1.3.2.2 La parentéLe système de
parenté aborigène est très complexe mais est essentiel
pour
comprendre le fonctionnement social et religieux. Les rapports
de parenté fixent les droits et les devoirs de chacun. Les
Aborigènes divisent leur société en deux classes exogames
et en huit groupes de peau chacun divisé entre hommes et femmes. Les
deux moitiés d'un groupe portent des noms qui ne changent que d'un
préfixe ou d'un suffixe qui indique le sexe. Par exemple, chez les
Walpiri, les noms de peau des femmes commencent par N et ceux des hommes par J.
Ainsi, on a les huit groupes Jungarrayi/Nungarrayi, Jakamarra/Nakamarra,
Japanangka/Napanangka, Jampijinpa/Nanpijinpa, Jangala/Nangala,
Japaljarri/Napaljarri, Jupurrurla/Nappururla, Japangardi/Napangardi. Les
deux
parties exogames de la société, entre lesquelles
fonctionne un cycle de parenté paternel, reprennent quatre groupes de
peau chacun. Ces derniers, par contre, sont animés par un cycle de
parenté maternel. Le mariage doit se faire avec le groupe de peau qui
est lié paternellement aux enfants de la personne qui veut se marier.
Ces prescriptions de mariage ne sont pas toujours respectées, il existe
alors des possibilités de choix quant au groupe de peau auquel l'enfant
appartiendra (Glowczewski 1996, 79-82).
Ce système de parenté est surtout utilisé
pour les activités rituelles : lorsqu'on célèbre un
Rêve, la fonction de chacun est définie selon son nom de peau. Par
exemple, dans la société Walpiri, si on célèbre le
Rêve Etoile dont le gardien est Jungarrayi/Nungarrayi, toutes
les personnes suffisamment initiées de ce groupe de peau sont les
kirda « propriétaire » et chacun d'eux sera
assisté par un ou une Japaljarri/Napaljarri qui est le groupe
paternellement associé aux gardiens. Ces assistants
considérés comme les kurdungurlu, «
régisseur », du rituel. Ces derniers préparent le terrain et
les objets rituels et dirigent la chorégraphie des danseurs kirda
(Glowczewski 1996,79-83).
1.3.3 La Loi du Rêve ou la Loi australienne ?
Un des aspects difficiles de la cohabitation des cultures
aborigène et australienne est le problème de la loi. Les
Aborigènes ont été reconnus comme citoyens australiens,
ils doivent donc respecter les lois de l'Etat, seulement les Aborigènes
ont leurs propres lois, celles des Rêves qui ne correspondent pas
à celles qu'on leur impose. Le problème est d'autant plus
difficile à résoudre que chaque groupe aborigène a ses
propres lois. Il y a cependant une trame de base commune aux différents
groupes, la voici : la Loi traite des cas de meurtre, sacrilège,
sorcellerie,
inceste, adultère, usurpation des droits rituels, vols,
attaque physique...mais explique aussi les règles à suivre en
matière de partage avec les autres groupes, d'éducation des
enfants, de relations avec autrui ou de comportements rituels. Avant la
colonisation, il y avait très peu d'intimité dans les campements,
il était donc difficile de cacher une offense à la Loi. Les
punitions telles que la mort, les blessures, les menaces de sorcellerie ou le
ridicule, étaient publiques et sous l'autorité du conseil des
anciens. Le principal problème à l'arrivée des colons fut
le comportement de ceux-ci qui brisaient constamment les Lois
aborigènes, notamment quant à la possession des terres et quant
aux relations avec les femmes (avec l'interdiction de les punir
traditionnellement par les blessures ou par la mort). Plus tard, les
Aborigènes, puisque à l'époque non-chrétiens, ne
pouvaient pas témoigner dans les tribunaux australiens. La loi
australienne ne leur fut vraiment utile que dans les années soixante-dix
et quatre-vingt, lorsque des lois sur leur droit à la terre se mirent en
place : petit à petit, la notion de "native title" apparut, c'est
à dire l'idée qu'en tant que premiers habitants de l'Australie,
les Aborigènes ont droit à une terre. Ainsi, ils ont
récupéré en tribunaux des terres ancestrales
occupées par de grands propriétaires terriens australiens depuis
la colonisation. Ils ont utilisé, entre autres, des tableaux
contemporains comme preuve de leur attachement à la terre (Bourke 1998,
56-73).
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