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Prosélytisme et liberté de religion dans le droit privé marocain


par Meriem AZDEM
Université Hassan II - Licence 2007
Dans la categorie: Droit et Sciences Politiques > Droits de l'homme et libertés fondamentales
   

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Section 2 : L'incrimination du prosélytisme :

Le phénomène des nouveaux mouvements religieux suscite l'intérêt et parfois même la passion. Le nombre des articles de presse et le soulèvement de la question devant le parlement en attestent. La plupart de leurs conclusions s'accordent pour stigmatiser les nouveaux courants religieux qui ne poursuivent qu'un but : diffuser leur croyance sans se préoccuper des moyens à employer pour y parvenir.

Pourtant, si l'on étudie les décisions rendues par les cours et les tribunaux, on se rend compte que ce qui est présenté comme le fléau du XXe siècle n'a pas, en réalité, l'importance que l'opinion publique semble lui accorder. Certes quelques mouvements religieux et quelques membres de communautés religieuses se sont rendus coupables d'infraction dans le but de convaincre ou d'astreindre autrui à adopter les croyances qu'ils ont pour tâche de répandre. Néanmoins, les décisions de condamnation restent extrêmement rares.

L'étude de la jurisprudence relative à cette question fait ressortir différentes catégories de contentieux. L'une d'entre elles est liée au seul but parfois visé par l'adhésion de nouveaux adeptes : l'enrichissement du mouvement, voire du ministre du culte100(*). Une autre regroupe les infractions portant atteinte à la liberté d'aller et venir de celui dont on veut faire le prosélyte.

Ces deux catégories de contentieux attestent une certaine domination du propagandiste sur ses cibles. La domination consiste en effet à asseoir une certaine emprise sur autrui. Dans la première hypothèse, cette emprise est seulement morale, psychologique, elle est établit par l'usage d'artifice (A), dans la seconde, la domination est physique, elle prend alors la forme d'une contrainte (B).

A. Prosélytisme réalisé au moyen d'un artifice :

Le mensonge, la duperie, la mise en scène sont autant d'artifices dont peut user un propagandiste peu scrupuleux pour tenter de convertir autrui. Celui-ci fait en sorte que la nouvelle recrue se sente bien dans sa nouvelle foi ou dans le groupe. Toutefois, la présentation qui est faite à cette dernière ne correspond pas toujours à la réalité. Cette présentation erronée fait partie du processus sournois par lequel le prédicateur parvient à asseoir une sorte de domination latente sur le prosélyte. C'est en cela que ces méthodes sont abusives. Par ces méthodes, le propagandiste vise à obtenir des avantages de ses prosélytes, ces avantages sont souvent de simples avantages financiers.

L'idée selon laquelle quelques mouvements religieux n'hésitent pas à user de ruses pour convaincre les prosélytes de se départir de leur fortune est fort répandue en France par exemple, mais bien moins au Maroc.

Les questions d'argent ont pourtant toujours été liées à l'exercice du culte. Cependant, il ne faut pas les associer systématiquement à des pratiques illégales. Tous les chefs spirituels sont préoccupés par la nécessité de s'assurer la plus grande indépendance possible à l'égard des choses du monde afin de pouvoir mener à bien leur mission.

La sollicitation des fidèles n'est pas contestable en soi101(*). Elle ne le devient que lorsqu'elle ne respecte plus la liberté individuelle. Lorsque le consentement du prosélyte qui répond favorablement à l'appel du chef spirituel enjoignant les fidèles à contribuer au denier du culte a été forcé ou s'est effectué alors que l'adepte n'est pas en état complet de discernement, la sanction du droit est alors indispensable.

* 100 Souvent appelé « gourou » dans le cas des sectes

* 101 Par exemple l'église catholique en France, fait, comme toute les autres religions, très largement appel à la contribution des fidèles. Ainsi pour la seule année 2002 l'élise de France a reçu 436 millions d'euro de ses fidèles dont 130 millions provenant de la quête (L'Expansion, janvier 2004, n°682, p. 31)

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