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Les jeunes mahorais et comoriens à  la Réunion : Stratégies d'adaptation et moyens de communication

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par Jean Kraemer
Université de la Réunion - Master Sciences et techniques de l'Information et la Communication 2012
  

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Chapitre 2 - LE CONTEXTE DE LA MIGRATION à LA REUNION

1. Le phénomène de créolisation : des influences réciproques

1.1. Créolité et créolisation

Le terme « créole » vient du portugais et de l'espagnol, (« criar » signifie élever), à l'origine il désigne les enfants et plus généralement les descendants de parents européens nés dans les anciennes colonies d'Amérique. Le deuxième sens cité est celui qui qualifie les gens de race noire nés en Amérique, par opposition à ceux qui arrivaient d'Afrique comme esclaves. (Real Academia Española, diccionario de la lengua española, vigésimasegunda edición -2012)

L'image habituelle de la créolité la montre réservée aux îles sous tutelle européenne et particulièrement française, composées d'un patchwork de peuples arrivés de manière plus ou moins involontaire, profitant ou subissant une société post-coloniale métissée.

Le fait créole, la créolité désigne plus généralement les sociétés et phénomènes typiques aux sociétés ultramarines issues du colonialisme européen. Selon Mintz et Price (1986), le terme de créole se réfère à ce qui vient du vieux monde mais qui est construit dans le nouveau. Jean Benoist (1996) reprenant les travaux de Ulf Hannertz indique que « Dès le départ, "métissage", comme "syncrétisme", impliquent en effet l'opposition entre une pureté initiale et le mélange qui la remet en cause. Selon les positions idéologiques, ce mélange peut être dangereux ou constructeur ».

La créolité peut ainsi être perçue comme une « perversion » adaptative de la société colonisatrice ou au contraire comme un construit original, enrichi par les apports de ses composantes, s'adaptant à ses contextes présents et à venir, dans une logique d'évolution plus darwinienne. Cette dynamique symbiotique et adaptative est ce que Ulf Hannertz (1992) a défini comme créolisation et qu'il veut concevoir comme un enrichissement par la mixité culturelle.

À la différence de "métissage" ou de "syncrétisme", le terme "créolisation" n'implique pas une faute ou une faille originelle. A l'inverse, il est porteur de représentations positives : il décrit un processus plutôt qu'un état. La référence identitaire change de signification. « Le multiple n'est

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pas une tare, il est une source; le fluide n'est pas une impossibilité d'être, il en est la modalité, et la condition... » (Jean Benoist, 1996)

Les sociétés créoles ne se sont jamais pliées aux modèles hégémoniques. Hétérogènes dès l'origine, aucune conception "cellulaire" ne s'appliquait à elles. Il a fallu pour les étudier user de concepts tels que "fluidité", "absence de structures communautaires", "métissage", "ambivalence"... (Jean Benoist, 1996). On peut considérer qu'en cela elles préfigurent la « modernité liquide » décrite par Z. Baumannn (2000).

1.2. Une « rétro-créolisation » ?

Les sociétés créoles, résultat dynamique de l'agrégation d'éléments sociaux dissemblables, mais plus généralement toutes les sociétés postmodernes, dans la mesure où face aux cloisonnements et aux ségrégations territoriales, elles participent à créer un "écoumène" (système mondial) global qui relie en réseau « ceux qui s'engagent plus systématiquement dans l'intégration culturelle, dans des synthèses, dans le syncrétisme », participent en effet de ce qu'on peut appeler la « créolisation » au sens d'Hannerz.

Le paradoxe arrive quand on constate que la créolisation, que l'on croyait réservée aux sociétés périphériques ou subordonnées revient en conquérant vers les « centres » qui en sont les composantes originelles ou dominatrices. Les sociétés créoles préfigurent par leur hybridation, leur évolution permanente, leur capacité à assimiler (contraintes ou de bon gré) des éléments allogènes, les sociétés postmodernes tenues d'agréger les éléments d'une culture globale en devenir permanent.

Par l'immigration, retour vers la « mère-patrie » (ou amère ?) des créoles, anciens colonisés ou représentants des états dépendants des nations conquérantes, arrivent et s'installent de nouvelles pratiques sociales, religieuses, linguistiques ou simplement culinaires. (Sophie Chanel, 04/2011). Juste retour des choses donc que cette créolisation des « Métropoles » par l'ancien (et parfois encore) dominé.

Si on admet la créolisation comme une évolution sociale et culturelle (féconde mais souvent douloureuse) imposée à des pays « périphériques » par un centre dominant, rien n'empêche d'étudier en retour l'influence des sociétés créoles ou étrangères sur les pays du « centre ». Ce phénomène pourrait être considéré comme une « rétro-créolisation ».

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Il sera intéressant de déterminer si ces phénomènes jouent, et dans quel sens, entre les migrants mahorais et comoriens de la Réunion et la société créole majoritaire dans l'île.

Cette nouvelle situation est difficile à accepter dans les pays occidentaux par ceux, nombreux, qui subissent les évolutions sans en être acteurs, victimes et non bénéficiaires des évolutions sociales et économiques, ou encore trop marqués par des conceptions culturelles communautaristes. C'est ce qui rend ces thèmes faciles à instrumentaliser et à exploiter politiquement.

Nous examinerons cet aspect dans le contexte réunionnais.

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2. Le contexte des mahoro-comoriens à la Réunion

2.1. L'immigration à la Réunion

2.1.1. Un peuplement allogène, une mosaïque de peuples

La créolité de la Réunion connaît une spécificité, elle est un construit total sur une terre originellement vierge, comme l'indiquent JCC. Marimoutou et F. Vergès (2005), « dans les îles créoles de l'Océan Indien, nulle autochtonie au départ ; tout le monde est, à l'origine, étranger à l'espace et, au fur et à mesure que se construit l'Histoire, la question des origines ne peut que renvoyer à cette étrangeté et à cette extranéité, sauf à la restituer à partir du lieu et dans le questionnement de leur transformation par le lieu » (Marimoutou JCC. et VERGES F. 2005)

A la Réunion, la créolité est un fait identitaire structurant dynamique, qui fait l'objet de tensions et de renégociations permanentes, comme en témoignent les évolutions de la langue créole, la stabilisation inachevée de sa graphie, sa place institutionnelle, scolaire et dans les relations professionnelles. L'ensemble relevant plus d'arrangements que de consensus, dans la logique de « modernité réunionnaise » indiquée par Michel Watin (1995, 2002, 2005)

La créolisation a généralement été plus subie que souhaitée par les intéressés, cet amalgame de cultures et de populations se faisant dans une logique de domination. Les précédentes vagues d'immigrants plus ou moins volontaires ou contraints ont progressivement été intégrées dans une acceptation générale des différences ethniques et culturelles, même si des zones de « friction » peuvent subsister entre les différentes composantes.

2.1.2. Les immigrants récents de la Réunion

Parmi les allochtones (étrangers ou non) que compte la Réunion, la grande majorité sont des français nés en métropole (parmi ces 80000 personnes, soit 10.2% de la population, figurent des « Zoreils » (Métropolitains) et un certain nombre de créoles nés en Métropole, de retour sur l'île de leurs origines). On ne compte que 6108 étrangers (de nationalité) au 1er janvier 2008 (INSEE), soit moins de 1% de la population totale (839480 habitants, estimation INSEE 2011).

Aux Métropolitains, Malgaches et autres Africains (ces derniers sont dits Cafres, ou Kaf en créole), Indiens (Malbars), Indo-Pakistanais (Z'arabes) », et chinois, viennent s'ajouter depuis les années 1980 les derniers arrivants, Malgaches, mais surtout Comoriens et Mahorais.

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Nous nous intéresserons aux migrants Indocéaniques et plus particulièrement à ceux venus de Mayotte et des Comores: « La Réunion reçoit un flux migratoire de populations venant de territoires parmi les moins avancés de l'océan Indien, avec pour partie un déplacement de populations de nationalité française. » indique l'étude du CREDOC (Centre de Recherche pour l'Etude et l'Observation des Conditions de Vie) pour l'ODR (Observatoire du Développement de la Réunion), réalisée en 2004; « Les Mahorais, Comoriens et Malgaches peuvent être attirés par le différentiel de prospérité et par les systèmes d'éducation, de santé et d'aides sociales qu'offre la Réunion. » « L'estimation haute est de 31 000 migrants, dont 15 400 Malgaches, 12 400 Mahorais et 3 300 Comoriens » cette estimation est la plus conforme à l'échantillon de l'enquête CREDOC-ODR, alors que le recensement de 1999 ne comptait que 18 784 migrants).

« Les plus nombreux ne sont pas les natifs de Mayotte (34,5 %), mais les natifs de Madagascar (57 %). Quant aux Comoriens, ils sont très minoritaires (8,5 %). » L'enquête CREDOC-ODR indique que « les Malgaches, comme les Mahorais, sont nombreux à être arrivés dans les cinq dernières années (de l'ordre de 45 % pour ces deux groupes). A l'inverse, la majorité des Comoriens présents à la Réunion, sont arrivés il y a plus de 10 ans (65 % d'entre eux). »

L'étude du CREDOC précise encore que les migrants de l'océan Indien sont de jeunes adultes, les mahorais ont des enfants dans 95 % des cas, 78% pour les Comoriens. La moitié des familles immigrantes mahoraises sont monoparentales, c'est une spécificité dans la mesure où il n'y a que 13% des familles dans ce cas à Mayotte (et 18 % à la Réunion, en 1999). « On peut donc penser que la migration est dans ce cas liée à des séparations de couple. »

« Pour les trois origines, les hommes et les femmes vivant seuls à la Réunion sont très minoritaires (6 % et 4 % respectivement). Les enfants des migrants sont nombreux (65 % des ménages ont au moins 3 enfants) et dans près des deux tiers des cas au moins un enfant est né à la Réunion. Les enfants présents dans les foyers ne sont pas toujours ceux des parents », les migrants pouvant accueillir des membres de la famille étendue.

Avant les années 90, « les migrations étaient plus souvent le fait d'individus ayant des chances de poursuivre des études ou de trouver un emploi à la Réunion. Depuis, les migrations sont principalement le fait de ceux qui sont attirés par les avantages sociaux (minima sociaux, couverture maladie, scolarisation gratuite) et les structures d'éducation et de santé. » ODR - CREDOC La situation des populations migrantes originaires de l'océan Indien - Décembre 2004

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2.2. La migration des Mahoro-Comoriens

2.2.1. Mahorais et Comoriens en France Métropolitaine

L'INSEE (2001) indique que « Le recensement de population de mars 1999, réalisé en Métropole et dans les DOM, a permis de dénombrer 8 032 personnes nées à Mayotte résidant en Métropole. Près de la moitié vivait à Mayotte en 1990. Leur venue en Métropole s'explique pour une partie par la poursuite de leurs études (8 % des Mahorais soit 691 personnes) ».

Un tiers de la population mahoraise est installé dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), essentiellement à Marseille. « L'existence d'une communauté comorienne importante favorise l'implantation dans cette région. » La communauté mahoraise en Métropole est plus jeune que la population majoritaire, particulièrement en PACA. Leur taux de chômage est très élevé (43% hors PACA, 64% en PACA, touchant encore plus les femmes que les hommes), le faible niveau de qualification expliquant cela. INSEE INFOS N°13 novembre 2001.

Comme nous l'avons signalé en préambule, le ministère français des Affaires Etrangères estime la communauté comorienne en France entre 150 000 et 300 000 personnes, ce qui représente une forte émigration pour ce pays.

2.2.2. Les Mahorais et Comoriens à la Réunion

Sur le plan culturel, ces deux groupes présentent de nombreuses similitudes, au point d'être dénommés par le terme générique de « Comores » par de nombreux Réunionnais. Les Mahorais et Comoriens partagent une origine archipélagique commune, mais des histoires, des traditions, des langues, des cultures proches mais distinctes, comme nous l'avons montré en préambule.

En premier lieu, la volonté réitérée des Mahorais de rester au sein de la République française, et leur récente départementalisation (depuis le 31 mars 2011), les confirme en tant que concitoyens. Mais culturellement différents, « immigrants de l'intérieur », les Mahorais de la Réunion sont les derniers ajouts à la société réunionnaise, qui s'en défend parfois.

Sur le plan administratif, contrairement aux Comoriens, ils ne peuvent à aucun titre être considérés comme immigrants puisque français de nationalité, et très majoritairement nés en France, de parents français.

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Les Comoriens, originaires des trois autres îles (Grande Comore, Mohéli et Anjouan) de l'archipel éponyme, sont étrangers, et soumis au bon vouloir administratif pour séjourner à la Réunion ou en France métropolitaine, jusqu'à leur éventuelle naturalisation.

Sans entrer dans un excès de détails, il convient de remarquer que parmi les Comoriens l'unicité n'est pas totale: un originaire de Grande Comore, un ressortissant de Mohéli ou un Anjouanais présentent de notables différences. Parmi les Mahorais aussi des dissemblances peuvent exister en fonction de leurs origines Maoré, Comorien, Malgache ou Swahili (voir préambule). Cela rend toute catégorisation globalisante très relative, et certainement abusive.

La recherche de terrain présentée en troisième partie nous permettra de confirmer le ressenti des intéressés sur cette question.

Dans le cadre de cette recherche, nous prendrons néanmoins la liberté de les dénommer ensemble « Mahoro-Comoriens » en fonction des thèmes abordés, quand les points de similitude permettent de les associer.

2.2.3. La situation des Mahorais à La Réunion

Peu de travaux et de chiffres sont disponibles pour connaître la communauté comorienne à la Réunion, par contre le cas des Mahorais a fait l'objet de plusieurs études, notamment celle très complète du Centre de Ressources de la Cohésion Sociale Urbaine de la Réunion dépendant du Conseil Régional CR-CSUR publiée en 2011. Cela permet d'étudier le cas de la population mahoraise à la Réunion de manière plus détaillée.

« J'ai 24 ans. Je suis venue à la Réunion en octobre 2008, avec ma petite fille qui avait alors 2 mois. À Mayotte j'ai suivi une formation professionnelle, avec une expérience dans une entreprise mahoraise. Aujourd'hui, j'habite toujours seule avec ma fille dans un appartement mais je ne trouve pas d'emploi et ce n'est pas faute de chercher. Mes seules ressources proviennent de l'aide du service social. Bientôt ma fille va entrer en maternelle... » (citation issue du CR-CSUR 2011). Actuellement l'immigration mahoraise à la Réunion est d'abord le fait de femmes, souvent avec des enfants, qui rencontrent de réelles difficultés d'insertion sociale et professionnelle ; elles placent un grand espoir dans l'éducation scolaire de leurs enfants.

Le nombre de Mahorais recensés à la Réunion est faible, 5900 d'après les données de l'INSEE (2006), auxquels il convient d'ajouter 2100 Comoriens (de nationalité ou d'origine). Ces chiffres

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sont bien inférieurs à ceux des Malgaches et des Mauriciens 15 900 et 4800 respectivement, mais beaucoup moins présents dans l'espace public réunionnais, ainsi que celui des Métropolitains (79 000 présents sur le territoire). Le nombre des originaires de Mayotte serait bien plus important, jusqu'à 60 000 d'après la fédération des associations mahoraises de la Réunion (SORODA, devenue FAMAR en mai 2012). Le différentiel s'explique par la comptabilisation par ces derniers de tous les membres de la « communauté mahoraise » indépendamment de leur lieu de naissance et de la durée de leur séjour. Le chiffre le plus généralement admis par la presse réunionnaise est de l'ordre de 30 000, soit moins de 4% de la population réunionnaise. Depuis le début des années 2000, par le jeu des retours et des départs vers la Métropole, le solde migratoire des Mahorais à la Réunion a tendance à s'inverser pour devenir négatif (INSEE 2009).

« Que ce soit à Mayotte ou en dehors, on continue à fonctionner pareil... » Ce témoignage issu de l'étude CR-CSUR 2011 montre que les mahorais tentent de garder leur mode de vie en arrivant à la Réunion, ce qui ne va pas sans difficultés et frictions : « Les populations originaires de l'archipel des Comores ne suscitent pas toujours l'empathie de la population réunionnaise. Le malaise s'exprime avec plus d'acuité envers les Mahorais, français depuis 1841» (CR-CSUR 2011) et Domiens depuis mars 2011, confirmant ainsi une volonté maintes fois réitérée du peuple mahorais.

Les motivations évoquées pour leur arrivée sont effectivement d'abord les possibilités d'une meilleure poursuite d'études (évoquées dans 62% des cas), puis le différentiel des aides sociales (57%) (CREDOC 2004). Les difficultés d'insertion les plus importantes se situent dans le logement (60% déclarent être mal logés) et l'emploi (moins diplômés et à diplôme égal moins employés) (INSEE 2006), ce qui peut conduire à la précarisation et à l'exclusion.

« L'étude menée par le CREDOC et l'ODR (2004) auprès de migrants de la zone océan Indien fait apparaître la stigmatisation qu'ils ressentent : 42 % des originaires des Comores, de Madagascar et de Mayotte jugent la population réunionnaise peu accueillante, et même hostile pour 15 % d'entre eux. Plus précisément, 7 % des Malgaches, 16 % des Comoriens et 21 % des Mahorais interrogés perçoivent un rejet. La confrontation à des manifestations agressives (insultes racistes, menaces, ...) est évoquée par 21 % de l'ensemble des migrants de l'enquête. Les Mahorais, à 44 %, se disent victimes de racisme. » CREDOC-ODR 2004

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« Quelqu'un disait : nous sommes tous les émigrés de quelqu'un... jusqu'à ce qu'un autre arrive » évoque Jean Luc Caro, Directeur Général des Services de la ville du Port : « La représentation populaire de l'habitat des mahorais à la Réunion c'est une forte concentration communautaire (qui mêle d'ailleurs mahorais et comoriens) et une insalubrité des logements occupés - faute de véritable alternative pour se loger. Cela produit un double effet de ghettoïsation et de rejet qui amalgame cette image péjorative à toute la communauté, comportement très perceptible dans le voisinage immédiat. »

« Vouloir retrouver et vivre avec sa communauté d'origine est un besoin naturel quand on est «étranger», surtout quand la solidarité communautaire constitue le premier expédient accessible. C'est un phénomène qui se constate dans d'autres communautés déracinées : on se regroupe par immeubles, par quartiers, par ville que ce soit entre mahorais à la Réunion ou entre réunionnais en métropole. La communauté est une cellule ressource forte pour toute personne d'une culture «étrangère». CR-CSUR 2011

Si tous souhaitent se rapprocher de leur communauté, on constate que chacun va pour se loger, là où il trouve à le faire. Dans les bidonvilles (évoqués par le CR-CSUR 2011) on rencontre trois types de mahorais : Outre des femmes seules, avec ou sans enfants, sans revenus, sans point d'ancrage local et avec peu de lien avec leur famille à Mayotte, on trouve des familles qui se sont déplacées ensemble ou petit à petit, et qui connaissent des difficultés d'adaptation aux modes de vie à la Réunion, par exemple la typologie et la conception de l'habitat, ainsi que des familles installées depuis longtemps, qui comptent souvent des enfants nés à la Réunion et ne connaissent pas Mayotte. (CR-CSUR 2011)

« Ce sont les solidarités intra-familiales et villageoises fortes qui leur permettent de tenir dans leur environnement précaire. D'autant que les migrations s'effectuent le plus souvent grâce à l'existence d'un réseau qui assure un point de chute à la Réunion. » (Note CESER 2010). La note évoque également la complexité pour les enfants de gérer une double allégeance culturelle et les difficultés scolaires liées à l'acquisition de la langue française, qui n'est souvent pas leur langue d'origine.

Si la solidarité communautaire existe, elle a peu de moyens pour aider à une intégration durable : l'accès au foncier à l'acquisition foncière - avec un ancrage durable - est difficile, la communauté dispose de peu de ressources, son réseau de connaissance est limité, les Mahorais et

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les Réunionnais vont peu l'un vers l'autre ; les contacts se limitent souvent à la fréquentation des services publics. CR-CSUR 2011

« La communauté mahoraise ne sollicite que très peu d'aide à l'extérieur, en dehors de la communauté. Les intervenants auprès de ce public doivent donc trouver une porte d'entrée leur permettant d'être reconnus comme admis à participer et à « intégrer », d'une manière ou d'une autre, le cadre communautaire. » Le rapport du CR-CSUR (2011) évoque ainsi la nécessité de médiateurs pour pouvoir connaître et interagir avec la communauté mahoraise à la Réunion.

Les femmes mahoraises :

« J'ai 23 ans. Bien qu'à la Réunion depuis l'âge d'un an, je me sens plutôt mahoraise. Aujourd'hui, je vis dans un bidonville de la Rivière des Galets (commune du Port). Nous sommes 14 à habiter sous le même toit de tôles récupérées : mes parents, mes soeurs, mes frères, mais aussi mes neveux et mes cousins. Je n'ai pas de diplôme ; n'ai jamais pu travailler, pourtant j'ai déjà fait de nombreux stages... » Cette citation issue du CR-CSUR (2011) évoque les principales difficultés rencontrées par les Mahorais en général et qui doivent souvent être gérés par les femmes, particulièrement dans le cas où elles se retrouvent seul adulte du foyer.

Filippo Ferrari, directeur du FTM (Finaliser Transmettre Mobiliser, association pour l'aide à l'insertion professionnelle) indique dans le rapport cité ci-dessus que « la femme «immigrée» a plus de difficultés que l'homme à trouver un emploi ; elle a peu de formation, de diplômes. » Pour ces femmes titulaires d'une expérience limitée et cantonnées à des emplois précaires, cette association a mis en place des formations à la recherche d'emploi. Leur public est composé en majeure partie de Mahoraises (40%), 30% de Comoriennes et de malgaches, et 30% de réunionnaises. CR-CSUR 2011

Mayotte devenue un département depuis 2011, doit se conformer aux règles de la République. Il faudra alors accommoder ce qui relève de la tradition, ce qui est imposé par la religion, ce qui est acceptable dans le droit républicain et ce qui est facteur ou non d'insertion dans la société réunionnaise ou métropolitaine. Cela concerne notamment le fait qu'il n'est plus possible de contracter des unions polygames, souvent imposées aux femmes, à Mayotte, mais les situations en cours pourront subsister. L'âge auquel les jeunes filles pourront se marier va passer de 16 à 18 ans, et la répudiation sera interdite. (Ministère de l'Outre-Mer)

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La polygamie n'est pas islamique, le Coran allant jusqu'à déconseiller cette pratique. Il s'agit une coutume qui a existé chez de nombreux peuples, souvent pour pallier la mortalité des femmes en couches et des enfants. En France, le mariage multiple est interdit depuis le 27 mars 1803 (article 147 du code civil) puis, en 1993, l'état de polygamie est interdit à tout résident sur le territoire. CR-CSUR 2011

« La société traditionnelle mahoraise est de type matriarcal: l'épouse a autorité, c'est elle qui protège le mari et le foyer. Elle peut également chasser son époux en cas de déchéance familiale constatée par la communauté villageoise. La femme a un rôle déterminant dans l'économie, la politique et la vie associative. Arrivée à la Réunion, souvent seule référent adulte, elle doit assumer seule la gestion du logement, des finances, de l'éducation... prise par des tâches plus urgentes, et handicapée par la langue, elle n'a pas toujours le temps d'assurer un suivi très proche de ses enfants et de leur scolarité ». (CR-CSUR 2011)

Nous constatons ici la coexistence entre un système matrilinéaire qui donne une grande importance à la femme dans la gestion de la maisonnée et l'éducation des enfants, avec une logique islamique qui va plutôt dans le sens de la prééminence des hommes. Ce paradoxe mahorais est souvent dépassé à la Réunion par la monoparentalité féminine. Comme nous l'avons vu, les référents masculins manquent dans de nombreux foyers.

2.3. L'espace public réunionnais et les migrants 2.3.1. Un espace public médiatique riche et varié

Les travaux de Michel Watin (1995, 2002, 2005), Jacky Simonin, Eliane Wolff (2010) et Bernard Idelson (2006) montrent que l'espace médiatique réunionnais est particulièrement riche, varié en types de supports comme en termes de visions politiques et sociales, qu'il constitue un moyen d'expression directe, notamment en presse papier et en radio, auquel les Réunionnais sont très attachés.

La presse quotidienne régionale (PQR) est représentée par trois titres : Le Quotidien (indépendant), le JIR Journal de l'Île de la Réunion (longtemps groupe Hersant, appartenant au groupe Réunionnais Cadjee depuis 2010) et Témoignages (organe du Parti Communiste Réunionnais). Parmi les nombreuses fréquences radio, il convient de remarquer aux côtés des

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correspondants locaux des principaux réseaux nationaux, Radio Freedom, antenne indépendante, en prise directe avec l'actualité et la population réunionnaise qui intervient beaucoup à l'antenne. La télévision réunionnaise est passée aux technologies numériques en 2011. Elle diffuse les chaînes publiques du réseau RFO, les émissions d'Antenne Réunion, groupe local, ainsi que plusieurs bouquets numériques par abonnement. Ces derniers permettent notamment de suivre en direct les émissions et journaux télévisés mahorais et comoriens.

Les courriers de lecteurs de la PQR ou les réactions d'auditeurs (notamment sur radio Freedom), particulièrement sur la vie locale, la société, et la politique montrent l'implication des Réunionnais dans leur espace public médiatique.

Le cas des immigrés comoriens a été étudié à la Réunion par Salimata M'LANAO (1999). Elle montre, dans son travail, comment la presse réunionnaise les identifie comme les derniers arrivants, les présente alors comme les victimes d'un système de domination historique et des mauvaises conditions qu'ils subissent et appelle à l'empathie et à la fraternité envers eux. La Réunion est présentée comme leur « terre promise » par rapport aux Comores, dévalorisées.

A compter des années 1980, les Comoriens sont perçus comme une population immigrée avec de graves problèmes d'intégration. « Le Comorien est considéré comme le dernier venu sur le sol réunionnais. Une population immigrée qui n'a pas encore réussi son intégration. La presse locale se fait l'écho de ce constat. » (M'Lanao S. 1999). La presse les présente en « boucs émissaires », en les associant aux problèmes économiques et sociaux de l'île, elle les stigmatise. En partant de lieux communs pour éventuellement tenter de les combattre, elle semble plutôt les renforcer.

Plus récemment, dans une étude linguistique sur la nomination et la catégorisation des Mahoro-Comoriens, Marc FRANCK (2011) confirme que le discours de presse écrite s'avère incapable de dépasser les représentations et caractérisations traditionnelles, notamment sur les groupes ethniques présents à la Réunion. Il constate que les discours négatifs confirmant l'ordre dominant ont une meilleure résonance sociale (et s'avèrent donc plus vendeurs) en évitant la dissonance cognitive.

Seul Témoignages semble éviter la tentation d'opposer les représentations du groupe mahoro-comorien à celles du groupe majoritaire, mais eux aussi entretiennent l'image d'altérité. Victime d'un système économique et social dont le créole souffre également, bénéficiaire des aides sociales en concurrence avec les autochtones, ou encore délinquant victimisé par la précarité,

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l'image a assez peu évolué entre les observations de Salimata M'Lanao (1999) et celles de Marc Franck (2011). On peut simplement observer que les éléments de désignation des Comoriens ont été étendus aux Mahorais.

Choix d' « agenda » ou simple conformation aux attentes des lecteurs, le résultat est dans tous les cas le renforcement de l'image de l'étranger (allogène à la société réunionnaise) dont l'intégration est difficile. Une image somme toute assez peu différente de celle observée en Métropole, mais un discours plus modéré, correspondant à un phénomène ne présentant pas la même acuité (origine géographique proche, plus grande tolérance liée à l'allogénéité originelle commune à tous les composants de la société réunionnaise, logique de créolisation), ni les mêmes enjeux politiques à la Réunion.

Pas de catégorisation ni de stigmatisation ici sur leur islamité, cette caractéristique ayant déjà fait l'objet de créolisation par les communautés z'arabes (musulmans indo-pakistanais) et Karanes (communauté de même origine mais arrivant de Madagascar) désormais intégrés.

Comoriens et surtout Mahorais sont naturellement désignés comme ceux qui viennent déranger un équilibre déjà précaire, et tout particulièrement sur le plan du logement social ainsi que de l'emploi : « Au deuxième trimestre 2011, le taux de chômage à La Réunion s'élève à 29,5 %. Les jeunes, avec 60 % des actifs, sont les plus touchés et se désengagent du marché du travail. Les femmes, et en premier lieu les plus âgées, se portent davantage sur le marché du travail, ce qui creuse l'écart de taux de chômage avec les hommes » (INSEE-Enquête emploi 2011 à La Réunion).

En effet, tous les habitants de la Réunion éprouvent de grandes difficultés pour trouver un emploi, et particulièrement les non diplômés, les jeunes et les femmes. Or ce sont précisément les caractéristiques de la population immigrante mahoraise et comorienne, qui font de celle-ci des rivaux en termes d'insertion professionnelle comme d'habitat pour les catégories les moins favorisées de la Réunion, avec pour corollaire des réactions de relative hostilité.

Dans le dossier du CSUR du Conseil Régional (2011), Attila Cheyssial, Architecte et docteur en sciences de l'éducation (sociologie urbaine), explique qu'il ne croit pas à un racisme entre la Réunion, Mayotte et les Comores. Il juge le terme inapproprié, précisant que « les étrangers ne sont appréciés nulle part, on considère l'autre comme ennemi parce qu'il n'est pas comme nous. L'hospitalité étant la règle établie pour dialoguer et échanger avec un étranger que l'on n'aime

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pas pour autant. » Les Comores, comme Mayotte rappelle-t-il font néanmoins partie avec la Réunion d'une identité commune dans l'Océan indien. (CR-CSUR 2011).

2.3.2. De l'extrême discrétion des uns à la globalisation péjorative des autres

Comme nous l'avons signalé, La Réunion a, depuis sa découverte, accueilli, intégré et s'est enrichie de nombreuses vagues d'immigration : Malgaches, Cafres, Indiens, chinois, Z'arabes, et Zoreils sont toujours différenciés et caractérisés, mais se côtoient et interagissent au quotidien dans une tolérance générale.

Les plus optimistes voudront voir dans la mosaïque qui compose le peuple réunionnais une harmonie exemplaire. Les plus prudents feront remarquer à l'instar de Christian Ghasarian (2002) qu'il s'agit là d'une image, que la société réunionnaise est constituée à la fois de « mélanges et de différences regroupées » qu'il est encore nécessaire « d'apprendre à accepter les différences côtoyées quotidiennement et de dépasser le racisme larvé et encore bien présent dans le langage commun à la Réunion. »

Pour avoir une image, bonne ou mauvaise, un groupe social doit être reconnu comme tel et être présent dans l'espace public. Quand les représentants sont trop peu nombreux ou trop discrets pour constituer un groupe visible, quand leur présence ne semble pas constituer une menace pour l'intérêt général, que les médias ne s'en emparent pas en tant que fait de société, il n'y a pas vraiment d' « opinion publique » à leur égard. C'est en général le cas pour les étrangers hors Océan Indien et hors Métropole. De fait, on peut constater que les médias font assez peu de cas des Mauriciens, et des Malgaches (pourtant présents en plus grand nombre), pour s'intéresser plus particulièrement aux Comoriens et Mahorais.

Le cas des Mahoro-comoriens est différent de celui des autres groupes ethniques. Plus récemment arrivés, pas encore intégrés à la société créole, ils cristallisent les craintes et les ressentiments comme les immigrés africains ou turcs peuvent le faire en métropole. Ces critiques et attaques ne vont généralement pas au delà du dénigrement verbal, de l'invective murale ou d'un courrier de lecteur « bien senti ». (Marc Franck 2011)

Logiquement, pas d'amalgame ici entre l'immigré et le Maghrébin, quasi absent du territoire réunionnais, il en va de même pour les quelques Africains non issus des îles de l'Océan Indien.

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De nombreux lieux communs, plus ou moins justes circulent sur les Mahoro-Comoriens à la Réunion, qui témoignent de leur visibilité dans l'espace public local et de l'attention que les autres composantes sociales leur portent. Un ensemble de représentations que les mahorais voudraient naturellement voir corrigées dans une logique de meilleure connaissance et de plus grand respect de leur identité.

2.4. Familles réunionnaises, pluriculturelles et en évolution

2.4.1. La transformation des structures familiales et des solidarités traditionnelles

Michel WATIN (2005) a souligné, à La Réunion, le passage de l'espace public constitué par le « kartié » créole traditionnel aux quartiers urbains et la nécessaire reconstruction des structures sociales dans une logique d'éclatement géographique et familial où les solidarités traditionnelles doivent s'accommoder des nouveaux modes de vie et de communication.

À La Réunion, les jeunes grandissent influencés par deux modèles culturels, traditionnel hérité de la société de plantation et moderne apporté par la Métropole et la mondialisation. La cohabitation entre les deux ne va pas de soi. Les modes de vie et des règles de comportement induits par chacun sont parfois contradictoires, finalement combinatoires. (Watin M. 2005). Les adolescents doivent ainsi faire des choix culturels conciliant les influences de la famille, des amis, des médias. Confrontés à une somme d'éléments hétéroclites, les jeunes doivent assembler leur propre « patchwork culturel » dans la logique du processus de créolisation (Flavie Plante, 2010).

Ces observations sur les adolescents, font écho aux analyses de Nicolas Roinsard (2007) qui semblent mieux s'appliquer aux jeunes adultes « On observe en effet aujourd'hui chez les jeunes générations une difficile cohabitation des deux référents sociaux en présence : celui hérité des aïeux qui est fait de pauvreté intégrée, de labeur et de solidarités, puis le modèle métropolitain de l'autonomisation des individus et de l'accès à la société de consommation. Tandis que le premier modèle cherche à être fui ou pour le moins dépassé, le second quant à lui ne parvient à être totalement atteint sous l'effet, en particulier, du chômage et de l'accroissement de la précarisation de l'emploi. »

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2.4.2. Les jeunes Mahorais et leurs familles à la Réunion

Des jeunes riches de plusieurs cultures, parfois partagées entre celles-ci, et conscients que leur intégration ne va pas de soi, qu'elle nécessitera des efforts d'adaptation de leur part, comme en témoignent ces jeunes Mahorais : « Moi je suis fière d'être comorienne, mais je suis aussi mahoraise, j'ai une identité, je me dis «je suis française donc à la Réunion je suis chez moi car la Réunion est une île française», mais j'ai l'impression qu'il fallait donner plus aux gens pour dire que je suis aussi chez moi... » (Citations issues du CR-CSUR 2011)

Ils réalisent aussi que leur intégration est, malgré tout, moins difficile que celle de leurs parents, « L'intégration est plus facile pour les jeunes car il n'y a pas trop de différence entre une réunionnaise et moi...» (Citations issues du CR-CSUR 2011)

Les adultes réunionnais, quant à eux sont prêts à accepter un certain degré d'identification identitaire chez les adolescents : « On a croisé plusieurs jeunes qui portaient un tee-shirt 974 et d'autres 976 (code départemental de Mayotte)... revendication identitaire ou culturelle ? En tout cas ça ne gêne personne, ça fait partie du paysage de la rue. » (citations issues du CR-CSUR 2011)

Au contact de la société réunionnaise, la communauté mahoraise se transforme. Tout comme les réunionnais, les jeunes mahorais doivent grandir en conjuguant deux cultures de façon variable selon les individus, leur milieu familial et leur mobilité (père resté à Mayotte, retour de l'enfant à Mayotte, arrivée d'autres membres de la famille à prendre en charge...). Il s'ensuit une déliquescence des repères qui entraîne souvent échec scolaire, absence d'autorité reconnue, délinquance... que ce soit à la Réunion ou à Mayotte après un retour éventuel. CR-CSUR 2011

Les jeunes mahorais de La Réunion, comme tous les immigrants, mais aussi comme les jeunes créoles, sont confrontés à des injonctions et des influences différentes et parfois difficilement compatibles. Les familles mahoraises accordent un rôle important à la transmission de la tradition et naturellement de leur culture. A l'inverse l'intégration dans la société réunionnaise ne peut se faire que par la créolisation, c'est à dire dans un premier temps l'adoption de codes linguistiques et comportementaux compatibles avec leur entourage réunionnais. Enfin la réussite scolaire et professionnelle passe également par la maîtrise des règles républicaines nationales.

Ce qui n'est pas toujours simple pour les jeunes créoles se charge donc, pour les jeunes Mahorais, d'un poids supplémentaire d'exigences et de contraintes, dans un environnement

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parfois hostile, parfois indifférent, rarement porteur ou valorisant. Les initiatives prises par les collectivités locales pour l'insertion des familles se traduisent le plus souvent pour eux par des injonctions supplémentaires en termes scolaires ou comportementaux. (CR-CSUR 2011).

Comme nous l'avons signalé dans la partie précédente, les jeunes sont aussi tiraillés entre les obligations de l'école coranique (entre 7 et 14 ans, voir préambule) et celles de l'école républicaine, avec des contraintes horaires et de déplacements peu favorables à un apprentissage serein (leçons, devoirs, fatigue) et la nécessité de concilier des (in)formations parfois discordantes.

Leur réussite dans un registre républicain (scolaire) ou leur trop grande implication identitaire (religion, arts traditionnels) peut être vécue comme une remise en cause par leur entourage social local, souvent issu de milieux et quartiers défavorisés, une trop bonne intégration à la société créole, à l'inverse peut être perçue comme un rejet de ses racines et stigmatisée. « Fatima a 24 ans et vit à la Réunion depuis 5 ans. Elle n'a que des amis réunionnais. Les mahorais l'ignorent. » (Citation issue du CR-CSUR 2011)

Le mode d'éducation mahorais, entre rigueur traditionnelle et liberté sous contrôle de la communauté est mal perçu à la Réunion, où il peut parfois être pris pour une démission. « Globalement, les enfants s'acceptent et jouent ensemble facilement. Par contre, les parents réunionnais ne comprennent pas que les parents mahorais laissent leurs enfants dans la rue jusque tard le soir. Même les services sociaux s'en inquiètent. À Mayotte, c'est la communauté qui veille. Les enfants sont toujours sous le regard d'un adulte mais pas nécessairement de ses parents. À Mayotte un enfant c'est celui de tout le monde il peut sillonner dans les rues, tout le monde a un droit de regard sur l'enfant, la société mahoraise c'est une grande famille alors que la société occidentale est régie sur la famille nucléaire... » (Témoignage issu du CR-CSUR 2011)

Les jeunes mahorais et comoriens qui arrivent savent qu'ils n'évolueront pas toujours en terrain favorable et se regroupent parfois pour faire face. « En venant à la Réunion, les jeunes savent qu'ils vont devoir se battre pour faire leur place et s'y préparent d'avance, se mettent en bande. Et ceux qui retournent à Mayotte, s'en servent pour acquérir un prestige et reproduisent le même schéma. » (Témoignage issu du CR-CSUR 2011)

Avec le temps et les relations, ils se créolisent en vivant à la Réunion ; de retour à Mayotte, en vacances ou pour s'y établir, ils auront évolué et apporteront aussi des éléments d'évolution

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(positifs ou non) à leur île d'origine, devenant eux mêmes agents de créolisation pour leur île. « J'ai pris des habitudes à la Réunion que je ne pourrais pas retrouver à Mayotte. Je ne me sens pas totalement réunionnaise, mais il y a quelque chose de réunionnais en moi. Sans doute parce que j'ai grandi à la Réunion. ». On le comprend, cette évolution peut aussi empêcher le retour. (Citation issue du CR-CSUR 2011)

« Il y a beaucoup de transformations chez les mahorais qui sont allés au contact de la société réunionnaise ; ils reviennent différents ; et à Mayotte des changements sont sensibles. Un exemple classique : le mahorais est très pudique ; et ont voit émerger de la part des mahorais qui viennent de l'extérieur le « paraître » ; il y a même des gens vivant dans des difficultés de logement, de salaire, qui vont montrer sur le boulevard « un paraître » qui n'est pas leur identitaire ! » (Témoignages issus du CR-CSUR 2011)

2.5. L'emploi et les migrants mahoro-comoriens à la Réunion 2.5.1. Un sous-emploi structurel

L'INSEE indique pour la Réunion en 2011 (publication 2012), un taux de chômage de 29.5% pour l'ensemble de la population active (9.4 % en France en 2010), 60% pour les jeunes désirant travailler (22.2% en France 2010). Rappelons que ces taux sont supérieurs à ceux que connaît Mayotte : 26.4% de taux de chômage global et 41.5% des 15-25 ans (chiffres INSEE 2010).

Ces indicateurs ne sont malheureusement pas le signe d'une situation exceptionnelle à la Réunion. La présentation de l'économie réunionnaise par l'INSEE précise que « La situation de l'emploi est difficile dans l'île. Moins de la moitié de la population en âge de travailler occupe effectivement un emploi. Le taux d'activité est faible, tout particulièrement celui des jeunes, des femmes et des seniors, qui ont tendance à se retirer d'un marché du travail excédentaire. »

« L'économie réunionnaise est caractérisée par la faiblesse des activités productives orientées vers les marchés extérieurs au territoire local. De plus la taille réduite du marché local et sa perméabilité met la production locale en concurrence avec les importations. Ainsi, les entreprises réunionnaises ne satisfont globalement que la moitié des besoins locaux. Au total, les activités productives ne fournissent que le quart des emplois, ce qui explique à la fois l'étroitesse du marché du travail et la part relativement élevée, par rapport à la France métropolitaine, de la Fonction publique, du commerce et de la construction. » (INSEE 2012).

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2.5.2. La difficile insertion professionnelle des mahoro-comoriens

Comme nous l'avons signalé, la notion d'immigration ne recoupe pas à la Réunion la notion de nationalité mais plutôt celle de l'allogénéité. S'il n'y a pas d'études spécifiques sur les discriminations dont seraient victimes plus particulièrement les Mahorais, on constate que leur taux d'emploi (nombre de personnes employées par rapport au total de leur catégorie) n'est que 14.5% pour les hommes, et 3.6% pour les femmes, contre 59.2 et 43.1% pour l'ensemble de la population de la Réunion (chiffres INSEE 2006).

Les Mahorais immigrant à la Réunion présentent un faible niveau de qualification, inférieur à celui des Mahorais restés au pays, à celui des Réunionnais, ainsi qu'à celui des autres allogènes, généralement plus qualifiés que les locaux (INSEE 2010)

Cet élément, prépondérant, n'explique pourtant pas tout ; leur taux d'emploi attendu (taux d'emploi moyen pour une sous-population présentant des caractéristiques similaires, hors le critère considéré, ici le fait d'être Mahorais) compte tenu de leur qualification étant de l'ordre de 40% et 20% suivant le sexe (chiffres INSEE 2006), une autre manière de dire que ce groupe, déjà handicapé par la moindre qualification, subit en plus des discriminations à l'emploi.

2.6. L'école et l'immigration à la Réunion 2.6.1. L'école à la Réunion

A la Réunion comme ailleurs, l'insertion sociale dépend d'une scolarisation de plus en plus longue, comme le signalent Eliane Wolff et Jacky Simonin (2002). Le système scolaire réunionnais rattrape peu à peu son « retard » par rapport à la Métropole, en termes quantitatifs, comme en offre qualitative. La palette proposée est comparable à celle des autres régions françaises, et des aides sont proposées à ceux qui souhaitent poursuivre leur formation supérieure en « sautant la mer ».

Il existe néanmoins encore un décalage entre les niveaux de formation atteints et l'offre d'emplois qui recherche des qualifications souvent supérieures à celles qu'ont les jeunes réunionnais. Les jeunes sans qualification sont encore nombreux, leur avenir professionnel très

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incertain et marqué par la précarité. (Roinsard N. 2007). Malgré les progrès réalisés, la scolarisation ne parvient pas à corriger les grandes inégalités de la société réunionnaise, amplifiées par la crise économique qui se répercute à la Réunion depuis 2009 (INSEE 2012).

La participation des parents, disposant de plus en plus de droits dans l'école, et à qui on demande une plus grande implication et de manière générale l'instauration d'un « dialogue » sont présentés comme la condition de la réussite scolaire de leurs enfants. Faute d'implication et de dialogue, « la responsabilité des parents est souvent mise en avant quand leurs enfants rencontrent des difficultés scolaires ou extrascolaires » (Fontaine S. 2007).

Ses recherches mettent en lumière un consensus entre les représentations des parents et des enseignants sur le double rôle éducatif et instructif de l'école, ainsi que sur l'importance du suivi parental dans la scolarité des enfants. Il démontre aussi une convergence entre les parents et les enseignants sur les questions d'identité culturelle, les problématiques inégalitaires et les valeurs de l'école. Les deux parties n'étant pas toujours conscientes de partager les mêmes représentations et valeurs gagneraient à mieux communiquer, ce qui serait surtout bénéfique pour les enfants. (Fontaine S. 2007).

Le niveau d'études, parfois l'historique de relatif échec scolaire, conjugué à une culture de respect et de crainte de l'institution expliquent aussi le manque d'aisance et donc d'implication et de communication de nombreux parents face à l'école. Les jeunes réunionnais dans leur grande majorité doivent également gérer un bilinguisme de fait, le parler créole est dominant dans les relations privées, notamment familiales, le français obligatoire et exclusif à l'école. (Simonin J., Wolff E. 1992).

2.6.2. La scolarisation des jeunes mahorais, de nombreux problèmes à surmonter

Un différentiel de niveau scolaire à l'arrivée

Le premier problème que rencontrent fréquemment les jeunes mahorais à l'école réunionnaise est celui de la langue maternelle, généralement autre que le français, qui lui est pratiqué comme langue seconde (voir préambule). « Certains enfants ne comprennent pas les consignes données par les enseignants et se retrouvent en situation d'échec scolaire. » (CR-CSUR 2011).

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En termes de niveau scolaire, « Le seul indicateur disponible est le chiffre issu de la journée d'appel pour la préparation à la défense (JAPD), qui pour 2009 compte 73% de jeunes ayant de grandes difficultés à la lecture et l'écriture" explique Hubert Derache, Préfet de Mayotte (octobre 2010), à formation égale, le niveau des élèves de Mayotte est nettement inférieur à celui des apprenants de la Réunion (observation faite par les correcteurs d'examens)

Un suivi parental difficile

Si les parents manifestent un fort intérêt pour la réussite scolaire de leurs enfants, ils n'ont pas pour autant les moyens de réaliser le suivi et le dialogue nécessaires à cette réussite, « Globalement les élèves mahorais n'ont pas de problème particulier de discipline, mais ils font partie des catégories en grande difficulté. » « Les parents s'impliquent peu dans la vie du collège et se proposent rarement pour le conseil de classe. Par contre ils ne refusent pas de venir à des réunions, de répondre à des convocations ». (CR-CSUR 2011).

Ce manque d'implication est souvent lié à un problème de pratique du français « Souvent la langue est un facteur bloquant et nécessite un interprète. » L'institution est déroutée aussi par la difficulté à trouver des interlocuteurs effectivement responsables « Le problème crucial est celui de la parentalité qui n'a pas le même contour. Il est fréquent que les parents soient hors du département, laissant leurs enfants à la communauté. Qui représente l'autorité parentale auprès des institutions en cas de problème ? »« L'enfant lui-même, par sa maîtrise de la langue française souvent supérieure à celle de ses parents, est conduit à se substituer à eux dans le dialogue avec les tiers. » (CR-CSUR 2011).

Une aide à la réussite scolaire

Les jeunes mahorais constituent une grande partie des enfants repérés en difficulté scolaire, et suivis par des programmes d'aide, qui nécessitent des médiations et des explications : « l'adhésion des enfants mahorais au programme nécessite l'adhésion préalable du fundi (référent religieux) de la communauté. La méconnaissance constitue un frein qui s'est, par exemple, manifesté à travers l'inquiétude des mères sur la compatibilité des activités proposées avec les traditions, la religion, les valeurs de la communauté. » (Témoignages issus du CR-CSUR 2011)

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Des élèves intégrés à l'école par le quartier

Jusqu'au collège, «il n'y a pas de communautarisme marquant dans le cadre scolaire. Que ce soit dans l'enceinte de l'établissement ou à l'extérieur, les groupes sont, la plupart du temps, mixés. Pour beaucoup d'élèves, l'appartenance à la communauté vient après celle au quartier... » « Les communautés mahoraise et comorienne semblent s'intégrer très peu et très lentement, mais il n'y a pas de conflit majeur. Les tags et bagarres aux abords du collège et dans les quartiers sont ponctuels et s'opèrent sur des transferts de quartier, de voisinage, très rarement de communauté. » Témoignages issus du CR-CSUR 2011.

Particuliers mais très divers

« Il n'y a pas un profil type pour un élève mahorais ou comorien ou malgache, pas plus que pour un élève réunionnais, mais nous pouvons constater des propensions, parfois contradictoires d'ailleurs : des garçons mahorais qui refusent l'autorité féminine (mère, enseignantes), les mêmes souvent se laissant facilement entraîner dans des mauvais coups, d'autres plutôt timides, cherchant surtout à se faire oublier, d'autres plutôt extravertis qui recherchent la sympathie, celle de leurs camarades et celle des adultes du collège, si nécessaire en faisant le pitre ou le diablotin ; des filles discrètes et travailleuses, des filles coquettes, à la mode occidentale, et d'autres très traditionnelles dans leur tenue vestimentaire, sans que cela nuise à la réussite scolaire des unes et des autres. » (Témoignages issus du CR-CSUR 2011.)

Problème de déracinement pour les primo-arrivants, de divergences culturelles, de suivi parental pour lequel les attentes sont différentes à la Réunion, tous les jeunes mahorais sont obligés de surmonter un parcours d'obstacles parfois trop important, et qui peut rejaillir sur leur réussite scolaire, donc leur avenir professionnel et social. Leur degré de réussite comme leur stratégie d'intégration dépend également de leur personnalité et du vécu familial.

2.7. Les langues à la Réunion

2.7.1. Un espace linguistique particulier

Les langues couramment pratiquées à la Réunion sont le français et le créole en situation de diglossie, bien que cela s'estompe. La première étant langue de réussite scolaire, de sélection sociale et d'usage exclusif dans la vie officielle et administrative jusqu'à une date récente ; le créole étant alors cantonné à la sphère familiale, locale et affinitaire.

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« Contrairement à d'autres régions ou d'autres contrées, le créole se maintient vigoureusement comme langue vernaculaire alors que le français familier gagne du terrain. » (Ledegen G. et Simonin J. 2010). Réhabilité dans les collectivités locales, le créole a gagné ses lettres de noblesse avec la création d'un CAPES en 2001, et sa formalisation graphique, encore en cours.

On observe de fait un développement fusionnel, une hybridation qui constitue le « parler réunionnais actuel » impulsé particulièrement par le développement des cultures adolescentes, les usages médiatiques, la pratique des TIC et les habitudes scolaires (français en classe, créole dans la cour, alternance et mixage fréquents) (Ledegen G. et Simonin J. 2010).

Cette situation a été observée chez les jeunes issus de l'immigration en métropole « Le bilingue utilise une langue, puis l'autre, ou les deux à la fois selon les paramètres de la situation de communication. » (Jacqueline BILLIEZ 1985).

Cela ne fait aucunement des jeunes créoles des « immigrés de l'intérieur », mais bien des « bilingues naturels » qui souvent s'ignorent.

2.7.2. Les langues des mahoro-comoriens

« Quand il vient à la Réunion, le mahorais trouve devant lui des interlocuteurs qui utilisent (au moins) quatre langues différentes : à la maison, le shimaoré (langue bantoue), à l'école publique, le français (langue indo-européenne), à l'école coranique, l'arabe (langue afro-asiatique), dans son quartier, le créole. » Cette citation issue du CR-CSUR (2011) illustre en effet le plurilinguisme dans lequel les jeunes mahorais et comoriens sont plongés malgré eux. (pour un panorama plus précis, se reporter au préambule).

Dans le pire des cas, ils développeront un semi-linguisme adaptatif synonyme d'échec scolaire, dans la meilleure situation, ils acquerront une maîtrise linguistique capable de leur ouvrir les portes des différents groupes sociaux mais aussi scolaires et professionnels avec lesquels ils entreront en contact. De la richesse de leur éventail linguistique dépendra aussi l'ouverture de leurs possibilités d'insertion.

Nous observerons de manière plus précise les pratiques linguistiques des jeunes Mahoro-Comoriens au cours de la recherche de terrain.

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2.7.3. La langue, vecteur d'intégration

Si le français est la langue de l'intégration officielle, scolaire, administrative et professionnelle, à la Réunion le créole est la langue de l'intégration sociale au sens relationnel ; au niveau des quartiers, le non-créolophone restera un étranger, quelle que soit son origine et la durée de son séjour, et même s'il y est né.

La langue créole peut dans ce sens devenir un véritable « patois » (pas toi !), sésame d'identification et d'acceptation ou non par les membres d'un groupe (famille, association, quartier ...) créole. La première étape, et le premier niveau d'acceptation étant la compréhension de la langue vernaculaire.

Nous observerons dans quelle mesure les jeunes Mahoro-Comoriens jouent de cette langue dans leurs stratégies adaptatives.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand