Les passerelles entre économie solidaire et économie collaboratvepar Eugenie Lobe Conservatoire national des arts et métiers - Master Sciences humaines et sociales 2017 |
II. Caractéristiques des initiatives de l'économie solidaireSi l'économie solidaire a impulsé de nouvelles pratiques participatives au sein d'associations et de coopératives, ainsi que des formes d'organisations innovantes, la volonté politique a également ouvert la porte à diverses composantes collaboratives du projet solidaire. Mais au-delà des principes qui la caractérisent, l'économie solidaire se distingue surtout par la mise en oeuvre de ces finalités : hybridation des ressources, débat public, gouvernance et co-construction. I. Hybridation des ressourcesDéfinie comme « l'ensemble des activités contribuant à la démocratisation de l'économie à partir d'engagements citoyens »19, l'économie solidaire articule par un effet d'hybridation les dimensions réciprocitaire, redistributive et marchande de l'économie, souvent réduite à ce dernier aspect. L'un des principes essentiels de l'économie solidaire repose sur l'articulation de quatre fondements économiques: - économie marchande, reposant sur l'économie de marché ; - économie réciprocitaire ; - économie de redistribution, en relation avec l'appareil étatique redistributif ; - économie domestique. Les ressources marchandes participent, au même titre que les ressources non marchandes, et non monétaires, à l'équilibre budgétaire et financier des initiatives de l'économie solidaire. L'aspect réciprocitaire de cette économie est probablement le principe dans lequel la dimension citoyenne s'exprime le mieux, à travers notamment la dimension non monétaire de l'économie et la construction conjointe de l'offre et de la demande (hors circuit marchand et non marchand). L'essence politique de ce principe économique permet ainsi le déploiement de la participation à la fois interne (dispositifs d'expression direct) et externe (débats 19 Fraisse Laurent, « Économie solidaire et démocratisation de l'économie », Hermès, La Revue, 2003/2 (n° 36), p. 137-145. URL : https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2003-2-page-137.html 17 publics), en redéfinissant également d'un point de vue idéologique, et pas seulement opérationnel, les dynamiques de socialisation et le sens donné au travail et à ses différentes déclinaisons (travail salarié, bénévolat...). L'hybridation des ressources s'exprime aussi, dans la recherche d'une pérennité économique, à travers des financements publics (subventions étatiques, régionales ou communales), l'économie solidaire ayant un champ de compétence territorialisé, aux côtés des prestations marchandes. L'engagement politique se vérifie aussi avec l'utilisation du bénévolat comme ressource permettant un certain rééquilibrage budgétaire, le volume de travail bénévole étant quasi identique, dans certaines structures, à celui du travail salarié. Les dimensions politiques et économiques du projet solidaire, sont donc profondément encastrées ce qui se vérifie également à travers le débat public, la gouvernance et la co-construction du projet solidaire, sur les territoires locaux. L'encastrement du politique (plaidoyer politique et défense d'un autre mode d'entreprendre) et de l'économique (recherche d'une pérennité économique à travers l'hybridation des ressources) constitue à la fois un espace de confrontation et de négociation de ces deux champs, mais aussi à travers leurs interactions, un lieu de régulation. |
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