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Le régime juridique des étrangers au Cameroun


par Martine AHANDA TANA
Chaire UNESCO des droits de la personne et de la démocratie de l'université d'Abomey-Calavi de Cotonou au Bénin - DEA droits de la personne et de la démocratie 2004
  

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B) Les procédures d'expulsion124(*)

Lorsque le clandestin est contraint de quitter le territoire camerounais, l'Etat lui fait subir des pratiques illicites semblables au principe de la « double peine » en vigueur en France. Ce principe consiste à condamner et à emprisonner un étranger pour irrégularité ou toute autre infraction commise ; généralement, il est privé de liberté sans aucune inculpation. Avant la fin de sa peine, l'Etat l'expulse sans même lui donner la possibilité de bénéficier d'un conseil judiciaire capable de défendre ses droits. Très souvent, il ne lui est pas permis de retourner avec ses biens. A titre illustratif, en 1988, huit à dix mille Tchadiens ayant traversé illégalement la frontière ont été expulsés du Cameroun sans leurs affaires125(*). Cela constitue des expulsions illégales car l'Etat les a privés de leurs biens en violation des dispositions légales internationales et internes relatives aux conditions de l'expulsion. D'ailleurs, nous nous rendons compte que presque une décennie après, la donne n'a guère changé.

En effet, en 1997, le Cameroun avait la ferme intention d'expulser  douze personnes originaires de Guinée Equatoriale arrêtées en septembre et au moins deux ressortissants tchadiens appréhendés au mois de novembre. D'après Amnesty International, ces clandestins risquaient d'être victimes de graves violations de leurs droits fondamentaux en cas d'expulsion vers leurs pays respectifs. Jusqu'à la fin de l'année, ils étaient encore détenus sans inculpation126(*). De telles expulsions sont illégales pour deux raisons fondamentales 127(*). En premier lieu, il est question des expulsions collectives proscrites par le droit international ainsi que par la loi de 1997 relative aux conditions d'entrée, de séjour et de sortie des étrangers au Cameroun. En second lieu, en expulsant un étranger vers un territoire où sa vie est en danger, l'Etat commet une véritable violation des droits de l'homme.

Dans une situation similaire (voir la Communication N°159/96 de l'Union interafricaine des droits de l'homme, de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme, de la Rencontre africaine des droits de l'homme, de l'Organisation nationale des droits de l'homme au Sénégal et de l'Association malienne des droits de l'homme contre Angola)128(*), la Commission Africaine des droits de l'homme et des peuples a fait certaines recommandations. Elle n'entendait certes pas remettre en cause le droit dont dispose tout Etat d'intenter une action judiciaire contre des immigrants irréguliers et de les reconduire dans leurs pays d'origine si les juridictions compétentes en décident ainsi. Elle trouve cependant inadmissible le fait de déporter des individus collectivement. Aussi a-t-elle reconnue que de telles expulsions sont illégales car elles violent la règle d'interdiction d'expulsions collectives des étrangers. Par ailleurs, dans la Communication 71/92 (rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme c/ Zambie), la Commission a précisé que « l'expulsion collective constituait une menace spéciale contre les droits de l'homme» 129(*).

Bien plus, nous tenons à préciser que les Etats, la plupart du temps, utilisent fallacieusement l'extradition130(*) pour légitimer l'expulsion illégale des étrangers qu'ils jugent indésirables. A titre illustratif, les tribunaux français ont condamné les « extraditions déguisées » des ressortissants basques vers l'Espagne. En effet, dans l'Affaire Teodoro Meabe Derteano, le Commissaire du gouvernement a proposé d'annuler la décision du ministre français de l'Intérieur, d'expulser le requérant vers l'Espagne au motif que cette décision violait l'article 27(2) de l'ordonnance du 02 novembre 1945131(*) car le requérant a été expulsé vers un pays où il risquait pour son intégrité physique et où sa liberté était menacée132(*).

Les étrangers classiques, à savoir les réguliers et les clandestins, demeurent donc des êtres marginalisés sur l'ensemble du territoire national. Toutefois, la situation des autres étrangers à statut exceptionnel est plus complexe.

* 124 Nous étudierons les procédures en considérant l'expulsion au sens large c'est à dire le refoulement, la reconduite à la frontière, l'extradition et l'expulsion proprement dite.

* 125 Revue Laltchad presse, Op Cit.

* 126 Amnesty International, Op Cit, p. 121-125.

* 127 Nul n'a eu connaissance de la suite des événements. Aussi, en nous basant sur les intentions affirmées du Cameroun de les expulser, nous essayerons d'en soulever les conséquences juridiques au cas où l'Etat aurait mis ce projet à exécution.

* 128 Institut pour les droits humains et le développement, Compilations des décisions sur les communications de la Commission Africaine des droits de l'homme et des peuples : extrait des rapports d'activités1994-2001, Dakar, Imprimerie Saint-Paul, 2002, pp.11-15.

* 129 Ibid, pp. 387-391.

* 130 Cf définition de l'extradition en note 54.

* 131 Cet article prévoit notamment qu'un étranger « ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa liberté y (est) menacée ».

* 132 Revue trimestrielle des droits de l'homme, La police des étrangers et la Convention européenne des droits de l'homme, 10e année, N° 37, 1er janvier 1999, Bruxelles, Bruylant, 1999, pp.178-179.

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