WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La primauté des tribunaux pénaux internationaux ad hoc sur la justice pénale des états.

( Télécharger le fichier original )
par Gérard MPOZENZI
Université du Burundi - Licence en Droit 2003
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

III.4.4.4. Quid de l'absence de coopération des Etats ?

Devant les difficultés liées à la coopération, le principal problème rencontré est le manquement des Etats à leur obligation d'arrêter et de livrer les personnes accusées. Une réponse a été donnée par l'adoption de l'article 61 dans le RPP du TPIR (art. 55, D du RPP du TPIY), qui a ouvert la voie à une jurisprudence de réconfirmation497(*).

Selon cet article, en cas de non- exécution d'un mandat d'arrêt dans un délai raisonnable, une procédure publique est suivie par la chambre de 1ère instance, qui procède au nouvel examen de l'acte d'accusation et vérifie s'il existe des raisons suffisantes de croire que l'accusé a commis une ou toutes les infractions mises à sa charge. Il s'agit d'une procédure de substitution au procès par contumace ou in absentia qui n'est d'ailleurs pas prévue par les Statuts des TPI ad hoc.

La réconfirmation de la chambre de 1ère instance, au-delà de son caractère de stigmatisation publique, a deux effets juridiques. D'une part, elle aboutit à l'émission d'un mandat d'arrêt international adressé à tous les Etats (ce qui rend difficile, au moins, les déplacements de l'accusé), d'autre part, le Tribunal peut en informer le CS des NU qui peut décider des mesures à prendre contre l'Etat défaillant.

Une autre possibilité de surmonter l'absence de coopération de certains Etats a consisté dans l'adoption d'actes d'accusation confidentiels498(*). Cela a permis d'arrêter plusieurs personnes recherchées grâce souvent au concours des forces internationales de paix présentes sur le territoire de l'ex- Yougoslavie499(*).

La dernière arme dont disposent les TPI ad hoc consiste à faire état, par la voie de leurs présidents, du manque de coopération des Etats au Conseil de sécurité de NU500(*). Mais, dans la pratique, ce dernier s'est limité à rappeler aux Etats leur obligation de mise en conformité et de coopération501(*).

CONCLUSION GENERALE

Il ressort de notre travail que les juridictions internationales n'ont pas vocation à se substituer à la justice des tribunaux internes. Les unes et les autres pourront ainsi avoir à juger des faits semblables. Certes, la répression des crimes internationaux dépend dans une grande mesure de l'agencement des rapports entre les juridictions internationales et nationales mais aussi de l'apport de la compétence universelle des tribunaux nationaux502(*). Ainsi, il n'existe pas une règle générale de droit international pour l'agencement de ces rapports ; l'articulation des compétences oscille entre deux principes : le principe de primauté et le principe de complémentarité. Certes, on note à ce sujet que le point de départ reste toujours la concurrence de compétence au lieu de l'exclusivité.

Dans le cadre des TPI ad hoc, leurs relations avec les juridictions nationales sont fondées sur la compétence concurrente, règle qui est tempérée par la reconnaissance de la primauté des TPI ad hoc. Cela ne signifie nullement que la possibilité pour les juridictions nationales de poursuivre les présumés auteurs des crimes internationaux est exclue.

Dans le cadre de la CPI que nous avons évoqué dans le premier chapitre, le principe est que cette juridiction est complémentaire aux juridictions pénales étatiques. L'on signale, à cet effet, que cela dénote les rudes et difficiles négociations du Statut de Rome à propos de cette Cour. Les Etats ont voulu ménager leur souveraineté et, par conséquent, on s'est vite retrouvé en deçà de ce qu'avaient déjà réalisé les deux TPI ad hoc. Il apparaît donc que l'efficacité de la Cour dépendra de la bonne volonté, d'une part, des Etats de coopérer avec elle et, d'autre part, du Conseil de Sécurité de la saisir.

Nous avons également passé en revue le cas des juridictions internationalisées ou hybrides. Leur rapport avec les juridictions nationales est également articulé sur la base du principe de la compétence concurrente, bien sûr avec primauté des juridictions hybrides. Mais dans ce dernier cas, la primauté est limitée aux juridictions nationales du pays concerné et ne s'étend pas aux juridictions des Etats tiers. Dans tous les cas cependant, les juridictions nationales ne doivent pas rester les mains croisées. Il y a lieu de signaler que les règles de compétence de ces dernières pour connaître les crimes internationaux ont connu un développement très important. Ainsi, on a traité des principes traditionnels (territorialité, personnalité active ou passive) et en marge de ces critères classiques, il s'est développé une compétence extraterritoriale ne répondant pas aux critères traditionnels de compétence. Cela a été fait au nom de la protection de valeurs ou d'intérêts jugés essentiels ou universellement reconnus : c'est la compétence universelle.

Avec les développements récents du système répressif international, on peut, en théorie, affirmer qu'aucun crime ne serait impuni. Les Tribunaux pénaux internationaux ad hoc ont été institués pour poursuivre les auteurs des violations graves du DIH commises dans le cadre d'un conflit armé international (pour l'ex-Yougoslavie) et dans le cadre d'un conflit armé interne (pour le Rwanda). Les compétences matérielles des deux TPI ad hoc sont, mutatis mutandis, les mêmes : crime de génocide, crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Ces crimes sont de caractère imprescriptible, inamnistiable et non politique. L'expérience des deux Tribunaux internationaux ad hoc et leur jurisprudence ont apporté des clarifications mûries à ces crimes.

En ce qui est du génocide par exemple, la jurisprudence du TPIR a apporté un nouveau souffle à un texte normatif demeuré inchangé dans ses termes depuis 1948503(*). Le jugement du TPIR du 2 septembre 1998 dans l'affaire AKAYESU constitue le premier jugement d'un Tribunal international traitant du crime de génocide.

Dans les Statuts des deux Tribunaux, la responsabilité pénale de l'Etat est exclue ; les deux Tribunaux poursuivront des personnes physiques à l'exclusion des personnes morales de droit public ou privé. Notons à cet égard que la qualité officielle d'un accusé n'est ni une excuse exonératoire ni une cause de diminution de la peine.

L'apport des juridictions pénales internationales doit être apprécié en relation avec leur fonctionnement effectif. Nous l'avons souligné, le principe de fonctionnement des TPI ad hoc est la primauté, qui résulte de leur mode de création par décision institutionnelle du CS des NU. Ce principe engendre, devant les juridictions nationales, le principe non bis in idem, le dessaisissement de celles- ci et le transfert des présumés coupables aux TPI ad hoc.

La force de ces deux Tribunaux internationaux ad hoc réside à la fois dans l'appui coercitif du CS des NU et dans les pouvoirs étendus dont ils ont été munis pour leur fonctionnement504(*). Créées par résolution contraignante sur la base du chapitre VII de la Charte des NU, « cela a entraîné une immédiateté et une quasi- universalité de leur autorité505(*) » car, en tant qu'organes subsidiaires du CS des NU les décisions des TPI ad hoc s'imposent à tous les Etats. En conséquence, leurs actes et le droit dérivé de ces institutions sont obligatoires pour tous les Etats. Donc, une obligation de coopérer avec les TPI ad hoc, à tous les stades de la procédure, est plus que nécessaire.

Certes, le principal problème rencontré a été le manquement des Etats à leur obligation d'arrêter et de livrer les personnes accusées. A cet égard, une réponse a été fournie par l'adoption du fameux article 61 RPP du TPIR et de l'article 55-D du RPP du TPIY. Selon cet article, en cas de non- exécution d'un mandat d'arrêt dans un délai raisonnable, une procédure publique est suivie par la chambre de 1ère instance, qui procède au nouvel examen de l'acte d'accusation et vérifie s'il existe des raisons suffisantes de croire que l'accusé a commis une ou toutes les infractions mises à sa charge. Il s'agit d'une procédure de substitution au procès par contumace ou in absentia qui n'est d'ailleurs pas prévue par les Statuts des TPI ad hoc.

Somme toute, l'oeuvre des TPI ad hoc est immense. En effet, en traduisant en justice les responsables de tous les niveaux, ces juridictions ont mis fin à la tradition de l'impunité dont bénéficiaient les auteurs de crimes de guerre et d'autres violations graves du droit international, surtout ceux qui occupaient les postes les plus importants mais aussi les autres personnes ayant commis de tels actes. Grâce aux TPI ad hoc, la question n'est plus de savoir si les dirigeants doivent répondre de leurs actes mais comment on peut les y amener. Pour la première fois dans l'histoire de la justice, un acte d'accusation a été établi par le Procureur du TPIY contre un chef d'Etat en exercice Slobodan Milosevic. On regrette toutefois que sa mort soit arrivée avant son jugement.

L'expérience des TPI ad hoc et leur jurisprudence constructive devrait former de tremplin au probable Tribunal spécial pour le Burundi car les cas répétitifs des crimes qui ont été commis au Burundi sont similaires à ceux qui sont incriminés par les Statuts des deux TPI ad hoc et dont leurs auteurs ont fait objet de poursuites et de jugement par ces deux TPI ad hoc. Dans tous les cas, l'impunité de ces crimes favorisera leur recrudescence comme le confirme l'adage africain selon lequel « le ventre d'où a surgi le monstre reste toujours fécond ». Le gouvernement du Burundi, d'abord, les NU ensuite, devraient largement s'investir à l'établissement dudit Tribunal afin de mettre fin à l'impunité. Cela est nécessaire pour, non seulement, consolider la paix et la sécurité dans le pays, mais aussi pour rétablir la paix dans les esprits.

Avant de clore ce travail, nous tenons à affirmer la contribution des TPI ad hoc au développement du droit international. Ils ont élargi la portée du droit international humanitaire et du droit international pénal et ont prouvé qu'une justice internationale sans failles, efficace et transparente pouvait exister. Il s'agit des premières juridictions à avoir appliqué le corpus du droit international humanitaire. Ils ont défini et appliqué la théorie de la responsabilité pénale des supérieurs ou responsabilité du supérieur hiérarchique, affirmant clairement qu'une relation de subordination officielle n'est pas forcément requise pour établir la responsabilité pénale de l'individu506(*) .

* 497 MAISON (R.), La décision de la chambre de 1ère instance n°1 du Tribunal pénal pour l'ex- Yougoslavie dans l'affaire Nikolic, J. E. D. I, vol. 7, 1996, p. 298.

* 498 RPP du TPIY, art. 53.

* 499 Voy. 4ème Rapport annuel du TPIY (A/52/375- S/1997/729) 18 septembre 1997, qui fait état des arrestations effectuées par les forces internationales de maintien de la paix (IFOR, puis SFOR et UNTAES).

* 500 Les juges du TPIR ont ajouté le 6 juin 1997 un art. 7bis au RPP qui permet au Président de faire un rapport au CS des NU. sur le manquement de coopération des Etats, un article. équivalent a été adopté le 25 juillet 1997 par les juges du TPIY.

* 501 Voy. S/Rés./ 1165(1998), 30 avril 1998, art.4 ; S/Rés./1329(2000), 30 novembre 2000, art.5.

* 502 PAZARTZIS (Photini), op. cit., p. 75.

* 503 PAZARTZIS (P.), La répression pénale des crimes internationaux, op. cit., p. 35.

* 504 Ibidem.

* 505 PAZARTZIS (P.), La répression pénale des crimes internationaux, op. cit., p. 35.

* 506 Pour les détails, voy. Le TPIY en un coup d'oeil : http://www.file://G\Le TPIY en un coup d'oeil_fichiers\achieveindex-f_fichiers\achieve-f.htm

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King