Partie 2
La télévision : un lieu d'actions
collectives traditionnel dont font partie les séries TV
Si les séries télévisées ont du
succès, c'est aussi parce qu'elles sont ancrées dans un
réseau où de nombreux acteurs sont appliqués. En effet,
lorsqu'un spectateur regarde une série, il ne s'agit pas en fait pas
d'un acte individuel mais d'un acte collectif, car il mobilise un réseau
entier avec lui.
Pour comprendre cette notion de réseau nous allons,
dans la suite de ce mémoire, faire appel a l'Actor Network Theory (ANT),
traduit en français de différentes façon : «
sociologie de la traduction », « sociologie de l'acteur réseau
», ou encore « théorie de l'acteur réseau ». Ce
concept à la fois anthropologique et sociologique a été
principalement développé par les chercheurs de l'école des
Mines Michel Callon, Bruno Latour et Madeleine Akrich, sans oublier John Law,
principal théoricien anglo-saxon de l'ANT.
A. Les fondamentaux du réseau des séries
télévisées
1) La définition de réseau d'après
l'Actor Network Theory
L'ANT naît lorsque des chercheurs centrent leurs
études sur l'émergence des faits scientifiques. Ces chercheurs
observent que chaque fait est ancré dans une organisation
composée d'éléments humains et d'éléments
non-humains qui interagissent entre eux, et la notion de réseau devient
clé dans cette analyse du « fait ».
« Reconstituer le réseau, c'est éviter de
découper la question en tranches, c'est chaîner toutes les
entités qui participent du problème. » 15 (p.135).
Soulignons l'intervention des éléments
non-humains, constituant toute l'originalité de cette théorie :
même des éléments techniques peuvent agir sur un
réseau. C'est pourquoi, chaque entité constituante du
réseau est nommée « actant » par Michel
Callon16. Le mot « actant » permet ainsi de ne pas
humaniser les entités étudiées du réseau, et
d'accorder une importance égale aux intervenants humains et
non-humains.
Du fait de sa forme hybride que l'on vient de décrire, le
réseau est qualifié de « sociotechnique ».
Dans ce réseau se transmettent diverses informations
(des messages, des faits, etc.) entre les différents actants. Ce sont
les « inscriptions ». Ces inscriptions sont émises par les
nombreux actants du réseau, et émergent de toute part. C'est
pourquoi, a certains points du réseau, on retrouve des « centres de
traduction ». Ces centres de traduction sont les lieux où
15 Les nouvelles approches sociologiques des
organisations, Henri Amblard, Philippe Bernoux, Gilles Herreros,
Yves-Frédéric Luvian, pp.127-140
16 Sociologie de l'acteur réseau, Michel
Callon, Sociologie de la traduction. Textes fondateurs, Presses de l'Ecole des
Mines, 16 novembre 2006
les inscriptions sont recoupées, combinées et
évaluées. Et en fonction de leur analyse, les centres prennent
des décisions stratégiques adaptées à la situation,
décisions qui mobiliseront le réseau. C'est pourquoi ils sont le
lien entre les différents actants du réseau. « De telles
actions stratégiques ne sont possibles que parce que le réseau
sociotechnique existe fournissant les lignes d'action possibles et autorisant
leur accomplissement. L'action et le réseau sont ainsi les deux faces
d'une même réalité : d'oü la notion
d'acteur-réseau. )) (p. 270)17.
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