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Le régime juridique des étrangers au Cameroun


par Martine AHANDA TANA
Chaire UNESCO des droits de la personne et de la démocratie de l'université d'Abomey-Calavi de Cotonou au Bénin - DEA droits de la personne et de la démocratie 2004
  

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SECTION 2- LES ETRANGERS A STATUT EXCEPTIONNEL

Comme vu précédemment, il s'agit des personnes les plus vulnérables que le droit international a voulu protéger par des conventions spécifiques, à savoir, la Convention de Genève de 1951 et celle de l'OUA de 1969 qui protègent le réfugié du fait qu' « il est privé en fait ou en droit de l'appui de son gouvernement »133(*) ainsi que la Convention relative au statut des apatrides134(*). Malheureusement, ces Conventions sont perpétuellement violées au Cameroun  car le réfugié rencontre des difficultés précises (Paragraphe 1) et l'apatride est exposé à un traitement encore plus inhumain (paragraphe 2).

Paragraphe 1- La problématique des droits du réfugié

La protection des réfugiés incombe en premier lieu au gouvernement du pays d'accueil qui doit se conformer aux dispositions des Conventions y relatives. Mais plusieurs exemples démontrent qu'il n'en est rien au Cameroun (A). En second lieu, le HCR, tout en veillant à ce que l'Etat respecte ses engagements, doit offrir aux réfugiés la possibilité de commencer une nouvelle vie135(*). La pratique révèle que cela est fort ambigu (B).

A) Les obligations de l'Etat

La Convention de Genève de 1951 laisse la liberté à chaque Etat d'établir les procédures de reconnaissance de la qualité de réfugié. Comme vu précédemment, en 2004, le Cameroun a accordé le statut de réfugié à soixante mille personnes et six mille demandeurs d'asile sont en attente136(*). Nous notons, d'ailleurs, une augmentation de ce nombre. En effet, Au 31 décembre 1999, 49 940 réfugiés et 740 demandeurs d'asile résidaient sur le territoire national137(*). A la lecture de l'article 2(6) de la Convention de l'OUA de 1969 précitée, l'on peut noter que la sécurité des réfugiés incombe aux gouvernements hôtes car c'est sur leur territoire qu'ils vivent138(*).

Or il apparaît que cette Convention n'est pas scrupuleusement appliquée par le Cameroun. En effet, douze réfugiés de Guinée Equatoriale arrêtés au mois de septembre 1997 sont demeurés toute l'année en détention en dépit des efforts du HCR de les réinstaller dans un pays tiers. Au mois d'avril, Amnesty International a de nouveau prié les autorités de ne pas rapatrier de force les ressortissants emprisonnés139(*)car le droit international qualifie ces pratiques de rapatriements illicites.

Par ailleurs, les réfugiés ont de plus en plus de problèmes140(*) parmi lesquels nous pouvons citer la confusion sur les questions cruciales de leur naturalisation et d'un droit d'accès au titre foncier. Il s'agit également des difficultés d'accès à l'éducation, à la santé, à l'emploi ainsi qu'à tous les autres droits fondamentaux. Nous tenons à préciser que selon une enquête menée en janvier 2000, 48 % des réfugiés urbains résidant à Yaoundé déclaraient être victimes de stigmatisation et de discrimination de la part des populations et du personnel soignant des établissements sanitaires à cause de leur origine étrangère et de leur état de séropositivité. Ils étaient également victimes des rapatriements forcés et de l'enrôlement « manu militari ». Ces immigrés se plaignaient, en outre, du travail des enfants réfugiés tchadiens dans les plantations au Nord du pays. Ils affirmaient être victimes des arrestations arbitraires et subiraient des coups, blessures et autres formes de tortures dans les prisons. Par ailleurs, cette enquête révèle que l'administration pénitentiaire ne fournissait aucun motif de ces arrestations. Elle empêchait les réfugiés détenus et emprisonnés de communiquer avec l'extérieur ainsi que de recourir aux services d'un avocat, d'un interprète et d'un médecin. En outre, ils ont eu des difficultés de porter plainte contre les policiers car, il s'ensuivait toujours des représailles et des expulsions illégales.

L'Etat a tendance à légitimer les expulsions illégales des réfugiés, ainsi que les autres formes de violations de leurs droits fondamentaux, alors que la Commission Africaine des droits de l'homme et des peuples l'a interdit dans les Communications 27/89, 46/91 et 99/93 (Organisation mondiale contre la torture et l'Association internationale des juristes démocrates, Commission internationale des juristes (CIJ), Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et Union interafricaine des droits de l'homme contre Rwanda)141(*). Vu la diversité de ces violations, comment ne parlerait-on pas de la « mise en fourrière » des droits du réfugié  au Cameroun ? En effet, celui-ci a fui la persécution dans son pays et se trouve encore confronté à la persécution dans le territoire d'asile.

Néanmoins, il est important de relever deux actions positives, posées par l'Etat. En premier lieu, nous ne manquerons pas de rappeler une réussite du droit extraditionnel camerounais. Il s'agit du refus de l'Etat d'extrader huit réfugiés politiques au Rwanda aux lendemains du génocide d'avril 1994. En effet, la Cour d'Appel du Centre a estimé que les réfugiés risquaient d'être soumis à la torture142(*). En second lieu, nous notons une certaine évolution virtuelle du droit interne relatif à la protection de ces étrangers car dès le mois de juillet 2005, l'Assemblée nationale a commencé à étudier un projet de loi portant statut du réfugié au Cameroun143(*). Il précise que les réfugiés séjournant sur le territoire pourront désormais revendiquer « tous les droits fondamentaux et les dispositions prévues aux chapitres II, III, IV et V des Conventions de Genève de 1951 et de l'OUA de 1969 relatives aux réfugiés, dans la limite des droits accordés aux nationaux ». Il s'agit là de la manifestation d'une réelle prise de conscience officielle par le gouvernement face aux problèmes rencontrés par les réfugiés.

Néanmoins, ils vivent encore sous le poids de nombreux maux. Nous remarquons, d'ailleurs, que ce phénomène existe aussi dans la plupart des pays d'Afrique. A titre d'exemple, la situation des réfugiées au Burkina-Faso144(*) laisse également à désirer depuis la fermeture du bureau du HCR en 2001.

Est-ce à dire donc que le problème des réfugiés ne se réduit pas au niveau de l'Etat ? En d'autres termes, le HCR n'est-il pas aussi responsable de certaines atteintes à leurs droits ?

* 133 SALOMON (Robert), Les réfugiés, Vendôme, PUF, 1963, p.8.

* 134 Nous tenons à rappeler qu'en vertu de l'article 1(A)(2)de la Convention de Genève de 1951, de l'article 1(2) de son Protocole de 1967 et de l'article 1(1) de la Convention de l'OUA de 1969, un apatride qui se sent persécuté dans le pays où il avait sa résidence habituelle bénéficie aussi de la qualité de réfugié. Il est un apatride-réfugié protégé également par les textes applicables au réfugié ordinaire, au même titre que ce dernier. Cependant la condition juridique de l'apatride au sens stricte du terme est garantie par la Convention relative au statut des apatrides.

* 135 UNHCR, Réfugiés, Volume 2, Numéro 123, Milan, Service de l'information du HCR, 2001, p16.

* 136 Cf. Première Partie, Chapitre 1.

* 137 Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, Les réfugiés dans le monde : cinquante ans d'action humanitaire, Paris, Autrement, 2000, pp.306-309 et pp.311-313.

* 138 Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, Les réfugiés dans le monde..., Op Cit, pp.248-249.

* 139 Amnesty International, Rapport 99, Londres, EFAI, 1999, p.216.

* 140 Voir Revue Camerounaise de presse Le Messager et NTIGA (Léger), 20 juin 2004 (journée mondiale des réfugiés).

* 141 Institut pour les droits de l'homme et le développement, Op Cit, pp.330-335.

* 142 Décision de la cour d'appel du Centre, IN  Affaire N°337/COR, 21 février 1997, Yaoundé, Cameroun.

* 143 Voir Revue Camerounaise de presse Le Messager et NDONG (Thierry), « Réfugiés au Cameroun : des jours meilleurs se dessinent », Douala, 7 juillet 2005. ( http://fr.allafrica.com/stories/200507070896.html ).

* 144 Consulter le Rapport sur l'état des droits humains au Burkina-Faso - période 1996-2002, S.V., Mouvement burkinabé des droits de l'homme et des peuples (MBDHP), 2002, pp.76-79.

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