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Réglementation prudentielle et performances du système bancaire au Cameroun

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par Rodrigue NANA KUINDJA
Université de Yaoundé II SOA - Diplôme d'Etudes Approfondies (DEA) 2009
  

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1.3- Les causes politico-administratives

Les causes politico-administratives sont liées à une politique économique d'inspiration keynésienne et à l'implication de l'Etat dans le secteur bancaire ou l'extension de la tutelle de l'Etat dans les institutions financières. La politique keynésienne consacrait un rôle important de l'Etat dans la sphère économique. La législation camerounaise née de l'indépendance a obligé les institutions à réserver à l'Etat ou aux organismes publics une part importante de leur capital. Cette obligation s'est matérialisée non seulement par la forte participation de l'Etat dans le capital des banques et la création des banques publiques ou de développement, mais aussi par son influence dans les prises des décisions dans des divers conseils d'administration des institutions financières et des nominations par l'Etat des représentants dans la gestion des banques. Cette influence a permis à l'Etat de faire mettre en place une politique d'encadrement du crédit bénéficiant aux entreprises publiques. En effet, Certaines entreprises publiques ont eu des crédits auprès des banques à la faveur des pressions politiques. Nous avons constaté que les encours de crédits distribués aux entreprises publiques ont triplé de 1976 à 1986. Cette distribution généreuse et incontrôlée des crédits a bénéficié à beaucoup de personnes et engendré un enrichissement de certains citoyens camerounais dits « protégés du pouvoir en place »8(*). Elle a fait naître des hommes d'affaires occasionnels qui ne savaient pas comment gérer les fonds empruntés. Par manque d'expérience, ils ont dirigé ces fonds vers des activités spéculatives : l'import-export et l'immobilier. En fait, ces pratiques interventionnistes ont enfoncé davantage les banques dans une crise d'illiquidité. En somme, les pouvoirs politico-administratifs ont aussi participé aux faillites bancaires de la fin des années 80 qui ont entraîné la liquidation de la plupart des banques importantes au Cameroun.

1.4- Les causes conjoncturelles

Les causes conjoncturelles sont liées à l'environnement économique des années 80 caractérisé par une baisse des recettes d'exportations suite à une diminution des prix des matières premières et des cultures de rente (cacao, café, coton, etc...) sur les marchés mondiaux. La chute des recettes d'exportations a entraîné une baisse des dépôts ou de l'épargne auprès des banques et une chute des recettes budgétaires.

Le tableau 2 présente l'évolution des dépôts bancaires de la zone BEAC. Les dépôts bancaires ont connu un accroissement remarquable entre 1980 et 1986 en passant de 445 milliards de francs CFA à 1270 milliards de francs CFA soit une hausse de près de 295%. Les dépôts nationaux pour la même période sont passés de 350 milliards de francs CFA à 1120 milliards de francs CFA, soit un accroissement de près de 302%. Par contre, à partir de 1986, la baisse des recettes d'exportations a provoqué la chute des dépôts bancaires. De 1986 à 1989, les dépôts bancaires de la zone BEAC sont passés de 1270 milliards de francs CFA à 890 milliards de francs CFA, soit une réduction de près de 30%. Les dépôts nationaux sont passés dans la même période de 1120 milliards de francs CFA à 750 milliards de francs CFA soit une baisse de 33%. L'accroissement des recettes des années 70 et du début des années 80 avait incité les banques commerciales à essayer d'étendre leur réseau dans les zones pastorales et agricoles.

Tableau 2. Evolution des dépôts bancaires de la zone BEAC de 1980 à 1989 (milliards de francs CFA)

Déposants

1980

1982

1984

1985

1986

1988

1989

-Déposants nationaux

.Déposants publics et parapublics

.Déposants privés

-Déposants étrangers

. Organismes internationaux

. Etrangers africains

. Etrangers non-africains

351,1

195

156,1


94
5,9
7,5
80,6

634,1

317,6

316,5


123,1
2,5
10,9
109,7

903,5

482

421,5


141
11,6
21,9
108

1053,8

585,3

468,5


151

6,8
21,1

123,1

1119,9

602,7

516,3


148,3
7,7
22,5
118,1

911,7

457,2

454,5


135,9
9,5
25,6
100,8

752,9

298,3

457,1


134,8
7,9
21,1
105,8

Total des dépôts bancaires

445,1

757,2

1045

1204,8

1267,3

1047,6

890,2

(Source : bulletin BEAC, N°193 juin-juillet 1992)

Des agences et des guichets périodiques ont été créés dans ces zones pour assurer la collecte de l'épargne. Les dirigeants des banques n'ont pas su développer des options stratégiques adéquates leur permettant de fructifier les dépôts enregistrés pendant la période de la conjoncture favorable. La baisse des dépôts a fait ressortir la précarité de la liquidité des banques et la fragilité des diverses stratégies de développement des banques.

Dans les secteurs publics et parapublics, la tendance des dépôts s'est également inversée. En fait, les dépôts ont régressé de 1986 à 1989 de 603 milliards de francs CFA à 305 milliards de CFA, soit une baisse de près de 50%. L'Etat ne pouvait plus assurer ses engagements auprès de ses fournisseurs qui s'étaient endettés dans les banques pour les travaux publics. Ces prêts sont devenus des créances douteuses et irrévocables. Les diverses entreprises ont ainsi renoncé aux projets d'investissements et réduit leur personnel à cause de la contraction des offres de marché public. De plus, la hausse des taux d'intérêts au niveau mondial a accru les services de la dette. Ces ingrédients rassemblés ont aggravé les crises de solvabilité et de l'illiquidité observées au Cameroun à la fin des années 80.

La crise bancaire camerounaise peut se résumer en trois phases : la phase de fragilisation du système bancaire, la phase des fluctuations des trésoreries et la phase de l'effondrement du système bancaire. Ces phases ne sont que l'aboutissement d'une longue évolution car la première phase a débuté en 1973 avec la camerounisation9(*) des banques et l'essoufflement du système bancaire post-colonial. Les réformes bancaires de 1973 avaient pour objectif d'impulser le développement des entreprises par des investissements nouveaux et de promouvoir le développement économique et social.

La deuxième phase a été matérialisée par les subventions de l'Etat avec les ressources financières pétrolières aux banques. Non seulement les banques ont accumulé des pertes dues aux divers crédits non remboursés, elles se sont autorisées aussi des erreurs de gestion. Les ressources financières pétrolières injectées par l'Etat dans les banques leur ont permis une réorientation de leurs activités vers les marchés financiers internationaux offrant des rémunérations plus élevées pour combler leurs déficits. Les profits ainsi réalisés ont été malheureusement insuffisants pour enrayer l'insolvabilité des banques. La situation de liquidité dans laquelle les banques réussissaient à se maintenir n'était que précaire.

En 1987, la baisse forte et simultanée des cours des produits d'exportations : le pétrole, le café, le cacao, etc... a déclenché la troisième phase ou l'effondrement des banques ou du système bancaire. La compression des recettes de l'Etat a entraîné des faillites bancaires et une panique des agents. Les retraits des banques sont devenus massifs tandis que les organismes publics avaient diminué leurs dépôts dans les diverses banques. La confiance chancelante envers le système bancaire a été mise à rude épreuve. La plupart des banques étaient incapables de faire face à cette ruée contagieuse entraînant l'effondrement du système bancaire.

* 8On les appelle au Cameroun des feymens.

* 9 Cette camerounisation des banques est une partie du slogan politique « le développement autocentré »

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard