WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

« Comment notre héritage culturel et historique influence-t-il encore notre monde actuel ? A travers l'exemple du luxe en France. »

( Télécharger le fichier original )
par Ambre Saclier
BBA INSEED - Master 1, Diplôme dà¢â‚¬â„¢école de commerce BBA INSEEC (reconnu et visé par là¢â‚¬â„¢État) 2016
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

51

PARTIE 3 : L'importance des origines aujourd'hui

Aujourd'hui, toute l'économie, est mondialisée, même celle du luxe. Paris ne possède plus l'exclusivité en matière de luxe comparé à des villes comme Tokyo, Londres, New York ou encore Milan. Mais le fait d'être français est toujours reconnu comme une qualité dans le milieu. Cela permet de rassurer les interlocuteurs d'autre nationalités puisque nous jouissons d'une excellente réputation à l'étranger.

L'industrie du luxe se métamorphosa dans les années 1980 : il se vulgarisa et devint plus manifeste. En 1990, les codes se globalisent. Les marques donnent le sentiment de s'étouffer, de se brouiller, de se perdre : l'impression que tout a déjà été fait domine les esprits. Enfin, dans les années 2000, la création se refait une place et prédomine. Bienvenue dans l'ère de la dématérialisation, celle où l'expérience de consommation onirique et phénoménale prend tout son sens. Ainsi, depuis quelques années, on se rend bien compte que plusieurs marques de luxe ressentent le besoin de retrouver leurs racines, leur essence.

Par exemple, Rolex a sorti en hiver 2015 une publicité télévisée, qui insiste sur son utilisation historique (la montre était destinée aux aviateurs ; elle pouvait transmettre deux fuseaux horaires simultanément), mais aussi sur son pays d'origine, la France (elle est aux couleurs de la France). Autre exemple, en 2006, la marque Dupont réédite le briquet Winsdor, 54 ans après la commande spéciale du Duc : les sources sont utilisées d'une manière contemporaine.

De même, les marques retournent à leurs origines : des Cacharel renait de ses cendres en repensant son positionnement (Cacharel a décidé de revenir à ses essentiels, en quittant le positionnement luxe qui ne marchait pas, et renouant avec la catégorie du prêt à porter simple mais toujours haut de gamme), ou le renouveau de produits phares comme la Fiat 500. Il est intéressant de se demander comment ses marques font pour faire du neuf avec du vieux ? Effectivement, même si la marque ou ses produits sont revisités, ce qui est proposé n'est pas vintage, mais tout à fait moderne. Les marques jouent sur les succès qui ont jalonnés leur histoire. Les références au passé sont utiles pour les produits destinés à durer. Ainsi, les

52

consommateurs se laissent porter par l'air du temps, en se disant que c'était mieux avant. Mais au final, le temps ne se remonte pas, alors le présent doit être réinventé.

CHAPITRE 9 : Le retour sur soi des marques, un argument de
vente pertinent

Toutes ces actualités montrent qu'on rentre dans un nouveau monde : celui où la décision d'achat n'est plus fondée sur la marque, mais sur les origines. Le luxe a la particularité de faire les deux. Si les grands créateurs font et défont les tendances au gré des défilés qu'ils organisent, l'essentiel de leurs ventes est souvent assuré par leurs produits les plus intemporels. Le sac Kelly d'Hermès, crée en 1935 reste le modèle phare du sellier. Le parfum presque centenaire N°5 de Chanel est toujours le parfum féminin le plus vendu dans le monde.

De nos jours, les consommateurs ont aussi envie de savoir ce qu'ils achètent. Au-delà de la qualité, le public d'aujourd'hui a envie de comprendre les valeurs de la marque. Dans un monde en perte de repères, les clients ont besoin de traditions et de valeurs sûres auxquelles se raccrocher. Il ne s'agit plus alors d'attacher pour attacher, mais aussi de s'imprégner de la marque pour mieux la saisir et s'identifier à elle.

Ce désir de connaître la marque renforce d'autant plus l'importance de la transmission dans les Maisons. Car si le public souhaite des réponses, les grandes marques elles aussi veulent des regards et des questions. A l'image de ce que doit être la consommation des produits de raffinement qu'elles vendent, les Grandes Maisons ne trouvent leur sens que dans le partage, l'échange et l'amour. C'est aussi pourquoi les Marques se raccrochent à des produits historiques qu'elles continuent de mettre sur le premier plan même s'ils ne génèrent pas tellement de chiffres comme Hermès avec les selles ou encore Louis Vuitton et les malles. En effet, les malles ne représentent plus que 2% des ventes de Louis Vuitton et sont parmi les derniers produits de la marque qui soient encore totalement confectionnés en France, dans l'atelier mythique d'Asnières. Ces parties intégrantes de leur héritage

53

leur permettent de ne pas perdre leur identité, ni d'oublier d'où elles viennent. Puis, la France jouit d'une richesse culturelle et historique fabuleuse et les marques de luxe ont bien compris qu'elles devaient jouer dessus pour se démarquer, et donner un supplément d'âme à leurs discours et produits. Les valeurs patrimoniales et familiales sont le meilleur des marketings. Elles justifient un savoir-faire avéré, donnant naissance à des icônes qui traversent les siècles.

En effet, la France fait vendre et au prix fort 49 Dans les boutiques Louis Vuitton, certains étuis de téléphone sont affichés au prix de 200 euros, les présentant comme un des produits les moins chers de la gamme. Elles sont même personnalisables : les initiales peuvent être gravées à la feuille d'or gratuitement, juste en dessous du «Made in Spain». Effectivement, ces pochettes sont produites dans l'un des deux ateliers de Louis Vuitton en Espagne. Cela explique sûrement le faible prix de ces pochettes, parce que le Made in France coûte cher. En effet, et malheureusement, l'objectif du chiffre d'affaire prend bien souvent le pas sur celui de l'image. Certaines marques préfèrent faire des économies d'échelles quitte à mettre en péril leurs origines.

Mais le pragmatisme et la rationalité ne nourrissent pas le rêve. En effet, Chanel a des ateliers en Écosse, les chaussures Louboutin et les sacs Dior sont fabriqués en Italie et 10 des 46 ateliers d'Hermès sont à l'étranger. En revanche, toutes les collections se décident dans les bureaux parisiens, ce qui conserve tout de même le patrimoine créatif français. Puis, les pièces de Haute Couture et les Commandes Spéciales (c'est à dire les produits faits sur mesure, avec les matériaux les plus précieux et les plus chers) sont toujours élaborées dans les ateliers parisiens. Dior se justifie de ses productions italiennes par le fait que c'est dans ce pays que se trouvent les meilleurs textiles (principalement le cuir) et les artisans les plus qualifiés pour effectuer ce travail particulier. Quand je leur demande s'ils comptent faire revenir leurs productions entièrement en France et former des artisans français, un malaise se fait sentir, accompagné d'un vague : « Oui bien sûr c'est prévu ».50 Peut-être qu'une distance est ainsi volontairement mise entre les

49 Voir Annexe 11, p.113

50 J'ai posé ces questions lors des Journées Particulières le vendredi 20 mai 2016, pendant la visite de l'Hôtel Particulier au 30 avenue Montaigne, là où l'aventure Dior a commencé.

54

produits « standards », les produits qui se trouvent en magasin et immédiatement accessibles, avec les produits d'exception comme les pièces de Haute Couture et les Commandes Spéciales qui elles sont réalisées à Paris. Dior a au moins le mérite d'être transparent sur ce sujet. Mais au-delà du prix, il est dommage que les marques n'appliquent la sévérité de la Haute Couture à l'ensemble de leurs collections, ce qui aurait certainement préservé leur authenticité. Car face à la standardisation des produits mondialisés, le « Made in France » apporte un gage de qualité. Mais une fois de plus, l'appât du gain et de la puissance l'a emporté sur les traditions.

L'essor des contrefaçons a aussi son rôle à jouer dans le besoin des marques à redorer leur image. Bien que la contrefaçon représente un sérieux danger pour les marques de luxe, elle renforce néanmoins la légitimité des originaux. Rien ne remplace la sensation de porter du vrai. Malgré cela, la contrefaçon est toujours un problème d'actualité, parce que certains consommateurs persistent à résister à l'achat de produits originaux. Cette résistance peut s'expliquer par le fait que ces consommateurs n'arrivent pas à accéder aux valeurs du luxe telles qu'elles devraient l'être. Les vraies valeurs du luxe sont censées être la confidentialité, la discrétion, le respect pour la tradition et le savoir-faire authentique. La notion d'apparence y est pour beaucoup dans cette confusion parce que certains ne savent pas l'utiliser à bon escient. Ces consommateurs ressentent le besoin cruel d'étaler leur argent, sans retenue, dans le but d'impressionner les autres. La contrefaçon résulte de l'aspiration à s'approprier des signes ostentatoires, mais surtout de montrer qu'on est plus riches que ce qu'on est. Cela reflète le combat mondial du bon goût, puisqu'il est plus facile d'avoir de l'argent que d'avoir du goût.

Enfin, et comme expliqué précédemment, le luxe est relatif à chacun : certains sont prêts à tuer pour avoir le Kelly d'Hermès, un produit iconique de la marque et symbole du luxe ultime pour certains. D'autres vont trouver ce comportement ridicule mais n'hésite pas à se payer des vacances dans un chalet de prestige sur les pistes. Il est permis d'interpréter cela comme une personnification du problème soulevé : le luxe se veut de plus en plus expérientiel. L'émotion ressentie l'emporte sur le produit en lui-même.

55

Même l'essor des produits d'entrée de gamme est justifié par l'expérience. Les marques répondent que l'expérience d'achat doit être ancrée dans les gènes de la Maison et donc être la même, quel que soit la valeur du montant de l'achat. En revanche, cette expérience n'est permise que par une distribution au sein d'établissement approuvés par la marque, ou même possédés par elle-même (Sephora, Le Bon Marché, etc.). Pour compenser le différentiel de rêve entre les gammes, les marques de luxe comptent sur les produits griffés, les icônes, pour redorer leur image en finançant divers évènements somptueux pour renforcer le prestige. Le luxe ne s'adresse pas seulement à ceux qui l'achètent : le conte de fées sert à entretenir le rêve dans les consciences collectives.

Dorénavant, les acheteurs investissent autant qu'ils se font plaisir dans leurs achats. Il s`agit de consommer moins et mieux, les consommateurs sont dorénavant prêts à économiser pour s'offrir quelque chose de vraiment digne d'intérêt, d'authentique et de valorisant. Le prix passe au second plan, après la valeur de l`émotion. Le vrai chic, c'est de durer, de se maintenir pour aller encore plus loin. Ces consommateurs aspirent à des produits plus durables, qui se démarquent par leur simplicité et s'éloignent de l'ostentation. La dimension émotionnelle du luxe prend alors tout son sens : il faut créer une émotion qui s'inscrira si fort dans le temps qu'elle en deviendra inoubliable. Ces produits doivent alors organiser un rendez-vous unique, taillé sur mesure pour vivre un rêve éveillé. La proposition luxueuse d'avant n'est plus la même, car elle doit dorénavant correspondre à une approche créative. Les gens veulent de l'étonnement (peu en quantité mais beaucoup en surprise), de la révélation de la pureté, de la précision et de l'esthétique : ils aspirent à quelque chose qui amène des frissons.

Les marques de luxe n'ont pas vraiment de concurrents puisque chacune d'elles a une image de marque qui lui est propre : son territoire est marqué. Le but est d'imaginer un univers confidentiel autour de la marque. Tout est mis en oeuvre pour sublimer le produit à travers un scénario plein d'anecdotes. Surtout dans un contexte de crise économique, les consommateurs ont besoin de sortir de l'ordinaire. C'est pourquoi les émissaires du luxe s'évertuent à projeter un univers chimérique.

56

Le luxe se crée son propre monde imaginaire, composé de lieux phénoménaux et d'oeuvres d'art. Cet univers flamboyant est renforcé par un vocabulaire plus lyrique, plus évocateur : des Maisons, des Ateliers et des Modèles, pour souligner une distance avec les entreprises, les usines et les produits, bien plus anodins ou encore la distinction claire entre les hôtels et les Palaces. Les marques de luxe ne veulent pas être choisies parmi d'autres, elles veulent que le consommateur les voit comme l'unique réponse à ses besoins. Cette tactique de story-telling s'avère gagnante, tant que la marque reste honnête.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand