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Dette du petrocaribe à  l'épreuve des droits économiques et sociaux en Haïti.


par Jean-DonàƒÂ¨s LETANG
Université Catholique de Louvain Saint-Louis-Bruxelles - Master de spécialisation en droits de l'homme 2018
  

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2.2- Incidences de la dette du Petrocaribe sur le droit au logement en Haïti

Au niveau universel, le droit au logement est consacré et garanti par les dispositions de l'article 25 de la DUDH. Le droit au logement a reçu sa véritable consécration juridique au travers des termes de l'article 11 du PIDESC. Au niveau national, la Constitution haïtienne de 1987 consacre le droit au logement dans article 2270. Toutefois en raison de ses ressources limitées, Haïti connait une crise en matière du droit au logement. La dette du Petrocaribe a des effets importants sur le droit au logement en Haïti. La crise de logement en Haïti s'est accentuée depuis le séisme dévastateur du 12 janvier 2010 qui a couté la vie à environ 300 000 personnes. C'est pourquoi, avoir un logement décent en Haïti, constitue un défi majeur pour les ménages71. Un rapport des Nations Unies résume la crise du droit au logement comme suit : « au 30 juin 2014, l'Organisation internationale des migrations (OIM) évaluait le nombre total de personnes déplacées à 103 565 individus, soit 28 143 ménages, situés sur 172 sites. Au cours du semestre, 101 camps ont été fermés, dont 97 grâce aux subventions au loyer allouées à 10 486 familles. Trois camps ont également été fermés après le « départ spontané » de leurs résidents (88 ménages, soit 402 personnes). Un quatrième camp (Camp Kios Pelé) a été fermé début mai après la fuite des déplacés terrorisés par les

65 . Olivier De Schutter, Notes de cours de Systèmes de protection, 2019.

66. Voir à ce sujet : www.loophaiti.com , selon la FAO 5 millions de gens ont faim en Haïti, le 12/08/2019.

67 . Voir à ce sujet Observation générale no 12 du Comité des droits économique, sociaux et culturels, Parag 5, Op. Cit., P. 3.

68 . Jean Ziegler, Destruction massive Géopolitique de la faim, Edit. Seuil, Paris, 2011, P.25.

69 . Jean Ziegler, Idem.

70. Voir Constitution haïtienne au niveau de l'article 22 : L'Etat reconnait le droit de tout citoyen à un logement décent, à l'éducation, à l'alimentation et à la sécurité sociale, p.7.

71 . Olivier De Schutter, Notes de cous du Système de protection, le 30/03/2019.

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activités des groupes criminels dans le camp et le quartier. Au cours des six premiers mois de l'année, l'OIM a noté une tendance qui s'est confirmée d'un trimestre à l'autre. Entre janvier et mars 2014, elle a observé une augmentation de la population dans 78 camps (sur les 243 ouverts à l'époque). 42 des personnes interrogées avaient expliqué leur retour dans ces camps par leur incapacité à payer un loyer (78 pour cent). La deuxième raison citée (9 pour cent) était le fait de retrouver leurs familles vivant dans les camps. Cette tendance à l'augmentation de la population dans certains sites contraste avec la fermeture d'autres camps »72.

Force est de constater cependant que l'Etat haïtien a failli à ses obligations de promotion et de mise d'une politique de logement. Toujours est-il que :« cinq ans après le séisme dévastateur en Haïti, des centaines de milliers de personnes déplacées sont toujours sans solution de logement durable. Les expulsions forcées de personnes déplacées vivant dans des camps ont diminué en 2014, mais les expulsions forcées dans le cadre de projets de reconstruction et d'infrastructure, dont les autorités haïtiennes sont directement responsables, sont en augmentation. Dans ce rapport, Amnesty International appelle les autorités haïtiennes et la communauté internationale à agir plus fermement pour faire du droit à un logement décent une réalité pour tous en Haïti »73. Qui plus est, durant cette même période les dirigeants gaspillent le fonds de Petrocaribe dans des projets bidons et mégalomanes qui n'étaient pas bénéfiques pour les personnes dépourvues de logement.

En matière du droit au logement, l'Etat a décidé de financer deux projets de logement audités par la CSCCA : « intervention en matière d'habitat dans le quartier de Jalousie estimant à un montant de deux millions dollars américains 2 000 000.00 et d'hébergement post tremblement de terre du 12 Janvier 2010 évaluant à un montant de trois millions dollars américains 3 000 000,00 et un montant de 5, 000,000.00 »74. Ces deux projets ont été financés globalement avec les fonds du Petrocaribe. Concernant l'exécution du projet dans le quartier de jalousie, la Cour a constaté que le marché a été octroyé dans le cadre d'un appel d'offre restreint alors que le seuil de passation de marché public pour les appels d'offre restreint est fixé à un montant de 4Ø,ØØØ,ØØØØ.ØØ75 de gourdes au regard des dispositions de loi relative à la passation des marchés publics. Ensuite, la Cour a pu déceler que ce projet ne consiste pas à construire des logements au profit des gens sans abris au lendemain du tremblement terre. Ce projet profitait plutôt à un petit groupe de gens qui se sont permis de détourner les fonds alloués à sa mise en oeuvre. Pourtant, ce projet aurait pu permettre à un nombre important de personnes sans logement d'en être pourvus. En un mot, il est question de détournement des fonds publics dans le cadre de l'exécution dudit projet qui aurait eu pour

72. Voir à ce sujet : rapport semestriel des Nations Unies sur les droits de l'homme en Haïti, Genève, 2014, P.19.

73. Voir à ce sujet : https://www.amnesty.be/IMG/pdf/rapporthaiti20150108fr.pdf, Haïti : 15 minutes pour partir : les violations du droit à un logement décent en Haïti après le tremblement de terre, le 12/08/2019.

74 . Voir CSCCA, Rapport d'audit spécifique de gestion du fonds Petrocaribe, No2, Port-au-Prince, 31 mai 2019, P. 350., disponible sur le site internet : http://www.cscca.gouv.ht/documents/249.pdf, consulté le 12/07/2019.

75 . Article 2 paragraphe 1 de l'arrêté du 25 mai 2012 fixant le seuil de passation des marchés publics. http://www.cscca.gouv.ht/documents/249.pdf, consulté le 12/06/2019.

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mission d'améliorer les conditions d'hébergement des sans-abris après le cataclysme du 12 janvier 2010. En fait, comme la quasi-totalité des projets exécutés avec les fonds du Petrocaribe, ce projet était une vaste opération de corruption et de détournement des fonds publics au détriment de la réalisation du droit fondamental de la population qui est le droit au logement tel qu'il est énoncé dans la constitution haïtienne de 1987 et garanti dans le PIDESC.

De plus, le projet portant sur « l'hébergement post tremblement de terre du 12 janvier 2010 »76. En principe, ce programme consiste à donner des subventions à des citoyens déplacés après le tremblement de terre en vue de les reloger dans le but d'améliorer les conditions d'hébergement. La Cour conclut en effet : « qu'elle n'est pas en mesure de savoir si ce programme avait été géré de façon efficace et économique. En effet, les irrégularités d'ordre administratif notamment par l'absence dans le dossier des éléments probants, fiables et complets nous permettant de conclure que les cinq mille (5000) bénéficiaires étaient le chiffre optimal que l'UCLBP pouvait reloger »77. Hormis les subventions reçues par les bénéficiaires, il faut relater que cette subvention a été donnée aux gens qui se trouvaient dans des camps afin qu'ils aient pu louer un appartement. Après avoir passé une année dans ces appartements, la plupart des bénéficiaires se trouvaient dans l'impérieuse obligation de quitter ces appartements. Car ils n'avaient pas les moyens de prendre en charge de cette location les années qui suivaient. Ce qui a conduit à la prolifération croissante des bidonvilles dans les périphéries de Port-au-Prince, la Capitale d'Haïti. Ce projet de relogement des gens n'a pas eu des impacts positifs escomptés. C'est dans ce sens qu'on peut admettre que la problématique du droit au logement en Haïti est une question insoluble : des milliers de familles vivent sans logement décent. Tout compte fait, le droit au logement doit être une préoccupation pour les autorités haïtiennes.

Avec le programme de Petrocaribe, l'Etat haïtien a raté l'opportunité de relancer le secteur du logement dans le pays. Pourtant, il s'était donné pour mission de reconstruire la ville de Port-au-Prince en expropriant les propriétaires des maisons affectées par le tremblement de terre moyennant indemnisation. De nombreuses maisons ont été rasées et détruite dans cette perspective de reconstruction. Le projet n'est toujours pas suivi d'effet, l'enveloppe budgétaire ayant été voltaïsé. Beaucoup de gens se retrouvent sans logement, la cité administrative et le grand centre commercial prévu dans le cadre de ce projet n'ont toujours pas abouti, exception faite de la reconstruction de quelques bâtiments publics. Toutefois, cette expropriation doit être prévue par loi. Elle doit avoir lieu dans un objectif d'intérêt général. En fin de compte, les personnes concernées par cette situation doivent être compensées à la valeur du marché »78. Cette crise du droit au logement est une violation des droits de l'homme. Elle a entrainé de multiples conséquences comme la bidonvilisation de la capitale.

76 . Voir CSCCA Rapport d'audit spécifique de la gestion des fonds de Petrocaribe, No 2, Op. Cit. P 360, disponible sur le site internet : http://www.cscca.gouv.ht/documents/249.pdf, consulté le 04/05/2019

77 . Voir CSCCA Rapport d'audit spécifique de la gestion du fonds de Petrocaribe, No 2, Op. Cit., P. 362, disponible sur le site internet : http://www.cscca.gouv.ht/documents/249.pdf, consulté le 04/05/2019

78 . Olivier de Schutter, Notes de cours de Système de protection, Bruxelles, Avril 2019.

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