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Entre convention alpine, directive territoriale d'aménagement des Alpes du nord et initiatives locales, quelles perspectives pour les politiques foncières volontaristes dans les Alpes ?

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par Nathalie MOYON
Université Joseph Fourier (Grenoble1), Institut de Géographie Alpine - Master 2 Recherche Villes, Territoires et Durabilité 2009
  

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2.2. Les prémices du sujet de recherche

La CIPRA France travaille sur les questions de développement territorial de l'espace alpin avec des entrées généralement thématiques (transport-mobilité, biodiversité, énergie-bâtiment, tourisme...) croisées très souvent aux enjeux du changement climatique et du développement durable. Presque « inévitablement », la gestion de l'espace, du sol et donc du foncier s'est révélée être une clé d'observation transversale assez efficace des jeux et enjeux territoriaux. De cette façon, Vincent Renard éclaire le constat selon lequel l'objet foncier est construit parmi des enjeux plus vastes qui focalisent d'abord sur eux les interrogations de la recherche : « la question foncière fait système, constitue une sorte de noeud gordien d'un ensemble de caractères d'une société : elle est à la fois la synthèse des caractères et origine des questions »29(*).

D'une façon similaire à la CIPRA, le travail de Marielle Mouly sur les relations ville-campagne l'amène à s'intéresser à cette question du foncier : « il semblerait que les enjeux liés à "la campagne ressource", agricoles et plus généralement, économiques, soient recoupés par un enjeu transversal qui est celui du foncier. La question de l'organisation et de la répartition des usages du sol conditionne le prix des terres dans notre pays, et est à l'origine de conflits d'usage et/ou d'intérêts parfois complexes et virulents. Ces conflits peuvent également être liés à la nouvelle attractivité des espaces ruraux et à l'arrivée de nouvelles populations non issues du milieu rural ou de touristes »30(*).

Au fil du temps, la CIPRA est d'ailleurs passée d'une approche centrée sur l'environnement stricto sensu à une vision plus systémique traduite par des projets plus transversaux (tournés vers l'aménagement et le développement territorial et plus seulement la protection du milieu) : son entrée actuelle, « Vivre dans les Alpes », comporte les trois piliers du développement durable. Au sens de la CIPRA France, faire du développement territorial durable nécessite d'actionner le levier du foncier.

Il était alors nécessaire de définir quelle clé d'entrée choisir pour s'attaquer à la question foncière. Le contexte normatif de l'aménagement constitué des cadres règlementaires et législatifs dans lesquels se déroulent l'action foncière semble intéressant puisqu'il traduit la façon dont on pense le territoire, et détermine - au moins à première vue - la manière dont on « fait » l'action territoriale. Regarder les cadres normatifs de l'aménagement est un moyen de saisir les discours produits, notamment sur l'objet foncier. Un choix était donc nécessaire pour déterminer un ou deux « cadres normatifs » à étudier et à décortiquer pour entamer ce travail de recherche. La Convention alpine et ses protocoles d'application ainsi que le projet de Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord ont été retenus pour les raisons suivantes.

Comme l'a rappelé Andreas Götz, le directeur de CIPRA International, à l'occasion du colloque « La Convention alpine. Un nouveau droit pour la montagne ? » en 200831(*), l'histoire de la CIPRA est très étroitement liée à celle de la Convention alpine, un texte de droit international contraignant qui doit être appliqué par les administrations et les tribunaux32(*). L'idée de la Convention alpine est née en 1951, tout juste un an avant la fondation de la CIPRA en tant qu'organisation faîtière alpine dont les documents de sa création prévoyaient « que la tâche la plus importante est la protection des Alpes, en élaborant une convention internationale pour la protection des Alpes et en veillant à son application par les pays signataires ». La Convention alpine voit le jour officiellement en 1991 lorsqu'elle fut signée par une large majorité des pays alpins et l'Union Européenne, et depuis, la CIPRA dispose d'un statut d'observateur officiel de la mise en oeuvre du traité.

Les protocoles d'application de la Convention alpine rédigés au fur et à mesure permettent de décliner ses principes suivant des grandes thématiques : aménagement du territoire et développement durable (1994), protection de la nature et entretien du paysage (1994), agriculture de montagne (1994), forêts de montagne (1996), protection des sols (1998), énergie (1998), tourisme (1998) et transport (2000). En raison -peut-être- de la transversalité de l'objet foncier, on ne retrouve pas de « protocole foncier ». Toutefois, il semble qu'aujourd'hui la Convention alpine soit devenue une plate-forme institutionnelle mise en difficulté33(*). Bien sûr, elle continue de donner à la CIPRA des axes de pensée et d'actions en restant un objectif fort mais non unique de son action.

Le projet de Directive Territoriale d'Aménagement (DTA) des Alpes du Nord est revenu d'actualité ce printemps 2010 ; il n'est pourtant pas récent. Dès 1996, soit un an après l'adoption de la LOADT34(*) instituant ce nouvel outil de planification étatique, un courrier des trois ministères concernés35(*) adressé aux préfets « futurs coordonnateurs » annonce en objet le « lancement des travaux préparatoires à l'élaboration des directives territoriales d'aménagement sur des territoires expérimentaux »36(*). Cinq sites expérimentaux sont retenus, dont les Alpes du Nord, pour constituer un échantillon « représentatif des principaux enjeux en matière d'aménagement, de développement, de protection, et de mise en valeur du territoire ». Une étude préalable à une DTA sur les Alpes du Nord est donc lancée pour une durée de six mois.

Quatorze années plus tard, seule la DTA des Alpes du Nord n'a pas abouti. Pour la CIPRA et de nombreuses autres associations de protection de l'environnement, cette DTA constitue (ou plutôt constituait) un garde-fou utile qui va dans le sens d'un développement équilibré et raisonné des Alpes du Nord, celle-ci se référant à plusieurs reprises à la Convention alpine. On peut ainsi appréhender la DTA des Alpes du Nord comme une déclinaison locale et concrète (ses orientations sont prescriptives et non indicatives) de la Convention alpine. Les fortes oppositions qui ont marqué le projet de la DTA alpine attirent d'autant plus l'attention sur ce cadre normatif mort-né37(*).

Le mandat du 11 mai 2000 définit le périmètre de mise en oeuvre de la DTA des Alpes du Nord : ce territoire comprend les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie, la partie orientale du département de l'Isère (bornée par la limite du SCOT de la région urbaine grenobloise), et les communes drômoises appartenant au Parc Naturel Régional du Vercors. Il s'agit d'un territoire d'une superficie de 16 077 km², concernant 923 communes et 1 841 256 habitants répartis sur 16 aires urbaines38(*).

Enfin, l'étude de ces deux cadres normatifs ne pouvait s'effectuer sans une « confrontation » au réel, c'est-à-dire un travail de terrain39(*).

www.dta-alpesdunord.fr

Au sein du périmètre défini par la DTA des Alpes du Nord, trois terrains d'études ont été choisis pour illustrer des situations différentes face à la question foncière :

ü La commune de Chamonix (74) qui développe une ingénierie foncière pointue sur des opérations de lotissement à destination des résidents permanents40(*),

ü Le Vercors Quatre Montagnes (38) qui travaille à la formation des élus sur les questions de mise en oeuvre d'une politique foncière,

ü Le territoire des balcons de Belledonne (38-73) où les enjeux de déprise agricole et de pression urbaine l'amènent dans l'arène de l'élaboration du SCOT de la région urbaine grenobloise41(*).

Le développement de l'analyse produite pour ces trois terrains d'études (Partie II) permettra également de justifier le choix de ces terrains. De plus, ces trois sites répondent aux impératifs pratiques qui s'imposent à la réalisation de ce travail : Chamonix et le Vercors sont deux des terrains d'études du programme de recherche IngéTerr auquel participe Sylvie Duvillard, le territoire de Belledonne est quant à lui facilement accessible depuis l'agglomération grenobloise.

* 29 RENARD Vincent, Préface. In : ELLOUMI M., JOUVE A.M. (sous la dir. de). Bouleversements fonciers en Méditerranée : des agriculteurs sous le choc de l'urbanisation et des privatisations, Karthala-CIHEAM, Montpellier, 2003, 384p.

* 30 MOULY Marielle, Les relations ville-campagne, Stratégies de développement urbain-rural en Rhône-Alpes, Mémoire de Master 2 Sciences des Sociétés et de leur environnement, Université Lumière, Lyon 2, 2008, p.63

* 31 YOLKA Philippe (sous la dir. de), La Convention Alpine. Un nouveau droit pour la montagne ?, CIPRA France, Grenoble, 2008, 148p.

* 32 GÖTZ Andreas, Architecture, fonctionnement et dysfonctionnements du système conventionnel, In :idem, p.16

* 33 De plus, d'autres initiatives émergent, « complémentaires » pour certains, « concurrentes » pour d'autres : le réseau des régions alpines avec l'idée d'une macro-région telle qu'envisagée au niveau communautaire, ou encore le programme communautaire INTERREG "Alpine Space" qui constitue une plate-forme technique qui agit concrètement sur les territoires alpins.

* 34 La Loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT) instaure un nouvel instrument juridique d'aménagement du territoire, les directives territoriales d'aménagement, définies à l'article L 111-1-1 du Code de l'urbanisme.

* 35 Ministère de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration, Ministère de l'environnement, et Ministère de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.

* 36 Une photocopie de ce courrier daté du 23/07/1996 a été retrouvée dans les archives de CIPRA France.

* 37 Comme cela sera détaillé dans la Partie II du mémoire, le caractère opposable de la DTA des Alpes du Nord n'a pas résisté aux amendements du projet de loi Grenelle II ; celle-ci a été promulguée le 13 juillet 2010.

* 38 DTA Alpes du Nord, Chiffres clés en 2006, Juillet 2010, p.8

* 39 L'intérêt du travail de terrain est développé au chapitre concernant les entretiens.

* 40 DEVOUASSOUX Anne-Sophie, Chamonix mène-t-il une politique exemplaire en matière de logement? Mémoire Master 2 géographie, Institut de Géographie Alpine, Grenoble, 2006

* 41 Le Schéma de Cohérence Territorial de la Région Urbaine Grenobloise (RUG) devrait être adopté courant 2011.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon