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La renonciation au recours en annulation en arbitrage OHADA


par A. Mariane Fabiola OBROU-ASSIRI
Université Catholique de l'Afrique de l'ouest- Unité Universitaire à Abidjan (UCAO-UUA) - Master en droit privé 2020
  

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CHAPITRE 2 : LES DIFFICULTES LIEES A LA MISE EN OEUVRE DE LA RENONCIATION AU RECOURS EN ANNULATION DE LA SENTENCE ARBITRALE

Il est loisible d'affirmer que la renonciation au recours en annulation de la sentence arbitrale est irrévocable. Mais dans bien des cas cette irrévocabilité est douteuse. Douteuse, nonparce que la sentence est contraire à l'ordre public international mais parce que plusieurs autres facteurs entrent en ligne de compte. La renonciation peut être remise en cause lorsque des conditions de fond et de forme ne sont pas remplies. Il peut être question par exemple du non-respect de l'obligation d'information, de l'exercice de la violence morale, ...etc. La liste n'est pas exhaustive c'est pourquoi il faut montrer que la renonciation peut être remise en cause, d'une part par le traitement inégal des parties à la renonciation (Section1) et d'autre part, par les moyens de recevabilité du recours en annulation (Section2).

Section 1 : Le traitement inégal des parties à la renonciation au recours en annulation

Le législateur OHADA n'a pas manqué de préciser qu'en matière d'arbitrage les parties doivent être traitées sur un pied d'égalité. On pourrait se demander pourquoi une telle précision ? En effet, l'intention du législateur en édictant cette règle était d'instaurer une sécurité juridique dans le domaine de l'arbitrage étant donné que c'est la volonté commune des parties qui est mise en exergue. Ce traitement égal qui doit exister entre les parties n'est cependant pas toujours pris en compte. Il arrive parfois que l'une des parties soit considérée comme partie faible, ce qui pose problème au niveau de son acceptation (paragraphe1). Aussi convient-il de démontrer qu'il y a absence de protection efficace des intérêts de la partie faible (paragraphe2).

Paragraphe 1 : Une acceptation discutée de la partie faible

Avant d'aborder la question de l'acceptation de la partie faible, il convient au préalable de cerner la notion de partie faible. Pour un auteur « la notion de partie faible en droit de l'arbitrage est considérée comme celle qui se trouve dans une situation inégale par rapport à son adversaire. Cette inégalité est le plus souvent associée au manque d'expérience de la partie supposée faible, soit dans la négociation d'un contrat d'affaire, au moment d'envisager des clauses relatives aux litiges éventuels, soit dans la mise en oeuvre d'une procédure arbitrale une fois le litige apparu. Elle est également associée à l'hypothèse de la difficulté de financement d'un arbitrage »154(*). Il ressort de cette définition que le faible est la partie qui sur le plan juridique ou même intellectuel est en position d'infériorité. Cette faiblesse peut être perçue à toute étape de l'arbitrage.

S'il existe une partie faible dans une convention d'arbitrage contenant la renonciation au recours en annulation de la sentence arbitrale, son acceptation à l'arbitrage peut être discutée de même que sa renonciation. Les parties à une convention d'arbitrage ont les mêmes droits et obligations155(*). De ce fait, son acceptation peut être remise en cause soit par le non-respect de l'obligation d'information (A), soit par la violence morale exercée sur la partie faible (B).

A- Le non-respect de l'obligation d'information

L'obligation d'information pèse à la fois sur les parties et sur l'arbitre. Dans ce contexte ci, la partie jugée faible est celle dont la capacité de s'informer apparaît limitée156(*). Le manquement à cette obligation peut entrainer irrecevabilité de la clause de renonciation. Il peut provenir soit de la partie forte, soit de l'arbitre.

Le déséquilibre entre les parties à l'arbitrage se matérialise le plus souvent pendant la rédaction de la convention d'arbitrage et même lors des négociations. Parfois, il advient que la partie forte détienne des informations qui peuvent changer le cours des choses. C'est pourquoi la jurisprudence impose l'obligation d'information entre les parties. Toutes les informations doivent être données, surtout la partie plus spécialiste (c'est-à-dire celle qui maitrise plus le domaine de l'arbitrage) doit informer l'autre partie qui est moins spécialiste afin d'éclairer sa décision sur la renonciation au recours en annulation. En ne donnant pas les informations susceptibles d'orienter sa décision, il entrave en quelque sorte l'effectivité de la renonciation parce qu'il fait preuve de mauvaise foi.

Or on le sait très bien, la bonne foi est une exigence de la validité de la renonciation. En gardant des informations afin de préserver ses intérêts, la partie forte (la partie la plus spécialiste) peut voir sa responsabilité civile engagée. Sachant que la renonciation au recours en annulation est une notion assez complexe, la partie intellectuellement forte a l'obligation d'informer ce dernier sur les clauses stipulées dans la convention d'arbitrage ou à toute autre information susceptible de changer l'issue de l'instance arbitrale.

L'obligation d'information qui pèse sur l'arbitre relève de son impartialité. Ainsi, lorsque l'arbitre constate au moment d'accepter sa mission, une cause de récusation, il doit en informer les parties. Ce devoir de révélation est très important à la fois pour les parties et pour la procédure arbitrale parce qu'il permet d'éviter le déni de justice. Mais lorsque l'arbitre manque à son devoir, cela peut entraîner de graves conséquences sur la procédure. Tel est le cas d'une renonciation au recours en annulation rejetée en raison de la partialité de l'arbitre.

En effet, l'obligation d'information peut être perçue comme une condition de fond car son inobservation peut entraîner des dégâts collatéraux à la justice arbitrale. Par exemple en cas de survenance d'un fait nouveau qui mérite d'être révélé, l'arbitre est tenu d'en informer les parties. S'il ne le fait pas, un tel manquement engage sa responsabilité civile délictuelle sur le fondement de l'article 1382 du Code civil157(*).

B- L'usage de violence morale exercée sur la partie faible

Lorsque la partie forte use de violence morale, le consentement de la partie faible est vicié. Ce qui entraine des conséquences négatives quant à la recevabilité de la renonciation.

Il est malheureux de constater que l'acceptation d'une convention d'arbitrage peut être commandée par le déséquilibre entre les parties158(*). Une telle acceptation remettrait en cause la convention d'arbitrage mais également la renonciation au recours en annulation. Dans bien des cas, la clause compromissoire contenant la renonciation au recours en annulation est imposée par la partie forte à celle en position d'infériorité. Cela pose un problème majeur : celui de l'effectivité du consentement des parties à la renonciation.

En pratique, plusieurs contrats d'adhésion dans lesquels sont insérés les clauses compromissoires montrent que l'adhérant donne son accord sans maitriser réellement la portée de son engagement159(*). Mais également, il n'a pas la possibilité de négocier, de modifier les clauses du contrat, il ne peut que s'y conformer. Ces clauses créent un déséquilibre significatif dans les contrats d'adhésion ; puisque c'est la liberté contractuelle qui est mise en avant on peut dire que le consentement de l'adhérent n'est pas total, éclairé. Un tel déséquilibre montre qu'il y a forcément une partie faible et une partie forte.

En outre, dans un tel cas de figure il est plausible de considérer le consentement de la partie faible comme vicié. La partie forte aurait donc usé de violence morale pour obtenir le consentement de l'autre partie ce qui remettrait en cause l'effectivité de la renonciation au recours en annulation.

A travers cet exemple, on voit bien que l'arbitrage est souvent imposé à une personne qui ne l'a pas conclu. Ceux qui l'ont formé ont stipulé pour elle160(*). Cela présente un danger à la recevabilité de la clause de renonciation car la principale condition de validité de celle-ci est viciée. La renonciation au recours en annulation doit être le fruit d'une discussion entre les parties et non l'adhésion par la partie faible à un acte déjà préétabli.

La rédaction de la convention d'arbitrage contenant la clause de renonciation par une seule partie peut entrainer des conséquences fâcheuses quant à la recevabilité de la renonciation.

Un consentement vicié ne peut pas être pris en compte dans la recevabilité de la clause compromissoire. Ce qui entraine l'invalidité de celle-ci et l'irrecevabilité de la renonciation au recours en annulation de la sentence arbitrale. Ainsi, la partie faible ou celle dont le consentement a été vicié peut remettre en question la recevabilité de la renonciation afin d'exercer l'action en annulation. Comme le dit Martial AKAKPO, l'engagement d'un faible dans une procédure arbitrale doit être le produit d'un consentement éclairé et libre161(*), c'est-à-dire que son engagement doit refléter son intention de ne pas contester la sentence arbitrale. Certains auteurs préconisent que la renonciation au recours en annulation de la sentence arbitrale doit faire l'objet d'une étude approfondie du législateur OHADA. L'article 25.2 AUA ne suffit pas pour réglementer une telle matière.

Dans le souci d'éviter de transformer l'arbitrage en tant que justice des forts, le législateur OHADA doit mettre en place un mécanisme de protection de la partie faible. C'est dans cette veine que Henri Lacordaire affirme que : « entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maitre et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit »162(*). Excepté l'article 9 AUA, le législateur OHADA est resté quasiment muet sur la question de protection de la partie faible en droit de l'arbitrage OHADA.

* 154 MAINGUY (D.), « PME et partie faible », JDI 2017-1, p.9, sp. p. 11.

* 155AGBAM (I.), « L'éthique dans l'arbitrage OHADA », Doctrine juridique, 14, 18 janvier 2018, disponible sur : https://www.lex4.com,[consulté le 18 septembre 2019].

* 156 TERRE (F.), SIMLER (Ph.), Droit civil, op. cit., p.238

* 157Article 1382 C. civ : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

* 158 BOFFA (R.), « Article 1108 : le contrat d'adhésion », n°2 ; ZENATI (F.) et REVET (T.), Cours de droit civil, Contrats, PUF, 2014, n°4.

* 159Idem, n°3.

* 160 AKAKPO (M.), La protection de la partie faible dans l'arbitrage OHADA, Thèse de doctorat, 06 juin 2017, 449 p., P.16.

* 161 Idem p.25

* 162Conférences de Notre-Dame de Paris, tome III, Cinquante-deuxième conférence, (Du double travail de l'homme, 16 avril 1848).

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