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Les aspects juridiques de la protection de l'environnement dans les forets communautaires au Cameroun

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par Henry NKOTO EDJO
Université de Limoges - Master2 Droit International et Comparé de l'environnement 2007
  

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P1- L'exigence de la personnalité juridique.

Puisqu'il est question de confier la gestion d'une forêt à une communauté locale, la loi a voulu que celle-ci soit identifiable et qu'elle existe au plan juridique : donc qu'elle soit dotée de la personnalité morale pour pouvoir traiter avec l'administration d'une façon juridiquement soutenable. La personnalité juridique est précisément cette aptitude à être titulaire actif ou passif de droits subjectifs6(*), c'est elle qui confère aux communautés l'aptitude à participer en tant que telle à la vie juridique. Il convient néanmoins de préciser que, la personnalité juridique de la communauté est distincte de celle des divers membres qui la composent7(*). Fort donc de cette exigence, la législation a prévu un ensemble d'entités autorisées à faire figure de représentation des communautés locales désireuses de gérer une forêt du domaine forestier non permanent8(*) ; chacune de ces entités de gestion présente des caractéristiques particulières qui ont des incidences sur la potentielle gestion de la forêt (A). De même, les modalités de mise en oeuvre de l'entité de représentation de la communauté participent de la promotion de la démocratie locale qui elle même est un adjuvant de la protection de l'environnement (B).

A- Les entités de gestion requises.

En vue de déposer une demande d'attribution d'une forêt communautaire et de voir la demande approuvée, une communauté est tenue de constituer une entité juridique reconnue par les lois en vigueur9(*), la communauté locale doit donc constituer l'entité juridique avant la tenue de la réunion de concertation posée par l'article 28 alinéa 1 du décret de 199510(*).

Les différentes entités prévues par les législations en vigueur sont donc constituées par :

- les associations

- les coopératives

- les groupements d'initiative commune en abrégé GIC

- les groupements d'intérêt économique.

Une communauté peut donc se constituer en l'une des entités juridiques sus mentionnées selon ses préférences, l'objectif étant simplement qu'elle respecte la condition légale qui confère le droit de postuler pour l'obtention d'une forêt à exploiter. Ces entités juridiques sont régies par trois différentes lois, à savoir, la loi n° 90-53 du 19 décembre 1990 sur la liberté d'association, la loi n° 92/006 du 14 aout 1992 et le décret n° 92/445/PM du 23 novembre 1992 sur les coopératives et les groupements d'initiative commune, et la loi n° 93/015 du 22 décembre sur les groupements d'intérêt économique.

L'objectif ici à savoir l'exigence pour les communautés de se constituer en l'une des catégories légales est de garantir tout d'abord et de façon naturelle et automatique la représentativité de toutes les factions sociales de la localité ensuite, de permettre que les préoccupations propres à chacun de ces différents groupes soient prises en compte donc de créer un cadre favorable pour l'émergence de décisions consensuelles, sensées satisfaire tout le monde par ce que résultant de l'union des consentements des membres de la communauté.

Ce mode de fonctionnement de l'entité juridique présente plusieurs avantages d'où l'on peut penser que la responsabilisation de la communauté par l'attribution d'une forêt communautaire ne doit pas être perçue comme un risque mais plutôt comme un facteur de gestion durable de l'environnement11(*). Toujours dans le même sciage, les statuts de l'entité juridique choisie peuvent faire l'objet d'une première rédaction générale puis être modifiés ou complétés par la suite selon les besoins.

Il convient de préciser qu'une entité juridique ne saurait bénéficier de plusieurs forêts communautaires. Seule une forêt communautaire unique peut être attribuée à une entité juridique crée à cet effet. Néanmoins, chaque hameau ou village peut créer plus d'une entité juridique, chacune d'entre elles pouvant alors déposer une demande d'attribution de forêt communautaire et se voir attribuer une telle forêt. Aussi, les entités juridiques requises par la loi pour la gestion des forêts communautaires peuvent, selon les besoins, inclure des membres de plusieurs villages ou hameaux au cas où les villages concernés partagent des ressources. L'appartenance à ces entités juridiques est régie par les lois et règlements en vigueur, ainsi que par les constitutions, statuts et règlements internes desdites entités juridiques. Enfin, les individus exerçant des activités dans plusieurs forêts communautaires peuvent faire partie des différentes entités juridiques associées aux forêts concernées, par conséquent jouir des bénéfices conférés aux membres de ces entités.

Pour ce qui est des particularités des différentes entités possibles, signalons que, les associations sont des entités faciles à former et à gérer. Il n'est pas nécessaire d'organiser une assemblée constitutive des membres fondateurs, la loi impose uniquement aux membres de déposer officiellement une demande ou une déclaration dans laquelle figure le nom, l'objet et le siège de l'association, ainsi que les noms et signatures (ou empreintes digitales du pouce) des associés, les fonctions et adresses des personnes responsables du fonctionnement de l'association, à la préfecture dont relève la zone où est situé le siège de l'association. Deux exemplaires des statuts de l'association doivent être joints à la déclaration au moment du dépôt, et il ne doit pas figurer dans ces statuts des dispositions prévoyant des activités portant atteinte à l'intégrité nationale. Le problème qui se pose ici est que la loi interdit aux associations non reconnu par décret présidentiel comme servant l'intérêt public, des subventions publiques, des dons et legs ou de distribuer des bénéfices à leurs membres. Alors, par souci d'une plus grande rentabilité du mouvement collectif il serait judicieux pour la communauté d'envisager de former plutôt l'une des trois entités juridiques restantes.

Concernant les coopératives, la distribution des bénéfices et ristournes aux membres dépend du volume de transactions effectuées par chaque membre12(*) ce qui amène à comprendre que la principale forme d'activité envisagée par la loi est la commercialisation des produits des membres. En plus, les systèmes de gestion des coopératives sont complexes et lourds, considérés comme ne pouvant pas toujours satisfaire les besoins immédiats en matière de gestion des ressources naturelles des communautés rurales. Il leur est imposé d'avoir une assemblée générale ou une assemblée de délégués, d'un conseil d'administration, d'un comité de surveillance, d'un directeur et d'un comité de vérification des comptes, tenus de satisfaire aux normes de l'UDEAC13(*).

Quant aux groupements d'intérêt économique, ils doivent être immatriculés au tribunal de première instance de la zone concernée. Leur objectif principal est l'amélioration des activités économiques des membres.

Au demeurant il est important de noter que, le groupement d'initiative commune est le mieux adapté au cas d'une forêt communautaire, puisque c'est la seule entité qui présente le plus de conditions compatibles avec les réalités des activités des communautés locales.

Quelle que soit l'entité juridique choisie par la communauté, il est important de tenir compte d'un point essentiel en ce qui concerne les forêts communautaires ; c'est la question de l'exonération fiscale. En effet, les associations, les coopératives et les groupements d'initiative commune jouissent généralement souvent d'une exonération fiscale en fonction de leurs activités. Le paiement d'un impôt sur les sociétés ou sur le revenu ne peut valablement se fonder que sur la distribution des bénéfices issus de la vente de produits forestiers. Dans le cas des associations, la distribution des bénéfices est spécifiquement interdite par la loi14(*); tout ceci invite à penser que dans les zones rurales, si les objectifs déclarés et effectifs de l'entité juridique sont l'amélioration des conditions de vie de la communauté par des projets sociaux, l'exonération de l'impôt sera maintenue et constituerait un avantage substantiel pour les communautés.

Cette mise sur pied d'un groupe de personnes sensées agir en communauté pour le bien être commun n'est pas sans conséquences sur le plan social et surtout politique.

B- La promotion d'une démocratie locale.

Comme souligné plus haut, la participation des populations dans les processus de gestion de l'environnement est l'un des principes fondamentaux du droit international de l'environnement. A coté de la reconnaissance du bien fondé d'un tel principe, il est important de se pencher un temps soit peu sur ses implications afin de mieux cerner le lien avec la démocratie.

En fait la nouvelle politique forestière du Cameroun met l'accent sur l'intégration des stratégies innovatrices en matière d'utilisation des zones rurales au niveau national. Cette approche propre au nouveau contexte économique national tient également compte comme nous l'avons souligné plus haut, des préoccupations de la communauté internationale par rapport à la gestion durable de l'environnement. Le deuxième des cinq objectifs généraux de la nouvelle politique forestière du Cameroun consiste à : « Améliorer la participation des populations à la conservation et à la gestion des ressources forestières, afin que celles-ci contribuent à élever leur niveau de vie »15(*). Toujours dans le même sens, la nouvelle politique estime que : «  en associant les populations rurales dans sa mise en oeuvre, notamment à travers le volet promotion des forêts des communautés villageoises, elle vise à garantir à celles-ci des avantages substantiels et à les inciter à mieux protéger notre couvert forestier ».

A regarder de près toutes ces dispositions, l'on se rend compte qu'il existe de façon sous jacente un lien viscéral et ontologique entre participation des populations et protection de l'environnement; mais l'élément qui sert de base à l'idée de démocratie se trouve à l'article 28(1) du décret de 1995 qui dispose que : « toutes les composantes de la communauté doivent être consultées sur la question de la gestion d'une forêt communautaire ». Comme pour dire que l'entité juridique choisie doit être représentative de toutes les composantes de la communauté concernée et non uniquement d'un petit groupe de personnes. Ensuite, lors de la réunion de concertation, il appartient au responsable local de l'administration de s'assurer, en premier lieu, que toutes les composantes de la communauté concernée ont été consultées et approuvent les propositions. Il doit aussi se rassurer que les représentants des communautés avoisinantes assistent à la réunion de concertation tout au moins pour pouvoir défendre les intérêts qui sont les leurs16(*). Si le responsable local de l'administration est convaincu que toutes les composantes de la communauté en question n'ont pas été consultées, que les communautés avoisinantes ne sont pas légitimement représentées, ou que les parties présentes ne parviennent pas à une entente, il est en droit de suspendre la réunion. D'autres réunions peuvent alors être organisées, le cas échéant, afin de régler les problèmes en suspens.

L'on constate donc que l'association effective des populations dans le processus de gestion des forêts a d'abord pour avantage de les responsabiliser mais aussi et c'est d'ailleurs l'aspect à relever ici, de favoriser une appropriation du processus par les populations elles même, puisque la loi exige la tenue des réunions préliminaires et de concertation en vue d'un consensus communautaire

Tous ces points donnent de façon suffisante la preuve d'une intention de démocratiser le fonctionnement effectif des entités de gestion des forêts communautaires. L'Etat devrait d'ailleurs s'investir sur ce terrain en encadrant ces communautés dans l'optique de les aider à régler et à gérer, dans le cadre de la loi, sous leur responsabilité et à leur profit une part importante des affaires publiques afin d'aboutir à une véritable autonomie locale preuve d'un processus démocratique réussi.

A coté de l'exigence de la personnalité juridique sus évoquée, l'élaboration du plan de gestion de la forêt est aussi une condition importante acquise à la protection de l'environnement.

* 6 François Terré, introduction générale au droit, 2è édition précis Dalloz page 272.

* 7 Puisque en ce qui concerne les personnes physiques, la capacité de jouissance est la règle alors qu'avec les groupes de personnes il convient toujours de ressortir les particularités liées à la nature même du groupe (groupements, associations, sociétés, syndicats) voir le traitement juridique des personnes morales in François Terré, op cit, pp 302-303

* 8 En effet la loi portant régime des forêts distingue dans le domaine forestier national d'un coté les forêts permanentes dont font partie les forêts domaniales et les forêts communales (art21) et de l'autre coté les forêts non permanentes composées de forêts du domaine national, de forêts communautaires et de forêts des particuliers (art34). Il est précisé que les forêts permanentes doivent couvrir au moins 30% de la superficie totale du territoire national et représenter la diversité écologique du pays (art22).

* 9 Décret de 1995, art 28, al 3 : « Cette communauté doit avoir la personnalité morale, sous la forme d'une entité prévue par les législations en vigueur ».

* 10 Il s'agit bien sûr du décret n°95/531PM du 23 aout 1995 fixant les modalités d'application du régime des forêts.

* 11 Michel Prieur tronc commun cours n°5 les principes généraux du droit de l'environnement consultable sur le site envidroit. « La philosophie politique qui est attachée à l'environnement implique que les citoyens soient actifs face aux problèmes d'environnement. La protection de l'environnement, si elle est devenue une obligation de l'État, est avant tout un devoir des citoyen ». En effet, le principe de participation est l'un des principes fondamentaux du droit international de l'environnement.

* 12 Loi n° 92/006 du 14 aout 1992 portant sur les coopératives et les groupements des initiatives communes. Art 11 et art 35 al 1.

* 13 Union Douanière et Economique des Etats d'Afrique centrale devenue CEMAC, Communauté Economique et Monétaire des Etats d'Afrique centrale.

* 14 Loi de 1990, art2

* 15 Manuel des procédures d'attribution et des normes de gestion des forêts communautaires. pp 5-6

* 16 C'est généralement souvent pour vérifier que les limites de la forêt n'empiètent pas sur leurs propriétés foncières c'est bien pourquoi leur approbation des limites proposées pour la forêt communautaire doit dument être consignée dans le compte rendu.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams