WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Réfugiés Hmong à  Montreuil-Bellay (Maine-et-Loire) - rapports aux lieux et diaspora

( Télécharger le fichier original )
par Pilippe MICHEL-COURTY
Université de POITIERS - Migrinter - Master 2 2007
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

v Cadre conceptuel et bibliographie

L'élaboration de la bibliographie s'est structurée avant tout autour de trois concepts de base - diaspora, intégration et territoire - et des notions qui leur sont associées. Elle a été complétée par des lectures ethnologiques et anthropologiques sur les populations du Sud-Est asiatique et tout particulièrement la population hmong.

Diaspora

Le terme « diaspora » utilisé pour désigner « toutes sortes de phénomènes résultant de migrations de populations dans plusieurs pays à partir d'un foyer émetteur » (BRUNEAU, 1995 : 5) est d'un emploi récent dans la littérature scientifique. En effet, une définition essentiellement descriptive a longtemps prévalu pour désigner le destin du peuple juif après la destruction du Temple et l'annexion de la Judée par les Romains. Il prenait en français une majuscule : c'était « la » Diaspora qui correspondait à la « dispersion » dont ils avaient été victimes en 70 ap. J.C. Progressivement, à partir des années 1970, en l'appliquant à des contextes spécifiques et à des groupes ethniques précis - Arméniens, Grecs, Chinois...- la notion s'est construite, prenant en compte les territoires d'« origine » ou de « départ » et d'« accueil » ou d' « installation16(*) » et analysant la « multipolarité de la migration » (MA MUNG, 1995 : 164). Aujourd'hui, en 2006, il s'agit d'un concept indispensable pour l'analyse et la compréhension des relations internationales en l'appliquant à toutes les populations dispersées qui maintiennent des liens (SCHNAPPER, 2001).

Nous aborderons successivement ces trois étapes, afin de préciser dans quel contexte théorique nous plaçons notre recherche.

1. un terme descriptif à connotation religieuse

Le mot grec diaspora est emprunté à l'historien Thucydide (460 - 385 av. J.C) évoquant dans « L'Histoire de la guerre du Péloponnèse » la fuite en ordre dispersé des populations qui fuyaient Egine, île grecque soumise par les Athéniens en 455 av. J.C. La dispersion présuppose l'existence d'un groupe (les habitants d'Egine) et implique l'idée de fuite sous la contrainte (la menace de l'armée athénienne). Utilisé pour désigner « la dispersion à travers le monde antique des Juifs exilés de leur pays » (dictionnaire ROBERT, 1985), le nom diaspora correspond aux diverses déportations des populations juives, en Mésopotamie d'abord au VIIIe siècle av. J.C., puis, à la fin du Royaume de Juda, avec la dispersion des Douze Tribus d'Israël17(*), enfin après la destruction du Temple par les Romains en l'an 70 de notre ère. Appliqué aux Juifs dispersés dans un grand nombre de territoires, ce terme se renforce d'une conscience identitaire forte, issue d'une relation privilégiée à un dieu unique (BRUNEAU, 1995).

2. une notion

Au cours du XXe siècle, dans la diffusion du terme, on assiste à sa progressive sécularisation. Les géographes vont faire d'un nom, qui correspond jusque là à une réalité historique précise, une notion. Max. SORRE18(*) utilise le terme pour évoquer « les minorités [envoyées] à des distances très grandes », comparables à « de véritables essaims qui gardent leur cohésion ». Il précise que ces minorités ne forment une diaspora que si elles « conservent leurs liens originels avec la mère-patrie ». Le phénomène diasporique semble alors tout à fait exceptionnel et, qui plus est, peu durable : on estime en effet qu'au fil des générations - la deuxième ou au plus la troisième - l'assimilation doit se réaliser dans le pays d'installation. Mais, dans les années 1980, face à l'échec de certaines politiques d'assimilation et au vu du multiculturalisme naissant dans les pays anglo-saxons, les sciences sociales s'emparent de la notion de diaspora. Elle couvre avant tout l'idée de dissémination et de diffusion de « toute collectivité ethnoculturelle... hors de son milieu naturel » (GEORGE, 1970), ce qui désigne de manière large tout groupe possédant une culture commune : langue, croyances, traditions, mode de vie... Le même auteur, quelques années plus tard, complète cette définition en substituant au nom collectivité le terme « entité... solidement constituée auparavant » (GEORGE, 1984). Le groupe ethnique possède une source territoriale ou espace de référence, dans lequel il a progressivement inscrit son histoire, sorte de « mère-patrie » évoquée par Max. SORRE et à qui Pierre GEORGE emprunte l'image de la dispersion considérée comme un « essaimage ». C'est en appliquant le terme à des peuples précis - Arméniens, Palestiniens... - que la notion va se construire progressivement. En premier lieu, sont analysées les causes de la diaspora. Yves LACOSTE, étudiant ces phénomènes d'exode massif, précise que « les causes ont été, au départ, moins la quête de meilleures conditions d'existence qu'une nécessité absolue sous l'effet de contraintes qui furent surtout de nature politique » (LACOSTE, 1989 : 8). En se référant implicitement au pays d'origine, il retient l'image de la fuite impérative face à la pression exercée par un groupe dominant et attribue aux diasporas des causes avant tout politiques. Cette idée est reprise et complétée par Roger BRUNET19(*) qui distingue trois causes aux diasporas : « la dispersion contrainte en l'absence de pays propre » - la dispersion a une origine politique -, « la difficulté d'existence plus ou moins momentanée » - la dissémination est provoquée par un motif davantage économique et demeurerait temporaire -, enfin « le choix d'activité et de mode de vie » - le processus a une origine culturelle, un « savoir-circuler » (TARRIUS, MISSAOUI, 1994) faisant partie de la culture, la tradition et le mode de vie du groupe.

Cette typologie, si elle a la vertu d'expliciter des causes - encore qu'il soit parfois difficile de distinguer de façon stricte migration politique et migration économique -, ne prend nullement en compte les dynamiques qui se mettent en place dans le phénomène diasporique que Gabriel SCHEFFER avait déjà énoncées : « les diasporas modernes sont des minorités ethniques de migrants vivant dans des pays d'accueil mais conservant des liens affectifs et matériels forts avec leur pays d'origine » (SCHEFFER, 1986). Il précise encore mieux cette définition en dégageant trois traits caractéristiques propres aux diasporas, à savoir la conscience et la revendication d'une identité ethnique ou nationale, la participation du groupe dispersé à une vie associative riche et l'existence de contacts sous des formes diverses avec le territoire ou le pays d'origine.

3. un concept

La multiplication des études sur les peuples en diaspora, réalisées sous le double éclairage de la géographie et de la sociologie, et plus particulièrement celle de l'école américaine, a permis de conceptualiser ce qui était jusque là une notion ancrée dans des contextes spatiaux-historiques précis et de dégager les critères qui assurent une meilleure lisibilité du phénomène et rendent intelligibles des conduites et des échanges sociaux. En effet, outre le caractère multipolaire de la migration que le géographe peut décrire, cartographier et analyser, comme il le fait pour toute migration quelle qu'elle soit, il existe un second élément à prendre en compte qui est celui de l'ensemble des relations tissées entre les différents pôles (MA MUNG, 1992), que d'aucuns ont nommé « l'ici », « le là-bas » et « l'ailleurs » (HOVANESSIAN, 1995, 1998 ). Et c'est effectivement « l'interpolarité des relations » qui prend appui sur de multiples réseaux, tant économiques que culturels, qui permet de distinguer la diaspora d'une migration dite classique. Les liens communautaires transnationaux volontairement créés et entretenus contribuent à renforcer une solidarité non seulement avec le lieu d'origine mais aussi entre les différents lieux d'installation, comparables à « un territoire en archipel » (TAPIA, 2005), indépendamment des frontières politiques. Ainsi les échanges matériels, symboliques ou même imaginaires alimentent la fidélité au passé et à une culture partagée dans une identité ethnoculturelle. Pourtant cette dernière peut-elle résister à l'épreuve du temps si elle n'est pas alimentée par un désir profond, ce que reprend Dominique SCHNAPPER en affirmant que « la condition diasporique implique une conscience et une volonté » (SCHNAPPER, 2001) ? En la définissant en terme de projet identitaire, la problématique des diasporas fait partie intégrante de la sociologie des relations interethniques.

* 16 Ce terme est préféré pour sa neutralité par Dominique SCHNAPPER

* 17 Lévitique 26, 33 : « Je vous disperserai parmi les nations, et je tirerai l'épée après vous. » et Deutéronome IV, 27 : « L'Eternel vous dispersera parmi les peuples et vous ne resterez qu'un tout petit nombre au milieu des nations où l'Eternel vous emmènera. » (traduction L. SEGOND - Cambridge 1926)

* 18 SORRE, M., 1957, Rencontres de la géographie et de la sociologie. Paris, Marcel Rivière. 313 p

* 19 BRUNET, R., FERRAS, R., HERVE, T. 1993. Les mots de la géographie. Dictionnaire critique. Montpellier-Paris : Reclus - La Documentation française. 520 p.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius