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L'inopportunité des lois d'amnistie dans le processus de pacification de la république démocratique du Congo.

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par Josué KALEKA
Universite Notre-Dame du Kasayi  - Licence 2015
  

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INTRODUCTION GENERALE

Il ne fait aucun doute que la paix a un prix et la cohésion nationale un autre. Bien souvent, après une période des tensions marquée par des guerres de tout genre, les États interprètent strictement l'article 6 du paragraphe 5 du protocole Additionnel II aux quatre conventions de Genève de 1949 qui dispose : « Qu'à la fin des hostilités dans un contexte de conflit armé non international, les autorités au pouvoir s'efforceront d'accorder la plus large amnistie possible aux personnes qui auront pris part au conflit armé ou qui auront été privées de liberté pour des motifs en relation avec ledit conflit armé, qu'elles soient internées ou détenues »1(*).

C'est ce qui explique la tendance à recourir à l'institution de l'amnistie sous prétexte d'apaiser les tensions et d'une quête de la paix. Ayant une base juridique non seulement interne mais aussi internationale, l'amnistie, par ses effets, apparait comme un calmant des esprits pouvant faire naître un climat de paix, de concorde et de cohabitation pacifique.

L'amnistie est ainsi conçue comme étant une mesure d'oubli, une manifestation d'un pardon officiel, consistant à retirer le caractère infractionnel à certains faits commis dans le passé : ce qui était infraction ne l'est plus, comme si l'élément légal venait à disparaitre de sorte que la peine qui s'y attachait cesse de recevoir exécution et la condamnation qui lui servait d'assise est réputée n'avoir jamais existée2(*).

Comme la prescription et la grâce, l'amnistie dispense de l'exécution de la peine, arrête immédiatement les poursuites déjà déclenchées et supprime rétroactivement le caractère infractionnel des faits reprochés ou concernés. Certes, l'amnistie n'obéit pas à un régime juridique, chaque loi d'amnistie, qui du reste est d'application immédiate et d'interprétation stricte, détermine son propre régime. Mais les circonstances peuvent être relevées quant au domaine d'applicabilité.

Seul compétent pour créer des qualifications pénales, le législateur demeure seul à même d'en neutraliser l'élément légal, il est donc la source exclusive de l'amnistie3(*). Par conséquent, le juge et le pouvoir exécutif ne disposent nullement du pouvoir d'amnistier même si, par le biais d'autres techniques, ils détiennent des possibilités comparables.

Longtemps, l'amnistie fut une mesure réelle qui s'attachait à supprimer le caractère délictueux des faits sans considération de la personnalité des bénéficiaires. Aujourd'hui, elle peut prendre un caractère personnel en visant certaines catégories des délinquants, en raison parfois des particularités qui leur sont propres : alors on amnistie moins les actes que les personnes4(*). Si elle est réelle, l'amnistie opère donc in rem, au sens où est prononcé l'oubli des faits entant qu'infractions, elle bénéficie dès lors à tous les participants : auteur, coauteur ou complice. Il s'agit dans ce cas, de la seule et véritable amnistie. Mais si elle est personnelle, l'amnistie se présente bien différemment ; opérant in personnam, elle conserve aux faits leur nature délictueuse, en sorte que le complice par exemple restera punissable s'il n'est pas visé par la loi d'amnistie et ce, pour n'avoir pas la qualité justifiant la faveur du législateur. L'amnistie personnelle est considérée comme une cause d'irresponsabilité pénale affectant la sanction et non l'incrimination et se rapproche beaucoup plus des immunités

Contrairement aux lois relatives aux faits justificatifs qui disposent pour l'avenir, celles d'amnistie ne sauraient effacer que des infractions passées. Et toute loi d'amnistie fixe une date limite pour son application en tenant compte de certaines conditions relatives soit aux infractions visées soit aux délinquants devant bénéficier de cette amnistie ou soit encore aux autorités habilitées à l'accorder.

Forme plus ancienne du pardon, l'amnistie entraine l'extinction de la sanction déjà prononcée, celle de l'action publique pour des poursuites déjà déclenchées et rend impossible l'engagement de nouvelles poursuites. En effet, l' amnistie a pour effet principal sinon fondamental de dépouiller rétroactivement certains faits de leur caractère délictueux c'est-à-dire qu'ils ont bel et bien eu lieu mais, ils sont censés, par une fiction juridique, n'avoir jamais été incriminés et, si leur auteur a été condamné, cette condamnation devient automatiquement caduque et les sanctions qu'elle contenait cessent de pouvoir recevoir application5(*).Ainsi donc, si les infractions amnistiées ne font pas encore objet de poursuite, celles-ci ne peuvent plus être engagées, car au regard de l'action publique, le fait doit être considéré comme n'ayant jamais été commis6(*).

Ayant généralement pour objet d'apaiser les passions et les esprits après une période de crise, l' amnistie peut revêtir plusieurs formes notamment :la forme générale, réelle, personnelle, mixte, conditionnelle ou d'ordre public et, chaque forme présentant ainsi des caractères très spécifiques. Mais, l'oubli créé par une loi d'amnistie n'est cependant pas absolu et l'amnistie connait des limites. Par conséquent, elle ne peut porter atteinte aux droits des tiers, ce qui implique que les victimes d'un fait amnistié peuvent obtenir réparation ou restitution, en basant leur action non sur l'infraction ou la condamnation, mais sur les faits.

En plus, il a été jugé que l'amnistie n'empêche nullement la chose jugée de produire son effet en ce qui concerne les responsabilités civiles7(*). Et ce point de vue juridique est illustré parfaitement par la loi n°05-023 du 19 décembre 2005 portant amnistie pour faits de guerre, infraction s politiques et d'opinion précisément en son article 4 qui dispose « la présente loi ne porte pas atteinte aux réparations civiles, aux restitutions des biens meubles et immeubles ainsi qu'aux autres droits et frais dus aux victimes des faits infractionnels amnistiés ».

En vertu de l'importance accordée à la dignité de la personne humaine, les nations civilisées ont convenu d'ériger en graves crimes (les cimes de droit international) certains actes causant de graves souffrances et mettant en péril cette dignité qu'il convient à tout prix de protéger.

En effet, pendant la deuxième guerre mondiale, la personne humaine a été victime des actes graves et barbares qui ont révolté la conscience humaine. C'est ainsi que les Etats ont décidé de la protéger à travers un cadre juridique d'un niveau très élevé (niveau supranational) et ce, d'abord par le biais de déclaration des droits humains et ensuite en créant des infractions de l'ordre international qui sont la résultante de toute violation des droits ainsi proclamés dans le but, si c'est possible, de poser l'inviolabilité de la personne humaine. Ces crimes sont notamment :les crimes de guerre, crimes contre l'humanité, le génocide et le terrorisme.

Dans le même ordre d'idées, au niveau international, plusieurs instruments juridiques ont, outre la création de la Cour Pénale Internationale pour la poursuite de tout responsable de ces actes horribles, établi et mis sur pied les principes de l'imprescriptibilité et de la non-amnistiabilité des crimes du genre, ce qui sous-entend que jamais, l'amnistie ne peut porter sur ce type des crimes. Ce qui suscite en revanche, non seulement une controverse sur l'inopportunité pour ces graves crimes d'une loi d'amnistie mais aussi et surtout un questionnement pour des raisons de paix ou de pacification du pays, lequel questionnement nous permet de poser la problématique de notre travail.

Problématique

Certes, en considérant toutes les implications d'une loi d'amnistie, nous arrivons au constat de l'inapplication de la loi pénale et par conséquent, celle de la sanction pénale face aux infractions amnistiées. S'il est un principe que l'amnistie ne porte pas sur les crimes jugés plus graves parce que considérés internationalement non amnistiables en raison de l'importance accordée à la dignité humaine, le paradoxe se laisse voir en République Démocratique du Congo où l'on a tendance à banaliser ces graves crimes pour les transformer en des simples faits de guerre et faits insurrectionnels susceptibles d'amnistie. Ce qui fait que tous les grands criminels se trouvent, dans le contexte de cette banalisation, hors des poursuites tant au niveau international qu'au niveau interne.

Cette entorse aux droits humains, par le biais de l'amnistie constitue un prix à payer, un sacrifice à porter et une plaie à supporter en contrepartie d'une paix durable qui, jusqu'à présent reste précaire. En d'autres termes, toutes les lois d'amnistie adoptées en RDC dans le processus de pacification du pays et ce, en sacrifiant les droits humains jugés inaliénables, imprescriptibles, indivisibles et inhérents à la personne humaine sous prétexte de la paix, conduisent à une paix incertaine et éphémère.

Ainsi, pour asseoir notre hypothèse, nous allons nous poser quelques questions :

ü Vaudrait-il la peine de sacrifier les droits humains par le biais des lois d'amnistie à l'égard de graves crimes au nom de la quête d'une paix incertaines et théorique ?

ü Avec la banalisation de ces graves crimes, a-t-on sérieusement pensé aux atrocités des guerres que les populations ont pu subir et leurs conséquences ?

ü Suite à l'inapplication de la sanction pénale qui est l'objet principal d'une amnistie à l'égard des faits visés, quel sera l'avenir du Droit pénal Congolais ?

ü Que faut-t-il faire pour pacifier le pays sans passer par l'institutionnalisation de l'impunité qui est le résumé de la législation congolaise d'amnistie ?

Telles sont les questions auxquelles notre travail aura à donner dans les lignes qui suivent des réponses.

* 1 Article 6 du Protocole Additionnel II aux quatre Conventions de Genève ( ce protocole additionnel est de 1977)

* 2 KOLB et L.LETURMY, Droit pénal général, Paris, Gualion éditeur 2005. P. 411.

* 3CONTE et P. MAISTRE DUCHAMBON, Droit pénal Général, 3ème édition, Paris, Armand Colin, 1998, p.154.

* 4 CONTE et P. MAISTRE DUCHAMBON, Op. Cit. p.154

* 5 STEFANI G., et alii, Droit pénal Général, 14ème édition, Paris, Dalloz, 1992, p.542.

* 6 Ibidem

* 7Conseil d'Etat Français, 20 février 1925, gaz. Pal ; 1958.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery