Chapitre 1 : Les Aborigènes : leur
histoire, leur terre, leur Rêve, leur
vie.
1.1 Petit historique du continent australien.
1.1.1 Découverte d'une terre nouvelle
Les premiers habitants de l'Australie furent de
téméraires voyageurs qui, il y a environ 53000 ans, ont
quitté les côtes de l'Asie du Sud-est pour partir vers les
contrées inconnues du Sud-est... Ils n'étaient pas si fous
puisqu'ils devinrent, en Nouvelle-Guinée et en Australie, les
ancêtres immémoriaux d'une population qu'ils n'avaient
probablement jamais espéré si grande. On suppose que ce voyage a
été rendu possible par un niveau de la mer, entre 120000 et 12000
avant J.C., particulièrement bas de sorte qu'un pont terrestre
s'était formé, ne laissant qu'une étroite étendue
d'eau à parcourir entre l'Asie et l'Océanie. Sans cette
diminution de la traversée, les embarcations de l'époque
n'auraient jamais été suffisamment solides pour traverser. La
Tasmanie, l'Australie et la Nouvelle-Guinée formaient alors une seule
terre nommée Sahul. ( Charleux 1989, 70-1 ; Meyer 1995, 14). Ces
nouveaux habitants se sont répandus petit à petit sur toute la
surface du pays. Ils se sont adaptés aux différents climats et
ont développé des pratiques culturelles variées dans un
isolement quasi total par rapport au reste du monde. Les fouilles attestent que
l'ensemble du continent était habité dès 20 000 avant J.C.
(Charleux 1989, 72).
1.1.2 Conquête britannique
Le nombre d'Aborigènes s'élevait aux environs du
million lorsque les premiers colons britanniques mirent pied à terre
en 1788. Cela n'empêcha pas ces
conquérants de déclarer le continent australien
terra nullius, terre vide qui dorénavant appartiendrait aux
premiers arrivés : eux. Comme lors de la conquête de
l'Amérique du Nord, autre terra nullius bien connue,
malgré la curiosité bienveillante de quelques rares explorateurs
xénophiles (comme par exemple François Péron 1989,12-9),
le massacre ne se fit pas attendre. Aussitôt que les colons furent en
nombre suffisant pour se sentir en sécurité, les autochtones
furent chassés de leurs terres sans le moindre scrupule. Au
XIXème siècle, dans la partie sud-est du pays, ce fut un
véritable massacre : les Aborigènes furent chassés comme
du gibier. De toute façon, les spécialistes de l'époque
les savent au plus bas de l'échelle humaine1, peut-être
sont-ils même le chaînon manquant entre le singe et l'homme
...(Condominas 1989, 24)
C'est au début du vingtième siècle que le
gouvernement remplace la tuerie par la politique d'assimilation :
détacher les Aborigènes de leur contexte traditionnel et les
insérer dans un contexte occidental pour qu'ils remplacent leurs
coutumes par les pratiques et des façons de penser des colons. Regrouper
les Aborigènes dans des colonies était une façon de faire,
enlever les enfants en bas âge pour les placer dans des familles blanches
en était une autre. Les Aborigènes résistèrent
à cette volonté de leurs nouveaux « maîtres »
d'anéantir leur culture. Vers les années trente, il
commença à se former des associations aborigènes qui
organisèrent des manifestations et des pétitions pour
l'égalité en droit et pour le droit foncier. Ces organisations se
multiplièrent encore dans les années soixante jusqu'à
aboutir, en 1972, au remplacement de la politique d'assimilation par une
politique de tolérance multiculturelle et d'auto-gérance toujours
d'actualité (Caruana 1994, 16-7).
1 Adam Kuper nous cite des extraits de textes
écrits par Fison et Howitt, deux anthropologues de la
fin du 19ième siècle où cette
idée est clairement exprimée (Kuper 1988, 92-4).
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