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Immunité diplomatique et justice pénale internationale.


par Mohamed OUASSAS
Faculté des sciences juridiques , économiques et sociales de Marrakech - Master en Géopolitique et Relations Internationales 2020
  

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2ème section : L'ingérence du CS dans les activités de la CPI : entre faveur et contrainte politique 

La capacité de saisine du Conseil de sécurité permet à la Cour d'exercer sa compétence sur les États non-parties et qui n'ont pas accepter de coopérer avec la Cour. A première vue, cela permettra vraiment d'élargir la compétence de la Cour qui, à défaut d'être universelle ; voit quand même sa compétence s'élargir et s'implique même aux Etats tiers au Statut. Cependant, ce mode de saisine par le CS soulève quelques pénuries et insuffisances et cet avantage demeure critiqué.

En effet, il découle des dispositions du Statut que la CPI reconnaît au CS l'aptitude d'actionner la Cour95(*) comme il peut éteindre son action96(*). D'ailleurs comme l'indique, Leïla Bourguiba, Assistante de M. Claude Jorda, procureur général de la CA Paris et président du TPIY : « Il y a une réelle crainte que la logique politique du Conseil de sécurité ne finisse par déteindre sur la Cour si celui-ci use trop des pouvoirs qui lui sont conférés par le Statut. En effet, l'article 16 du Statut (sursis à enquêter et à poursuivre demandé par le Conseil de Sécurité) constitue une arme redoutable dont le but pourrait sans aucun doute être dénaturé97(*) ».

Pour mieux détailler, lorsque le CS défère une situation au procureur de la CPI, le Procureur n'est pas obligé de donner suite à la situation. Il apprécie et décide s'il y a lieu d'ouvrir ou non une enquête.

Ainsi, la lecture des articles 15 et 16 nous fait comprendre qu'il ne peut y avoir de sursis à enquêter que lorsqu'il est démontré que le Procureur a décidé d'ouvrir une enquête et qu'il l'a déjà effectivement entamée. Une existence préalable d'une activité d'enquête ou de poursuite est nécessaire pour que l'intervention du CS dans les activités de la Cour qui semble être le chapitre VII de la Charte soit valide. En constatant que la poursuite des enquêtes constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales, le CS doit objectivement le démontrer.

Néanmoins, le débat qui se pose est de savoir sur quels critères le CS doit se baser pour déterminer qu'il existe une menace contre la paix et la sécurité internationales ? Autrement dit, la décision du CS de saisir la CPI est-elle une question de procédure ou de fond ?

L'extension des compétences de la CPI grâce au pouvoir du CS pose un véritable souci non seulement quant à la primauté du CS mais aussi au droit de véto dont dispose ses membres permanents. Lorsque le CS s'apprête à renvoyer une situation devant la CPI, les membres permanents ont la capacité de bloquer cette résolution en vertu de leur droit de veto, qui leur permet de paralyser totalement une résolution proposée par les autres membres. Dans ce cas, la compétence de cette Cour serait entre les mains de ces Etats qui, loin d'obtenir une justice internationale, jouissent de ce privilège pour servir leurs intérêts politiques.

Ainsi, par ce pouvoir de saisine, les membres permanents disposent d'un nouvel instrument avec des effets obligatoires à l'égard de tous les Etats membres de l'ONU. En effet, conformément à l'article 25 de la Charte de l'ONU tous les membres de l'ONU conviennent d'accepter et d'appliquer les décisions du Conseil de sécurité conformément à la présente Charte.Cela veut dire que les EU98(*), qui ne sont même pas partie au SR, peuvent examiner le déclenchement de l'activité de la Cour et priver les garanties apportées par la saisine du CS.

La réalisation de la justice et le maintien de la paix restent donc deux objectifs difficiles à réaliser lors de la saisine de la CPI par le CS. « En effet, bien que possédant une apparence juridique, la couleur politique de ces objectifs reste indéniable puisqu'ils dépendent largement de situations concrètes où se mêlent les différents intérêts étatiques99(*)».

La résolution 1593 relative à la situation du Darfour examine ce curieux dilemme et démontre les subtilités de l'intervention du CS dans la saisine de la CPI et constitue une étape importante dans la lutte contre l'impunité et une avancée historique pour la justice pénale internationale.

Ø La situation ardue et controversée de l'Ex-Président soudanais Omar Hassan Al Bashir100(*) :

Revenons un peu dans l'histoire : Avant la création de la CPI, les États africains ont été membres actifs pour l'adoption du SR. Après sa création, ils se sont, montrés très coopérant avec elle en lui déférant ses premières situations tout simplement pour montrer la volonté africaine de lutter contre l'impunité des plus grands criminels et la répression des crimes les plus graves. Cependant, dès qu'une situation a été renvoyée par un acteur autre que les Etats africains, notamment le CS, les relations entre la Cour et l'Afrique ont commencé à se dégrader et les intérêts politiques ont dépassé la réalité du droit. La situation du Darfour en a été le bel exemple dont le mandat d'arrêt délivré contre Al Bashir avait provoqué une grande contestation. Ni le Tchad, ni le Congo ou encore moins le Malawi et tout récemment l'Afrique du Sud n'ont voulu coopérer avec la Cour.

L'histoire du Soudan et de la CPI commence le 26 mai 2004, soit plus d'une année après l'éclatement des premières violences à large échelle au Darfour, lorsque le CS des NU manifeste sa grave préoccupation sur la détérioration de la situation humanitaire et les nombreuses violations des droits de l'homme dans cette région. En 2004, les Nations Unies adoptèrent la résolution 1564101(*) pour la mise en place d'une commission d'enquête sur le Darfour. Antonio Cassese, ancien Président du TPIY est alors placé à sa tête. Le 25 janvier 2005, il présente au Secrétariat Général un rapport établissant la responsabilité des forces gouvernementales et des milices dans les exécutions, actes de tortures et viols perpétrés au Darfour102(*).

Le transfert du cas à la CPI est alors demandé. Le Soudan, non signataire du SR rejette en conséquence toute autorité de la CPI ainsi que toute coopération avec elle. La saisine de la CPI ne peut dès lors se faire que sur demande du CS de l'ONU en vertu du en vertu de l'article 13 b du SR, car la charte ne prévoit aucun pouvoir du CS à l'égard des individus pouvant ainsi mettre en cause les ressortissants d'un État n'ayant pas ratifié le Statut de Rome ou traité d'un crime commis sur son territoire.

Une autre résolution a été adoptée le 31 Mars 2005 par le CS, la situation du Darfour est déférée de à la compétence de la CPI malgré le refus de gouvernement soudanais. Elle prévoit que : « Agissant en vertu du Chapitre 7 de la Charte des Nations Unies :

1. Décide de déférer au Procureur de la Cour pénale internationale la situation au Darfour depuis le 1er juillet 2002;

2. Décide que le Gouvernement soudanais et toutes les autres parties au conflit du Darfour doivent coopérer pleinement avec la Cour et le Procureur et leur apporter toute l'assistance nécessaire conformément à la présente résolution [...]103(*)»

En 2008, trois ans aprèsque le CS lui a demandé de mener une enquête au Darfour et ens'appuyant sur les éléments de preuve recueillis, le Procureur de la CPI a conclu qu'ily avait des motifs raisonnables de croire qu'Omar Al Bashir doit répondrepénalement de nombreuses accusations pour génocide, crime contre l'humanité et crime de guerre commis depuis la création de la CPI voire le 1er Juillet 2002. La Chambre préliminaire a émis deux mandats d'arrêt à son encontre :

· Le 4 mars 2009 pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité104(*).

· Le 12 juillet 2010 pour crime de génocide105(*).

Elle s'est clairement prononcée. Elle a conclu avoir des motifs raisonnables de croire que « Omar Hassan Al Bashir, dans la mesure où il était en droit et en fait le Président de l'État du Soudan et le commandant en chef des Forces armées soudanaises pendant toute la période concernée par la requête de l'Accusation, a joué un rôle essentiel dans la coordination de l'élaboration et de la mise en oeuvre du plan commun. [...]Omar Hassan Al Bashir a également [...] exercé un contrôle total sur toutes les branches de « l'appareil d'État » du Soudan106(*). »

La CPI, en se prononçant sur sa propre compétence concernant la situation au Darfour, a dégagé le principe audacieux selon lequel la résolution 1593, adoptée par le CS, s'imposait au Soudan en tant que membre des Nations Unies. Par conséquent, le Soudan doit se conformer au SR, par application de l'article 25 de la Charte des Nations Unies107(*).

Suite à ces mandats d'arrêts, il ne restait que leur exécution et donc l'arrestation d'Omar Al Bashir. C'est à partir de ce moment que l'application des articles 27 et 98 du SR deviennent problématique.

Le refus de coopération des Etats-Unis avec la CPI :

Omar Al Bashir avait laissé entendre le 16 septembre 2013 qu'il envisageait de se rendre au siège des Nations Unies à New York afin de s'adresser à l'Assemblée générale. Le 18 septembre 2013, la CPI rendait une décision dans laquelle elle invitait les États-Unis, un État non partie au Statut de Rome, à procéder à l'arrestation d'Omar Al Bashir si celui-ci se rendait sur leur territoire108(*).

Le CS rappelle que « Aux termes de la résolution, le gouvernement soudanais et toutes les autres parties au conflit du Darfour doivent coopérer pleinement avec la Cour et le Procureur, et leur apporter toute l'assistance nécessaire conformément à la présente résolution et, tout en reconnaissant que le Statut de Rome n'impose aucune obligation aux États qui n'y sont pas parties [...]109(*)»

Les États-Unis n'avaient donc aucunement l'obligation de coopérer avec la CPI si Al Bashir s'était rendu sur leur territoire. Cependant, la CPI a rappelé que la situation était déférée par le CS et donc ladite résolution pourrait créer une obligation autonome de coopérer. La Cour a fait une distinction importante entre l'obligation créée par le SR et celle créée par une résolution du CS :

« The Statute of this Court is an international treaty. Therefore, it is only with the State's consent that the Statute can impose obligations on a non-State Party. Thus, non-States Parties may decide to cooperate with the Court on an ad hoc basis, as foreseen in article 87(5)(a) of the Statute. This principle may be altered by the SC which may, by means of a resolution adopted under Chapter VII of the UN Charter, create an obligation to cooperate with the Court on those UN member States which are not members of the Statute. In such a case, the obligation to cooperate stems directly from the UN Charter.

Accordingly, the United States, as a non-State Party to the Statute, has no obligations vis-à-vis the Court arising from the Statute. The Chamber notes, however, that the situation in Darfur was referred to the Court by the SC and that SC Resolution 1593 (2005), while recognizing that States not party to the Rome Statute have no obligation under the Statute, `'urge[d] all States and concerned regional and other international organizations to cooperate fully'' with the Court.110(*) »

La Cour est toujours dans un mode d'invitation et non d'imposition d'une obligation de coopération mais se permet de mettre l'accent non pas sur ses propres pouvoirs mais sur les pouvoirs du Conseil de sécurité. En effet, elle ne déguise pas sa faiblesse en tant qu'une juridiction sans mécanisme d'exécution :

« The Chamber wishes to point out that the ICC has no enforcement mechanism and thus relies on the States' cooperation, without which it cannot fulfil its mandate and contribute to ending impunity.111(*) »

Cette utilisation de langage non-obligeant et peu urgent démontre la paralysie de la Cour à exécuter le mandat.

Le refus de coopération des Etats africains :

1. La situation de la République du Tchad112(*)et de la République du Malawi113(*) :

Le 27 août 2010, la Chambre préliminaire I a informé le CS de l'ONU et l'Assemblée des États parties au SR des visites de M. Al Bashir à la République Démocratique du Tchad et au Kenya, qui sont des États membres de l'ONU et des États parties au Statut de Rome, et ont donc l'obligation de coopérer avec la Cour et lui prêter assistance. Le 29 octobre 2010, le ministère des Affaires étrangères de la République du Kenya a envoyé au Greffier de la CPI une note verbale dans laquelle le Ministère l'informe que le gouvernement du Kenya n'est pas au courant d'une visite imminente par Omar Al Bashir.

D'un autre côté, la République du Malawi a reçu notification des Demandes de coopération. Le 18 octobre 2011, le Greffe a déposé un rapport concernant le séjour d'Omar Al Bashir au Malawi, par lequel il informait la Chambre de ce qui suit :

i. Plusieurs sources médiatiques ont rapporté qu'Omar Al Bashir s'était rendu au Malawi le 14 octobre 2010 afin d'assister au sommet du Marché commun de l'Afrique orientale et australe (COMESA) organisé du 4 au 15 octobre à Lilongwe, la capitale du Malawi » ;

ii. Le 13 octobre 2011, le Greffier avait adressé une note verbale à l'ambassade de la République du Malawi à Bruxelles, pour rappeler à cet État les obligations légales lui incombant en vertu du Statut, et lui demander sa coopération aux fins de l'arrestation et de la remise à la Cour d'Omar Al Bashir « au cas où celui-ci entrerait sur le territoire du Malawi » ; et

iii. Aucune réponse n'avait été reçue au jour du dépôt du Rapport.

La République du Malawi s'est justifiée par le manquement à l'obligation d'accéder aux demandes de coopération adressées par la Cour114(*)

Dans ses décisions sur le refus de coopération la République du Malawi et de la République du Tchad, la Cour a conclu qu'en application des articles 86, 87-7 et 89 du Statut, ces Etats ne se sont pas acquittés de l'obligation qu'ils avaient de consulter la Chambre, en omettant de lui soumettre la question de l'immunité d'Omar Al Bashir, et n'ont pas coopéré avec la Cour, en ne procédant pas à l'arrestation et à la remise à la Cour d'Omar Al Bashir, ce qui a empêché celle-ci d'exercer les fonctions et les pouvoirs que lui confère le Statut ; et a décidé de référer l'affaire au CS et à l'assemblée des États Parties.

En réponse de cette décision, dans un communiqué de presse du 9 janvier 2012, la Commission de l'Union Africaine115(*) se prononce comme suit :

« L'Union regrette vivement que la décision vise à :

i. Apparemment changer le droit international coutumier par rapport à l'immunité ratione personae ;

ii. Rendre l'article 98 du SR redondant, non opérationnel et absurde ;

iii. Ne pas tenir compte de la question cruciale de la levée ou du maintien des immunités par le Conseil de sécurité conformément à la résolution 1593 (2005) qui a référé la situation du Darfour à la CPI ».

Ainsi, l'UA ajoute que l'article 98-1 impose la présente interprétation : « Les États ne peuvent pas se dégager de leurs obligations juridiques internationales vis-à-vis des pays tiers en instituant un tribunal international. En effet, contrairement à l'affirmation de la Chambre préliminaire I de la CPI, l'article 98-1 a été inclus dans le Statut de Rome instituant la CPI, tout en sachant que le statut ne préconise la levée d'une immunité que le droit international accorde à des fonctionnaires des États qui ne sont pas parties au Statut de Rome. C'est parce que les immunités des fonctionnaires de l'État sont des droits de l'État concerné et un traité ne lie que les parties au traité. Un traité ne peut pas priver les États non parties des droits qu'ils possèdent normalement.

De ce fait il convient de rappeler que l'immunité accordée aux hauts fonctionnaires en service, ratione personae, de juridiction pénale interne étrangère (et d'arrestation) est absolue et s'applique même lorsque le fonctionnaire est accusé d'avoir commis un crime international116(*).

Le cas de la République démocratique du Congo (RDC)117(*) :

Le 26 février 2014, la Cour a reçu un avis qu'il était possible qu'Omar Al Bashir se rende en République démocratique du Congo afin de participer au « sommetdu Marché commun de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe (COMESA) à Kinshasa » devant se tenir les 26 et 27 février 2014. Le Procureur avait donc demandé à la Chambre de faire le nécessaire pour s'assurer que les mandats d'arrêt à l'encontre d'Al Bashir seraient exécutés.

Le 26 février 2014, la Cour rend la décision dans laquelle elle demande notamment à la RDC, en tant qu'un État partie, de procéder immédiatement à l'arrestation d'Al Bashir. Le 3 mars 2014, la Chambre a reçu notification que la visite d'Al Bashir avait eu lieu et les autorités de la RDC avaient confirmé qu'il avait quitté le pays dans la matinée du 27 février 2014118(*).

La RDC soutient que les demandes d'arrestation et de remise d'Omar Al Bashir n'ont pas été exécutées en raison de contraintes temporelles et légales. Elle indique que la présence d'un chef d'État étranger sur son territoire l'a placée « dans une situation complexe, ambigüe et importante » compte tenu du fait que la RDC est un État partie au Statut et est également membre de l'Union africaine. De plus, le peu de temps écoulé entre l'arrivée d'Omar Al Bashir le soir du 25 février 2014, la réception de la Décision du 26 février 2014, et le départ prématuré de l'intéressé le matin suivant ont fait qu'il n'était pas matériellement possible de prendre une décision comportant autant « d'implications légales, diplomatiques, politiques et sécuritaires».

Par ces motifs, la Cour a conclu que la RDC « n'a pas coopéré avec la Cour en refusant délibérément de procéder à l'arrestation et à la remise d'Al Bashir, empêchant ainsi la CPI d'exercer les fonctions et les pouvoirs que le Statut lui confère et, qu'elle ne s'est pas conformée à son obligation de consulter la Chambre conformément à l'article 97 du Statut et à la règle 195-1 du Règlement sur les difficultés qui l'ont empêchée d'exécuter les demandes d'arrestation et de remise d'Omar Al Bashir pendant son séjour, à savoir à son obligation de porter à la connaissance de la Cour les informations utiles qui lui auraient permis de se prononcer sur la difficulté rencontrée évoquée à l'article 98-1 du Statut119(*)» et a référé sa décision au CS.

Dans son avis consultatif sur la Namibie, la CIJ avait déclaré que « Lorsque le Conseil de sécurité adopte une décision aux termes de l'article 25 conformément à la Charte, il incombe aux États membres de se conformer à cette décision [...]. Ne pas l'admettre serait privé cet organe principal des fonctions et pouvoirs essentiels qu'il tient de la Charte120(*)».

De son côté, la Commission de l'UA avait pris la peine de rappeler que ses États membres ont volontairement négocié le Statut de Rome et ont rejoint la CPI en vue de renforcer la lutte contre l'impunité. À ce sujet, la Commission ajoute :

« L'Union africaine va continuer à se battre contre l'impunité tel que le préconise l'article 4 de l'Acte constitutif et les décisions pertinentes de la Conférence et va s'opposer à toutes les décisions présomptueuses et égoïstes de la CPI ainsi qu'à toute prétention ou politique de deux poids deux mesures qui deviennent évidentes suites aux enquêtes, poursuites et décisions prises par la CPI concernant les situations en Afrique. [...] L'Union africaine estime que les questions relatives à la paix et à la justice doivent être traitées de manière globale et détaillée et entend poursuivre, en ce qui concerne le Soudan, les objectifs communs, mutuellement interdépendants et équitablement souhaitables de paix, de justice et de réconciliation121(*)».

De plus, l'UA a confirmé qu'aucune « poursuite ne doit être engagée devant un tribunal international contre un chef d'État ou de gouvernement en exercice ou toute autre personne agissant ou habilitée à agir en cette qualité durant son mandat122(*)».Malheureusement, Devant ce manque ou, plus ou moins, refus répétitif de coopération des pays africains dont le dernier fut l'Afrique du Sud, le Conseil de sécurité n'a pas réagi aux demandes incessantes du Procureur de la CPI.

Après 29 ans de pouvoir, L'Ex-Président Omar Al Bashir a été renversé et évincé par les militaires en Avril 2019. L'ancien président a fait face à des accusations de possession de devises étrangères, de corruption et de réception illégale de présents liés à ses fonctions.

Deux mois après le renversement de l'ex-Président Omar Al-Bashir par l'armée soudanaise, la Procureure de la CPI, Mme Fatou Bensouda, a invité les autorités de Khartoum à ouvrir un « nouveau chapitre » dans l'histoire des relations du pays avec la Cour, jusqu'ici marquées par un « manque total de coopération », en acceptant de lui livrer les suspects toujours visés par un mandat d'arrêt pour les crimes commis au Darfour, dont M. Al-Bashir.  Rejetant la main tendue par la Procureure, le Soudan a répondu qu'il ne reconnaissait pas la compétence de la CPI et que sa position sur la question demeurait inchangée, en dépit des changements politiques récents.

La rédaction de l'article 98-1 à la lumière de l'article 27 retrouve sa pertinence dans la déclaration de la CIJ dans l'Affaire Mandat d'arrêt123(*) où elle a déclaré qu'elle n'a pas pu retrouver « qu'il existe en droit international coutumier une quelconque forme d'exception à la règle accordant l'immunité de juridiction pénale et d'inviolabilité aux Ministres des Affaires étrangères lorsqu'ils sont suspectés d'avoir commis des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité124(*)». Ainsi, une décision de levée d'immunité parle CS doit être explicite et ne peut se déduire implicitement par le simple renvoie d'une situation à la CPI ou le simple fait de demander à un État de coopérer avec la CPI125(*).

* 95L'article 13 -b du Statut qui précise que :« La Cour peut exercer sa compétence à l'égard des crimes visés à l'article 5, (...) b) si une situation dans laquelle un ou plusieurs de ces crimes paraissent avoir été commis est déférée au Procureur par le Conseil de Sécurité agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations unies »

* 96 En vertu de l'article 16 du Statut portant sur le sursis à enquêter ou à poursuivre qui dispose que « Aucune enquête ni aucune poursuite ne peuvent être engagées ni menées en vertu du présent Statut pendant les douze mois qui suivent la date à laquelle le Conseil de sécurité a fait une demande en ce sens à la Cour dans une résolution adoptée en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies ; la demande peut être renouvelée par le Conseil dans les mêmes conditions. »

* 97Roland Adjovi, « Regard sur la Cour Pénale Internationale Entretien avec Claude Jorda », Revue électronique Droits fondamentaux, n° 6, janvier - décembre 2006.

* 98Membre permanent du CS à côté de la France, La Russie, le Royaume Uni et la Chine.

* 99Allafi Moussa, « La Cour Pénale Internationale et le conseil de sécurité : justice versus maintien de l'ordre », page 157, Thèse de Doctorat, Université François - Rabelais De Tours, 2013.

* 100CPI, Situation au Darfour (Soudan), Le Procureur c. Omar Hassan Ahmad Al Bashir, Chambre préliminaire, Décision relative à la requête de l'Accusation aux fins de délivrance d'un mandat d'arrêt à l'encontre d'Omar Hassan Ahmad Al Bashir. Affaire n° ICC-02/05-01/09, 04/03/2009.

* 101 Conseil de sécurité, Résolution 1564, 2004. Pour plus d'informations sur la résolution : http://unscr.com/en/resolutions/1564

* 102Conseil de sécurité, Rapport de la Commission internationale d'enquête sur le Darfour au Secrétaire général Rapport établi en application de la résolution 1564 (2004) du Conseil de sécurité, le 01/02/2005.

* 103Conseil de sécurité, Résolution 1593 (2005), Doc. Off. NU S/RES/1593 (2005).

Doc en français sur : https://www.un.org/press/fr/2005/CS8351.doc.htm

* 104Ibid.

* 105CPI, Situation au Darfour (Soudan), Le Procureur c. Omar Hassan Ahmad Al Bashir, Chambre préliminaire, Deuxième Décision relative à la requête de l'Accusation aux fins de délivrance d'un mandat d'arrêt. Affaire n° ICC-02/05-01/09, 12/07/2010.

* 106 Ibid.

* 107Article 25 de la Charte des Nations Unies : « Les Membres de l'Organisation conviennent d'accepter et d'appliquer les décisions du Conseil de sécurité conformément à la présente Charte. »

* 108 Décision de la Chambre préliminaire II du 18/09/2013, SITUATION IN DARFUR, SUDAN THE PROSECUTOR V. OMAR HASSAN AHMAD AL BASHIR, Public Document, Decision Regarding Omar Al-Bashir's Potential Travel to the United States of America, N°ICC-02/05-01/09.

Doc en anglais sur : https://www.icc-cpi.int/pages/record.aspx?uri=1646291&ln=fr

* 109 Résolution 1593, Préambule, supra, note 97.

* 110ICC-02/05-01/09, supra, note 102,p 5-6, par 10-11.

* 111Ibid, par 12.

* 112Décision de la Chambre préliminaire I du 13 décembre 2011, SITUATION AU DARFOUR (SOUDAN) LE PROCUREUR c. OMAR HASSAN AHMAD AL BASHIR, Décisionen application de l'article 87(7) du Statut de Rome sur le refus de la République du Tchad d'accéder aux demandes de coopération délivrées par la Cour au sujet de l'arrestation et la remise d'Omar Hassan Ahmad AlBashir,N°ICC-02/05-01/09-140.

Doc officiel : https://www.icc-cpi.int/pages/record.aspx?uri=1287888

* 113Décision de la Chambre préliminaire Idu 13 décembre 2011,SITUATION AU DARFOUR (SOUDAN) LE PROCUREUR c. OMAR HASSAN AHMAD AL BASHIR, Rectificatif à la Décision rendue en application de l'article 87-7 du Statut de Rome relativement au manquement par la République du Malawi à l'obligation d'accéder aux demandes de coopération que lui a adressées la Cour aux fins de l'arrestation et de la remise d'Omar Hassan Ahmad Al Bashir, N°ICC-02/05-01/09-140.

Doc officiel : https://www.icc-cpi.int/Pages/record.aspx?docNo=ICC-02/05-01/09-139-Corr-tFRA

* 114Ibid, p 6, par 8.

* 115Addis-Abeba, le 9 janvier 2012, Union Africaine, en ligne : http://www.au.int/en/

* 116 Ibid.

* 117 Décision de la Chambre préliminaire II du 09/04/2014, SITUATION AU DARFOUR (SOUDAN) LE PROCUREUR c. OMAR HASSAN AHMAD AL BASHIR, Décision relative à la coopération de la République démocratique du Congo concernant l'arrestation et la remise d'Omar Al Bashir à la Cour, N°ICC-02/05-01/09.

Doc officiel : https://www.icc-cpi.int/pages/record.aspx?uri=1767189

* 118ICC-02/05-01/09-187,Notification par l'Accusation d'un éventuel voyage dans l'affaire Le Procureur contre Omar Al Bashir, p4.

* 119ICC-02/05-01/09, supra, note 106, p 18.

* 120CIJ, Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l'Afrique du Sud en Namibie. Avis consultatif, 21/06/1971, par 116.

* 121 Union Africaine, supra, note 109.

* 122Ibid.

* 123CIJ, Mandat d'arrêt du 11 avril 2000, supra, note 25.

* 124Ibid.

* 125Ibid.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote