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La mise en œuvre de la responsabilité pénale du chef de l'état en droit congolais, en droit français et en droit international.

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par Yves KASHOSI CIRHUZA
Université catholique de Bukavu - Licence 2010
  

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Section 3. Comparaison des droits congolais et français sur la responsabilité pénale du chef de l'Etat

§1. Quant au fond 

L'article 164 de la Constitution congolaise de 2006 rend le chef de l'Etat responsable pour les infractions politiques de haute trahison, d'atteinte à l'honneur ou à la probité et de délit d'initié et pour toutes les autres infractions de droit commun commises dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. Seulement, le chef de l'Etat bénéficie d'une faveur s'agissant des infractions commises en dehors de l'exercice de ses fonctions159(*). S'il en est ainsi en droit congolais, le chef de l'Etat « n'est responsable des actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute trahison »160(*), en droit français. Seulement, la Constitution française de 1958 ne se prononce pas sur le sort des actes non rattachables à la fonction du chef de l'Etat et « le met à l'abri de toute mise en cause de sa responsabilité ... pénale pour des faits liés à sa fonction161(*)». Nous estimons donc que l'article 68 de la Constitution française de 1958 n'évoque pas explicitement la responsabilité pénale du Président de la République.

Remarquons que le constituant congolais de 2006, contrairement à celui de France de 1958 à prévu la haute trahison, l'atteinte à l'honneur ou à la probité et de délit d'initié comme infractions politiques pouvant engager la responsabilité pénale du chef de l'Etat alors que son homologue de France n'a prévu uniquement que la haute trahison. Qu'il s'agisse de la RDC et de la France, ces infractions politiques sont critiquables au regard du principe de la légalité des infractions et des peines.

Il résulte, dans les droits congolais et français, des mesures de protection de la fonction présidentielle (en France) vis-à-vis de la mise en cause de la responsabilité personnelle. D'abord, il s'agit de l'irresponsabilité pour les actes « accomplis en qualité de chef de l'Etat ». En effet, l'article 68, alinéa premier de la Constitution française de 1958 indique que « le Président de République n'est responsable des actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute trahison ». Cette disposition met le chef de l'Etat à l'abri de toute mise en cause de sa responsabilité pénale pour des faits liés à sa fonction à l'exception de la haute trahison. S'il en est ainsi en droit français, en droit congolais, en revanche le chef de l'Etat est responsable pour les actes que celui-ci accomplit dans l'exercice de ses fonctions étant donné qu'il ressort de l'article 164 de la Constitution de 2006 que la Cour constitutionnelle exercera sa compétence pénale contre le chef de l'Etat pour les autres infractions de droit commun commises dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de sa fonction.

Ensuite, dans la nouvelle rédaction de la Constitution de 1958 comme dans l'ancienne, le droit français établit l'inviolabilité du chef de l'Etat. L'article 67, alinéa 2 de la Constitution française dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle du 23 février 2007 indique que le chef de l'Etat « ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l'objet d'une action, d'un acte d'information, d'instruction ou de poursuite »162(*). Cette disposition constitutionnelle exclu qu'il puisse en principe faire l'objet des mesures de contrainte liées à la mise en oeuvre de procédures juridictionnelles. La Constitution congolaise de 2006 suspend, pour sa part, les poursuites et la prescription contre le chef de l'Etat pour les actes détachés de ses fonctions163(*). Ainsi, pour les infractions détachables de sa fonction, c'est-à-dire celles qui sont donc antérieures ou extérieures à son mandat, le chef de l'Etat bénéficie d'une immunité temporaire dans le droit congolais étant donné que, pour ces actes, les poursuites seront suspendues pendant la durée de son mandat et renvoyées à la date à laquelle elles ne pourront pas nuire à l'accomplissement par le chef de l'Etat des devoirs de sa charge. Mais la Constitution française de 1958 reste silencieuse à propos des actes extérieurs à l'exercice de ses fonctions. On pourrait croire qu'on leur appliquerait le droit commun.

Mais précisons que pour ces actes, c'est-à-dire ceux détachables de la fonction du chef de l'Etat, le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation ont soutenu en France des analyses divergentes sur ces sujets par leurs décisions du 22 janvier 1999 et du 10 octobre 2001, le Conseil constitutionnel optant pour la thèse d'un privilège de juridiction alors que la Cour de cassation a tranché en faveur de celle d'une immunité temporaire. Pourtant, l'inviolabilité rend le chef de l'Etat pénalement irresponsable dans l'ensemble de son activité. L'inviolabilité étant comprise comme l'institution qui permet de renvoyer les poursuites à une date à laquelle elles ne pourront pas nuire à l'accomplissement par le Président de la République de sa charge164(*).

Insistons néanmoins sur le fait que l'inviolabilité, qui n'est et ne doit être que temporaire, n'est cependant pas une immunité totale. Qu'il s'agisse du droit congolais ou du droit français, « demeure la menace, telle une épée de Damoclès à retardement, qui reste suspendue au-dessus de la tête du titulaire de la Présidence de la République, qui peut s'abattre dès qu'il quitte »165(*) ses fonctions car, reprenant les propos de la commission d'Avril, « les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre le chef de l'Etat à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la cessation des fonctions»166(*).

Nous remarquons que les règles de fond en rapport avec la responsabilité pénale du chef de l'Etat démontrent que le régime pénal du chef de l'Etat en droit congolais est très sévère ; il est « tellement sévère si bien que nous hésitons à parler d'une immunité pénale ...» étant donné que le chef de l'Etat est responsable à la fois pour des infractions politiques (de haute trahison, d'atteinte à l'honneur ou à la probité et de délit d'initié) et pour toutes les autres infractions de droit commun commises dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. La seule faveur consiste en la suspension des poursuites pour les actes détachables de ses fonctions pendant que la justice attendrait le chef de l'Etat dès la fin de son mandat.

Le droit français, contrairement au droit congolais, ne permet d'engager la responsabilité du chef de l'Etat uniquement qu'en cas de haute trahison. Hormis le cas de haute trahison, aucune disposition de la Constitution française ne rend expressément le chef de l'Etat en exercice responsable. Autrement dit, le chef de l'Etat est irresponsable pénalement sauf en cas de haute trahison. Nous remarquons donc qu'en France les actes accomplis par le chef de l'Etat dans l'exercice de ses fonctions sont soumis à un régime d'irresponsabilité. Comme nous l'avons indiqué précédemment dans le premier chapitre de ce travail parlant des immunités constitutionnelles, le régime d'irresponsabilité pénale du chef de l'Etat est une garantie pour le Président de la République de pouvoir répondre aux devoirs de sa charge en toute liberté, sans pression extérieure, en application du principe de séparation des pouvoirs. Cette irresponsabilité se traduit par l'impossibilité pour le pouvoir législatif ou pour l'autorité judiciaire d'entraver le fonctionnement de la Présidence de la République167(*).

* 159 Article 167 alinéa 2 de la Constitution de 2006.

* 160 Cfr. Article 68 de la Constitution française de 1958.

* 161 http://www.conseil-etat.fr/cde/fr/discours-et-interventions/la-responsabilite-du-chef-de-l%C3%89tat-en-droit-compare-k2s.html, (consulté le 31/08/2011).

* 162 Constitution française du 04 Octobre 1958 dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle du 23 février 2007. http://fr.wikisource.org/wiki/Constitution_du_4_octobre_1958#Titre_X__De_la_responsabilit.C3.A9_p.C3.A9nale_des_membres_du_gouvernement, (consulté le 13/08/2011).

* 163 Article 167, alinéa 2 de la Constitution de 2006 : « Pour les infractions commises en dehors de l'exercice de leurs fonctions, les poursuites contre le Président de la République et le Premier ministre sont suspendues jusqu'à l'expiration de leurs mandats. Pendant ce temps, la prescription est suspendue ».

* 164 Lire à ce sujet Joe VERHOEVEN, op. cit., p. 173.

* 165 Rapport de l'Assemblée nationale Constitution du 4 octobre 1958 portant modification du titre IX de la Constitution, douzième législature, N° 3537. Dans www.acoes.es/pdf/Ponente.pdf, (consulté le 14/02/2012).

* 166 Ibidem.

* 167 Rapport de l'Assemblée nationale Constitution du 4 octobre 1958 portant modification du titre IX de la Constitution, douzième législature, N° 3537, dans www.acoes.es/pdf/Ponente.pdf, (consulté le 14/02/2012).

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius