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La coutume Kongo face aux conflits fonciers.


par Rhéa Mylord voka
Université Kongo - Licence en droit privé et judiciaire 2019
  

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§2. Modes judiciaires de résolutions de conflits

Les litiges peuvent être de diverses natures, mais principalement ils sont pénaux et civils. De ce fait, ils sont portés devant les juridictions de droit commun. A. Les juridictions compétentes à la matière

Les tribunaux en matière foncière sont ceux de droit commun et qui obéissent aux mêmes règles des compétences. Les compétences en matière civiles sont essentiellement réparties entre le tribunal de paix et le tribunal de grande instance, la cour d'appel et la cour de cassation ne connaissent que les affaires sur recours en annulation.

Ainsi nous allons principalement analyser les compétences civiles et répressives du tribunal de paix et du tribunal de grande instance.

1. Les tribunaux civils

Dans ce point, nous examinerons la compétence matérielle du tribunal de paix (a) et du tribunal de grande instance (b) en matière civile.

a. Le tribunal de paix

De la loi organique n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l'ordre judiciaire à son article 110 alinéa 2 dispose : « Les tribunaux de paix connaissent de toutes les autres constatations susceptibles d'évaluation pour autant que leur valeur ne dépasse pas deux millions cinq cent mille francs congolais ».198

L'analyse de cet alinéa élargit les compétences du tribunal sans citer nommément les types des conflits que celle-ci doit connaître. Contrairement à l'alinéa premier du même article qui limite la compétence dudit tribunal seulement aux constatations qui portent sur les droits de la famille, les libéralités et les conflits fonciers individuels et collectifs régis par la coutume, l'alinéa 2 étend la compétence du tribunal aux litiges dont la valeur en argent ne dépasse pas deux millions cinq cent mille francs congolais. Cet alinéa exclut de la compétence du tribunal de paix, les conflits fonciers régis par le droit écrit, on cite par-là les concessions perpétuelles et ordinaires prévues par la loi foncière de 1973 mais aussi, les terres du domaine public de l'Etat.199Ainsi, au premier degré, les parties portent principalement leur litige

198 Article 110 alinéa2 de loi n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l'ordre judiciaire

199 LUZOLO BAMBI LESSA, Cours d'organisation et compétence judiciaire, UNIKIS, Faculté de droit, 2004-2005, p. 100, inédit

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portant sur un conflit foncier individuel ou collectif devant le tribunal de paix. Dans ce cas, les prétentions peuvent être notamment : violation de la tradition, 200 méconnaissance de l'appartenance coutumière dans le clan.201

b. Le tribunal de grande instance

Le tribunal de grande instance est compétent pour connaître des toutes les constatations ne relevant pas du tribunal de paix.202

Cette disposition inclut toutes les constatations qui ne relèvent pas du tribunal de paix, c'est-à-dire toutes les dispositions dont la valeur excède deux million cinq cent mille francs congolais.

Il convient de signaler que le tribunal de grande instance connaît en appel de toutes les décisions rendues par le tribunal de paix.203

En outre, aux termes de la loi foncière, les décisions du conservateur des titres immobiliers peuvent être attaquées par un recours devant le tribunal de grande instance. Le recours est introduit par voie d'assignation du fonctionnaire dans les formes de la procédure civile.204

En effet, comme dit précédemment, en matière civile, les litiges fonciers coutumiers qui opposent les parties litigantes relèvent au premier degré de la compétence matérielle du tribunal de paix. Et pour trancher ce conflit, le juge fait souvent recours à la coutume pour motiver sa décision à travers des adages kongo.

D'où les adages kongo : - « Nkanu ye mbangi kinkuinka », c'est-à-dire, le procès avec témoins, c'est une chose à laquelle on peut croire ; à partir des témoignages dignes de foi, on peut rendre une justice équitable.205 En ce sens, il a été jugé par le tribunal de grande instance de Mbanza-Ngungu que : « Qu'en coutume mukongo, il est de principe que les conflits claniques ne peuvent mieux se résoudre

200 C'est le cas d'un esclave qui veut s'accaparer de la terre de son maitre

201 C'est le cas d'un enfant à qui sa famille maternelle lui dénie cette qualité d'ayant droit

202 Article 112 de loi n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l'ordre judiciaire

203 Article 114 de loi n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions de l'ordre judiciaire

204 Jackson MUMBERE KINANGA, op.cit., p.48

205Joseph LUBAMBA BIIKOKI, Les proverbes juridiques kongo, Kinshasa, MEDIASPAUL, p.19

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que par les dépositaires des propres membres du clan ou soit par les membres des clans limitrophes ».206

A contrario, il y a le proverbe kongo : « Nkanu ukonda mbangi, ufua », c'est-à-dire, une accusation sans témoins ne vaut rien.

- « Muntu kua sumba ko, mfumu yaku », c'est-à-dire, celui qui n'est pas votre esclave est chef comme vous. En vertu de ce principe, il a été jugé par le Tribunal de paix de Mbanza-Ngungu :

- « Etant donné entre le demandeur et le défendeur, personne n'est esclave de l'autre, personne ne peut par voie de conséquence chasser l'autre du village Kiwonso II ».207

Dans le même sens, ce tribunal a également jugé :

- « Le tribunal estime que n'ayant pas acheté la demanderesse à Sadi, le défendeur doit savoir qu'il est ayant droit de cette terre au même titre que celle-là, considérant surtout le fait que les deux avaient été affranchis par le même ancêtre et personne ne peut faire partir l'autre de la même terre ».208

En application de l'adage : « Mvia sutu kayi zenguanga nzengua zole ko », c'est-à-dire, le pénis n'est jamais circoncis par deux fois ou ce qui est déjà jugé ne peut plus être revu. En vertu de cet adage, il a été jugé par le tribunal de grande instance de Mbanza-Ngungu :

- « Les deux parties de la présente cause ont été en procès dans la cause sous RR 44/1999-RTS 30/2000 autour de la même terre de Kinsunsu et à l'issue de ce procès, par son jugement du 30 août 2000, le tribunal de secteur de Kivulu a reconnu la qualité d'ayant droit de ladite terre à l'actuel défendeur. Ledit jugement, n'ayant fait l'objet d'un quelconque recours, le bénéfice d'une présomption irréfragable et ne peut être contesté : Res judicata pro veritate habetur ».209

Aussi le tribunal de Songongolo a fait application du même adage n

décidant :

206Tribunal de grande instance de Mbanza-Ngungu, R.A. 1514/ 1340 du O2 mai 2003, in Odon NSUMBU KABU, op.cit., p. 27

207Tribunal de paix de Mbanza-Ngungu, R 012, 7 février 2003, in Odon NSUMBU KABU, op.cit., p.98 208Tribunal de paix de Mbanza-Ngungu, R 141, 15 avril 2005, idem

209Tribunal de paix de Mbanza-Ngungu, R 165, 9 février 2005, in Odon NSUMBU KABU, op.cit., p.99

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- « Le tribunal constate qu'effectivement les mêmes parties ont comparu pour les mêmes faits sous le R 096 où le jugement rendu a confirmé le défendeur comme étant du clan Mazinga du village Mpangu. Au lieu d'attaquer cette décision, le demandeur a préféré initier une nouvelle action portant sur le même objet que dans la cause sous R n°096.

En vue d'éviter la contrariété entre les décisions judiciaires, le tribunal de céans confirmera simplement le dispositif de ce premier jugement, car, l'on ne peut pas se prononcer à deux reprises pour les mêmes faits ».210

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand