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Le temps de l'insertion des jeunes, une considération rituelle et temporelle

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par James MASY
Université de Nantes - Master 2 - Sciences de l'éducation 2008
  

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1. L'exclusion pour parler de qui ?

Utiliser le substantif situe notre parti pris, il rompt avec l'idée que sous-tend l'adjectif, devenu par sa médiatisation un nom commun forçant la stigmatisation, l'exclusion s'apparente à un procédé et non pas à un état. Ce qui implique un débat : qui est l'acteur de cette exclusion ? On peut lire deux discours sur cette question.

Le premier est sans nul doute celui du mouvement Aide à Toute Détresses (ATD Quart-Monde) qui fut dés les années 1960 le promoteur de la notion d'exclusion sociale à travers la catégorisation socio-économique des « exclus » définit par Joseph Wrésinski comme « la population la moins instruite, non ou à peine qualifiée au travail, celle qui est souvent sous-employée, en chômage ou malade, a les revenus les plus bas, celle qui accède le plus difficilement à un logement décent et moderne, et dont les retards scolaires des enfants sont inquiétants dés les premières années de l'école primaire »1. On retrouve ici ce que M. Bresson nomme la « sociologie de la pauvreté » en ce qu'elle caractérise la pauvreté comme un manque et dont « les traits négatifs se combinent et se renforcent faisant ainsi glisser l'interprétation de la pauvreté vers un cumul de handicaps. »2 Toutefois il est à retenir dans cette mouvance idéologique « l'aspect multidimensionnel et multiforme de la pauvreté, qui ne se réduit pas à un simple manque de ressources »3.

Le second est un discours politique qui traverse le libéralisme et le socialisme et tend à assimiler l'exclusion à l'inadaptation. Ce postulat repose sur l'idée d'une juxtaposition des termes, c'est-à-dire une vision de l'exclusion fondée sur une hétérogénéité que serait l'inadaptation à un monde en marche. Afin de mieux appréhender ce que sous-tend ce glissement sémantique, nous nous arrêterons sur les travaux de l'INED qui avait été chargé au début des années 1960, par le gouvernement, de mener une étude sur la population inadaptée. L'auteur, C. Vimont, considère que « toute population comprend des éléments inadaptés, qui ne suivent pas les règles de vie admises par l'ensemble de la société (...) toutes les sociétés ont dû définir une politique d'action à l'égard de ces éléments qui ne suivent pas les règles de vie qu'elles se sont définies. »4

Si depuis la révolution, la question de la responsabilité de la société dans l'inadaptation de certains groupes sociaux divisaient déjà la France en deux, la déclaration de la constitution de 1946 reprise en 1958, qui contraint la collectivité à pourvoir aux

1 Joseph Wrésinski ; cité in Gilbert Clavel ; la société d'exclusion ; l'Harmattan ; Paris ; 1998 ; p. 20.

2 Maryse BRESSON ; Sociologie de la précarité ;op.cit. ; p. 32.

3 Gilbert Clavel ; la société d'exclusion ; op.cit. ; p. 22

4 Claude Vimont ; Une nouvelle fonction de l'I.N.E.D. : les recherches sur les populations inadaptées ; in Population ; 1962 ; Volume 17 ; n°4 p. 739-752 ; p. 739. Le Ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, Direction de l'enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation ; http://www.persée.fr [consulté novembre 2007]

besoins de « tout être humain qui en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique se trouve dans l'incapacité de travailler »1 est à ce titre explicite quant à la fonction de l'État. Le phénomène grandissant de l'inadaptation y est analysée par l'action contiguë de plusieurs facteurs. Chacun lié à une organisation croissante de la société qui débouche sur de nouvelles normes. L'auteur l'explique par l'exigence progressive de la société ou de l'État en matière de diplômes qui transforme la distribution du travail, la normalisation des revenus par l'instauration d'un Salaire Minimum Garanti (SMIG)2 qui détermine un « continuum de positions comparables »3 c'est-à-dire une référence à laquelle chacun peut se comparer. Mais la palme d'or de la croissance du nombre d'inadaptés revient sans nul doute, dans cet article, à la science pour l'ensemble de son oeuvre sur l'institutionnalisation de la maladie. En proposant une catégorisation systématique de la pathologie, la médecine décline des types d'inadaptation liés à l'incapacité physique ou mentale de travailler, ce qui donne droit à la solidarité Étatique. Les sciences sociales travaillent de leur côté à expliquer, la nécessaire adaptation de l'homme à son environnement, en même temps que les variables sociales de l'adaptation, fussent-elles du ressort de « l'héritage » ou non. C'est ce que P. Rosanvallon appelle de son côté l'invention du handicap social, qui englobe « les diverses formes de marginalité et allant même jusqu'à désigner les travailleurs qui ne s'adaptent pas aux mutations technologiques. »4 C'est là le paradoxe de la solidarité Étatique que d'exclure d'abord pour apporter une aide dont le droit est immanent à une reconnaissance institutionnelle, même si « il n'y a pas de distinction claire et nette, de fossé entre les inadaptés et ceux qui sont réellement adaptés à la vie moderne. »5

L'action publique en la matière est tout à fait parlante. Les divers dispositifs mis en oeuvre depuis plus d'un siècle visent à créer dans un premier temps une cohésion sociale, puis à endiguer dans un second temps la montée d'une « exclusion durable »6 consécutive à un chômage et une précarité salariale croissante. Cette cristallisation autour de la lutte contre l'exclusion « a polarisé toute l'attention, mobilisé les énergies, ordonné la compassion. »7 On ne saurait dire aujourd'hui que l'exclusion est un nouveau problème

1 Préambule de la constitution de 1946 ; http://www.conseil-constitutionnel.fr ; [consulté en novembre 2007]

2 Le SMIG est fondé sur le calcul des sommes nécessaires à un travailleur célibataire pour satisfaire ses besoins considérés comme indispensables

3 Robert Castel ; les métamorphoses de la question sociale ; Folio ; Paris ; 1995 ; p.617.

4 Pierre Rosanvallon; La nouvelle question sociale; op.cit. ; p. 119.

5 Claude Vimont ; Une nouvelle fonction de l'I.N.E.D. : les recherches sur les populations inadaptées ; op.cit. ; p. 745.

6 Denis Fougère et Nadir Sidhoum ; Critères socio-économiques de l'intégration ; in Contribution à la Journée d'étude « Faire société en France et en Europe au début du XXI e siècle » Palais du Luxembourg, 25 avril 2006 ; p. 44

7 Pierre Rosanvallon; La nouvelle question sociale; op.cit. ; p. 88.

social, il est au XXè siècle ce que le paupérisme était au XIXè. L'idée n'est pas nouvelle, c'est le sens qu'elle véhicule qui l'est; « elle est sollicitée pour désigner des phénomènes sociaux de nature différente. »1 Apparue au coeur des trente glorieuses que l'on aime à reconnaître comme LA période de prospérité, oubliant dans le même coup les évènements de l'époque (Algérie; 17 octobre 1961; Mai 68...), l'exclusion tente de définir une certaine inadaptation sociale de l'individu et donc institue une catégorie sociale. Elle réapparaît dans les années 1980 autour du RMI pour rendre compte de la pauvreté liée à la dégradation du marché de l'emploi qui touche une population somme toute hétérogène. Puis pour finir on la retrouve dans les années 1990 à travers les divers travaux sociologiques dans lesquels elle évoque une menace qui pèse sur de plus en plus de groupes sociaux. Elle devient ce que R. Castel désigne comme une « zone d'exclusion ou plutôt de désaffiliation »2 qui conjugue absence de travail et isolement social.

S'il nous est possible de relever des tendances théoriques quant à ce qu'il convient de qualifier un « flou artistique », il est cependant impensable d'universaliser une notion qui s'inscrit dans un ici et maintenant et dont la singularité touche à l'individualisation. Il eut certainement fallu tenter la difficile approche épistémologique de la notion en mobilisant les différentes écoles en la matière, pour atteindre une définition aboutie. Il existe déjà nombre de travaux qui conduisent à la construction de cette définition aussi notre souhait est ici de proposer au lecteur une définition par défaut.

Bien qu'assumée par l'État, l'exclusion ne peut lui être imputée. Elle ne peut être lue selon la seule réduction de la condition socio-économique, ou de l'affiliation juridicomédico-sociale des individus. Elle ne peut être non plus un état infléchi à des déterminants sociaux ou un état social donné. Elle « n'est pas une absence de rapport social mais un ensemble de rapports sociaux particuliers à la société prise comme un tout »3. Ce qui est essentiel, et tous les travaux de recherche le soulignent, c'est que « l'exclusion n'est pas isolée par une sorte de "cordon sanitaire" de ceux qui seraient insérés dans la société ; il y a un continuum de situations, un ensemble de positions dont les relations avec le centre sont plus ou moins distendues ».4

Subordonnée à la volonté de maintenir la cohésion sociale au sens durkheimien du terme, elle est le résultat d'un processus d'accroissement des handicaps et des inégalités. Il

1 Hmaid Ben Aziza, « Exclus et exclusion », Cahiers de la Méditerranée, vol. 69, Être marginal en
Méditerranée (XVIe - XXIe siècle), 2004, [En ligne], mis en ligne le 10 mars 2006. http://cdlm.revues.org/document715.html. [Consulté novembre 2007].

2 Robert Castel ; les métamorphoses de la question sociale ; op.cit. ; p.669.

3 Robert Castel ; les métamorphoses de la question sociale ; op.cit. ; p.715.

4 Observatoire national de la Pauvreté et de l'exclusion ; Rapport 2000 ; La Documentation Française ; Paris, 2000 ; p. 49.

n'y a donc, à notre sens, exclusion que si l'on admet qu'il existe une société duale ; d'un côté des cotisants ou ayants droits que R. Castel appelle les « détenteurs de commodités », et de l'autre... les autres, que les détracteurs de l'État-providence ont pour coutume d'appeler les « assistés ». « Comme bien des concepts celui-ci [l'exclusion] ne fonctionne pas en célibataire, mais agit le plus souvent en couple»1, il flirte même avec une certaine polygamie. Mais plus qu'une simple dialectique, il s'agit de marquer ici dans une dualité intégrée dans l'action publique, les processus dynamiques liés au travail et au non-travail, et donc aux droits des salariés et aux devoirs de l'État face à aux non-salariés.

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