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Les conséquences du principe que de responsabilité pénale des personnes morales en droit camerounais.


par Ivan De Nguimbous Tjat Limbang
Université de Yaoundé II - Soa - Master en droit privé 2018
  

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Section 2 : Une limitation inhérente à l'admission d'un cumul de responsabilité entre les personnes physiques auteurs des actes incriminés et les personnes morales

94. La possibilité d'échapper à la répression ne doit pas uniquement s'envisager sous le prisme de la personne morale. En effet, le choix de l'utilisation de la personne physique comme substratum humain et même comme « instrument »261(*) de la responsabilité pénale des personnes morales, laisse ainsi planer le doute sur la possibilité d'engager sa responsabilité sous le fondement de l'infraction qu'elle a commise pour le compte de la société.

95. Ainsi, soit l'on admet que la personne physique organe ou représentant auteur des infractions imputables à la personne morale se confond avec celle-ci et donc elle ne devrait pas être considérée de façon singulière comme pénalement responsable. Soit on considère que la personne physique servant de support humain est différente de la personne morale, la responsabilité pénale des personnes morales deviendrait alors une responsabilité du fait d'autrui d'où le cumul de responsabilité entre les personnes morales et des personnes physiques. L'idée retenue était alors que la responsabilité pénale des personnes morales est une responsabilité pénale du fait personnel et celle des personnes physiques se trouve diluée voir même absorbée par celle de la personne morale.

À la réalité, ces deux hypothèses n'ont de séduisante que leur simplicité. Car au fond suivant la logique employée par le législateur ce n'est pas la personne physique qui serait assimilée à la personne morale, mais le personnage ou l'institution qu'il incarne262(*). Ainsi la distinction doit plutôt être faite entre l'institution de l'organe ou du représentant et la personne qui incarne cette institution, de telle sorte que la faute de l'organe ou du représentant considérée comme la faute de la personne morale puisse cohabiter avec la faute de la personne physique. C'est dans cette hypothèse qu'on envisage le cumul de responsabilité pour juguler la dépénalisation que l'admission généralisée de la responsabilité pénale des personnes morales pourrait entrainer pour les personnes physiques auteurs des actes incriminés (§-1), mais aussi comme outil pouvant servir à leur répression (§-2).

§-1 Le cumul de responsabilité comme parade du législateur faceà la dépénalisation implicite des agissements des organes et représentant

96.La dépénalisation est l'action de dépénaliser, c'est-à-dire retirer à un comportement son caractère délictueux, de le soustraire à la sanction pénale. C'est l'acte par lequel le législateur renonce à la voie pénale, cette renonciation peut être totale ou partielle. Elle est intégrale lorsque le législateur pénal sort complètementde la voie pénale. Elle est partielle lorsqu'il est demandé au législateur de mesurersa voie pénale263(*).

Dans le cadre de notre analyse, la dépénalisation est synonyme d'impunité dans la mesure où la responsabilité pénale des personnes morales est susceptible de soustraire la personne physique à la sanction pénale, ce qui a le même effet qu'une dépénalisation proprement dite264(*). Ainsi, l'extension du champ de la responsabilité pénale des personnes morale, s'accompagne de l'extension de la possibilité d'échapper à la répression pour la personne physique, dans la mesure où la personne morale étant désormais responsable pour toutes les atteintes aux valeurs sociales vient servir d'écran à la personne physique. Ceci se manifeste par dépénalisation qu'elle induit (A) et ce rendant compte de cela, le législateur a trouvé une -ou du moins a cru trouver265(*)-parade dans le mécanisme du cumul de responsabilité, qui a eu des effets sur cette dépénalisation (B).

A. La dépénalisation induite par l'admission généralisée de la responsabilité pénale des personnes morales

97. Derrière la question du champ d'application de la responsabilité pénale des personnes morales se joue l'épineuse question de la répartition des responsabilités au sein de l'être collectif. Selon François ROUSSEAU, la répartition des responsabilités dans l'entreprise se fait soit par une logique d'addition, soit par une logique de substitution266(*).

Lorsqu'on s'attarde aux motifs ayant servi d'implémentation de la responsabilité pénale des personnes morale, c'est la logique de substitution marquée par la disparition de la pression pénale exercée sur les personnes physiques organes ou représentants (1) et un transfert de la responsabilité pénale des personnes physiques vers la personne morale (2).

1- Une dépénalisation marquée par une disparition de la pression pénale sur les organes et représentant

98. Dès la genèse de l'institution, la responsabilité pénale des personnes morales a été instrumentalisée afin d'aboutir à un relâchement de la menace pénale pesant exclusivement sur les dirigeants sociaux. Au lieu d'en faire un instrument au service de la prévention de la délinquance des groupements, et de la mise en place d'un fonctionnement vertueux de la personne morale267(*), la responsabilité pénale a été limitée à une simple « technique redistribution du risque pénal au profit de la personne physique en position de décideur »268(*).

En France par exemple, une formule célèbre de Robert BADINTER exprime suffisamment la volonté du législateur français de réduire « la présomption de responsabilité pénale qui pèse en fait aujourd'hui sur des dirigeants à propos d'infractions dont ils ignorent parfois l'existence ». Ainsi, on observe donc un déplacement de la présomption de responsabilité des personnes physiques vers les personnes morales, diminuant ainsi le risque pénal qui pèse sur chaque personne lors de l'accomplissement d'une activité. Cette diminution du risque marque un point de départ vers une déresponsabilisation des personnes physiques.

2- Une dépénalisation exprimée par le transfert de responsabilité du substratum humain vers la personne morale

99. Le dirigeant qui était avant l'admission de la responsabilité pénale des personnes morales la cible privilégiée du législateur pour les infractions commises dans le groupement et même par le groupement, se trouve soulagé lorsqu'il a commis une infraction pour le compte de la personne morale. On assiste donc à un paradoxe, consacré par une législation alliant répression et dépénalisation269(*) qui tient en ce que « personnalité morale forme un écran qui permette aux dirigeants de commettre des faits générateurs de responsabilité en toute impunité »270(*).

La responsabilité pénale des personnes morales par le truchement du principe général offre une sorte d'immunité à la personne physique agissant es qualité, mais cette immunité présente de nombreux désavantages. Ce rendant compte de cela le législateur camerounais a réagi en envisageant un cumul de responsabilité entre les personnes physiques auteurs des actes incriminés et les personnes morales, qui a eu des effets sur le mouvement de dépénalisation.

* 261 NTONO TSIMI (G.) « Le devenir de la responsabilité pénale des personnes morales en droit camerounais. Des dispositions spéciales vers un énoncé général ? » op.cit. pp. 221 et s.

* 262« D'une part, les organes et représentants se confondent avec la personne morale qui est alors personnellement responsable par leur représentation, c'est-à-dire à travers eux. D'autre part, les personnes physiques se distinguent des organes dont elles sont membres ou de la qualité de représentant qu'elles endossent et cette dissociation conduit à envisager l'imputation d'une autre responsabilité » SAINT-PAU (J.-C.), La responsabilité des personnes morales : réalité et fiction, op.cit.p. 105.

* 263NTONO TSIMI (G.), Les contraintes internationales des politiques criminelles nationales. La normativité des obligations des juges supranationaux, séminaire de grands problèmes pénaux contemporains, Master II année académique 2018-2019.

* 264« Cette pénalisation des personnes morales conduit parfois à une dépénalisation du comportement des personnes physiques qui bénéficient ainsi d'un bouclier ou d'un parapluie protecteur, puisque si, à l'origine, le législateur annonçait la juxtaposition des deux types de responsabilités, (bref, qu'en termes gastronomiques ce serait fromage et dessert), force est d'observer que de plus en plus fréquemment c'est fromage ou dessert au point que, parfois, la responsabilité pénale des personnes morales vient jeter un voile impudique sur celle des personnes physiques » MAISTRE DU CHAMBON (P.), « Rapport introductif sur la dépénalisation » in Dépénalisation de la vie des affaires et responsabilité pénale des personnes morales, collection Ceprisca, puf, 2009, p.9.

* 265 TRICOT (J.), « Le droit pénal à l'épreuve de la responsabilité des personnes morales : l'exemple français » op.cit. pp 19 et s.

* 266 ROUSSEAU (F.) « La répartition des responsabilités dans l'entreprise », in RSC, 2010.

* 267CONSIGLI (J.) « La responsabilité pénale des personnes morales pour les infractions involontaires : critères d'imputation » op.cit. pp. 297 - 310.

* 268 TRICOT (J.), « Le droit pénal à l'épreuve de la responsabilité des personnes morales : l'exemple français »,ibid. pp.19 - 46.

* 269 ROUSSEAU (F.) « La répartition des responsabilités dans l'entreprise », op.cit. pp. 10 et s.

* 270AFCHAIN (M.-A.), La responsabilité de la sociétéop.cit. p. 217.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius