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Analyse comparée des stratégies de désendettement public pour la Zone UEMOA

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par Drissa SANGARE
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 2 Recherche Finances Publiques et Fiscalité 2007
  

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CONCLUSION

Nous avons vu que le problème de la dette, malgré les réaménagements effectués par les créanciers afin de rendre les débiteurs solvables, la dette des pays pauvres reste un problème récurrent.

L'option en faveur d'une annulation de la dette est défendue par les représentants de la société civile que l'on range habituellement sous l'appellation d'altermondialiste. Pour cette mouvance, par ailleurs très hétérogène par ses discours et ses projets, la dette des pays du Tiers Monde est illégitime et constitue une forme de « criminalité financière contre le développement humain ». L'effet « boule de neige » de la dette, en rendant impossible toute perspective de développement au Sud, justifierait largement que celle-ci soit annulée. L'audit du stock de la dette est préconisée dans le but de déceler des dettes odieuses et donc illégitimes.

Cependant, pour d'autres, le plaidoyer en faveur de l'annulation de la dette reposerait sur des postulats qu'il conviendrait de démystifier.

Pour ceux-ci, « annuler n'est pas aider ». Rien ne justifie que l'on considère la dette comme étant intrinsèquement pernicieuse. Pour progresser, les pays, comme les individus, doivent emprunter. Ce qui importe, c'est que les fonds obtenus soient utilisés à des fins productives et rentables. La réalité démontre que les pays du Tiers Monde les plus endettés ne sont pas victime de l'exploitation du secteur privé. Le manque d'intérêt des entreprises multinationales à leur égard constitue leur handicap principal.

Ensuite, « l'allégement de la dette n'est pas nécessairement conforme au principe de justice». Parmi les 1,4 milliard de personnes très pauvres dans le monde, 30% environ

vivent en Inde. Or, ce pays n'est pas éligible à l'allègement de la dette car il gère ses affaires avec une relative sagesse. Les pays qui ne peuvent rembourser leurs dettes sont, dans l'ensemble, les plus mal gérés. C'est pour cette raison qu'il est injuste d'annuler la dette d'un pays sans tenir compte de ses résultats.

Enfin, « l'allègement de la dette ne favorise pas nécessairement la réduction de la pauvreté ». Si le poids de la dette enlève des marges de manoeuvre réelles aux pays endettés, à l'inverse, l'annulation de la dette ou même son allègement ne débouche pas nécessairement sous la forme d'une amélioration du sort des populations les plus démunies. L'élimination de la pauvreté de masse ne peut être conditionnée à la seule annulation de la dette internationale. Seule une croissance soutenue et rapide peut permettre d'y parvenir. Cette croissance dépend à son tour de la mise en oeuvre d'un ensemble de mesures de politiques macroéconomiques, dont la stabilisation budgétaire et monétaire, la liberté du commerce et l'assainissement de l'administration.

Entre ces deux idées, la problématique de la dette des pays pauvres demeure.

Lorsqu'un endettement public excessif et croissant s'est accumulé, un gouvernement dispose, en théorie, d'un ensemble important de dispositifs lui permettant de sortir de cette situation. Toutefois, en pratique, peu de voies sont à la fois réalisables et efficaces dans le contexte actuel des pays de la zone UEMOA :

- La voie privilégiée dans le passé est l'inflation, conséquence du financement monétaire de la dette.

Toutes choses égales par ailleurs, une hausse de l'inflation érode une part de la dette à moyen terme. Le taux d'intérêt réel diminue, voire devient négatif, et cela permet par monétisation (création monétaire destinée à financer les dépenses publiques) d'absorber une part importante de la dette. Cette voie, observée par exemple en France dans l'entre-deux guerres, est désormais exclue, du moins dans les pays de l'UEMOA, du fait du contrôle de l'inflation par une banque centrale commune et indépendante.

- Une autre pratique courante autrefois, principalement dans les pays en développement, mais également dans les pays industrialisés, est celle de la répudiation de la dette. Le risque de perte de confiance et de crédibilité est majeur et la période pendant laquelle le gouvernement trouve difficilement des prêteurs peut s'avérer longue. Enfin, faute de changement structurel dans la nature et la structure des recettes et dépenses, le gonflement de la dette recommence, appelant de nouveaux ajustements.

- Certains pays ont fait dans le passé, le choix de réduire leur dette par recours à une taxe unique et ponctuelle sur le revenu ou sur le capital (ceci a été utilisé par plusieurs pays, dont la France en 1924 qui, à la suite de la première guerre mondiale, porte le taux supérieur de l'impôt sur le revenu à 90 % pour les couples sans enfant). Les risques sont alors semblables à ceux de la répudiation à ceci près que le poids de la dette est largement réparti.

- Dans une logique voisine, une réduction de dette peut être obtenue en consacrant des recettes exceptionnelles à cette fin. C'est le cas par exemple de recettes de privatisations ou du produit des ventes de certains actifs de l'Etat. Cette solution peut permettre d'impulser une politique de réduction de l'endettement en produisant un effet immédiat et visible avant d'engager une réforme des facteurs qui ont généré la dérive des comptes publics et compléter ou se substituer à des formes plus traditionnelles de financement. En plus de la dégradation du bilan de l'État, cette politique trouve ses limites dans le fait que le stock d'actifs éligibles à la privatisation n'est pas illimité et notamment quant il s'agit des pays de la zone UEMOA. Par ailleurs, comme dans les cas précédents, cette méthode n'a aucun impact sur les causes initiales de l'endettement excessif qui risque de réapparaître à moyen terme. Enfin, avant de procéder à une vente totale ou partielle d'actifs publics pour rembourser la dette, des recherches sont essentielles, notamment des simulations de l'impact potentiel de la vente des actifs sur la taille relative de la dette publique, une évaluation minutieuse de la juste valeur des flux de revenus futurs des actifs concernés, et une analyse approfondie de l'impact d'un accroissement du contrôle privé dans les secteurs économiques touchés, peuvent éclairer la décision de cession.

- La gestion active de la dette peut, également, participer à la réduction de l'endettement en optimisant la structure et la nature des titres. Cependant, les gains susceptibles d'être réalisés demeurent limités et ne peuvent réussir à eux seuls à inverser une dynamique cumulative de la charge de la dette.

- Le remboursement de tout ou une partie de l'emprunt par anticipation, n'exige pas non plus de réforme structurelle de nature à dégager de recettes supplémentaires, mais dépend plutôt, de manière générale, d'une aisance financière, le plus généralement conséquence d'une remontée plus que prévu des cours des matières premières dont le pays débiteur est exportateur.

- L'action directe sur les déficits primaires pourrait être d'une certaine façon la voie incontournable pour réduire l'endettement public. Une baisse du déficit primaire appelle une augmentation des impôts ou une amélioration de leur perception et/ou une réduction des dépenses publiques, si possible en optimisant leur efficacité. Mais, comme énoncé plus haut, cela comporte des coûts politiques et économiques.

De même, la réduction des dépenses publiques ne doit pas grever la croissance potentielle à moyen terme. De fait, les dépenses publiques réputées productives (recherche et développement, éducation supérieure, soutien aux entreprises innovantes ou de haute technologie, investissement en infrastructures...) doivent être préservées.

- Le plus sûr moyen de réduire le ratio d'endettement est certainement d'augmenter la croissance économique. À court terme, les conséquences sont immédiates sur un plan comptable (le dénominateur plus élevé fait diminuer le ratio à numérateur constant), mais aussi sur le plan économique puisqu'une hausse du produit national implique moins de dépenses publiques, notamment sociales, et plus de recettes grâce au dynamisme des assiettes budgétaires.

Le problème de la dette des pays de l'UEMOA réside, à notre avis, dans les grandes difficultés qu'ils peuvent rencontrer pour augmenter, même à moyen terme, leur croissance (potentielle) de façon non négligeable. Il est admis qu'un contrôle des finances publiques ne nuit pas nécessairement à la croissance à moyen terme et, pour certains, peut même être une condition nécessaire, mais pas suffisante, à son rebond. En conséquence, une baisse du ratio de dette par des réformes structurelles conduisant à des baisses de dépenses publiques improductives, moyennant un éventuel coût transitoire, est une condition nécessaire et/ou suffisante pour relancer l'activité. Toutefois, les estimations statistiques du lien entre variables de finances publiques et croissance sont fragiles.

Nous croyons que dans le contexte actuel de réduction de la dette décidée par les créanciers au titre de l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés, les gouvernements respectifs des pays de la zone UEMOA pourraient adopter une politique de réduction du fardeau de la dette en procédant en des réformes structurelles, permettant de définir le périmètre d'intervention de l'Etat et partant des dépenses publiques. Les dépenses d'investissement doivent être préservées. La mise en place de ce procédé, permettra d'impulser la croissance, seule facteur, à notre avis, de long terme permettant un désendettement durable.

Enfin, un contrôle parlementaire efficace de l'endettement comme l'a réclamé la conférence annuelle du réseau parlementaire sur la Banque mondiale, doit passer par une budgétisation des opérations d'emprunt et d'amortissement de dette.

Les nouveaux moyens de financement des Etats doivent donc être à la fois les moins dommageables possibles sur le plan économique et les plus acceptables sur le plan politique.

Jusqu'à une période très récente, des accommodements techniques (rééchelonnement, approches par menu) ont permis de rendre artificiellement le fardeau de la dette supportable. Mais, ces accommodements n'ont pu empêcher la dette d'enfler au point devenir un obstacle majeur au développement des économies des pays pauvres.

En définitive, sortir de la logique de l'endettement oblige à repenser les mécanismes et les politiques de croissance et du développement.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld