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L'aménagement des droits des actionnaires après l'ordonnance du 24 juin 2004


par Julien Carsantier
Université Paris Dauphine - DEA 122 2005
  

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(2) L'exercice et les aménagements du droit de vote

154. - Dispositions légales impératives. La loi s'intéresse aussi aux actions de préférence bénéficiant du droit de vote et précise que les dispositions légales impératives qui gouvernent le droit de vote leur sont applicables314(*).

Il s'agit là des règles générales applicables à tous les titres de capital : le droit de vote attaché aux actions de capital ou de jouissance est proportionnel à la quotité de capital qu'elles représentent et chaque action donne droit à une voix au moins315(*) ; un droit de vote double peut néanmoins être institué par les statuts dans les conditions fixées par la loi316(*) ; les statuts peuvent, à l'inverse, limiter le nombre de voix dont chaque actionnaire dispose sans distinction de catégorie317(*).

L'article L. 228-11 du Code de commerce renvoie ainsi aux dispositions classiquement applicables aux SA et aux SCA. Le fait que ces sociétés, lorsqu'elles émettent des actions de préférence, doivent continuer à respecter ces prescriptions ne prête donc pas matière à débats. En revanche, l'application de ces textes est en principe écartée lorsque la société émettrice est une SAS318(*) ; certains auteurs en concluent que les dispositions restrictives susvisées ne s'appliqueraient dès lors pas, par exception, lorsque des actions de préférence seraient émises par une SAS319(*). Cette interprétation alternative semble hasardeuse ; elle n'est corrélée par aucun argument de texte320(*). Aussi, il faut considérer que les dispositions légales impératives des articles L. 225-122 à L. 225-125 du Code de commerce sont applicables, outre aux SA et au SCA, également aux SAS lorsque celles-ci émettent des actions de préférence321(*).

Ainsi, au sein des sociétés par actions, nulle action de préférence ne peut être créée avec le bénéfice de droits qui dérogeraient à ces règles, à peine de nullité322(*).

155. - Possibilités de renforcer le droit de vote. Les actions de préférence peuvent bénéficier d'un droit de vote double, dans les conditions prévues aux articles L. 225-123 et L. 225-124 du Code de commerce. Cela ne soulève aucune discussion.

En revanche, l'attribution de droits de vote multiples soulève des questions. La très grande majorité des auteurs estiment qu'il serait illicite de créer des actions de préférence à droit de vote plural323(*), ceci constituant une violation des dispositions légales susvisées. Un auteur324(*) s'interroge toutefois sur cette possibilité ; il écrit : « l'article L. 225-122 précise que chaque action donne droit à un droit de vote au moins. Il est donc possible, à lire ces textes, de prévoir des droits de vote multiples. En cas de vote double, il suffirait de respecter les dispositions de l'article L. 225-123, mais en cas de vote supérieur, aucune règle ne serait imposée ! ». Cette interprétation, bien que méritant réflexion, nous paraît néanmoins hasardeuse.

156. - Possibilités de plafonner le droit de vote. Les statuts peuvent contenir une clause limitant le nombre de voix dont chaque actionnaire dispose dans les assemblées. La doctrine apparaît divisée sur la faculté offerte par les actions de préférence de stipuler un plafonnement des droits de vote.

Le professeur Viandier estime que, puisque l'article L. 228-11 du Code de commerce autorise l'absence de droit de vote, il permet nécessairement de pratiquer un plafonnement qui ne s'appliquerait qu'aux actions de préférence, puisque cela revient à supprimer le droit de vote pour les actions excédant le plafond325(*).

En revanche, d'autres auteurs prennent le parti inverse et concluent à ce que tout plafonnement des droits de vote ne portant que sur des actions de préférence est exclu326(*). Ils doutent en effet de cette possibilité en raison des termes de l'article L. 225-125 du Code de commerce327(*), desquels il faut en déduire que les actions de préférence constituent bien une catégorie d'actions et qu'il ne semble donc pas raisonnable d'envisager ce plafonnement, dans la mesure où il devrait alors s'appliquer à toutes les actions quelle que soit leur catégorie.

157. - Possibilités de limiter le droit de vote à certaines résolutions seulement. Le droit de vote attaché aux actions de préférence peut s'exercer seulement lors de certaines décisions, par exemple dans les assemblées générales ordinaires mais non dans les assemblées générales extraordinaires, ou inversement.

On peut aussi réserver le droit de vote à certaines décisions précisément définies telles l'affectation du résultat, la distribution de réserves, la nomination des membres de l'organe d'administration ou de surveillance, la transformation de la société. Sont dès lors concevables les actions de préférence à l'américaine et à l'anglaise, c'est-à-dire des actions pour lesquelles subsiste toujours un droit de vote, au moins pour l'affectation des résultats et l'attribution de dividendes.

En revanche, dans les assemblées spéciales réunissant chaque catégorie d'actions de préférence, le droit de vote reste, par principe, plein et entier pour chaque actionnaire.

En outre, certaines hypothèses particulières propres au droit des biens ou au droit des contrats doivent être réservées, comme notamment le démembrement de propriété des actions de préférence328(*) ou encore la mise en trust de ces actions.

158. - Impossibilité de créer des actions de préférence auxquelles serait attribué uniquement le droit de vote. Les auteurs s'accordent à penser qu'il n'est pas possible de créer des actions de préférence avec uniquement des prérogatives gouvernementales pour, en quelque sorte, imiter les certificats de droit de vote329(*).

Cette position se justifie par le fait que les actions de préférence sont par nature des titres de capital ; elles rémunèrent donc un apport qui ne saurait être privé de toute rémunération, quelle qu'en soit la forme. A défaut, les conditions seraient réunies pour rendre applicable la prohibition des pactes léonins. En outre, en l'absence de texte, et comme il semble difficile de faire entrer les certificats de droit de vote dans la définition des valeurs mobilières puisqu'ils ne donnent aucun droit d'accès au capital ou sur le patrimoine de la société, il semble qu'en l'état actuel du droit leur création soit tenue pour illicite.

Toutefois, l'ingénierie financière, pour parvenir au même résultat, sera certainement tentée de créer des actions avec un nominal très faible, conférant le même droit de vote que les actions ordinaires330(*).

159. - La suppression, la suspension et l'aménagement du droit de vote, pour un délai déterminé ou déterminable, rendus possibles ou libéralisés par l'ordonnance du 24 juin 2004 offrent ainsi de grandes possibilités. Désormais, sans emprunter le chemin compliqué des actions à dividende prioritaire ou des certificats d'investissement, on peut émettre des titres de capital non-votants.

Le plus souvent, on peut s'attendre à ce que le droit de vote soit taillé sur le patron des droits particuliers à caractère financier, la sauvegarde de ces avantages justifiant qu'un droit de vote soit ou non reconnu, même temporairement. La même observation peut être faite pour les droits d'ordre politique autres que le droit de vote.

(iii) Les droits particuliers d'ordre politique

160. - La formule pour le moins générale de l'article L. 228-11 du Code de commerce - l'octroi de « droits particuliers de toute nature » - ouvre la voie à l'aménagement possible de très nombreux droits331(*), dont certains, sans rechercher l'exhaustivité, viennent aisément à l'esprit (2). La question sensible du droit de veto a cependant soulevé de nombreux débats (1).

* 314 Art. L. 228-11, al. 1er C. com. : « Ces droits sont définis par les statuts dans le respect des dispositions des articles L. 225-10 et L. 225-122 à L. 225-125 ».

* 315 Art. L. 225-122 C. com.

* 316 Art. L. 225-123 et L. 225-124 C. com.

* 317 Art. L. 225-125 C. com.

* 318 Art. L. 227-1 C. com.

* 319 En ce sens, A. GUENGANT, D. DAVODET, P. ENGEL, S. de VENDEUIL et S. LE PAVEC, « Actions de préférence : questions de praticiens », art. préc., p. 1162 ; M. BANDRAC, P. BIROTHEAU, C. DEBIN, J.-P. DOM, S. GAILLET, F. LE ROQUAIS et M. SUPIOT, « Le régime et l'émission des valeurs mobilières après les ordonnances de 2004 », art. préc., p. 12.

* 320 V. G. DE TERNAY, « SAS et actions de préférence : modus operandi », JCP E 2005, 568.

* 321 Sur l'intérêt de l'émission d'actions de préférence par une SAS, v. infra n° 260 et s.

* 322 Art. L. 235-2-1 C. com.

* 323 A. GUENGANT, D. DAVODET, P. ENGEL, S. de VENDEUIL et S. LE PAVEC, « Actions de préférence : questions de praticiens », art. préc., p. 1162 ; M. BANDRAC, P. BIROTHEAU, C. DEBIN, J.-P. DOM, S. GAILLET, F. LE ROQUAIS et M. SUPIOT, « Le régime et l'émission des valeurs mobilières après les ordonnances de 2004 », art. préc., p. 12 ; A. VIANDIER, « Les actions de préférence », art. préc., p. 1531 ; M. COZIAN, A. VIANDIER et F. DEBOISSY, op. cit. n° 521 et n° 533 ; A. COURET et H. LE NABASQUE, Valeurs mobilières - Augmentations de capital - Nouveau régime - Ordonnance des 25 mars et 24 juin 2004, op. préc., n° 505 ; B. MERCADAL et Ph. JANIN, Sociétés commerciales, op. préc. ; G. DE TERNAY, « SAS et actions de préférence : modus operandi », art. préc., n° 8.

* 324 Th. MASSART, « Les actions de préférence et la question du droit de vote » , art. préc., p. 84.

* 325 A. VIANDIER, « Les actions de préférence », art. préc., p. 1531.

* 326 M. BANDRAC, P. BIROTHEAU, C. DEBIN, J.-P. DOM, S. GAILLET, F. LE ROQUAIS et M. SUPIOT, « Le régime et l'émission des valeurs mobilières après les ordonnances de 2004 », art. préc., p. 13 ; A. COURET et H. LE NABASQUE, Valeurs mobilières - Augmentations de capital - Nouveau régime - Ordonnance des 25 mars et 24 juin 2004, op. préc., n° 504-2.

* 327 Art. L. 225-125 C. com. : « Les statuts peuvent limiter le nombre de voix dont chaque actionnaire dispose dans les assemblées, sous la condition que cette limitation soit imposée à toutes les actions sans distinction de catégorie, autres que les actions à dividende prioritaire sans droit de vote ».

* 328 Supra n° 152.

* 329 V. Th. MASSART, « Les actions de préférence et la question du droit de vote » , art. préc., p. 84 ; A. GUENGANT, D. DAVODET, P. ENGEL, S. de VENDEUIL et S. LE PAVEC, « Actions de préférence : questions de praticiens », art. préc., p. 1162.

* 330 Le risque d'une sanction au titre de la prohibition des pactes léonins n'est pas écartée pour autant.

* 331 V. MEDEF, Les actions de préférence : propositions du MEDEF pour une modernisation du droit des valeurs mobilières, rapp. préc. ; ANSA, AFEP et MEDEF, Pour un droit moderne des sociétés, rapp. préc. 

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote