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Le droit au logement a l'épreuve de l'expropriation pour cause d'utilité publique: étude du cas de la population de Ngueli/Tchad


par Abba TABOU
Université de Dschang - Master II 2021
  

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Paragraphe II : Les recommandations à l'endroit de l'état

La première recommandation porte sur la rétrocession du site de Nguéli aux anciens occupants (A), et les autres recommandations sont d'ordre général (B).

A- La rétrocession du site de Nguéli aux anciens occupants

La rétrocession est un droit reconnu aux victimes d'expropriation, de récupérer leur ancien site frappé d'expropriation, sous certaines conditions de fond et de délai. L'article 15 du décret n° 187 sur la limitation des droits fonciers dispose à cet effet que : « Dans le cas où deux ans après la prise de possession, l'administration n'aurait pas commencé l'opération qui a motivé l'expropriation, les expropriés peuvent demander la rétrocession qui est de droit. Cette rétrocession se fait à un prix débattu à l'amiable ou, à défaut, fixé comme en matière d'expropriation ». La difficulté à mettre en oeuvre ce droit par les expropriés tient au fait que le législateur a fixé un délai de cinq ans, à compter de la date de prise de possession, pour exercer cette action98. Dans le cas d'espèce, le délai étant écoulé depuis 2018. Toutefois,

97 Art. R. 423-2 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, France.

98 Art. 15 du décret n° 187.

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le législateur mentionne que la mise en route de l'opération vaut pour les expropriés forclusion s'ils n'ont pas intenté d'action auparavant.

Si l'Etat a revendu le site de Nguéli à la société française Bolloré et a utilisé une partie pour abriter les réfugiés Camerounais, l'on a de sérieuses raisons de croire que le motif invoqué pour exproprier la population a cessé d'être d'utilité publique et par conséquent, ledit site ne représente plus une zone à risque. Si la puissance publique ne peut procéder à la rétrocession des immeubles à toutes les victimes pour cause de prescription du délai fixé, elle doit néanmoins accorder la rétrocession aux 102 victimes de Nguéli-sud et 350 victimes de Nguéli-nord qui, jusqu'à ce jour n'ont pas été recasées. Cela constituerait en même temps une réparation et un acte d'humanisme de la part de l'administration.

B- Les recommandations d'ordre général

Le droit à un logement convenable est protégé sur le plan international par une panoplie d'instruments internationaux des droits de l'homme tel que les deux pactes, la Convention internationale des droits de l'homme, la Convention sur les droits de l'enfant, la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discriminations raciales, etc. Au niveau régional, ce droit est protégé par les articles 14, 16 et 18 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, respectivement sur le droit de propriété, droit à la santé physique et mentale et la protection des familles et les principes et directives relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels, de la Commission Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples. Compte tenu de l'importance que représente le droit au logement pour la protection de la dignité humaine, l'Etat tchadien doit mettre en oeuvre un certain nombre de mesures garantissant à chaque citoyen, y compris les expropriés, ce droit fondamental.

Rappelant d'une part que l'Etat, en vertu de son obligation de respect et de protection est tenu de garantir et de protéger le droit à un logement convenable et d'éviter de procéder à des expulsions forcées, et que la Commission des droits des Nations Unies a reconnu que les expulsions forcées constituaient des atteintes manifestes à toute série de droits fondamentaux et notamment au droit à un logement convenable ; et d'autre part, préoccupé par le fait que depuis quelques années au Tchad, de milliers de personnes sont expulsées de force de leurs domiciles par l'Etat et les acteurs non-étatiques sans procédure régulière, consultations, notification suffisante, indemnisation ni solutions de relogement adaptées, l'Etat doit :

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> Mettre un terme aux expulsions forcées en les interdisant clairement en droit et en pratique ;

> Veiller à ce qu'il ne soit procédé à des expulsions qu'en dernier ressort, après examen de toutes autres solutions pouvant éviter l'expulsion et veiller à ce qu'elle soit conforme aux normes régionales et internationales ;

> Adopter des législations et politiques qui établissent les garanties à fournir avant toute expulsion, fondées sur les principes de base et directives concernant les expulsions et les déplacements liés au développement et qui respectent les engagements régionaux et internationaux en matière de droits humains ;

> Garantir que toutes les victimes d'expulsions forcées disposent de recours utiles et bénéficient du droit de demander des réparations qui peuvent prendre la forme d'une restitution, d'une indemnisation, d'une réadaptation ou d'une réhabilitation et de garanties de non-répétition ;

> Prendre des mesures concrètes afin de garantir la sécurité d'occupation à toutes les personnes qui ne bénéficient pas d'une telle protection actuellement ;

> Enfin, s'assurer que toute nouvelle habitation proposée soit conforme aux normes régionales et internationales sur les logements décents.

CONCLUSION DU CHAPITRE II

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A l'issue de tout ce qui précède, l'on pourrait affirmer sans risque de se tromper que le système juridique tchadien est loin de garantir suffisamment le droit au logement des victimes d'expropriation pour cause d'utilité publique. Dans la pratique, l'application effective des règles existantes en matière d'expropriation reste un véritable défi pour l'administration. C'est dans cette optique que nous avons formulé dans le cadre de ce chapitre, des suggestions et recommandations pour que soit efficacement protégé le droit au logement des expropriés. La prise en compte de ces suggestions par le législateur et l'administration constituerait une avancée significative dans la protection des droits humains, notamment le droit au logement des personnes expropriées.

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