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L'art du désert - Etude des peintures aborigènes contemporaines du désert central d'Australie dans le contexte de la culture aborigène et du marché de l'art.

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par Amandine Dooms
Université Libre de Bruxelles - Histoire de l'Art et Archéologie. Civilisations non-européennes 2001
  

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3.4 Quelques artistes renommés

Depuis le début de l'art contemporain du Désert, quelques artistes se sont démarqués du lot : Clifford Possum Tjapaltjarri et Emily Kame Kngwarreye ont chacun au moins une monographie, les autres sont très souvent cités et sont les plus côtés dans le marché de l'art. Leurs développements artistiques personnels sont assez intéressants et montrent bien que les artistes aborigènes peuvent dépasser les limites de la tradition pour la faire évoluer vers de nouvelles formes. La plupart de ces artistes ont pris part au commencement du courant artistique à Papunya et sont décédés récemment. Ils faisaient partie de cette génération exceptionnelle qui a pu peindre avec des connaissances approfondies des Rêves auxquelles leurs enfants n'ont malheureusement pas accédé (communication personnelle: Petitjean 2002).

Emily Kame Kngwarreye (ILL.52,65, 88-90)

Emily, née en 1916, était anmatyerre et a vécu à Utopia jusqu'en 1996, date de sa mort. Hautement initiée, elle fut la gardienne de nombreux Rêves associés à sa région. Elle fait partie des artistes les plus connus d'Australie centrale. En effet, en sept ans de peinture, elle a participé à plus de cent expositions et ses tableaux se sont vendus dans le monde entier. Son style particulièrement libre et original y est pour beaucoup (Nangara 1996, 86). Ses tableaux ne présentent pas les mêmes signes que ceux développés plus haut mais des points énormes ou des lignes entrelacées ou parallèlles. Leurs mélanges colorés font référence aux couleurs du désert selon les périodes de l'année ou les événements naturels (feu, vent...).

L'abstraction est poussée ici à l'extrême dans l'art du désert. Fred Myers interprète l'abstraction comme un moyen de mieux conserver le secret des Rêves représentés (Myers 1999,222) et, en effet, Judith Ryan explique comment cette artiste recouvre les signes habituels par des couches d'énormes points colorés (Ryan 1993, 55). Ces points ne sont néanmoins pas choisis aléatoirement, ils ont un lien direct avec les signes secrets cachés sous eux. Par exemple, sur le symbole secret d'une plante, Emily Kame Kngwarreve peint des taches rondes représentant les fleurs de cette plante. Le sens religieux est inhérent à ses oeuvres mais il est visuellement difficilement accessible (Ryan 1993, 55).

Clifford Possum Tjapaltjarri (ILL.37,87, 91-93)

Clifford Possum Tjapaltjarri, né en 1932 est anmatyerre. Il vit à Napperby dans le sud du Territoire du Nord. Déjà initié à la gravure sur bois et à la peinture, il lance réellement sa carrière artistique vers 1970 lorsqu'il travaille avec le groupe de Geoffrey Bardon à Papunya. Exposé dans le monde entier, il est devenu l'artiste d'Australie Centrale le plus connu. Plusieurs livres lui sont d'ailleurs consacrés (Nangara 1996, 84). Clifford Possum est décédé en juin 2002.

Bardon voit dans sa peinture en couches entremêlées des tentatives de tridimensionnalité. Clifford Possum essaie aussi de faire ressentir les différentes saisons et les divers moments de la journée à travers ses agencements de couleurs (Bardon 1991, 113).

Johnny Warangkula Tlupurrula (ILL.35, 94,95)

Né en 1925, il a vécu une enfance selon le monde traditionnel jusqu'à ce que sa
famille déménage à Hermannsburg. Il est pleinement initié puis déménage à

Haasts Bluff, puis, en 1960, à Papunya. C'est lui qui est à l'origine du fond recouvert de points. En effet, dans le souci de cacher les aspects secrets peints dans les premières peintures du courant artistique, il recouvre les signes secrets par des couches superposées de points créant des effets vibrants. Il fut un des grands artistes de Papunya jusqu'à ce qu'une maladie des yeux l'empêche de continuer à peindre à la fin des années quatre-vingt (Johnson 1994, 203-4). Il est décédé en juin 2001. Ces Rêves sont celui de l'igname, du feu et les histoires de Egret et Nyilppi et Nyalpilala.

Ronnie Tjampitjimpa (ILL.59, 85, 96)

Ronnie Tjampitjimpa est né en 1943 à Muyinnga (100 km à l'est de Kintore). Une fois initié, il a beaucoup voyagé, passant notamment par Yuendumu avant de s'installer à Papunya jusqu'en 1981 lorsqu'il put rejoindre sa terre natale. Il fait partie des artistes importants qui ont commencé à peindre à Papunya dès 1971 (Johnson 1994, 174-5).

Ses tableaux les plus connus sont basés sur un motif de carrés concentriques, fréquents sur les objets de bois rituels gravés, mais absents des peintures de sables et rupestres. Au début du courant artistique, on peut retrouver ce motif sur la représentation figurative de ces objets rituels (ILL.58). Petit à petit, le motif se déplace de cette représentation vers le support du tableau lui-même (ILL.58b), alors toujours entouré des autres motifs qui forment le tableau. Plus tard, Ronnie va prendre pour sujet unique ce motif monumentalisé et multiplié (Petitjean 2000, 227-8). Comme ceux d'Emily ou de Turkey, les tableaux qui résultent de cette évolution se distinguent dans la production artistique contemporaine du désert par

cette abstraction géométrique qui les rapproche étroitement de certains artistes occidentaux modernes et contemporains (cf.infra)

Turkey Tolson Tjupurrula (ILL.26, 28, 61, 97,98)

Turkey est né en 1938 à huit kilomètres de Haasts Bluff et il est décédé en août 2001. En 1959, peu après son initiation, sa famille part pour Papunya, où il est un des plus jeunes à prendre part au courant artistique de Geoffrey Bardon (Johnson 1994, 194). Turkey est gardien des Rêves émeu, serpent, feu de brousse, femme et Mitukutjarrayi. Il a peint quelques tableaux plus classiques avec des cercles concentriques reliés entre eux et parfois des éléments plus figuratifs mais se distingue surtout par ses peintures plus innovatrices composées de lignes horizontales superposées faites de points serrés (ILL.98). (Johnson 1994, 194). Ces peintures, comme celles d'Emily, de Ronny Tjampitjimpa et de Mick Namarari, frappent par leur abstraction dénuée des signes typiques de l'art aborigène du désert. D'ailleurs, ces innovations ne sont pas toujours bien perçues par les anciens (communication personnelle Petitjean 2002).

Cependant, on remarque vite que ce motif de lignes parallèles est repris de façon fort semblable par plusieurs peintres. Dans le seul catalogue de l'exposition Nangara qui eut lieu à Bruges en 1996, il est repris (avec des variations dans les couleurs, l'épaisseur des traits et la façon de les former (traits de pinceau, juxtaposition de points séparés ou pas...)) par Emily Kame Nngwarreye, Greeny Purvis Petyerre, Gladys Kemarre, Ronnie Tjampitjimpa, Charlie Eagle Tjapaltjarri, Billy Stockman Tjapaltjarri, Benny Tjapaltjarri et Turkey Tolson Tjapaltjarri. Presque chaque peinture est associée à un Rêve différent et toutes ces peintures

sont postérieures à 1990. On voit aussi un motif similaire dans un dessin sur papier fait par Jerry Waldmadjari datant des années 1930 (ILL.25) (cf.p.34). Plusieurs questions se posent : ces tableaux aux seules lignes horizontales sontils une innovation de Turkey qui développe un motif traditionnel rencontré notamment dans les peintures corporelles pour en faire son seul sujet ? Est-ce une innovation d'un autre artiste duquel Turkey et d'autres se seraient inspirés ou est-ce que tous ces artistes auraient eu la même démarche de développer cet élément de lignes parallèles? Le dessin de 1930 de Jerry Waldmadjri (ILL.25) pourrait indiquer que ne prendre que ces lignes pour sujet n'est pas une innovation récente mais une démarche traditionnelle. Mais on ne sait pas ce qu'a demandé l'anthropologue à Jerry Walmadjari pour qu'il dessine ce motif. Si l'anthropologue lui a simplement demandé de représenter de l'eau, il est normal que ce soit le seul sujet du dessin... Il m'est impossible de statuer bien qu'il semble peu probable qu'ils aient tous eu indépendamment la même démarche. Les ressemblances entre les oeuvres de différents artistes aborigènes sont très fréquentes dans l'art du désert autant pour ceux qui peignent de façon plus traditionnelle que pour ceux que l'on considère comme plus innovateurs. Il semble que, pour les artistes aborigènes, reprendre une idée de composition ou de technique découverte par un de leurs confrères est une chose tout à fait naturelle. Quoi de plus logique dans une société où l'on considère que tous ces motifs un héritage des temps ancestraux ?

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