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L'évolution de la notion d'associé

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par Florent Kuitche et Philippe Mankessi
Université Nice Sophia antipolis - Master II droit économique des affaires 2007
  

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Section II : la notion d'associé élargie à l'investisseur.

L'actionnaire a toujours été regardé comme un associé. En revanche le sort de l'investisseur qui participe au pouvoir reste généralement sous silence. Le moment est venu de s'attarder sur le régime que l'on applique à l'investisseur associé au contrôle. Le constat est simple. Partant de la différence des profils des actionnaires, la doctrine a proposé un critère général permettant de déterminer qui peut se prévaloir de la qualité d'associé. En pratique, l'épargnant ne peut y prétendre et se voit exempté des obligations propres à la qualité d'associé, pour ne bénéficier que de ses droits83(*). Au contraire, l'actionnaire qui participe au pouvoir est associé à part entière et se voit soumettre au statut d'associé dans son intégralité, avec ses droits et ses obligations. Néanmoins les conséquences de cette qualification sont faibles ; l'investisseur professionnel est un associé particulier, mais il est traité comme un associé ordinaire, et comme un minoritaire ordinaire. La notion d'associé est donc impuissante, car elle ne s'applique pas à lui. Par conséquent, si la qualification d'associé est perspicace dans son fondement (Paragraphe I), elle s'avère inopérante dans sa mise en oeuvre (paragraphe II).

P1) une qualification perspicace dans son essence.

Est associé, celui qui a fait un apport en société et qui intervient dans les affaires sociales84(*). De nos jours, la qualité d'associé, ou du moins celle de véritable associé, ne dépend plus seulement de la possibilité abstraite d'intervenir dans la vie sociale, mais de la faculté de le faire utilement. Le critère est qualitatif et s'apprécie in concréto. Peu importe que l'on soit majoritaire ou minoritaire, dès lors qu'on a la volonté de participer au contrôle, que ce soit pour le mener ou pour le contester. De ce point de vue, l'investisseur professionnel relève entièrement de la qualité d'associé.

La législation contemporaine offre de nombreux exemples de confusion entre l'associé et l'actionnaire. Le législateur ne distingue pas formellement les investisseurs et les associés réels. On pourrait objecter qu'il n'est dans la société que temporairement, même lorsqu'il investi à long terme, et que l'ambiguïté de sa mission « naturelle » d'investisseur commande de le considérer avec indulgence85(*). Néanmoins, son rôle actif dans la société et la pression qu'il exerce sur les détenteurs du contrôle, en font un véritable associé, au même titre que les actionnaires controlaires. Sans même aller jusqu'à reconnaître son droit concurrent au contrôle, on peut donc valablement le qualifier d'associé, en raison de son seul « activisme »86(*). Quelque soit son engagement dans le capital, l'investisseur est techniquement animé d'un affectio societatis, caractérisé par sa participation active et intéressée au processus de prise de décision87(*). Dès lors, il est naturel qu'il soit soumis pleinement au statut d'associé, générateur de droit et d'obligation.

Confus sur ce point, mais pragmatique et flexible, le droit des sociétés se prête aisément à cette logique. Certes, la distinction entre « vrai » et « faux » associé en est encore à ses balbutiements. Elle relève de la pratique du fonctionnement de la société cotée sans être reconnu explicitement88(*). Cependant elle est sous-jacente à un bon nombre de décisions, et la jurisprudence en tient compte, même si elle se garde bien d'y fonder ses solutions89(*). L'investisseur bénéficie donc des droits de l'associé ordinaire, tandis qu'il a un pouvoir bien plus important que celui d'un simple associé. Ensuite, on ne peut par exemple lui imposer une augmentation des engagements. Par ailleurs, comme tout associé, il est libre de céder ses titres à tout moment. En outre, paré d'un double visage d'associé et d'investisseur, s'appuyant sur une jurisprudence solide, il va se soustraire aux dispositifs des clauses léonines s'il cherche à profiter d'un prix de rétrocession arrêté à l'avance90(*). De toute évidence le droit des sociétés n'en n'est pas encore au stade des nuances, au sein de la catégorie des véritables associés. Quoi qu'il n'ait rien d'un associé ordinaire, le pouvoir politique engendré par sa puissance financière est donc occulté par le statut d'associé.

Il reste que le système n'est cohérent qu'en apparence. Aussi sensée qu'elle puisse être, la qualification d'associé de l'investisseur se trouve enfermée dans ses propres limites, celles du classicisme. En revanche une fois identifié, l'investisseur n'est ni un associé ordinaire, ni un minoritaire ordinaire, si bien que le soumettre à un régime qui ne tient pas compte de ses particularités, revient à démunir la qualification de son utilité.

* 83 .V. I. Parachkévova, Pouvoirs et financement dans la société anonyme cotée, thèse Nice 2OO4, n° 235.

* 84. A. VIANDIER, op. Cit. n° 153 et s. p.151 et suivant.

* 85. V. F. MANIN, les investisseurs institutionnels, thèse, Paris I, panthéon Sorbonne, 1996.

* 86. V. I. PARACHKEVOVA, Le pouvoir de l'investisseur professionnel dans la société cotée, droit et économie, LGDJ, 2005, n°168, p. 117.

* 87. V. sur cette définition de l'affectio societatis, C. Ruellan, la loi de la majorité dans les sociétés commerciales, thèse paris II, 1997, n° 352, p. 208.

* 88 . I. Parachkévova, thèse op. cit. n° 235.

* 89. L'exemple est particulièrement révélateur s'agissant des clauses léonines où les arguments juridiques permettant de valider les clauses ostensiblement léonines, ne correspondent pas aux vrais raisons de cette clémence : l'absence de qualité d'associé des bénéficiaires. V. F. X. Lucas, « promesse d'achat de droits sociaux à prix garantie et prohibition des clauses léonines a la recherche de la cohérence perdue», JCP 2000-E-II-168.

* 90. Ceci résulte de l'appréciation souple de la qualité même d'associé. V. F.X. LUCAS, « promesse d'achat de droits sociaux à prix garantie et prohibition des clauses léonines. A la recherche de la cohérence perdue... » op. cit. ; « Les actionnaires ont-ils tous la qualité d'associé ? », Rev. Dr. Bancaire et financier. , n° 4-juillet/Août 2002, édition jurisclasseur, p. 216.

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