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L'imposition des cultures de rente dans le processus de formation de l'etat au cameroun (1884-1914)

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par Sandrine Carole TAGNE KOMMEGNE
YAOUNDE 2 - SOA / CAMEROUN - Diplome d'Etude Approfondie en Science Politique 2006
  

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2. L'instauration de l'impôt et son impact sur le contrôle des populations camerounaises

Le colonisateur n'a pas débarqué au Cameroun avec de la main d'oeuvre. L'une des méthodes de recrutement de la main d'oeuvre était l'imposition. L'impôt de capitation (kopfsteuer) ou par tête a été expérimenté pour la première fois chez les doualas en 1903. Malgré la vive résistance qu'il rencontrera chez ce peuple, on assiste à l'avènement de l'impôt de case appelé Huttensteuer (Saha 1993 : 62). En 1907, cet impôt s'étendra à tout le territoire. Toutefois, l'imposition ne fut formellement instituée que par un décret du 20 octobre 1908. Notre objectif ici est de voir les montants exigés, les modes de payement et comment l'instauration de l'impôt participe à la mise en discipline des populations.

a. Le taux d'imposition comme stratégie de subordination des Camerounais

Après la législation du travail de 1902, le mark est imposé officiellement comme monnaie unique sur le territoire camerounais par l'ordonnance du 1er février 1905. Le décret de 1908 avait fixé le taux d'imposition à 6 marks et en 1913, l'administration l'éleva à 10 marks par l'ordonnance du 26 Juin 1913. Ceci est justifié par les nombreux textes existant à ce sujet. D'après un rapport fait en 1916 sur la collection des taxes dans la division d'Ossindinge, il est écrit que :

«Under the Germans the division was divided into 3 districts: 1- Ossindinge, 2- Assumbo, 3- Menka, of which all the Ossindinge, halft the Assumbo, an 4 villages of the last German report for the financial year 1913-1914 there were collected from the Ossindige District including the 4 villages of the Menka district 7.300.000 and from the Assumbo district, 710000 or a total of 8.010.000, representing 8010 male adults paying 10 marks each»17(*).

Les populations étaient obligées de payer ces taxes sous peine d'être emprisonnées ou recrutées pour les travaux forcés. La nécessité de la main d'oeuvre a poussé les allemands à mettre sur pied des techniques leur permettant d'obliger les autochtones à travailler pour eux et surtout dans les plantations. Comment oeuvraient donc les autorités pour recruter ces populations ?

b. Le mode de payement comme stratégie de recrutement des ressources humaines du Cameroun pour la culture des produits de rente dans les plantations allemandes

L'une des intentions de l'instauration de ces différents types d'impôts surtout l'impôt par le travail (steuerarbeit) était en réalité un mode de recrutement de la main-d'oeuvre. Officiellement, les imposables pouvaient s'acquitter de leur devoir fiscal, exceptionnellement en offrant 30 journées de travail gratuit à l'administration. Le souci de vulgariser l'emploi du mark pour faire échec au troc et aux monnaies non allemandes justifiait ces modes de payement. Mais c'est surtout l'intérêt de recruter sous la forme de l'impôt prestataire l'indispensable main-d'oeuvre qui prédominait.

L'un des moyens de recrutement de la main d'oeuvre se faisait chez les prisonniers. En fait, d'après la circulaire provinciale concernant le règlement des prisons allemandes, il est prescrit ce qui suit:

«Reference to circular 15 of 7 th under this heading amend para 1 by adding to end of it the following: - this applies only to prisoners who are in a position to pay but do not do so. In such cases if neither food is supplied nor cash for its cost is paid the prisoner is liable to the obligation of working off its value in labour for the government (see abstrack of german law of 14 th august section B para 4).

2- Add as para 4: - where tax-labour is available these men should be employed on prison farms, or else instructed to bung in food for the prisons up to the value of their tax. This does not mean that taxes in cash are refused but that their value in labour or kind may be accepted in those cases where it is impossible to cash»18(*).

Par ailleurs, à travers les expéditions militaires, ou les conquêtes de «pacification », la schutztruppe recruta par voie de contrainte, de nombreux travailleurs. C'est ainsi qu'en mars 1905, le lieutenant Rausch fit une incursion dite punitive dans la chefferie Bamundu en pays bamiléké et en ramena 61 travailleurs. Le chef Foentu avait été défait par une armée de 47 soldats noirs et 2 officiers blancs. Ensuite, Rausch exigea l'envoi par an de 200 autres travailleurs dans les plantations de la côte. Ce fut là, le plus important point de ce qui se passait pour un traité de paix. Les autorités de Bamendu durent accepter cette grave clause sous la contrainte des armes (Saha 1993: 82).

En plus, l'administration allemande procédait par réquisition. En effet, l'administration avait réussit à faire en sorte que fournir de la main-d'oeuvre à l'administration était devenu un devoir pour les autorités traditionnelles au même titre que la perception d'impôts. Cette réquisition consistait à exiger des autorités traditionnelles de mettre à la disposition de l'administration, un certain nombre de travailleurs destinés en principe aux chantiers publics. Seulement, l'administration fournissait également aux entreprises privées de la main-d'oeuvre ; il s'agissait surtout des firmes agro-commerciales de la côte (Saha 1993 : 83).

Tout ceci contribue à la naissance d'une société où des populations à l'origine étrangères seront forcées d'entretenir des liens. Les mouvements migratoires se vérifient si on tient compte du fait que dans la zone de prédilection des grandes plantations, c'est-à-dire les pentes du mont Cameroun, la situation n'était guère encourageante pour les coloniaux désireux d'avoir à leur disposition une main-d'oeuvre capable de mettre en valeur leurs plantations. En effet, Léon Kaptue (1986 : 22) affirme que le chiffre des populations locales (Bakweri, Isubu, Balon etc. environ 32000 âmes) était faible par rapport aux besoins par ailleurs illimités des plantations en main-d'oeuvre. Les agriculteurs rechercheront alors des travailleurs hors de la région. Ce qui occasionnera d'importantes migrations. Ici, l'exode «rural» dans lequel on reconnaît une conduite politique ne témoigne t-il pas d'abord de la capacité à agir des acteurs locaux ? Toujours est-il que ces flux migratoires vont favoriser les contacts entre les populations résidant sur le territoire du Cameroun et on peut affirmer qu'ils poseront les jalons de la naissance de la nation camerounaise.

A coté de toutes ces mesures, les colons avaient aussi besoin d'une main d'oeuvre de qualité. En dehors de la quantité, se posait désormais un problème de qualité.

* 17. ANB, 22/17-KCG/1916/1, Taxation Ossindige.

* 18 ANB, Pf/h/1916/1, German prison laws-Victoria division

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