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L'interdiction de la fusion General Electric / Honeywell


par - Jan Wasilewski Aude Rousselot
Science Po
Traductions: en Original: fr Source:

Disponible en mode multipage

Aude Rousselot et Jan Wasilewski

Cours de Lobbying Européen

de M. Dominique Jacomet

Sciences-Po, Juin 2003

L'interdiction de la fusion

General Electric / Honeywell

du 20 octobre 2000 au 20 novembre 2001

Le cas de la fusion interdite entre General Electric et Honeywell a été choisi car c'est un sujet qui permet une analyse opérationnelle complète du point de vue de notre enseignement, étant à la fois le cas d'une stratégie d'influence qui a échoué, et l'occasion d'une comparaison sur les méthodes de lobbying qui s'exercent d'un côté et de l'autre de l'Atlantique.

Méthodologie : cette analyse s'appuie certes essentiellement une revue de presse, mais aussi sur des publications académiques et des notes internes à des Cabinets de Relations Publiques. Pour éviter autant que possible le biais de l'analyse univoque d'un fait, elle s'est aussi souvent que possible fondée sur au moins deux sources (ainsi des frictions révélées lors du Salon de l'Aéronautique du Bourget, décryptées par Le Monde, le Financial Times et la BBC, ou de la leçon de lobbying à l'Européenne présentée par Allen&Overy, Crowell&Moring et l'European Association of Communication Agencies)

Remerciements : à Messieurs Dahan et Jacomet qui nous ont fourni les éléments de définition et d'appréciation du cas, en espérant que nous aurons su les utiliser à bon escient dans cette brève analyse.

Introduction

Pourquoi la fusion des deux entreprises américaines de matériel aéronautique General Electric et Honeywell, si brillamment annoncée le 20 octobre 2000 et entérinée par le Department of Justice le 2 mai 2001, a-t-elle finalement abouti à la déclaration d'abandon de la fusion par les deux partenaires le 2 octobre 2001 ?

La réponse tient en un fait : les activités de ce nouveau consortium s'exerçaient en partie en Europe, le soumettant à l'autorité de la Commission Européenne ; et en deux points, l'un juridique et l'autre politique :

- la fusion telle qu'acceptée par l'autorité américaine était incompatible avec les exigences de la législation européenne

- la stratégie de General Electric et de Honeywell1(*), lors des négociations de mise en conformité de la fusion avec les lois antitrust de l'Union Européenne, a été largement inadéquate.

Il est légitime de s'étonner a priori de l'échec d'une stratégie d'influence de la part d'une entreprise dotée de tous les moyens nécessaires pour mettre en place un schéma rationnel et raisonnable d'argumentation, et qui plus est basée aux Etats-Unis, la patrie du lobbying. Cet échec révèlerait pourtant, tout simplement, une différence de culture de négociation et d'influence de ce côté et de l'autre de l'Atlantique.

Il est donc possible de faire une hypothèse selon laquelle,

I. au-delà d'un introuvable compromis entre GE/H et la Commission sur les questions d'antitrust,

II. les tentatives multiples d'influencer la Commission ont contribué à instaurer une atmosphère de passage en force qui n'a pas joué en leur faveur ;

III. et de conclure sur ce cas comme révélateur de certaines incompatibilités de traditions et de méthodes entre les Etats-Unis et l'Union Européenne.

1. L'introuvable compromis entre GE/H et la commission sur les questions d'antitrust

1.1. Présentation des acteurs

1.1.1. Honeywell et Michael Bonsignore

Honeywell Inc. emploie plus de 100 000 personnes et fabrique entre autres des produits pour l'industrie aéronautique, ainsi que des systèmes d'automation et des systèmes de contrôle industriels. Elle est renommée pour la qualité de ses composants avioniques et la vitalité de son département recherche et Développement. Michael Bonsignore en est le PDG.

1.1.2. General Electric et Jack Welch

General Electric Co. est la plus grosse entreprise du monde du point de vue du capital et du nombre d'implantations à l'étranger, elle est entre autres le principal fabricant de moteurs d'avions au monde. Elle emploie plus de 197 000 ouvriers et Jack Welch en est le PDG depuis 1980. Il est connu pour son volontarisme et son intransigeance en affaires : il a été surnommé «Neutron Jack»pour les plans de licenciements massifs qu'il a organisé pour assainir ses filiales. C'est à lui que GE doit son classement d'entreprise bénéficiant de la plus forte confiance de ses actionnaires, et la haine personnelle la plus tenace de la part des syndicats.

H est le plus gros achat de GE depuis l'arrivée de Welch à la tête de la compagnie : elle représente l'équivalent de la moitié de la somme de tous les achats depuis 1980. Cependant GE a l'habitude de l'assimilation de sociétés entières : elle a ainsi absorbé Allied Signal l'année précédente. A l'occasion de sa fusion avec H, GE s'est trouvé en opposition avec son principal concurrent domestique, United Technologies : en fait, J. Welch a déjà fait faire une étude interne sur la possibilité et l'intérêt d'une fusion avec Honeywell, mais United Technologies est sur le point de signer avec Honeywell pour une fusion à 40 milliards de dollars quand l'affaire est révélée dans les journaux du matin du 20 octobre 2000. Jack Welch apprend la nouvelle dans sa voiture, il convainc les membres du conseil d'administration par téléphone et faxe une proposition manuscrite de 42 milliards à Michael Bonsignore dès son arrivée au siège de GE. Deux jours plus tard, l'accord sur la fusion-acquisition par échange de parts est trouvé et J. Welch déclare en conférence de presse que d'une part « this is the clearest deal you'll ever see from a regulatory standpoint » et que d'autre part l'opération devrait être terminée pour février 2001. Cette dernière opération est un défi pour J. Welch, il y pensait depuis longtemps et elle se déroule à quelques mois de son départ prévu à la retraite ; on ne sait si c'est à la demande des membres du Conseil d'Administration ou à sa propre demande, mais il a été décidé que J. Welch resterait à son poste jusqu'à la fin de la transaction, ce qui signale que l'opération était considérée comme cruciale et délicate par l'entreprise.

L'implantation européenne de GE est forte : en 2000, la compagnie y a réalisé 25 milliards de ses 130 milliards de chiffre d'affaires, et elle y emploie 85 000 personnes.

> GE et H ont donc deux PDG à fortes personnalités ; mais l'instance antitrust de l'Union Européenne à laquelle leur projet se heurte est dirigée elle aussi dirigée par deux fortes personnalités, à savoir Mario Monti pour la Commission, doublé d'Alex Schaub pour la DG Concurrence.

1.2. La fusion GE/H

1.2.1. Des enjeux forts et une décision enthousiaste pour la fusion

Autant J. Welch que M. Bonsignore s'expriment sur les enjeux forts qui ont présidé à la décision de fusion : le but étant le renforcement de l'efficience des deux entreprises, elles espèrent prendre des parts de marché par l'intégration verticale et horizontale de leurs activités sous la forme d'économies de rendement et d'échelles. En effet, elles couvrent 100 pays à elles deux, et beaucoup de leurs structures et clientèles y sont concurrentes ou redondantes. En proposant à leurs clients de packs de produits, par exemple avioniques de H et moteurs de GE, à un prix incomparablement compétitif, le nouveau consortium est certain d'élargir ses parts de marché. C'est ce «bundling', ou vente de biens/services en «fagots» qui va être pointé par la Commission comme anticoncurrentiel.

Pour Honeywell, la fusion avec une multinationale de la taille de GE devrait assurer le renforcement de sa position dans ses niches technologiques et une marge de manoeuvre beaucoup plus large du point de vue des investissements de production ainsi que de recherche et développement.

Pour GE, il s'agit aussi de rééquilibrer l'entreprise GE avec le développement d'une branche industrielle qui viendrait contrebalancer l'hypertrophie de la part du GECAS2(*) dans son bilan consolidé (GECAS en représente 42%, or on sait que l'activité financière est bien plus volatile que la production industrielle).

L'importance financière d'une fusion rapide se révèle assez vite : Honeywell a voulu anticiper les procédures de négociation et a cédé l'équivalent de 10% de son chiffre d'affaires en activités, ce qui devient un réel handicap et manque à gagner quand les procédures se mettent à perdurer.

Enfin, la Bourse réagit très violemment aux différentes phases de l'affaire : à l'annonce de la fusion en octobre, les cours des deux compagnies avaient été en légère hausse ; au fur et à mesure que le compromis tarde à sa dégager, leurs cours baissent de plus en plus, et le 14 juin, l'indice Dow Jones des sociétés industrielles qui font le plus de profits fait une chute de plus de 100 points dans la première heure d'ouverture de la bourse dont la chute des actions de Honeywell et de GE représente plus du cinquième.

1.2.2. Une procédure nord-américaine sans heurts

Suite à l'accord sur le projet de fusion le 22 octobre, GE et H ont contacté les autorités antitrust américaine et canadienne à la mi-novembre et mis en place un calendrier de négociation. (d'ailleurs, il semble que les premiers contacts avec la Commission datent aussi de cette époque, même si il est impossible de déterminer de manière certaine si c'est GE/H qui a établi le contact ou des concurrents de GE/H qui ont commencé à éveiller l'attention de l'instance européenne).

Conformément à la procédure de notification des fusions acquisitions déterminée par la loi Hart Scott-Rodino de 1976, le formulaire HSO3(*) est déposé par le consortium à la Antitrust Division du Department of Justice et à la Federal Trade Commission le 15 novembre 2000.

L'autorisation américaine intervient le 2 mai 2001, sous réserve de vente d'une société construisant des moteurs d'hélicoptères par GE, sans aucune référence aux discussions qui ont commencé à Bruxelles depuis le 5 février et ont déjà commencé à se dégrader ; la décision du Canadian Competition Bureau de ne pas s'opposer à la fusion est annoncée le 16 mai (sans aucun égard pour le fait que la phase d'investigation approfondie a été lancée de l'autre côté de l'Atlantique). A ce stade, les projets de réorganisation managériales et de restructurations techniques commencent à être lancés entre les deux partenaires.

Il est cependant possible qu'une investigation ait été lancée aux Etats-Unis, car la réglementation est la suivante : en cas de non-objection positive de la part de FTC ou du DoJ, la transaction est automatiquement validée 30 jours après la notification ; or l'autorisation est intervenue presque 5 mois après, ce qui implique qu'une «second request for additional information», à peu près l'équivalent de la procédure d'investigation approfondie, a dû être lancée, mais qu'elle n'a pas abouti à l'identification d'éléments entrant en violation des lois antitrust.

> A l'inverse de cette procédure quasiment sans heurts en Amérique du Nord, qui a plus tenu de l'enregistrement qu'autre chose, les débuts de la procédure européenne apparaissent clairement laborieux.

1.3. Les négociations de mise en conformité

1.3.1. Les objections de la Commission

Rappelons que la Commission a autorité d'examen sur toute fusion-acquisition concernant un chiffre d'affaire global de plus de 4,25 milliards de dollars, ou réalisant plus de 225 millions de dollars de chiffre d'affaires sur le territoire de l'Union Européenne. Or, GE avait réalisé en 2000 25 milliards de dollars de chiffre d'affaires en Europe, ce qui soumet indubitablement la fusion à la régulation de la Commission en lui donnant la `dimension communautaire » consacrée.

Suite à l'enregistrement de la notification par formulaire CO4(*) auprès de la DG Concurrence le 5 février 5 février 2001, toutes les parties prenantes se rencontrent à Bruxelles pour la mise en place du calendrier des négociations. A 18h30 GE et H apprennent avec un certain étonnement que la Commission va ouvrir une procédure d'investigation approfondie.

Cette dernière débute officiellement le 1er mars et devrait donc se conclure 4 mois plus tard, le 1er juillet.

La Commission a pour but, à partir de ce moment-là, de s'investir dans une procédure de mise en conformité de la fusion avec les exigences de la réglementation européenne, pour en faire disparaître les éléments de position dominante et de bundling, considérés comme anticoncurrentiels. C'est ainsi que dans son premier document d'objections de 155 pages remis aux deux compagnies le 8 mai 2001, elle formule comme demandes principales

1. la réduction des «horizontal overlaps» sur les composants avioniques et les moteurs d'avions privés petit-courrier ou «regional jets». Cette expression désigne des chevauchements dans la production de biens, c'est à dire que le fait que GE et H produisent les mêmes composants avioniques leur assurerait, une fois la fusion faite, une position dominante sur le marché des composants avioniques.

2. et la disparition du «conglomerate effect», aussi connu sous le nom de théorie du portefeuille (cf. 1.2.1).

Ces demandes de modifications sont à la fois structurelles et managériales : il faudrait se séparer de certaines activités d'un point de vue juridique et comptable, et en vendre complètement certaines autres, pour garantir que la concurrence puisse subsister dans les deux domaines principalement incriminés des composants et des moteurs.

En fait, au fur et à mesure des discussions, un troisième domaine se révèle être le plus difficile à négocier : celui des effets verticaux de l'existence de GECAS aux côtés du marché de Honeywell sur les composants avioniques. En se combinant,

1. General Electric Capital Aviation Service, filiale de leasing et de financement d'avions, permettait de faire pression sur les locataires d'avions,

2. et les composants de Honeywell permettaient une influence sur les autres loueurs/financeurs d'avions,

ce qui prenait toute la concurrence du haut en bas de la chaîne en tenaille, et était visiblement une situation d'abus de position dominante. (remarque : GE produisait certes des composants avioniques, mais pas suffisamment pour risquer d'être accusé de position dominante en les combinant en bundles de biens/services avec son activité de leasing).

1.3.2. Des propositions insuffisantes

GE/H s'est rapidement déclaré surpris du niveau des exigences de la Commission, ne s'étant préparé qu'à présenter à nouveau le dossier constitué pour les instances américaine et canadienne. Une argumentation complète a donc dû être élaborée dans l'urgence par les 17 lawyers et lobbyistes du Cabinet Skadden, Arps, Slate, Meagher&Flom qui s'est chargé de compléter la ressource interne de GE (Department of Public Relations Services de GE dirigé par Joyce Hergenhan) pour ces négociations. (GE impose apparemment à H de mener seul la campagne de négociation, même si cette coalition est stable).

Ce retard au départ va finalement rester comme une forme permanente de «défense» de GE/H face aux demandes de la Commission et non une anticipation qui aurait sans doute été plus productive et moins exaspérée.

Le 29 mai 2001, toutes les parties prenantes se rencontrent à Bruxelles pour 2 jours d'auditions. Selon quelques observateurs, GE/H se fonde dans une contr'argumentation économique pour défendre sa position, contestant en particulier le bundling (effet portefeuille) en envoyant des experts économistes renommés (dont le Pr. Shapiro de Berkeley), ne pouvant nier les effets horizontaux de la fusion.

La Commission ayant maintenu son interprétation de l'effet portefeuille, J. Welch propose le 12 juin de vendre la branche aérospatiale d'Honeywell estimé à 2,2 milliards de dollars sans compter la branche de production de moteurs d'hélicoptères. C'est à cette époque que la question du GECAS émerge comme obstacle majeur, et J. Welch propose immédiatement d'en séparer les activités en une entité juridique indépendante de GE, - tout en restant opposé à la demande de M. Monti d'effectuer un transfert en bourse du capital du GECAS dont GE veut absolument rester propriétaire. C'est visiblement insuffisant face aux demandes de la Commission.

Après une semaine de négociations, J. Welch flanqué de sept assistants rencontre Monti deux fois dans la journée du 13 juin 2001 sans parvenir à trouver de compromis. Monti veut que GE vende 20% du GECAS à un concurrent, pour J. Welch c'est hors de question : il est soutenu dans son raisonnement par ses lawyers et économistes qui arguent que « it would bee like asking a Ford CEO to drive a Toyota for 20% of his time » (Barry Nalebuff, économiste de Yale). A cet instant de l'échec de la stratégie économiste, on sent que la fusion est sur le point d'être avortée.

Le 17 juin, date légale limite pour déposer des propositions, GE propose des concessions juridiques que la Commission juge inadéquates et insuffisantes, notamment en l'absence de propositions sur le GECAS. Cette fois Monti exige la cession de la totalité des activités avioniques, qui représentent 3,6 milliards de dollars de chiffre d'affaire et la moitié des bénéfices de Honeywell.

Le 27 juin 2001, soit 2 semaines après la date limite légale pour déposer des propositions, GE propose encore de nouvelles concessions juridiques très précises pour se détacher progressivement de GECAS et au profit d'actionnaires choisis, que la Commission accepte d'examiner mais finit par déclarer comme toujours insuffisantes.

Durant toute cette période, J. Welch et M. Bonsignore contestent médiatiquement l'analyse et les conclusions de la Commission sur la théorie du portefeuille, dénoncent l'instabilité (réelle) et la croissance (réelle) des exigences de la Commission5(*), et sa partialité : le 14 juin GE émet ainsi un communiqué de presse qui suppose que la véritable raison de l'opposition à la fusion est la défense des intérêts des entreprises européennes.

> Les négociations ont donc été laborieuses, et les positions inconciliables ; le rejet technique était inévitable, et il est intervenu le 3 juillet 2001 lors d'un vote en session plénière de la Commission.

A l'issue de l'examen de cette partie juridique de l'interdiction de la fusion, où le compromis n'a pu être trouvé entre la Commission et GE/H sur les questions d'antitrust malgré une stratégie juridique et économiste importante, on peut s'interroger sur cette atmosphère en dérive progressive qui semble avoir été l'arrière-plan de ces négociations difficiles. On peut y lire toute la stratégie politique de GE/H, et les probables raisons de son échec retentissant.

2. La forte campagne d'influence mise en place par GE/H

2.1. Un contexte formel et conjoncturel sous-évalué par le consortium américain ?

2.1.1 Les concurrents dans le secteur aéronautique

Les principaux concurrents de GE et H sont les motoristes anglais Rolls Royce et français Snecma, Rockwell et Thales (ancien Thomson CSF) pour les produits avioniques, Pratt and Whitney (filiale de United Technologies) dans les avions.

Il semble que ces différentes firmes se soient organisées assez tôt pour contrer la fusion : Enrique Gonzalez-Diaz, délégué à la Commission au dossier GE/H, aurait été contacté dès décembre 2000 par des compagnies prêtes à lui fournir des éléments susceptibles d'entraîner une « deuxième phase » (procédure d'investigation approfondie) - même si le fonctionnaire les accusés sur le moment de « venir couiner » auprès de la Commission, il ne les a pas pour autant évincés de la liste des entreprises entendues lors de la semaine d'auditions organisée du 15 au 20 mai 2001.

Par ailleurs, ces compagnies se seraient même partagé le travail : le Christian Science Monitor comme le Legal Times attribuent très précisément à United Technologies et à ses lobbyistes du cabinet Cleary l'apport des preuves sur les effets néfastes de GECAS, et à Rolls-Royce et ses conseillers de Freshfields celle sur le bundling et les packages qui portent atteinte à la concurentialité du secteur. Rockwell International aurait aussi joué son rôle dans l'expertise technique contre GE/H, profitant du fait que les effectifs limités de la Commission6(*) la poussent à accepter les expertises techniques volontaires.

2.1.2. Le secteur aéronautique dans sa globalité

Non seulement l'industrie aéronautique est une arène privilégiée des conflits commerciaux entre les Etats-Unis et l'Europe au point de vue politique et diplomatique7(*), ce qui a été un véritable aléa thématique malheureux pour l'affaire, mais encore les pressions de branche se sont-elles faites fermement sentir autour de thèmes annexes à l'affaire GE/H à cette époque.

L'exemple des événements du Salon aéronautique du Bourget du 14 au 18 juin 2001 en sont sans doute le meilleur exemple. D'une part EADS en profite pour affirmer publiquement n'avoir pas témoigné contre la fusion. D'autre part Airbus, le principal fabricant d'avion européen, annonce à cette occasion qu'il a battu Boeing, son concurrent américain, en s'assurant de la part de ILFC, une société de leasing située aux Etats-Unis, la commande (9,4 milliards de dollars) de cent onze avions, ainsi qu'une promesse d'acheter cinq avions géants A380. La branche militaire d'Airbus obtient pour sa part, des ministres de la défense européens, un engagement écrit selon lequel ils achèteront deux cent douze avions A400M, le premier gros porteur militaire produit depuis bien des années par l'Europe. A la suite de ces déclarations, le vice-président de Boeing, Harry Stonecipher, accuse Airbus de forcer la main de la Commission en s'opposant à la fusion entre les deux groupes américains. Il avertit, dans une interview au journal Le Monde, que le conflit pourrait s'étendre dans l'arène commerciale. «Les Etats-Unis ont approuvé cette fusion. Si l'Europe la refuse, que se passera-t-il ? Nous ne sommes pas exactement des amis, non ?» dit il. Il qualifie l'intention de l'Europe d'acquérir plus de deux cents avions cargos A400M «d'absurde» économiquement, l'Amérique pouvant produire ces avions à meilleur marché.

On a pu relever d'autres stratégies diverses de pression de branche : ainsi les PDGs de Rolls-Royce et Thales Avionics se sont-ils fréquemment exprimés publiquement quant à des doutes sur l'honnêteté de la fusion et les pressions que GE exerçait sur la concurrence ; un congrès du secteur MRO (maintenance, repair and overhaul) a lieu en avril 2001 à Dallas et Delta Airlines et Air Canada ne manquent pas d'y exprimer leurs réserves, et caetera.

> Un glissement du débat s'opère ainsi des deux parties prenantes de la négociation (GE/H contre Commission) vers les sphères industrielles et politiques qui se positionnent indirectement pour la défense des positions. Chacune a sensibilisé les acteurs industriels continentaux de la branche concernée : les Américains contre les Européens, même hors-marché direct, en une forme de pression politique informelle et polymorphe qui brouille le débat et tente de maquiller ce qui n'en était pas moins une volonté d'influence en élargissant les critiques bien au-delà des implications directes de l'affaire.

2.1.3. La politique intérieure américaine

L'administration républicaine, arrivée au DoJ récemment avec l'élection de G. W. Bush, est réputée pour être a priori plus `souple' et plus encline à soutenir le Big Business8(*), que l'administration Clinton précédente avec qui la Commission s'était bien entendue (ce qui s'était en particulier illustré par un lancement en parallèle des investigations contre Microsoft).

Par ailleurs, les équipes américaines ont été nommées très tardivement par rapport à l'affaire, ce qui n'a pas facilité la coopération avec la Commission. Ainsi, Charles James n'est confirmé et n'est donc enfin effectivement en fonctions d'Attorney Général Délégué à l'Antitrust que le 14 juin 2001, c'est à dire une fois que les négociations se sont déjà crispée sur la question du GECAS. Nombre de commentateurs s'attardent sur l'impossibilité du dialogue qui aurait fortement obéré l'ouverture et la possibilité du compromis : Mario Monti lui-même a déploré a posteriori de ne pas avoir eu d'interlocuteur institutionnel avec qui échanger sur l'affaire.

2.1.4. La tendance dans les jugements de la Commission

En prolongement du principe selon lequel une position dominante est néfaste, la Commission se fondait de plus en plus sur la nouvelle théorie du portefeuille ou du conglomérat ; ceci était notamment relevé par certains think-tanks économistes qui signalaient que la théorie du portefeuille diffère de la perception classique de la dominance formée par concentration d'acteurs sur un même marché, la transformant en une approche plus stricte des deux principes fondateurs de l'action de la Commission :

1. principe d'intolérance face aux positions dominantes, voire par constitution d'un conglomérat d'activités voisines

2. et principe d'élargissement progressif des raisonnements de la DG et de l'autorité de la Commission par constitution de précédents juridiques et apprentissages scientifiques9(*).

Cette tendance se concrétisera dans la décision d'interdire GE/H et sera à nouveau visible dans la décision ultérieure d'interdiction de la fusion TetraLaval/Sidel du 30 octobre 2001. Cette dernière opération a été jugée néfaste à la concurrence au sein du marché commun en ce qu'elle aurait permis à la nouvelle entité de bénéficier de la position estimée dominante de TetraLaval sur le marché de l'emballage en carton pour pénétrer fortement le marché voisin de l'emballage en plastique. Soit tout à fait le même problème que GE/H, où la Commission a estimé que l'opération aurait permis à la nouvelle entité de vendre un mix des produits GE (moteurs d'avions) et Honeywell (systèmes d'avionique) à un prix décoté par rapport à des ventes séparées des deux produits, de bénéficier de la force de frappe financière de GE Capital, un des principaux acteurs de leasing aéronautique, pour imposer les produits GE/Honeywell et de rendre les produits des deux compagnies uniquement disponibles lorsque vendus ensemble.

> C'est donc cette double pression conjoncturelle, totalement extérieure à l'affaire proprement dite, que les lobbyistes et lawyers de GE/H ont peut-être insuffisamment jaugée ; et, à l'instar de la place beaucoup plus importante laissée à la concurrence dans les procédures européennes, ils ont peut-être trop compté sur le « magic bullet10(*) » de l'intervention politique pure pour sauver leur affaire.

2.2. La stratégie de GE/H : imposer sa puissance

2.2.1. Retards et légèreté face à la procédure

On a vu que le formulaire est déposé tardivement auprès de la DG, le 5 février 2001, alors que son équivalent a été déposé au DoJ le 15 novembre 2000. C'est d'autant plus incompréhensible et inacceptable que GE a eu au mojns déjà une fois l'exprérience des procédures européennes, à l'occasionde l'acquisition de la filiale Engine Alliance de Pratt&Whitneyen 1996.

Par ailleurs, J. Welch est revenu à Bruxelles avec de nouvelles propositions deux semaines après la date limite, instituant de fait un «stop-the-clock» qui n'avait pas été annoncé par la Commission.

2.2.2. Contestations scientifiques et académiques

GE s'est offert temporairement les services d'économistes renommés pour aller contester les conclusions de l'analyse de la Commission en tant qu'experts, en particulier le Professeur Shapiro de Berkeley qui s'est exprimé de manière à la fois laconique et polémique à la sortie de l'audition sur l'attitude de la Commission : « No ill motives, but poor legal reasoning ».

2.2.3. Contestations personnelles et politiques

Il est connu que GE alloue d'importantes sommes aux hommes politiques sous la forme de contributions légales à leurs campagnes électorales : 960 000 $ en 1999 ; et que par ailleurs la compagnie exerce un lobbying extrêmement actif, qui lui a coûté 7,28 millions de dollars la même année simplement pour l'échelon fédéral.

Il n'est alors pas étonnant qu'en une forme de retour sur investissement en capital politique, nombre de personnalités se soient exprimées sur le sujet ou rendues à Bruxelles pour soutenir la fusion : quelques exemple suffisent :

- une haut-fonctionnaire du DoJ, Deborah P. Herman, vient à Bruxelles le 7 juin pour présenter ce qu'elle appelle la « position américaine » en un lapsus savoureux qui laisse entrevoir l'agrégation des intérêts de GE et du gouvernement des Etats-Unis.

- le même jour, l'administration américaine soulève également l'affaire GE-Honeywell lors d'une rencontre informelle avec les dirigeants européens lors du Sommet de Göteborg en Suède.

- Robert Zoellick, le Représentant au Commerce, a régulièrement appelé au «traitement équitable» du cas.

- enfin, le Président Bush lui-même : le 18 juin au soir, alors que tout semblait perdu, J. Welch avait appelé Andrew Card, le Chef de Cabinet de la Maison Blanche, pour lui demander « whatever help you can give us ». Le lendemain, G.W.Bush interrompait son tour de Pologne pour se déclarer « concerné » par les difficultés que faisait la Commission à la fusion.

- le 3 juillet  Paul O'Neill, secrétaire au Trésor américain accuse de «  reaching into the affairs of other countries by blocking a deal between two US-based companies ».

- le sénateur républicain Phil Gramm déclare sur la chaîne CNBC : «Je pense qu'il s'agit là d'une chose inquiétante, une chose à laquelle nous devons prêter attention. Le problème de savoir quel pouvoir l'Union européenne doit avoir quand elle examine le cas de deux sociétés qui sont fondamentalement américaines est tout à fait réel.»

2.2.4. Contestations diplomatiques et commerciales 

A la suite de cette déclaration du Sénateur Phil Gramm, deux membres de la Sous-Commission Anti-Trust du Sénat américain ont d'ailleurs mené une étude sur les raisons qui ont fait que les instances anti-trust américaine et européenne ont abouti à des conclusions si différentes ; ils y affirment que la divergence entre les positions européennes et américaines «empêcherait le développement de marchés libres et ouverts et bloquerait les efforts d'expansion des sociétés américaines sur marché mondial.» 

Le 14 juin 2001, GE publie un communiqué de presse qui affirme que la véritable raison de l'opposition à la fusion est la défense des intérêts des entreprises européennes.

Le Financial Times rapporte le 26 juin 2001 que des pressions exercées directement sur les Etats-membres commencent à avoir des effets : «Cracks appear in EU's unanimity against GE deal», au point de «raising the possibility that negociations could be reopened » : il s'agirait en particulier de la Grande Bretagne et de la France, l'Office pour le Commerce Equitable anglais se demandant si les arguments de la Commission sont « suitably weightly ? ».

2.2.5. Les réponses de la Commission 

La pression a été constante de part et d'autre, la Commission répondant aux menaces par la révélation scandalisée de ces pressions.

Ainsi de la déclaration de M. Monti le 18 juin 2001 à Lubljana, à la suite de l'intervention de G.W.Bush. « Je déplore les tentatives visant à désinformer le public et à provoquer une intervention politique. De telles façons d'agir sont totalement déplacées dans une affaire d'entente et n'ont pas la moindre incidence sur la Commission. Il s'agit d'une question juridique et économique et non politique».

Ou encore, afin de réaffirmer la compétence et la légitimité de la Commission par rapport au 4064/89, M. Monti a déclaré le 20 juin 2001 « la nationalité des compagnies et les considérations poltiiques n'ont jamais joué et ne joueront jamais de rôle dans l'examen des fusions. Monit a fait remarquer à cette même occasion que GE/H était le 394è cas examiné par la Commission impliquant au moins un partenaire américain depuis 1989, et que seulement quatre avaient été interdites formellement, et que le seul cas de fusion américano-américain à avoir été interdit par la Commission était MCI Worldcom/Sprint, qui avait été interdit aussi par le DoJ. Par ailleurs, la Commission a bloqué sur les mêmes critères la fusion Volvo/Scania en 1997 ; et en enfin plusieurs entreprises américaines ont porté plainte et ont participé activement à l'audition organisée par la Commission à la fin du mois de mai - alors que l'absence de témoignages publics volontaires de la part des clients et fournisseurs de GE11(*) inclinait à laisser penser que GE et le gouvernement américain pouvait exercer des pressions sur eux.

Ces rappels à l'ordre signalent qu'elle refuse toute contestation quant à son raisonnement économique, son rôle d'instance antitrust ou l'indépendance de l'Union Européenne.

2.3. Remarque : l'évolution du partenariat GE/H

Il doit être ajouté à cette description des stratégies politique et médiatique menée par GE une remarque importante sur l'évolution du partenariat GE/H. Il semble qu'au fur et à mesure que la situation se dégradait, GE ait pris conscience du fait que la fusion n'était finalement pas si souhaitable, pour la raison suivante : la situation économique s'est dégradée depuis octobre 2000 où GE a décidé d'acheter H et il ne serait pas mécontent de se rétracter ; en outre, toute la procédure a déjà coûté fort cher à GE qui a monopolisé l'organisation du lobbying dès novembre 2000 et voit ses dépenses atteindre des coûts échoués non négligeables ; enfin si le deal avortait apparemment H perdrait bien plus que GE, car les opérations de H sont ébranlées sur le long terme et sans possibilité de rééquilibre ni de transferts de capitaux, H étant une entreprise industrielle fonctionnant à flux plus tendus.

D'où sans doute une exaspération de J. Welch qui repousse avec humeur la dernière proposition pourtant quasi-suicidaire au point de vue managérial de M. Bonsignore le 29 juin 2001 : il propose à J. Welch de baisser le prix d'achat12(*) de H et d'accorder plus à la Commission ; mais J. Welch répond que « the new deal you propose cuts the heart out of the strategic rationale of our deal ; it makes no sense for our share owners ».

> La stratégie de brouillages politiques et médiatiques menée par GE a certes créé un flou, mais qui a fini par être contrebalancé par la querelle interne entre GE et H, entraînant une double rigidité de la position de GE pris entre les supplications de H et les remontrances de la Commission.

> On note ainsi l'importance du cas comme «précédent», de la couverture médiatique, du choc de deux modèles de négociation et d'influence : ce qui constitue une occasion de s'interroger sur l'illustration que ce cas offre des divergences qui existent entre les politiques de concurrence et les traditions de lobbying américaine et européenne.

3. Analyse opérationnelle : occasion d'une étude sur la perception du lobbying en Europe par les acteurs américains par le prisme de la fusion interdite GE/H

3.1. Les politiques de concurrence américaine et européenne

3.1.1. Divergences de principes

Les divergences entre les politiques de concurrence américaine et européenne tiennent d'abord à des définitions divergentes des termes de «concurrence» et «position dominante«, qui impliquent des exigences de mise en conformité avec la légilsation qui diffèrent fondamentalement, comme J. Welch a pu le constater : «The European regulators' demands exceed anything I or our European advisers imagined » Mr. J. Welch of G.E. said 12 juin, « and differ sharply from antitrust counterparts in the U.S. and Canada, which shows that you're never too old to get surprised ».

Ces divergences conceptuelles entraînent des divergences dans les principes de jugement des cas :

- Sur la théorie du protefeuille William Kolasky, responsible de l'antitrust au DoJ a déclaré qu'elle n'était «ni fondée dans la théorie économique ni prouvée par les faits empiriques», et que cette divergence d'analyse représente un désaccord absolument fondamental»

- Sur la notion de position dominante et de protection des concurrents et des consommateurs : les deux instances américaines acceptent de faire des entorses à la concurrence si une fusion permet de dégager des synergies et des effets d'échelle ou de créer de nouveaux marchés, autant d'effets induits se révélant in fine favorables pour le consommateur, à l'inverse de la Commission qui veut protéger les intérêts des deux. Le Legal Times rapporte ainsi le débat indirect entre C. James et M. Monti : «The problem, James said, is that Monti aims to prevent harm to competitors rather than harm to competition». En réponse, Monti déclare que "not only competitors, but also customers [were] worried about the prospect of GE-Honeywell». Il affirma que la dichotomie présentée par C. James était fausse, car si des concurrents quittent un marché, les clients souffrent immédiatement des effets monopolistiques ou oligopolistiques induits.

Ces divergences peuvent aboutir à des conclusions inverses sur un même phénomène, comme le note David Evans dans Foreign Affairs : « les deux instances reconnurent que la fusion aurait pour conséquence une baisse des prix pour le consommateur. Mais alors que les Américains voyaient en cette baisse un bénéfice indéniable, les Européens le virent comme venant au détriment de la marge de manoeuvre des concurrents. Selon les propres mots de C. James, "What led the United States to clear the transaction - the prospect that it would make the combined firm a more effective competitor - was the very reason the EU opposed it.".

En ce qui concerne cette querelle conceptuelle, Monti tenta d'y mettre fin lors d'une allocution à Londres peu de temps après le rendu de la décision : «nous ne sommes pas contre les fusions qui créent des firmes plus efficientes ; nous sommes cependant opposés aux fusions qui ne créent pas de meilleure efficience et risquent par ailleurs d'élever des barrières contre la concurrence et même de réduire le confort des consommateurs». On peut noter, par ailleurs, que M. Monti a rencotré C. James en septembre 2001 à Washington et qu'ils y ont décidé d'un recentrement des raisonnement ssur une défintion commune de l' «atteinte à la concurrence».

3.1.2. Différences de processus : deux traditions de négociation

La procédure de la Commission s'appuie sur le travail de la Merger Task Force, qui fonctionne par accumulation de données, pays par pays, produit par produit, et recoupage systématique par des tests de marché auprès des clients et des concurrents.

L'audition publique contradictoire, un grand oral où les entreprises partenaires, les concurrents et les consommateurs exposent leur point de vue, sous la présidence d'un conseiller-auditeur garant des droits de la défense, est le moment le plus exemplaire de cette place importante laissée aux concurrents et fournisseurs/clients dans la procédure européenne, à la différence de l'amércaine. Dans le cas de GE/H, des questionnaires avaient été envoyés aux compagnies aériennes et aux industriels de la branche, préludant à l'établissement de 15 témoignages formels. GE/H a longuement critiqué cette importance laissée aux «dénonciations et allégations» faites par les concurrents sosu le sceau de l'anonymat et du secret. Il est vrai que, si le DoJ n'avait pas réussi à déclencehr de procédure pour bundling contre GE/H, c'est parce qu'aucune compagnie aérienne ou fournisseur n'aurait accepté de témoigner en public sur ce sujet, craigant les foudres de GE et des autres acteurs du secteur aéronautique. Pour répondre à cette critique d'influençabilité par les concurrents, M. Monti déclara en mars 2001 à un congrès de l'American Bar Association que "We are sufficiently non-naïve, as to be able to discount the elements provided by competitors for their vested interests. Competitors are a rather powerful source of overall assessment of mergers and potentially for the identification of remedies."

Un autre élément qui a supris les Américains est la non-juridicité de la procédure : au Etats-Unis, l'affaire est plaidée devant une cour si elle n'est pas automatiquement enregistrée sans objections ; à l'inverse, ce sont des fonctionnaires semi-politiques dela Commission qui jugent des affaires d'antitrust et les Américains sont choqués par le fait que la procédure repose «sur des politiciens susceptibles d'être influencés par les lobbies»13(*), et que la Commission soit à la fois plaignant, juge et jury. A cela M. Monti ne peut répondre qu'en s'appuyant sur la définition législative de sa fonction pour justifier de son intransigeance et de son indépendance.  

> En bref, GE s'est heurté à une instance de régulation (la Commission) après avoir rapidement évacué une instance d'enregistrement (le DoJ).

3.2. Les traditions américaine et européenne de lobbying

3.2.1. La coopération judiciaire

Les stratèges de GE avaient peut-être pensé s'appuyer sur une coopération judiciaire établie depuis 1991 entre la Commission et le DoJ pour faire passer l'affaire sans autre forme de procès. En effet, La coopération judiciaire entre la Commission et le DoJ sur les questions d'antitrust existe depuis l'Accord Bilatéral sur l'Application des Lois de Régulation de la Concurrence, signé en 1991, qui instaurait un « US-EU Merger Working Group ». L'action de ce groupe a été renforcée sur le moment face à la polémique : outre les séances de négociation entre la Commission, les deux firmes et leurs avocats, il y a eu des discussions et des réunions avec des officiels du DoJ, du FTC, de la DG et Marion Monti bien au-delà des habitudes du US-US-MWG. Cette coopération a cependant pâti à la fois du retard de dépôt de dossier auprès de la DG qui a décalé les échanges d'information, et de la passation de pouvoir entre les équipes Clinton et Bush qui a compliqué la transmission des dossiers et la mise en place du dialogue (cf. retard de la nomination de C. James 2.1.2.).

A parcourir la presse et les publications diverses, on trouve des traces d'une double position officielle/administrative qui diffèrerait, au coeur même de la coopération judiciaire US/UE. Ce serait ainsi sur les conseils de membres de l'Antitrust Division que la Commission aurait fondé ses premières objections sur la théorie du portefeuille (le DOJ n'aurait pas réussi à accuser de bundling car aucune compagnie aérienne n'aurait accepté de témoigner publiquement devant une cour à ce sujet, comme le réclame la procédure américaine des témoignages publics) ; alors que William Kolasky, numéro 2 de la même Antitrust Division a publiquement déclaré que la théorie du portefeuille «n'est ni fondée dans la théorie économique ni prouvée par les faits empiriques».

Une brouille plus ou moins fausse, et d'ailleurs plus politique que juridique, s'était donc établie entre les deux instances ; c'est pourquoi à la suite du verdict le 4 juillet, Mario Monti s'est exprimé dans le sens de la simplicité et de l'apaisement : «chaque autorité doit mettre en oeuvre ses propres principes et le risque de vues divergentes, bien que regrettable, ne peut jamais être exclu. Je suis déterminé à renforcer la coopération bilatérale pour réduire ce risque à l'avenir» ; et depuis des négociations sont en cours pour un accord «de seconde génération», ce dont témoigne le nouveau document-cadre «Best Practices on Cooperation in Merger Regulation» publié le 30 octobre 2002 entre les US et l'UE.

3.2.2. Différence de mesure et différence de moyens

Sans vouloir forcer le trait, on peut dire que le fait que GE n'avait avant l'affaire qu'un lobbyiste temporaire à Bruxelles, et que ce soit son propre PDG qui ait fini par venir négocier pied à pied, est exemplaire de la différence de mesure et de moyens qui existe entre les Etats-Unis et l'Union Européenne, et en particulier sur la nature politique et personnelle des pressions qui ne peuvent avoir cours en Europe.

La tradition du « revolving door system » a entaché la neutralité et le professionnalisme des lobbyistes envoyés par GE à Bruxelles. Ainsi on sait que figurent parmi leurs donneurs d'ordres d'anciens membres du Congrès et des Secrétariats, des deux tendances politiques. Entre autres, Nicholas Calio, un lobbyiste officiellement enregistré comme au service de GE qui est aujourd'hui en charge des Affaires Législatives à la Maison Blanche ; idem, une ancienne sénatrice de Géorgie pendant 24 ans, Sam Nunn, est aujourd'hui membre du Conseil d'administration de GE et partenaire d'une firme d'avocats (King & Spalding) qui a servi les intérêts de GE pendant l'affaire.

Le Legal Times analyse ce recours aux lobbyistes politiques, sans précédent dans son volume comme dans son intensité à Bruxelles, comme étant l'élément le plus important de l'échec de la stratégie de GE : « In Brussels, aggressive lobbying of senior policy makers can backfire. That's what GE did, and the company's strategy is widely considered its biggest mistake». De même, le memo précité de Wilmer Cutler et Pickering invite à se méfier du «magic bullet» (l'intervention de personnes économiquement, politiquement ou administrativement haut-placées) qui est si prisé aux Etats-Unis : «applying political pressure will likely cause the Commission to conclude that the parties are seeking to undermine its authority - and thereby may poison the essential final stage of the procedure».

GE n'a ainsi pas lésiné sur la mobilisation des ressources relationnelles et des parties prenantes. Mais il apparaît ici qu'à l'inverse de la logique naturelle qui voudrait que le nombre, la diversité d'origine et l'unité d'intérêt soient un avantage pour la cause que les parties prenantes promeuvent, non seulement le volume et la force, mais aussi la nature du lobbying opéré par GE ont fondé la méfiance et le ressentiment de la Commission.

3.3. Une prise de conscience pour les Américains 

3.3.1. Importance de l'affaire pour les USA

Sur toute la période, la presse américaine revient en permanence sur une image publique puissante et méliorative : le poids financier et symbolique de la fusion entre GE et H : c'est la plus grosse fusion financière de l'Histoire, c'est l'alliance de deux grandes firmes américaines faisant partie du Dow Jones (les 30 premières compagnies américaines), ce serait le couronnement de la carrière du PDG-modèle que représente Jack Welch. Les médias s'appuient aussi sur l'image publique internationale du DoJ : on sait qu'il est considéré comme un modèle par la Commission14(*) et que jusqu'alors aucune fusion acceptée par le DoJ n'a ensuite été interdite par la Commission15(*).

Tout au long de l'affaire, la couverture médiatique est intense outr'atlantique, dans la presse spécialisée comme dans les médias grand public, et elle peut se montrer fortement biaisée : ainsi la pression politique est en particulier passée par le canal de CNBC, une chaîne du câble qui appartient en partie à GE et sur laquelle nombre de sénateurs se sont exprimés avec virulence contre l'autorité jugée «protectionniste» et «ingérante» de la Commission.

L'affaire est un veritable drame vu des Etats-Unis, si l'on en croit le Financial Times qui se lance le 29 juin 2001 dans un récit fax-par-fax des tentatives désespérées de M. Bonsignore pour sauver l'affaire («Exchange of faxes burries GE deal») ou le 6 juillet 2002 dans une analyse psychologique des rapports entre M. Monti et J. Welch, en particulier dans des descriptions de négociations où les situations auraient leur place chez Beckett ou Ionesco («How Monti truned th edeal into a flight of fancy»). Beaucoup sont marqués par le fait que la Commission interdise la fusion la veille au soir de l'Independence Day.

Nul doute alors que les conséquences et les conclusions que les Américains aient tirées aient pour but d'empêcher à l'avenir ce scénario-catastrophe de se reproduire.

3.3.2. On s'accorde sur le fait que ces interdictions et l'autorité de la Commission vont aller croissant 

Il est frappant de découvir dans les analyses des think-tanks et des cabinets américains et européens la même conviction sur les répercussions et le précédent créés par l'interdiction de la fusion GE/H. Ils se focalisent en particulier sur les prémices d'autres décisions indépendantes et incontournables d'une Commission devenue «leçons que les autres firmes américaines doivent retenir de la déroute de Jack Welch et de ses méthodes».

3.3.3. La nécessité stratégique enfin comprise

3.3.3.1. Accroître la présence et la connaissance de Bruxelles et de ses logiques

L'échec de la stratégie de GE a été l'occasion d'une prise de conscience méthodologique pour les Américains : la connaissance de la procédure européenne et de la puissance de la Commission sont des incontournables pour toute action à mener en Europe. Dans un memo d'octobre 2001, un analyste d'Allen&Owery évoque l'affaire comme une véritable leçon de lobbying : il rappelle que, de la même manière que GE avait fait valider sa fusion auprès des autorités canadiennes, les firmes américaines doivent prendre le pli de se soumettre aussi au régulateur européen et de se plier, comme pour l'institution canadienne, à ses particularités d'esprit et de procédure. L'European Association of Communication Agencies y voit l'avènement dans la douleuret l'ugrence d'une politique européenne des firmes américaines.

Il s'agit donc de renforcer la connaissance de et la présence à Bruxelles, en particulier par le biais d'un recrutement ciblé : la AEACA cite dans un document d'avril 2002 l'installation soudaine des grandes compagnies US à Bruxelles : McDo y entretient 5 permanents, ; Nike 4 et Toyota 3 ; en outre, les grands cabinets de Relations Publiques et de Conseil recrutent dorénavant des fonctionnaires communautaires. Le Legal Times signale dans le même sens le doublement des bureaux permanents de firmes américaines entre début 2001 et mi-2002.

3.3.3.2. Méthodologie :

3.3.3.2.1. Nécessité d'un lobbying à l'européenne

Ainsi que l'indique un article de 2002, ce sont définitvement les méthodes trop fortes et trop directes «à l'américaine» qui peuvent choquer à Bruxelles :

US lobbyists struggle in Brussels - S. Lowenberg

While most European officials may speak English, that doesn't mean they share American laissez faire values. The American context is so neo-liberal that it is very hard for any American, whether they are a consumer organization or a corporation, to understand what drives Europeans. As some of the biggest U.S. companies have found out, simply transporting Washington K-Street tactics and personnel to the European Union capital in Brussels does not work.

American lobbyists trying to ply their craft in the EU are finding themselves without many of their traditional tools. This is a world largely without the campaign contributions, revolving door of former public officials who trade on their influence, and artificially manufactured public support - all standard practice in Washington, whether the issue is tobacco, pharmaceutical drugs, or nuclear power.
The insider game in Washington does not apply nearly as much in Brussels, where legislation gets tossed between the commission, the council of ministers, and the parliament so many times that large-scale image and coalition-building campaigns often make more sense than rifle shot lobbying. With the power in the hands of so many, intelligence and strategy take precedence over access and influence. Brent Staples, who heads the Brussels office of Washington, D.C. based PR and lobbying firm APCO, compares it to "three-dimensional chess."

Dans le cas particulier de GE et H, on peut constater que la leçon ci-dessus évoquée a porté ses fruits : GE a transféré son bureau permanent de Londres à Bruxelles, y a renforcé son équipe de lawyers, et a mis à sa tête un ancien fonctionnaire italien de la Commission qui serait a priori plus apte à nouer des échanges avec Mario Monti.

3.3.3.2.2. Nécessité d'une existence européenne

Par ailleurs ce n'est peut-être pas un hasard si les cabinets qui ont assuré le soutien des `gagnants' sont européens de fait ou de caractère, à l'inverse de celui choisi par GE.

Le Cabinet Cleary, Gottlieb, Steen & Hamilton, leader américain dans le domaine des fusions-acquisitions, est présent depuis les débuts de l'unification européenne : en 1951, George Ball qui était alors partenaire du cabinet à Washington a aidé Jean Monnet a rédigé les propositions de lois antitrust de la CEAC. Cleary s'est donc assuré une place à Bruxelles avant même la plupart des Européens eux-mêmes (et en particulier avant les Britanniques, qui n'ont rejoint la CEE qu'en 1973), en ouvrant un bureau à Bruxelles dès 1960. On peut attribuer une partie du succès de Cleary en Europe au choix qui a été fait de recruter principalement en Europe les membres du bureau : en 2001 on y compte 5% d'Américains seulement et 17 nationalités du continent européen. Cleary fait part de l'establishment bruxellois au point de représenter Airbus et United Technologies... ce qui n'est évidemment pas neutre au regard des débats de l'affaire GE/H16(*).

Freshfields est le leader britannique dans le même domaine des fusions-acquisitions, il a fusionné en 2000 avec le cabinet allemand Deringer, et s'appuie sur un panel d'experts et une équipe de juristes très large qui lui permet des délais de réaction extrêmement brefs. Il a servi les intérêts de Rolls Royce dans l'affaire.

A l'inverse, Skadden, choisi par GE pour la négociation, était certes déjà le premier cabinet pour les fusions américano-américaines en terme de valeur dollar, mais son bureau bruxellois n'avait été ouvert qu'en 1990 et ne comptait à l'époque aucun Européen dans l'équipe juridique, alors composée de 10 membres seulement. Depuis, il compte 17 nationalités et 18 juristes permanents.

Le Cabinet choisi par GE pour soutenir le recours devant le Tribunal de Première Instance est Vogel&Vogel, un cabinet qui se dit implanté à Paris, Bruxelles et Francfort, travaillant en français, anglais et allemand, ayant la pratique des instances administratives et judiciaires, françaises et communautaires, habitué à l'évaluation du risque juridique : on note ainsi aussi dans ce phénomène le recentrement de la stratégie de GE.

> GE/H aura donc été l'occasion d'une prise de conscience pour les politiciens autant que pour les lobbyistes américains. Il devient un précédent qui a ouvert nombre de possibilités pour l'avenir proche : on peut citer la question des investigations sur Microsoft, à qui Joe Wilcox annonce «  de dures batailles », et le Legal Times quant à lui conseille tout simplement « If J. Welch were to send a memo to Bill Gates, he might well advise that Brussels is not D.C. ».

Conclusion

Comme nous l'avons vu, si l'interdiction de la fusion entre General Electric et Honeywell était logique du point de vue de la législation européenne, il est tout aussi vrai que les tentatives de mise en conformité de la fusion ont souffert d'une atmosphère délétère créée par des tentatives d'influence trop nombreuses et trop visibles. L'échec de GE/H fut donc l'occasion d'une prise de conscience des politiques et des lobbyistes outr'Atlantique vers un redimensionnement de leurs stratégies.

Cette affaire manquée restera certainement comme l'un des cas importants de l'Histoire de la Commission dans sa fonction antitrust, et elle est porteuse d'enseignements à la fois techniques et pratiques, présentant autant une impasse juridique et économique, que l'affirmation de la puissance de la Commission.

Il semble que, suite à cette affaire et comme toujours, le milieu du lobbying apprenne vite, comme le montre la récente mutation des stratégies d'éviction de la part d'entreprises américaines. Rockwell International et United Technologies étaient des concurrents sur le marché domestique de GE/H : de même ce serait Disney qui aurait réussi à pousser la Commission à forcer AOL à faire des concessions importantes à l'occasion de son acquisition de Time Warner pour 165 milliards de dollars, et encore dans la même veine, Sun Microsystems aurait joué un rôle déterminant dans l'investigation en cours sur la position dominante de Microsoft dans le software pour serveurs. Toutes ces compagnies sont des concurrents domestiques des entreprises soupçonnées : leurs lobbyistes auraient de cette manière trouvé le meilleur moyen d'atteindre à leurs adversaires en changeant de continent et en en appelant à la Commission, renouvelant ainsi la classique « stratégie par la bande ».

A.1. Historique du cas :

20 Octobre 2000 - le PDG de GE, Jack J. Welch, apprend que United Technologies, un concurrent de GE, est en train de préparer une acquisition de Honeywell. Il prépare en 45 minute une contre-offre, écrite à la main, et l'envoie par fax à Honeywell

22 Octobre 2000 - plan de la fusion accepté par Honeywell

Début novembre 2000 - GE et Honeywell contactent les autorités antitrust américaine et européenne au sujet de la fusion préparée, début de contact régulièr afin de remplir les formulaires de notification

15 novembre 2000 - dépôt du formulaire HSO (Hart Scott-Rodino) de notification auprès de l'autorité antitrust des Etats-Unis

Décembre 2000 - certains concurrents de GE, déjà organisés, appellent Enrique Gonzalez-Diaz, délégué à la Commission au dossier GE/H, pour lui fournir des éléments susceptibles d'entraîner une « deuxième phase » (procédure d'investigation approfondie). Ils sont accusés de « couiner » par le susdit.

5 février 2001 - dépôt du formulaire CO de notification de la fusion auprès de la Commission européenne

26 février 2001 - toutes les parties prenantes se rencontrent à Bruxelles. A 18h30 il leur est annoncé par Mario Monti et Alex Schaub que la Commission va passer à la deuxième phase.

1 mars 2001 - début officiel de la deuxième phase avec l'ouverture de la procédure d'investigation de quatre mois par la Commission européenne

2 mai 2001 - autorisation de la fusion par l'antitrust américain sous réserve de vente d'une société construisant des moteurs d'hélicoptères par GE

8 mai 2001 - la Commission présente aux deux compagnies un document de 155 pages d'objections qui cible principalement le bundling, les horizontal overlaps dans les moteurs de jets régionaux; et pas tellement GECAS qui se révèlera l'obstacle le plus important.

16 mai - le Canadian Competition Bureau informe les deux entreprises qu'il ne s'oppose pas à leur fusion. A ce stade, les projets de restructurations commencent à être lancés entre les deux partenaires.

entre le 15 et le 20 mai - la Commission mène des auditions d'entreprises américaines et européennes

29 mai 2001 - toutes les parties prenantes se rencontrent pour 2 jours d'audition. Selon quelques observateurs, GE et Honeywell réussissent à invalider l'argumentation de la Commission sur le bundling (effet portefeuille) en envoyant des économistes renommés dont le Prof. Shapiro de Berkeley.

12 juin - Pour éviter l'effet portefeuille auquel la Commission se raccroche avec force, J. Welch propose de vendre la branche aérospatiale d'Honeywell estimé à 2,2 miliards de $ sans compter la branche moteur d'hélicoptère, et de cadrer les activités de GECAS en une entité juridique indépendante de GE, mais J. Welch reste opposé à la demande de l'Union européenne d'effectuer un transfert en bourse du capital du GECAS dont GE resterait propriétaire. C'est insuffisant face aux demandes de la Commission.

13 juin - clôture de la semaine de négociations. J. Welch flanqué de sept assistants rencontre Monti deux fois dans la journée sans parvenir à trouver de compromis. Monti veut que GE vende 20% du GECAS à un concurrent, pour J. Welch c'est hors de question : il est soutenu dans son raisonnement par ses lawyers et économistes qui arguent que « it would bee like asking a Ford CEO to drive a Toyota for 20% of his time » (Barry Nalebuff, économiste de Yale). A cet instant, on sait que la fusion est sur le point d'être avortée. Au soir J. Welch téléphone à au Chef de cabinet de G.W. Bush, en lui demandant « whatever help you can give us ».

13-14 juin - sommet de Göteborg, officiellement on ne parle pas de GE.

-Jeff Immelt, le successeur de J. Welch, déclare la fusion avortée. J. Welch rentre aux USA.

14 juin - Charles James, nommée par Bush, prend enfin effectivement la tête de la division antitrust du Département de Justice des Etats-Unis

- communiqué de presse de GE qui suppose que la véritable raison de l'opposition à la fusion est la défense des intérêts des entreprises européennes

- l'indice Dow Jones des sociétés industrielles qui font le plus de profits fait une chute de plus de 100 points dans la première heure d'ouverture de la bourse, suivi de près par l'indice Nasdaq. La chute des actions de Honeywell et de GE représente plus du cinquième des pertes enregistrées au Dow Jones

15 juin - le Président Bush en visite à Varsovie ce dit « préoccupé » par le fait que les européens n'acceptait pas la fusion. «Je m'inquiète de ce que les européens s'opposent à la fusion». Il avertit également que l'Union «a un fort intérêt à ce que GE et Honeywell soient traités de façon équitable».

17 juin - (date limite légale pour déposer des propositions), GE propose des concessions que la Commission juge inadéquates et insuffisantes, notamment en l'absence de propositions sur le GECAS. Monti exige la cession de la totalité des activités avioniques, qui représentent 3,6 milliards de dollars de chiffre d'affaire et la moitié des bénéfices de Honeywell.

18 juin - Monti déclare à Ljubljana, furieux. «I deplore attempts to misinform the public and to trigger political intervention» «This is a matter of law and economics, not politics»

19 juin - Jeffrey Immelt, numéro 2 de GE et futur successeur de J. J. Welch, déclare dans une interview aux journalistes français que les chances de sauver la fusion sont devenues « nulles »

25 juin - suite à des pressions diplomatiques sur les différents Etats-Membres, certains pays commencent à craquer comme la Grande-Bretagne dont le représentant de l'Office for Fair Traiding se demande publiquement si les arguments de la Commission sont « suitably weightly »

27 juin 2001- 2 semaines après la date limite légale pour déposer des propositions, GE propose de nouvelles concessions, que la Commission accepte d'examnier mais finit par déclarer comme toujours insuffisantes. Robert Pitofski (ancien chef du Federal Trade Commission), appelle Alex Schaub et M. Monti, ; Debbie Herman (numéro deux de la division Antitrust du Department of Justice) vient à Bruxelles et rencontre des administratifs de la Commission.

29 juin 2001 - lettre de Michael Bonsignore, PDG de Honeywell à J. Welch, dans laquelle il propose de baisser le taux de change de « 1.055 shares to 1.01 shares of GE for every Honeywell share », ce qui baisserait la valeur de la transaction de 2 milliards de $, pour que GE puisse vendre plus de segments de son activité et se rendre ainsi aux exigences de la Commission. J. Welch décline l'offre dans une lettre, arguant «What the commission is seeking cuts the heart out of the strategic rationale of our deal. The new deal you propose, in response to the commission, makes no sense for our share owners.»

3 juillet 2001 - vote de la Commission interdisant la fusion

4 juillet 2001 - le PDG d'Honeywell, Michael Bonsignore, est limogé. Le nouveau PDG, Larry Bossidy, demande à ses lawyers de définit comment H pourrait poursuivre GE pour absence de réels efforts « reasonable good efforts » à l'occasion de la procédure manquée auprès de la Commission.

12 septembre 2001 - On apprend que GE accepte d'acheter deux entreprises appartenants à Honeywell - Tensor et Honeywell Advanced Composites, et s'engage à couvrir tout les frais de Honneywell relatifs à la fusion avortée. GE et Honeywell renoncent officiellement à formuler des recours l'une contre l'autre au sujet de la fusion avortée. GE et Honeywell déposent chacune un recours contre la décision de la Commission au Tribunal de Première Instance pour fondements insuffisants de la décision de la Commission.

mi-septembre 2001 : M. Monti rencontre Charles James à Washington et pose les jalons d'une nouvelle forme de coopréation entre les instances antitrusts américaine et européenne, déclarant aussi que la Commission examine un recentrement de ses raisonnements sur la notion d' « atteinte à la concurrence » (à l'américaine) et non plus sur de « position dominante ».

2 octobre 2001 - GE et H sont normalement liées par leurs accords américain et canadien jusqu'au mois de novembre ; mais, et ce même en l'absence de décision définitive du Tribunal, les deux entreprises déclarent en conférence de presse renoncer officiellement à la fusion. La décision du Tribunal de Première Instance n'a toujours pas été rendue, sans qu'on sache véritablement si cet abandon a ajourné de fait la procédure ou si elle est toujours en cours.

A.2. Bibliographie :

Institutions :

Régulation du Conseil (EEC) No. 4064/89 de décembre 1989 sur le contrôle des fusions entre entreprises (fondement légal de l'action de la Commission)

Communication de la Commission «Le Commissaire Monti dénonce la politicisation» (18 juin 2001 à Lubjana) http://europa.eu.int/rapid/start/cgi/guesten.ksh?p_action.gettxt=gt&doc=ip/01/855|0|rapid&lg=en ip/01/855

European Commission, «The Commission prohibits GE's acquisition of Honeywell,» Press release, http://europea.eu.int/rapid, 3 July 2001 (décision complete de la Commission)

Commission Press Room, «EU and US issue best practices concerning bilateral cooperation in merger cases,» 30 October 2002 (modalités d'approndissement de la cooperation judiciaire entre le DoJ et la MTF)

U.S. Department of Justice and the Federal Trade Commission, Horizontal Merger Guidelines, www.usdoj.gov/atr/public/guidelines/horiz_book/15.html

Federal Trade Commission. «Promoting Competition, Protecting Consumers: A Plain English Guide to Antitrust Laws.» www.ftc.gov/bc/compguide/index.htm.

Productions académiques ou scientifiques :

BANNERMAN Edward pour le Center for European Reform, août-septembre 2001 http://www.cer.org.uk/articles/n_19_bannerman.html (un think tank sur la politique de concurrence de l'UE)

DYLLA Bownwyn, KNUDSEN Jette «Merger clearance in the US and in the UE : a comparison» pour la Copenhagen Business School WP 18-2002 www.cbs.dk/departments/int/publications/ publications2002uk.shtml (sur les différences juridiques et économiques des deux procédures)

EVANS David S. «The New Trustbusters: Brussels and Washington May Part Ways,» Foreign Affairs, 81(1), 2002: 14. ou www.foreignaffairs.org/.../david-s-evans/ the-new-trustbusters-brussels-and-washington-may-part-ways.html http://europa.eu.int/comm/competition/speeches/text/sp1996_054_en.html

QUIRY P. et LE FUR Y. pour Vernimmen.net « Les règles anti-concentration européennes » Avril 2002 http://www.vernimmen.net/lettre/lettre_avril_09.pdf (la mutation des nouveaux fondements théoriques et pratiques des décisions de la Commission) (site sur la finance d'entreprise)

TEMPLE LANG John, «European community antitrust law-innovation markets and high technology industries», 17 octobre 1996, Fordham Corporate Law Institute (les lois antitrust, leurs effets sur les avocats d'affaires et sur leurs méthodes)

Articles de Presse

Presse Spécialisée

TAVERNA Michael A. and MECHAM Michael «One Down, One To Go For GE-Honeywell Deal» in Aviation Week and Space Technology June 17, 2001 (débat dans la branche et pressions de concurrents et clients)

VELOCCI Anthony L. «Most Suppliers Beating Wall Street Estimates»in Aviation Week and Space Technology February 5, 2001 (importance financière de la fusion rapide)

Presse généraliste :

Le Monde, nombreux articles dont

12 Octobre 2001 L'irrésistible ascension de la Commission européenne en matière économique

1 Novembre 2001 Cinquième veto de Bruxelles à une fusion depuis le début de l'année : La politique européenne de la concurrence est plus rigide que celle de l'Amérique.

5 Janvier 2002 Le nombre des fusions et acquisitions a diminué de 50 % en 2001, c'est l'américain Goldman Sachs qui a conseillé le plus d'opérations aux Etats-Unis et en Europe

8 Juin 2002 Concurrence : les juges désavouent la Commission de Bruxelles

2 Octobre 2002 L'Europe et les Etats-Unis veulent examiner conjointement les fusions internationales

2 mai 2003 La Commission réforme la Direction Concurrence

Financial Times et Financial Times Online nombreux articles dont

20 juin 2001 Monti defends Europe's stance on GE/Honeywell

25 juin 2001 Cracks appear in EU's unanimity against GE deal (pressions américaines sur les Etats-Membres)

26 juin 2001 Commissioner defends EU over GE-Honeywell deal (ligne de la commission dans la négociation)

27 juin 2001 GE makes new efforts to save Honeywell deal (nouvelles propositions de GE après la deadline)

28 juin 2001 Rivals react with scepticism over compromise (menaces de concurrents de reprendre leurs cations de lobbying sur les négociations sont relancées)

29 juin 2001 Exchange of faxes buries GE deal (tentative avortée de proposition commune fax-par-fax)

29 juin 2001 GE's tough line leaves Honeywell deal in tatters (GE perdrait mois qu'Honeywell en cas d'échec de la fusion et reste sur sa ligne dure)

2 juillet 2001 Global antitrust (débat sur la régulation globale de la concurrence)

2 juillet 2001 GE and Honeywell consider a future apart (Welch tente d'élaborer une dernière proposition commune mais Bonsignore se tourne déjà vers un autre projet de fusion avec UTC)

3 juillet 2001 GE may appeal Brussels' decision to block Honeywell bid

3 juillet 2001 Brussels poised to veto GE move for Honeywell (pressions sur les PDG : hypothèse de la démission de Welch et Bonsignore après la décision)

3 juillet 2001 EU seeks to heal rift after veto of GE/H deal (constat de divergence d'analyse sur un même cas)

4 juillet 2001 Monti's block makes waves across the Atlantic (mauvais acueil de l'interdiction aux Etats-Unis)

6 juillet 2001 How Monti turned GE/H into a flight of fancy (le plus important des articles du FT ; sur les relations personnelles durant la négociation)

23 juillet 2001 Blocked deal leaves Monti with one regret : he would have liked to approve the merger (difficultés conjoncturelles de la cooperation US/UE sur ce dossier)

The Economist nombreux articles dont

23 juin 2001 Welch Squelched (Welch réduit au silence et à la résignation par l'insensibilité de la Commission ; mais aussi par la conscience progressive que le deal avec H n'est pas si intéressant)

5 juillet 2001 Europe's Fearless Diplomat (intelligence et compétence de Monti, malgré son arrogance)

* «The Anatomy of the GE-Honeywell Disaster» in Times, 8 juillet 2001 http://www.time.com/time/business/article/0,8599,166732,00.html (excellent article généraliste)

* «Comment négocient les sheriffs de Bruxelles» in L'Expansion 23 mars 2003 http://www.lexpansion.com/art/17.45.58382.0.html (sur le fonctionnement et les méthodes de ma Merger Task Force)

* «Monti's world» in Businessweek, 25 mars 2002 http://www.businessweek.com/magazine/content/02_12/b3775015.htm (sur le rôle capital de M. Monti)

CARNEY Dan, «Bush's Trustbusters Need Another Name,» in Business Week, September 13, 2002. www.businessweek.com/bwdaily/dnflash/ sep2002/nf20020913_3027.htm (sur la `souplesse' de l'administration Bush quant à l'enregistrement des fusions aux Etats-Unis)

COLVIN Geoffrey «Welch's Swan Song, Take Two? It's never safe to assume Jack Welch has run out of surprises» in Fortune 2 juillet 2001 http://www.fortune.com/fortune/investing/articles/0,15114,373132,00.html

FITZ-GIBBON Jorge « GE's political ties worry environmentalists » on TheJournalNews.com http://www.thejournalnews.com/pcb/gejuice.html (sur la «dram team» de lobbyists de GE)

FORD Peter «EU is blocking major US merger» in The Christian Science Monitor 21 juin 2001 http://csmweb2.emcweb.com/durable/2001/06/21/p1s1.htm (sur la surprise des Américains face au pouvoir de regulation de la Commission sur les fusions américano-américaines)

GOLDHABER Michael D. «Antitrust law - US and British firms vie for EU antitrust work» in the Legal Times 22 avril 2002 www.global-trade-law.com/ Article.EU-US%20Antitrust%20(LT%204.29.02).htm (sur la présence croissante des cabinets américains à Bruxelles)

HALE Briony «Hope lives on» on BBC online, June 22, 2001 http://news.bbc.co.uk/1/hi/business/1402399.stm (après les premières difficultés)

HEGMANN Gerhard, Rüdiger KÖHN, und Birgit JENNEN GE-Honeywell entzweit Flugkonzerne« in Financial Times Deutschland, 18 juin 2001, www.ftd.de/ub/in/1073080-i.html (sur les débats de branche)

ROWLEY James « EU's GE-Honeywell Demands Product of Global Antitrust Policy » on BloombergNews.com, 21 juin 2001, http://quote.bloomberg.com/cgi-bin/fgcgi.cgi?ptitle=Latest%2520Columns&touch=1&s1=blk&tp=ad_topright_bbco&T=markets_fgcgi_content99.ht&s2=ad_right1_bbco&bt=blk&s=AOykcUhWFRVUncyBH (sur la pression exercée en 1997 à l'occasion de la fusion Boeing/McDonnell-Douglas)

SERWER Andy «Street Life : A Rare Skeptic Takes On the Cult of GE : Is there a CEO or company more lionized than Welch or GE ?» in Fortune 9 février 2001 http://www.fortune.com/fortune/print/0,15935,372622,00.html (critiques sur le statut et la personnalité versatile de J. Welch)

SORKIN Andrew Ross «U.S. Businesses Turning to Europeans for Antitrust Help» in The New York Times 19 juin 2001 http://www.manishin.com/pressdocs/nyt2/19EURO.html

WILCOX Joe «Microsoft faces tougher battle in Europe» on News.com 3 juillet 2001 www.news.com.com/2100-1001-269434.html?tag=prntfr (sur GE comme précédent favorable à un examen du cas Microsoft par les instances européennes)

Documents de cabinets de RP ou d'agences de communication :

* pour le Cabinet Allen&Overy «GE/H : European Commission blocks US Merger on eve of independance day» Bulletin d'octobre 2001 www.allenovery.com/asp/pdf/ GE-Honeywell%20-%20Oct%202001.pdf (remarques sur l'insuffisant respect des procédures européennes et la différence de méthodes d'influence)

* pour le Cabinet Crowell&Moring «General Electric-Honeywell : The EU's Prohibition» Eté 2001 www.crowell.com/content/expertise/europeanpractice/europeaninsight/20012 (analyse de la stratégie de la Commission et sur la nécessité de connaître les procédures communautaires)

MITCHENER Brandon for the European Association of Communication Agencies, «Rules, regulations and Global Economy are increasingly being set in Brussels», 23 avril 2002 http://www.eaca.be/documents/conference/WSJ_EUregulateUSA.doc (sur l'attention à porter aux instances de l'UE)

Documents divers :

* pour Socialfunds.com «GE Shareholders Want Disclosure on Political Spending», 26 avril 2000 http://www.socialfunds.com/news/article.cgi/article232.html (sur les contributions de GE aux campagnes électorales) (groupe d'intérêt public ciblé sur l'investissement responsable)

LOWENBERG Samuel «US lobbyists struggle in Brussels» in the Columbia Journal 2002

http://www.jrn.columbia.edu/studentwork/reutersjournal/2002/loewenberg.asp

MARDSEN Chris pour le World Socialists' Website « les US et l'UE divisés sur le rachat de Honeywell par General Electrics » 21 juin 2001 http://www.wsws.org/francais/News/2001/juin01/21juin01_honeywell.shtml

PETERSON Alan pour Worldhighways.com «It's a small world» http://www.worldhighways.com/opinion/zz10.htm (sur le fait que les Américains sont choqués de voir les trios fonctions concentres dans une Commission faite de personnes soumises à du lobbying, contrairement à la procédure judiciaire aux Etats-Unis) (lobby professionnel sur les chantiers autoroutiers)

PODVIN David pour MakeThemAccountable.com «The Payoff» 31 janvier 2002 http://www.makethemaccountable.com/podvin/media/020131_Payoff.htm (groupe d'intérêt public pour la responsabilité des homes politiques)

www.cleanupge.org (lobby anti-GE et en particulier très virulent sur J. Welch, données sur les contributions aux campagnes électorales du G.W.Bush )

A.3. Table

Introduction

1. L'introuvable compromis entre GE/H et la commission sur les questions d'antitrust

1.1. Présentation des acteurs

1.1.1. Honeywell et Michael Bonsignore

1.1.2. General Electric et Jack Welch

1.2. La fusion GE/H

1.2.1. Des enjeux forts et une décision enthousiaste pour la fusion

1.2.2. Une procédure nord-américaine sans heurts

1.3. Les négociations de mise en conformité

1.3.1. Les objections de la Commission

1.3.2. Des propositions insuffisantes

2. La forte campagne d'influence mise en place par GE/H

2.1. Un contexte formel et structural sous-évalué par le consortium américain ?

2.1.1 Les concurrents dans le secteur aéronautique

2.1.2. Le secteur aéronautique dans sa globalité

2.1.3. La politique intérieure américaine

2.1.4. La tendance dans les jugements de la Commission

2.2. La stratégie de GE/H : imposer sa puissance

2.2.1. Retards et légèreté face à la procédure

2.2.2. Contestations scientifiques et académiques

2.2.3. Contestations personnelles et politiques

2.2.4. Contestations diplomatiques et commerciales 

2.2.5. Les réponses de la Commission 

2.3. Remarque : l'évolution du partenariat GE/H

3. Analyse opérationnelle : occasion d'une étude sur la perception du lobbying en Europe par les acteurs américains par le prisme de la fusion interdite GE/H

3.1. Les politiques américaine et européenne de concurrence

3.1.1. Divergences de principes

3.1.2. Différences de processus : deux traditions de négociation

3.2. Les traditions américaine et européenne de lobbying

3.2.1. La coopération judiciaire

3.2.2. Différence de mesure et différence de moyens

3.3. Une prise de conscience pour les Américains 

3.3.1. Importance de l'affaire pour les Etats-Unis

3.3.2. Ces interdictions et l'autorité de la Commission vont aller croissant 

3.3.3. La nécessité stratégique enfin comprise

3.3.3.1. Accroître la présence et la connaissance de Bruxelles et de ses logiques

3.3.3.2. Méthodologie : nécessité d'un lobbying à l'européenne et d'une existence européenne

Conclusion

Annexes

A.1. Historique du cas

A.2. Bibliographie

A.3. Table

* 1 Désormais désignés ensemble par « GE/H » ou séparément par « GE » et « H »

* 2 GE Capital Aviation Services

* 3 du nom de la loi

* 4 Formulaire que les entreprises sont tenues d'utiliser lorsque l'opération de concentration qu'elles envisagent de former est de dimension communautaire au sens du règlement sur les concentrations et que l'opération doit donc être notifiée à la Commission. Il est annexé au règlement (CE) n° 447/98 de la Commission (JO L 61 du 2.3.1998), qui porte application du règlement sur les concentrations.

* 5 Ces demandes successives et contradictoires ont d'ailleurs déclenché la colère de Wall Street et du Wall Street Journal

* 6 40 personnes au début de la procédure, 60 à la fin, 100 en 2003

* 7 La Commission avait plié sous la pression du gouvernement Clinton lors de la fusion Boeing/MacDonnellDouglas en 1997, à la fureur ultérieure de M. Monti

* 8 Dan Carney, «Bush's Trustbusters Need Another Name,» Business Week, 13 septembre 2002 ;

et Times «Anatomy of the GE/H disaster» 8 juillet 2001

* 9 cf. Quiry et Le Fur sur Vernimmen.net

et les déclarations de Bert Foer, président du American Antitrust Inst., au Christian Science Monitor du 26 juin 2001

* 10 Expression relevée dans les documents produits par Wilmer, Cutler and Pickering

* 11 de tous les client et fournisseurs contactés par la Commission, seul Lufthansa est venu officiellement participer aux auditions.

* 12 Soit le ratio d'échange des actions de GE et de H «from 1.055 shares to 1.01 shares of GE for every Honeywell share» », ce qui baisserait la valeur de la transaction de 2 milliards de $, pour que GE puisse vendre plus de segments de son activité et se rendre ainsi aux exigences de la Commission.

* 13 groupe d'intérêt public Highways

* 14 Mario Monti avait déclaré que la Commission et la DG Conc, au regard du DoJ et du FTC, n'étaient que des «junior institutions»

* 15 alors que le contraire était arrivé, 1. dans le cas de l'interdiction de la fusion Worldcom/Sprint le 28 juin 200 qui avait été interdite des deux côtés, et 2. le DoJ avait bloqué la fusion AirLiquide/BOC alors que la Commission l'avait autorisée.

* 16 D'ailleurs, on peut noter rapidement la « bonne » stratégie des concurrents : se sont attaqués tôt à la cause, ont alloué une expertise technique, ont été toujours prêts à reprendre le débat, ne se sont pas trop «découverts» sur le plan médiatique. Seule déception : l'interdiction de la fusion les prive de racheter des filiales que la Commission aurait pu forcer GE à abandonner.


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