Les mycorhizes apparaissent comme des sites
privilégiés d'absorption et d'accumulation de phosphore. Les
phosphatases des mycosymbiotes jouent un rôle dans la mobilisation du
phosphore interne des hyphes mycéliens et dans le recyclage du phosphore
immobilisé dans le sol sous forme organique par hydrolyse des esters
phosphorylés. Le phosphore des composés organiques peu solubles
passe ainsi sous forme d'orthophosphate. (Hatch, 1937 ; Mousain, 1989 ; Bolan,
1991).
L'absorption du phosphore par les racines des plantes se fait
essentiellement sous la forme d'orthophosphate (H2PO4 -, HPO42-, et
PO43-) dont la concentration dans la solution du sol est très
faible (un micro molaire = 1 uM). Les échanges entre les formes solubles
et insolubles de phosphore dans le sol sont lents (Bhat et Nye, 1973).
L'absorption de phosphore par les racines étant plus
rapide que la diffusion de phosphore dans le sol, il se forme très
rapidement une zone d'épuisement autour de la racine. D'importantes
réserves de phosphates, organiques ou minéraux, sont toutefois
immobilisées dans le sol (Bhat et Nye, 1973).
Parmi elles, les phosphates organiques,
représentés par les phosphates d'inositol, les phospholipides,
les acides nucléiques et d'autres formes difficilement identifiables,
constituent une fraction très importante du phosphore des horizons
superficiels du sol (Anderson, 1967). Les phosphates d'inositol
représentent parfois plus de 50 % des phosphates organiques du sol
(Dalal, 1977). Ces phosphates sont susceptibles d'être
dégradés
par des phosphatases, enzymes qui catalysent l'hydrolyse de
liaisons organiques en libérant de l'orthophosphate.
La carence en phosphore du milieu stimule les
activités phosphatases (Mousain, 1989). Elle traduit une adaptation
à un environnement limitant en phosphore soluble que l'on rencontre dans
la plupart des sols forestiers (Calleja et al., 1980).
L'effet de la carence en phosphore soluble est
considérablement plus marqué sur les activités
phosphatases des Mycelia des champignons ectomycorhiziens que sur
celles des racines de leurs plantes-hôtes (Doumas et al.,
1984).
Le marquage cytochimique des phosphatases montre une
localisation essentiellement à la surface externe des filaments (Lacaze,
1983 ; Dexheimer et al. 1986 ; Mourer et al., 1994). Une
variabilité importante, inter- et intraspécifique, est
observée dans le niveau des activités phosphatases des
champignons ectomycorhiziens (Mousain et al., 1988 ; Meyselle et
al., 1991 ; Matumoto-Pintro, 1996) ; cette variabilité pourrait
être mise à profit pour sélectionner des associations
mycorhiziennes efficaces dans l'utilisation des phosphates organiques du
sol.
En effet, les activités phosphatases mesurées
dans les racines mycorhizes sont très supérieures à celles
des racines non infectées (Williamson et Alexander, 1975 ; Mousain,
1989).
Au voisinage de la racine par l'excrétion d'enzymes
(phosphatases) dégradant les phosphates organiques, ou par la mise en
oeuvre de divers mécanismes modifiant les conditions physico-chimiques
de la rhizosphère (excrétion de H + ou HCO3- , et
d'acides ou d'anions organiques ayant des propriétés
complexantes,...) et la présence d'une microflore synergique,
solubilisatrice de phosphates minéraux (Matumoto-Pintro, 1996).
L'augmentation de l'ortho phosphate absorbé par les
racines mycorhizées, qui résulte principalement de
l'accroissement du volume de sol exploré par ces systèmes et de
la translocation du phosphore du sol vers la racine via le
réseau mycélien extramatriciel, ainsi que de la présence
de transporteurs d'ortho phosphate plus efficaces dans les racines
mycorhizées que dans les racines non infectées (Mousain,
1989).
L'acidification du milieu augmente la disponibilité en
ortho phosphate de la rhizosphère ; elle favorise le passage du
phosphore sous la forme H2PO4 ; Cette forme semble être plus facilement
absorbée par les champignons que la forme HPO4.
La signification écologique des activités
phosphatases des champignons mycorhiziens ne peut toutefois être
réellement établie que dans la mesure où elles s'exercent
vis-à-vis de phosphates organiques réellement présents
dans les sols forestiers.
La solubilisation des phosphates minéraux complexes
résulterait des actions chimiques exercées dans la
rhizosphère par les champignons mycorhiziens et les plantes-hôtes
par excrétion de H+ ou de HCO3 - (Mousain et al.,
1989 ).Ces polyphosphates constituent une réserve de phosphore
mobilisable dans le manteau des ectomycorhizes (Harley et Mc Cready, 1981).