La gestion de la dette publique dans les états membres de UEMOA et de la CEMAC( Télécharger le fichier original )par Aïcha Ndiaye Université Paris I Panthéon-Sorbonne - Master II recherche droit et gouvernance des systèmes financiers publics 2017 |
Paragraphe 2 : l'élaboration d'un document annuel de stratégie d'endettement :Les Etats membres de la C.E.M.A.C et de l'U.E.M.O.A élaborent chaque année un document de stratégie d'endettement public à moyen terme communément appelé Stratégie de gestion de la Dette à Moyen Terme (SDMT). Pour les pays de l'U.E.M.O.A, la SDMT est souvent étalée sur cinq ans alors que pour ceux de la CEMAC c'est sur trois ans. A- Le contenu du document de stratégie d'endettement : Le contenu du document de stratégie d'endettement est précisé à l'article 4 du règlement. Ainsi, il doit comporter des informations relatives : - A la justification de l'emprunt ; - Aux plafonds d'endettement et de garantie ; - A la structure du portefeuille des nouveaux emprunts ; - Aux termes indicatifs des nouveaux emprunts ; - Le profil de viabilité de la dette pour les quinze années à venir La justification de l'emprunt dépend des politiques publiques mises en oeuvre. En effet, chaque Etat justifie le besoin de recours à l'emprunt par rapport à son propre contexte. Et le contexte varie dans le temps et dans l'espace. Pour le Mali, le besoin d'emprunt pour l'année 2016 se justifiait par la loi d'orientation et de programmation militaire et par l'Accord signé avec l'Union Nationale des Travailleurs du Mali. Pour le Bénin, le besoin de financement se justifie par le Programme d'Investissements Publics qui vise entre autres à renforcer les infrastructures, à améliorer la productivité du secteur agricole. Quant au Gabon, les priorités dans les investissements sont « le renforcement du réseau routier et des capacité de production d'eau et d'électricité » Les plafonds d'endettement et de garantie sont fonction d'un cadre de viabilité de la dette. Pour les Institutions de Breton Woods, une dette extérieure est viable lorsqu'elle est inférieure à 150% des exportations des biens et services, à 40% du PIB et à 250% des recettes budgétaires. Donc les Etats vont tenir compte de ces paramètres pour connaître les marges d'endettement qui se présentent à eux. Le Gabon, par exemple, a fixé son plafond d'endettement à 35% du PIB. Le portefeuille de la dette permet de rendre compte de la part de chaque type de dettes (intérieure et extérieure) dans le montant global de la dette d'un Etat. Il permet aussi de faire une dichotomie en fonction de la variabilité ou non du taux d'intérêt ; de faire une classification en fonction des devises des bailleurs (monnaie locale à savoir le CFA, l'euro, le dollar américain ou encore les autres monnaies étrangères) ; de classifier en fonction des catégories de créancier (dette multilatérale ou bilatérale). Par ailleurs, des indicateurs de risque comme le taux d'intérêt ou le taux de change sont répertoriés afin d'éviter le surendettement. C'est sur la base de l'étude des risques que la stratégie d'endettement sera déterminée. Dans son document de stratégie d'endettement pour 2016, le Mali préfère « maintenir une politique prudente de mobilisation d'emprunts à taux fixe »54(*). Le Bénin opte pour la même stratégie et précise que le recours aux emprunts à taux variables sera exceptionnel. Les termes indicatifs des nouveaux emprunts renvoient entre autres à la maturité (date à laquelle les dettes deviennent dues et devront être remboursées) ; au taux d'intérêt (pourcentage calculé et que devra payer chaque année l'Etat au bailleur. On l'appelle aussi service de la dette) ; à la commission d'engagement (rémunération que l'Etat doit au bailleur du fait de son seul engagement tant que le crédit n'est pas encore utilisé. Elle représente un taux du crédit) ; au différé (période au cours de laquelle l'Etat n'a pas à rembourser sa dette. Elle se situe généralement au début du prêt).55(*) Le profil de viabilité de la dette pour les quinze années à venir responsabilise les Etats. Il permet de prévoir les chocs futurs et de les anticiper. Cette exigence n'est pas respectée par tous les Etats. Certains Etats comme le Bénin respectent cette règle. Par contre, d'autres, comme le Sénégal, rédigent un rapport spécial sur l'analyse de la viabilité de la dette plus connu sous le nom d'AVD. Mais ce rapport n'est pas annexé à la loi de finances comme la SDMT. B- L'annexion du document à la loi de finances initiale : Le document de SDMT, rappellent les règlements de la C.E.M.A.C et de l'U.E.M.O.A, est une annexe obligatoire. Elle est partie intégrante de la LFI. Ce qui signifie qu'une fois voté, le document de stratégie s'impose à l'exécutif tel qu'il est approuvé par le Parlement. Cette exigence est prévue à l'article 46 de la directive n° 06/2009/CM/UEMOA portant lois de finances au sein de l'UEMOA. Elle est aussi prévue à l'article 45 de la directive n° 01/11-UEAC-190-CM- 22 relative aux lois de finances. Il est normal que le document soit annexé à la L.F.I vu qu'il permet de justifier l'emprunt. Or, ce n'est que dans la L.F.I qu'on peut trouver de telles explications. Rappelons, en effet, qu'à la fin de la première partie de la L.F.I, un tableau d'équilibre doit être construit. C'est ce tableau qui informe sur les besoins de financement de chaque Etat. Il ressort la différence entre recettes et dépenses. Et grâce à lui on sait si le solde budgétaire est déficitaire (ce qui traduit un besoin de financement du déficit) ou excédentaire. D'habitude, les Etats ne recourent à l'emprunt que pour faire face au déficit budgétaire. Il s'y attache aussi le souci d'informer le Parlement. L'exécutif ne peut engager l'Etat sur des obligations qu'ignorent les représentants du peuple. Par conséquent, en les informant, on leur donne l'occasion de savoir ce sur quoi l'Etat pourrait s'engager et dans la limite de ses capacités de remboursement. Cependant, certains pays ne publient pas le document de stratégie d'endettement. Les lois de finances sont mises en ligne pour en faciliter l'accès aux citoyens. Elles sont même parfois accompagnées d'annexes. Mais l'annexe sur la stratégie d'endettement n'en fait pas partie (Côte d'Ivoire, Sénégal) alors que ce document fait partie intégrante de la loi de finances initiale. A côté de ces documents élaborés par les Etats, il est exigé d'eux de créer un organe spécial chargé de la gestion de la dette conformément aux directives. * 54 Mali, Annexe 12 de la LFI pour 2016, « stratégie d'endettement public pour l'année 2016 », p.12 * 55 Définitions trouvées sur lesechos.fr |
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