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Des Etats particuliers libres à l'organisation sociale mondiale


par Raphaël BAZEBIZONZAS
Saint Pierre Canisius - Bachelier en Philosophie 2006
  

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3.2.2. La coopération mondiale des Etats

« L'organisation de la société universelle incombe aux Etats tels qu'ils existent dans le monde contemporain. »61(*) Au niveau universel se déploie l'ensemble des structures de l'ONU, fondées en 1945 à Bretton-Woods, et de ce qui a subsisté de la Société des Nations, comme le Bureau International du Travail. L'Organisation des Nations Unies elle-même se présente comme un Parlement ouvert à tous les Etats. Mais cette Assemblée n'est pas élue directement ; simple « Sénat des Etats », sans moyens financiers ni militaires propres, elle est très loin d'un gouvernement mondial. Une pléiade d'organisations multilatérales spécialisées gravite autour d'elle, les dernières en date étant l'OMC - Organisation Mondiale du Commerce - et la Cour Criminelle Internationale dont la création vient d'être décidée. Dans l'espace de la puissance, l'astre du G8 contrôle le mouvement des affaires monétaires, financières et économiques importantes du monde. Au plan juridique, plusieurs conventions internationales commencent à organiser un droit public mondial commun à tous les Etats à partir du moment où une fraction suffisante d'entre eux les ont ratifiées. Cet ensemble passablement disparate, annonciateur de l'organisation sociale mondiale, appelle au moins trois remarques.

Si tous les Etats qui le souhaitent peuvent y participer, tous les Etats n'y sont pas pour autant égaux. Les Etats-Unis et les vainqueurs de 1945 y jouent un rôle central, ainsi que le Japon, l'Allemagne et quelques autres pays européens. L'influence des Etats n'est pas forcément en lien avec leur puissance réelle. Cette distorsion, patente au Conseil de Sécurité, n'est certainement pas un facteur d'efficacité. En dernier ressort, toute action internationale lourde repose en fait sur la puissance et les volontés américaines. Les exemples abondent et sont connus de tous. C'est d'ailleurs en vue de protester contre les pratiques mafieuses des institutions financières internationales que le professeur Joseph STIGLITZ a démissionné de son poste de vice-président de la Banque Mondiale. Dans son livre intitulé La grande désillusion, il dénonce le musellement de l'économie mondiale par les pays industrialisés. « L'occident, dit-il, a organisé la mise en place de la mondialisation de façon à recevoir une part disproportionnée de ses bénéfices aux dépens du monde en développement. »62(*) Abordant dans le même sens, Jean ZIEGLER taxe la mondialisation d'être un archipel de prospérité flottant sur un océan de misère63(*). On restera toujours en dehors de l'unification mondiale de la société tant « que la compétition des sociétés particulières reste le moteur principal du progrès matériel ».64(*)

A quoi sert l'ONU ? A question simple, réponse malaisée si l'on veut dépasser les a priori et les jugements légers. Conçue au départ pour maintenir la paix et faciliter le développement économique - chacun avait alors en mémoire que la crise de 1929 avait favorisé les fascismes -, elle n'a pas pu éviter de nombreux conflits ni répandre rapidement le développement. Certains pensent que l'équilibre de la terreur a été plus efficace pour éviter une troisième guerre mondiale ; les pays qui ont su se développer vite, en Asie par exemple, l'ont fait davantage en utilisant au mieux le libéralisme qu'à travers l'aide publique au développement. Il est clair cependant que ce fouillis institutionnel, déconnecté des citoyens, sert à éviter la propagation des crises de tous ordres, ce qui n'est déjà pas si mal. Les problèmes se multiplient parce « qu'une organisation centrale n'existe pas encore »65(*)

L'important n'est peut-être pas dans les résultats concrets mais dans la symbolique et la société. Nous nous trouvons devant un gigantesque processus d'auto-apprentissage du travail en commun par des Etats très différents. Un tel processus ne peut manquer de se traduire par l'apparition progressive d'une société mondiale de la gouvernance et de l'approche des problèmes. L'ONU n'est certainement qu'un symbole d'une réelle communauté mondiale des Etats, décidant de concert et ayant les moyens réels d'intervenir. Mais sans le symbole, parfois réduit à un simulacre, pourrait-on avancer plus vite ? Certainement pas. Cet auto-apprentissage planétaire de l'humanité ne se cantonne pas au niveau des Etats. Lorsque l'ONU traite de l'environnement, de la démographie, des femmes ou des Droits de l'Homme, ce sont les sociétés et les personnes qui peuvent entrer en débat. Nécessairement, des éléments communs de culture se dégagent peu à peu ainsi que des lignes de partage claires. Discuter, entendre les autres, c'est déjà appartenir symboliquement à une même société66(*). Ainsi se prépare, de manière plutôt involontaire, le jour où l'on basculera de la symbolique à la pratique, le jour où des forces sociales suffisantes exigeront que ce niveau politique universel soit plus démocratique et plus effectif, moins soumis à une seule puissance. Alors se posera vraiment le problème de la coexistence des Etats avec ce niveau politique universel.

3.2.3. Vers une nouvelle organisation sociale mondiale ?

Obligés de coopérer pour survivre, les Etats particuliers profitent de la mondialisation actuelle, pour sortir de leur isolement et se lier entre eux de multiples façons. Ce faisant et sans le vouloir explicitement, ils deviennent les briques d'un Lego politique planétaire renouvelant les concepts de la politique. A long terme, ce mouvement pourrait aboutir à une sorte d'« Etat mondial », s'ajoutant aux Etats actuels sans les supprimer, sans nécessiter cependant la création d'un « gouvernement mondial » qui paraît fort peu probable. Après tout, l'Etat reste incontournable. Eric Weil pense qu'« il n'y a pas d'organisation internationale comparable à l'organisation de l'Etat ; mais puisque chacun doit craindre les résultats de l'emploi de la violence, tous ont un intérêt commun à l'établissement d'une telle organisation »67(*). Il reste convaincu qu'« il est possible et licite d'envisager l'état à venir de l'humanité - à venir (...), non au sens d'une prédiction, mais au sens d'un but à atteindre et qui sera ou non atteint »68(*). Et quel est ce but ? Le but d'une telle organisation « est que la compétition entre les sociétés particulières disparaisse en même temps que la lutte entre les Etats historiques »69(*). Ainsi, tout individu accédera à la gestion des intérêts communs du monde. Il pourra saisir la justice et obtenir par là le respect de ses droits les plus fondamentaux, fondés ici sur la structure même de la société du travail.

* 61 PP., p. 244.

* 62 Joseph STIGLITZ, La grande désillusion, Traduction de l'anglais par Paul Chemla, Paris, Fayard, 2002, p.31.

* 63 Cf. Jean ZIEGLER, Les nouveaux maîtres du monde et ceux qui leur résistent, Paris, Fayard, 2002.

* 64 PP., p. 241.

* 65 Ibid.

* 66 Selon Eric Weil, « on reproche souvent à ces institutions - supra-nationales - d'être inefficaces et de ne produire que des bavardages ou des proclamations de foi aussi morales que creuses. De telles critiques sont compréhensibles ; elles sont en même temps injustes : c'est dans des bavardages et des proclamations, dit-il, que naissent l'efficacité et les discours vrais. PP., p. 228.

* 67 PP., pp.237-238.

* 68 PP., p. 242.

* 69 Ibid.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci