editions RETZ.

* 54.Michèle, BEDOUET et Frédérique, CUISINIEZ (1997), Lire : soyez rapide et efficace, 2ème édition, Paris, Editions ESF, p. 19.

* 55. Michèle, BEDOUET et Frédéric, CUISINIEZ (1997), op.cit. p. 35.

* 56.Brigitte, CHEVALIER (1986), Bien lire au collège, Guide méthodologique, Niveau 2, Paris, Editions Nathan, pp. 14 - 20.

* 57.Emile, JAVAL (1978), op.cit.

* 58. F, MACAIRE (1993), Notre beau métier, Paris, Les classiques africains, p. 403.

* 59. Brigitte, CHEVALIER (1986), Bien lire au collège, Guide méthodologique, Niveau 2, Paris, Nathan, p. 16.

* 60.Gérard, VIGNER (1979), Lire : du texte au sens, Paris, Editions Clé International, p. 53.

* 61. Le test de CLOSURE est un exercice inventé par William TAYLOR aux Etats-Unis d'Amérique en 1953. Par la suite, cet exercice a été transposé pour la langue française par Gilbert de LANDSHEERE. Il désigne un texte auquel il manque certains mots qu'il faut trouver.

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