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La postérité de l'empereur Tibère (XVIIIème- XXIème siècle)


par Thomas Min-Tung
Université du Havre - Master 2 « Cultures, Espaces et Sociétés Urbaines et Portuaires » 2015
  

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C - Tibère et le Christ

I - Tibère et la religion

a. Tibère et l'astrologie

La religion n'a pas pris une importance majeure dans la conception de l'état selon Tibère. En revanche, le prince était adepte d'une croyance orientale, alors répandue dans la haute société romaine de l'époque : l'astrologie. Nous pouvons voir en cet intérêt une manière de s'échapper du présent, pratique tout à fait concevable pour un stoïcien mélancolique. En témoigne Barbara

Levick : Si l'astrologie ne fait pas partie des bagages du stoïcien, l'intérêt de Tibère peut s'expliquer d'une autre manière : par l'échec dans sa recherche d'une consolation adéquate dans la philosophie en ces temps d'humiliation et de peur262

C'est à Rhodes que Tibère se convertit à cette pensée, au moment même où il s'éloigne du monde romain. Nul dieu ne peut lui venir en aide, et les signes deviennent un élément rassurant. Pour lui, fataliste convaincu, le destin est immuable et l'astrologie lui permet de le connaître et d'anticiper les

imprévus de la vie. : Il s'adonna aussi à l'étude de la philosophie, et surtout à l'astrologie, science dans laquelle il parvint à un niveau de compétence égal à celui des spécialistes. Il s'amusait à faire l'horoscope des personnes en se fondant sur l'état civil et, une fois, en voyant s'approcher le jeune Galba, il s'écria : « Voici celui exercera, un jour, le pouvoir sur le monde... » (...) Du haut des villes mortes, dressées sur des rochers battus par la mer, Lindos, Camiros, il a dû s'attarder à contempler ce firmament qu'il croyait immobile ; il en tirait la certitude qu'il existe, derrière la faible épaisseur de la réalité, un ordre, une géométrie cristalline, en vertu de laquelle les êtres occupent chacun une place, dans un tout hiérarchiquement stable. (...) Une certitude qui conduit au fatalisme, au détachement de toute forme de culte : la prière, l'espérance sont refusées à celui qui croit que la volonté des dieux a déjà prédéterminé, dès la

naissance, le destin de chacun, et que ce destin est immuable263.

Dans la série The Caesars, Tibère fait souvent usage de l'astrologie. Elle lui révèle systématiquement de mauvaises nouvelles. Lors de la première occurrence, il cherche à faire son horoscope et celui de Postumus Agrippa ; la prédiction est la même dans les deux cas : ils auront droit à ce qu'ils désirent le moins (accéder au trône pour Tibère, mourir dans l'ombre pour

262. Levick 1999, p. 7

263. Storoni-Mazzolani 1986, p. 81-82

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Postumus). Il en appelle une seconde fois à l'astrologie pour savoir si son plan géopolitique - envoyer Germanicus en Orient accompagné de Pison - était judicieux. Réponse négative dont il aura par la suite la confirmation par la mort du jeune homme.

Il partage cette croyance avec un de ses compagnons de Rhodes, l'un des rares personnages à être resté son ami tout au long de sa vie : Thrasylle. Celui-ci est souvent présenté comme un fidèle confident, lisant dans les astres pour l'aider et le conseiller. Dans le second tome du roman de Franceschini et Lunel, Thrasylle prouve la légitimité de ses croyances en prévoyant l'arrivée d'un enfant d'Orient devant changer la face du monde, et en admettant une certaine curiosité lorsque les rapports de Judée mentionnent le nommé Yeshua. Pour Gregorio Maranon, Thrasylle était un homme providentiel qui, sachant que Tibère ne voudrait pas que ses prétendus ennemis lui survivent, lui prévoyait une longue vie, sauvant ainsi bien des condamnés. Sur ce point, on retrouve une analogie avec le personnage de Shéhérazade264.

Mais les motivations de Tibère importent peu aux yeux de la postérité religieuse. La seule image qui transparaît est celle d'un homme influençable, victime d'une époque de superstitions. Le Romain est

crédule, sous la domination morale des astrologues. Ainsi pense J.-F. Rolland : Les apparences, comme l'on voit, n'étoient pas brillantes, et ne lui promettaient pas l'élévation à laquelle il parvint bientôt après. Il revint pourtant, si nous en croyons Suétone, plein de grandes espérances, fondées principalement sur les prédictions de l'astrologue Thrasyllus. (...) Car Tibère dévoré d'ambition dans sa retraite, et ne perdant point de vue l'Empire, consultoit volontiers ces hommes trompeurs, qui se donnent pour habiles dans la connaissance de l'avenir, et dont tout le savoir ne consiste qu'en ruse et en charlatanerie.265

Les croyances de Tibère sont jugées irrationnelles, voire ridicules. Charles Dezobry grossit le trait pour s'en moquer dans son oeuvre de fiction :

Les Romains ont quantité de pratiques et de croyances superstitieuses, toutes d'autant plus étonnantes qu'elles sont

observées par des gens d'ailleurs habituellement raisonnables. Ainsi, l'un, en portant de la salive avec son doigt derrière son oreille, croit adoucir les inquiétudes de son esprit ; l'autre attendra la pleine lune pour se faire faire les cheveux, persuadé que par-là il évitera la calvitie et les maux de tête, ce qui n'arriverait pas s'il s'avisait de choisir

pour cette opération le décours de la lune. Tibère observe cela rigoureusement.266

L'idée est de démontrer de l'aberration qu'est le paganisme aux yeux des chrétiens et de ses aspects pervers. Superstitieux, les Romains causent des morts évitables, telle celle de Marcellus : quand Musa avait soigné la maladie d'Auguste à l'aide d'eau froide, le remède semblait convenir à toute

264. Maranon 1956, p. 190

265. Rolland 2014, p. 194

266. Dezobry 1846, p. 372

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affection. Croyant son idée géniale, le médecin l'appliqua dans le cas de la maladie du gendre du prince, aggravant davantage la maladie267.

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