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L'officier de police judiciaire dans le code de procédure pénale camerounais

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par January Eyango Nzima
Université de Douala - DEA  2006
  

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INTRODUCTION GENERALE

La loi n° 2005/007 du 27 juillet 2005 portant code de procédure pénale au Cameroun, entrée en vigueur le 1er janvier 2007, intervient dans un contexte dominé par la consolidation de l'Etat de droit et la protection des libertés individuelles. L'univers procédural a ainsi connu un chamboulement considérable. La lutte contre l'impunité ne peut aujourd'hui se concevoir sans un encadrement juridique qui prenne en compte le respect des droits de la personne accusée d'avoir violé la loi pénale.

La procédure pénale, à travers le code de procédure pénale qui fixe les droits et les devoirs de l'ensemble des acteurs du procès pénal se positionne comme le baromètre par excellence des garanties de protection des droits individuels des personnes en butte à une accusation pénale, notamment de leur droit à un procès équitable1.

Les différents intervenants dans le cadre de la procédure pénale ont vu leurs missions redéfinies. L'officier de police judiciaire faisant partie de cette chaîne n'y échappe pas. Cette nouvelle législation procédurale, tout en accordant d'importants pouvoirs à l'OPJ dans la conduite des enquêtes, a pu édicter un certain nombre de mesures propres à protéger le suspect contre des maux tels que l'arbitraire et les manoeuvres policières insidieuses2. D'où notre préoccupation de nous appesantir sur le cas particulier de l'OPJ dans le code de procédure pénale du Cameroun. Le thème soumis à notre recherche présente un double intérêt théorique et pratique.

Sur le plan théorique, il pourra nous permettre de ressortir les divers contours de la mission de l'OPJ, en amont et en aval dans le cadre d'un procès pénal.

1 Lire le Rapport du ministère de la justice sur l'état des droits de l'Homme au Cameroun en 2007, p.29 (Bibliothèque du ministère de la justice ).

2 J.P.S NKENGUE, « L'OPJ : enquête de police et la torture>> in « les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise >> 2007, volume 1, PUA, p.225.

Sur le plan pratique, il nous permettra d'évaluer la mise en oeuvre des dispositions relatives à la police judiciaire en vue de dégager les difficultés rencontrées et d'envisager les perspectives de solution.

Le Cameroun, malgré son unification administrative et politique en 1972, a attendu longtemps avant qu'intervienne son unification sur le plan de la procédure pénale.

Par le passé, la partie anglophone (Ex Cameroun Occidental) appliquait le <<Criminal procedure ordinance>> emprunté d'un texte nigérian de 1958. La partie francophone (Ex Cameroun Oriental) était régie par le <<Code d'Instruction Criminelle >> issu de l'ordonnance française du 14 février 1938 et ses modifications subséquentes3.

Face à ces deux textes bien différents et parfois contradictoires, la mise en place du code de procédure pénale n'a pas été facile. Son avènement a sonné le glas de ce dualisme dont seul le Cameroun avait le secret. C'est à l'orée des années 70 que l'administration camerounaise a sollicité la contribution des éminents spécialistes, experts nationaux et étrangers parmi lesquels le professeur Stanislas MELONE4 afin de mettre sur pied un code de procédure pénale au Cameroun.

Cette réflexion sera à l'origine trente années environ plus tard de la naissance du CPP. Le code de procédure pénale vient rompre avec certaines pratiques qui, loin de concilier les intérêts en présence-la protection de la société et la protection des libertés individuelles-, la pratique policière optait généralement pour la méconnaissance des dernières5. L'évolution de notre société ne permettait plus que le CIC continuât à être appliqué. On a noté que ce code était devenu désuet et surtout anachronique.

3 Signalons que le Code d'instruction criminelle et le <<Criminal Procedure Ordinance >> étaient des textes d'origine coloniale. Le premier est adopté en France en 1808 et rendu applicable au Cameroun par une ordonnance du 14 février 1938 ; le second est extrait des <<Laws of Nigeria>> de 1958 et rendu applicable au Cameroun par l'Angleterre qui avait, sur le plan législatif, rattaché au Nigeria la partie du Cameroun qu'elle administrait.

4 Premier professeur agrégé en droit d'Afrique Noire francophone qui nous a quitté en 2001. Nous lui rendons un vibrant hommage. Repose en paix << Grand Prof>>.

5 S. YAWAGA, << La garde à vue >>, in Les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise, 2007, volume 1, PUA, page 56.

Trois ans environ après son entrée en vigueur, le CPP continue à changer nos habitudes. C'est pour cette raison que tous les acteurs sont ici interpellés afin que cet outil de travail soit bien utilisé.

<< Une définition peut être arbitraire en ce qu'elle ne fait pas toujours l'unanimité des chercheurs ; elle n'est jamais inutile puisqu'elle implique un choix, lequel détermine le cadre de la recherche >>.6 Nous pouvons définir l'officier de police judiciaire comme étant un auxiliaire du Procureur de la République chargé de poser les actes de police judiciaire, d'effectuer les délégations des juges d'instruction et les instructions du PR. En d'autres termes, l'OPJ est chargé en tant qu'auxiliaire du Procureur de la République de constater les infractions, d'en rassembler les preuves, d'en rechercher les auteurs et complices et, le cas échéant, de les déférer au parquet, tant qu'une information n'est pas ouverte7. Selon l'article 80 du CPP, les officiers de police judiciaire sont assistés dans leurs missions par les agents de police judiciaire.

La procédure pénale est l'ensemble des règles qui décrivent et règlementent à la fois les différents organes chargés de traiter le phénomène criminel, et les différents actes judiciaires qui doivent se succéder depuis le moment où l'infraction est découverte jusqu'au moment où son auteur reconnu ou déclaré commencera à exécuter sa peine8.

Depuis le CIC, le rôle de l'OPJ a toujours prêté à beaucoup de controverses. Même avec l'entrée en vigueur du CPP, ce rôle est davantage mal compris par les usagers. Notre souci est d'essayer de lever ce pan de voile, de permettre, grâce à nos recherches aux lecteurs et aux usagers d'avoir un autre regard quant à la mission de l'OPJ, faire comprendre à ceux-ci que l'OPJ est un auxiliaire du PR au service de tous et de chacun. L'OPJ doit travailler dans le respect de la loi et des droits du suspect, sinon il est susceptible de répondre de ses actes devant la justice (le

6 T.R. HASSAN, << La liberté religieuse : l'exemple libanais >>, in l'effectivité des droits fondamentaux dans les pays de la communauté francophone, édition Eric KOETHER pour l'AUPEF-UREF, 1994, pages 179.

7 S. GUINCHARD et J. BUISSON, <<Procédure pénale >>, Paris Litec 2000, page 329.

8 J. GATSI, J.A. NJOCK et M.J.J FOMCHIGBOU, <<Nouveau dictionnaire juridique >>, PUL, 1ère éd. 2008, page 164.

Cameroun étant un Etat de droit). Nous souhaitons donc mettre à la disposition des usagers (non professionnels et professionnels de droit) des éléments pouvant leur permettre d'être plus éclairés sur la mission complexe de l'OPJ. Ce qu'ils peuvent faire en cas de violation de leurs droits par l'officier de police judiciaire chargé de leur enquête.

Sous l'empire du CIC, l'OPJ se comportait comme « un loup pour l'usager ». L'officier de police judiciaire profitait du fait que ce code n'avait pas accordé une place à la protection des droits du suspect. Ce dernier était alors livré à la merci de son enquêteur. Le CIC ne prévoyait aucun moyen de poursuite contre l'OPJ. Le CPP est venu changer toutes ces pratiques, il est l'outil par excellence de la protection des droits du suspect. Mais loin de croire que le pouvoir de l'OPJ a été fragilisé, il a été renforcé tout en ajoutant le respect des droits du suspect au cours de la procédure.

Après avoir cerné les contours des différents concepts qui forment la trame du thème de recherche, nous pouvons, dès lors nous interroger sur la problématique suivante. En tant qu'auxiliaire du Procureur de la République, quelle est la place accordée par le code de procédure pénale à l'officier de police judiciaire ? Quelles sont les garanties prévues par le code de procédure pénale afin de permettre à l'OPJ d'accomplir sa mission dans le respect de l'équilibre entre les droits de la personne poursuivie et l'intérêt de la société ?

En d'autres termes, quelles sont les dispositions prises par le code de procédure pénale afin que l'OPJ joue efficacement son rôle en respectant les libertés individuelles et l'équilibre social ? Les dispositions du code de procédure pénale relatives à l'officier de police judiciaire sont-elles de nature à favoriser l'exécution par ce dernier de sa mission (notamment le traitement du phénomène criminel) dans le respect de l'équilibre entre les droits du suspect et la garantie de l'ordre social?

Le rôle de l'OPJ doit être bien cerné afin que son contrôle et sa responsabilité soient dégagés face aux difficultés qu'il endure au quotidien dans l'accomplissement de sa mission. La

problématique que nous avons dégagée un peu plus haut nous permet de donner une orientation en deux parties, à savoir d'une part l'étendue de la notion d'officier de police judiciaire et l'importance de ses pouvoirs mais relatifs dans le CPP (première partie), et d'autre part le contrôle et la responsabilité de l'OPJ (deuxième partie).

PREMIERE PARTIE

L'ETENDUE DE LA NOTION D'OPJ ET L'IMPORTANCE DE SES
POUVOIRS MAIS RELATIFS DANS LE CPP

Le CIC dans ses dispositions n'avait pas accordé la qualité d'OPJ à certaines personnes. Mais le CPP a élargi cette qualité à d'autres éléments de la Gendarmerie Nationale et de la Sûreté Nationale. En plus, l'OPJ a vu ses pouvoirs renforcés par le législateur pénal de 2005. Bien que ces pouvoirs soient ainsi renforcés, ils restent sous la direction et la surveillance du Procureur de la République d'où leur caractère relatif. Nous allons d'abord étudier l'étendue de la notion d'OPJ et l'importance de ses pouvoirs dans le CPP (chapitre 1), ensuite nous verrons le caractère relatif des pouvoirs de l'OPJ dans le code de procédure pénale (chapitre 2).

CHAPITRE 1
L'ETENDUE DE LA NOTION D'OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE ET
L'IMPORTANCE DE SES POUVOIRS DANS LE CODE DE PROCEDURE
PENALE

Le législateur pénal de 2005 a permis à certaines personnes d'entrer dans le cercle des officiers de police judiciaire. Le code de procédure pénale a défini clairement qui a la qualité d'OPJ. Compte tenu du rôle très primordial que joue l'OPJ dans la chaîne du procès pénal, le législateur pénal lui a accordé des pouvoirs très importants. Nous pouvons à ce titre dire que l'OPJ est à un certain niveau la cheville ouvrière de la procédure pénale. Ceci se justifie par le fait que c'est lui qui est au début de la phase de déclenchement de la procédure pénale. La mission de l'OPJ est complexe à plus d'un titre et il a l'obligation à bien la maîtriser. Son rôle est clairement défini par le code de procédure pénale. Qui a la qualité d'OPJ dans le code de procédure pénale ? Quels sont les pouvoirs reconnus à l'OPJ dans la procédure pénale ? Pour être mieux édifié sur toutes ces questions et bien d'autres, nous allons d'abord voir l'étendue de la notion d'OPJ dans le code de procédure pénale (section 1) ensuite nous dégagerons l'importance de ses pouvoirs dans le cadre du procès pénal (section 2).

SECTION 1 : L'ETENDUE DE LA NOTION D'OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE
DANS LE CODE DE PROCEDURE PENALE

Cette étendue s'explique par la diversité des personnes ayant la qualité d'OPJ (paragraphe 1) et aussi par le fait que certains fonctionnaires sont investis d'une mission spécifique d'officier de police judiciaire (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La diversité des personnes ayant la qualité d'officier de police judiciaire

L'examen des textes de procédure pénale au Cameroun amène à relever l'extension de la qualité d'OPJ à d'autres personnels et leur appartenance à des corps administratifs distincts (A). Cette extension évolue jusqu'à certains magistrats... (B).

A- L'extension de la qualité d'OPJ à d'autres personnels

L'article 3 de la loi n° 58/203 du 26 décembre 1958 portant adaptation et simplification de la procédure pénale modifiant les articles 9 et 118 du code d'instruction criminelle (CIC) qui jadis régissait la procédure pénale au Cameroun avait restreint la qualité d'OPJ à certaines personnes9. Mais le CPP a étendu cette qualité à d'autres personnels dans ses articles 79 à 80. Cette extension s'est faite tant du coté de la Gendarmerie Nationale (1) que de la Sûreté Nationale (2).

9Article 9 du Code d'instruction criminelle.

1- Les OPJ relevant de la Gendarmerie Nationale

Ont la qualité d'OPJ au niveau de la Gendarmerie Nationale selon l'article 79 du code de procédure pénale, les officiers et sous-officiers de la gendarmerie, les gendarmes chargés même par intérim d'une brigade ou d'un poste de gendarmerie, les gendarmes ayant satisfait à un examen d'OPJ et ayant prêté serment.

La qualité d'OPJ a été étendue d'office aux sous-officiers de gendarmerie alors que sous l'empire du CIC, ceux-ci, avant de devenir OPJ étaient astreints à satisfaire à un examen et à prêter serment. Une autre extension est faite aux gendarmes ayant satisfait à un examen d'OPJ et ayant prêté serment. Actuellement, nous constatons que tous les gendarmes ont la possibilité de devenir OPJ, et ne restent APJ que ceux qui n'auront pas satisfait à l'examen d'OPJ.

Pour ce qui est des officiers de gendarmerie, nous pouvons noter qu'on distingue d'un coté les officiers supérieurs (Généraux de gendarmerie, colonels de gendarmerie, Lieutenants-colonels de gendarmerie, commandants de gendarmerie) et de l'autre les officiers subalternes (capitaines de gendarmerie, lieutenants de gendarmerie, sous- lieutenants de gendarmerie).

Pour ce qui est des sous-officiers de gendarmerie, il existe des sous-officiers supérieurs (adjudants chefs majors de gendarmerie, adjudants chefs de gendarmerie, adjudants de gendarmerie) et les sous-officiers subalternes (maréchaux de logis chefs et maréchaux des logis).

Le Secrétaire d'Etat à la Défense chargé de la Gendarmerie en tant que chef a-t-il la qualité d'OPJ ? Ailleurs comme en France, le problème ne se pose pas car le chef de la gendarmerie est un officier supérieur. Au Cameroun, le chef n'est pas nécessairement un gendarme et le CPP ne lui reconnaît pas la qualité d'OPJ. Il serait souhaitable que le législateur pénal puisse lui donner la qualité d'OPJ pendant son séjour à la tête de la gendarmerie.

2- Les officiers de police judiciaire relevant de la Sûreté Nationale

Selon l'article 79 du CPP, ont la qualité d'OPJ, les commissaires de police, les officiers de police, les fonctionnaires exerçant même par intérim les fonctions de chef d'un service extérieur de la Sûreté Nationale, enfin les inspecteurs de police ayant satisfait à un examen d'OPJ et ayant prêté serment.

Le CPP a étendu la qualité d'OPJ aux inspecteurs de police10 ayant satisfait à un examen et ayant prêté serment. Sous l'empire du CIC, ces fonctionnaires de police étaient considérés comme des APJ.

Il faut bien noter que les commissaires de police dont parle le CPP sont : les inspecteurs généraux de police(IGP), les contrôleurs généraux de police11(CGP), les commissaires divisionnaires de police (CD), les commissaires de police principaux (CPP) et les commissaires de police (CP).

En ce qui concerne les officiers de police nous avons : les officiers de police principaux (OPP), les officiers de police de 2ème grade (OP2) et les officiers de police de 1er grade (OP1).

Le Délégué Général à la Sûreté Nationale a-t-il la qualité d'OPJ ? Dans son article 9, la loi n° 58/203 du 26 décembre 1958 reconnaissait au chef de la Sûreté Nationale la qualité d'OPJ. Mais le CPP ne lui reconnaît pas cette qualité. Il faudrait que le législateur pénal donne au chef de corps de la police la qualité d'OPJ pendant son séjour à la tête de la DGSN.

10 Dans le cadre des inspecteurs de police, nous avons les inspecteurs de police principaux (IPP), les inspecteurs de police de 2ème grade (IP2) et enfin les inspecteurs de police de 1er grade (IP1)

11 Les deux grades d'inspecteurs généraux de police et contrôleurs généraux de police ont été institués par le statut spécial du 12 mars 2001. Il faut noter que ces grades n'existent jusqu'à présent que sur le papier. Une première vague de commissaires de police divisionnaires promus au grade de contrôleurs généraux en 2002 n'ont jamais porté leurs galons jusqu'à leur départ tous en retraite. On ne sait pas encore à quoi ressemblent ces galons.

B- L'acquisition de la qualité d'OPJ par certains magistrats dans certaines conditions

Nous devons noter que sous l'empire du CIC, le Procureur de la République et ses substituts, le juge d'instruction avaient la qualité d'OPJ12. Mais avec l'avènement du CPP, ces fonctionnaires ne sont pas cités par l'article 79. Le CPP ne leur reconnaît pas la qualité d'OPJ. Par contre, l'article 137 (3) du CPP dispose que le Procureur de la République peut, à tout moment, agir aux lieu et place de tout officier de police judiciaire. Peut-on poser tous les actes d'OPJ sans être OPJ ?

Il faut dire que le PR revêt la qualité d'OPJ dans certaines conditions. Ceci se justifie dès lors que l'article 111 du CPP dispose qu'en cas de crime flagrant, le PR est compétent pour diligenter l'enquête. Son arrivée sur les lieux de l'infraction dessaisit de plein droit l'OPJ qui s'y trouvait à moins que ce magistrat n'en dispose autrement.

Paragraphe 2 : Certains fonctionnaires sont investis d'un pouvoir spécifique d'OPJ

Le code de procédure pénale a prévu parmi les OPJ, des OPJ à compétence spéciale. Nous aurons à déterminer dans les lignes qui suivent les fonctionnaires investis de ces missions spécifiques (A) avant de voir le domaine limité de leurs interventions (B).

A- La détermination de ces corps de fonctionnaires

Selon l'article 80 du CPP, ce sont les fonctionnaires des administrations des services publics auxquels des textes spéciaux13 attribuent certaines compétences de police judiciaire, les

12 Voir à ce titre l'article 9 de la loi n°58/203 du 26 décembre 1958 dans le code d'instruction criminelle

13 Nous avons recensé plus d'une vingtaine de lois et décrets attribuant à certains fonctionnaires et agents de certaines Administrations la qualité d'OPJ à compétences spéciales.

exercent dans les conditions et limites fixées par ces textes. On les retrouve aux Eaux et Forêts, Douanes, Postes et Télécommunications, Transports14, Impôts et Taxes, Commerce et Prix, Inspection du travail. On parle des officiers de police à compétences spéciales.

B- Le domaine limité de leurs interventions

L'OPJ à compétences spéciales agit dans un domaine bien déterminé et spécifique. Il intervient dans les domaines aussi réservés que les postes et télécommunications, les douanes, les Eaux et Forêts.

Les pouvoirs de police judiciaire sont attribués par des textes spéciaux, à certains fonctionnaires et agents des services publics (inspecteurs et agents assermentés des eaux et forêts chargé de rechercher et de constater par PV les infractions à la réglementation des eaux et forêts, de la chasse, voire des armes). C'est la substance de l'article 141 de la loi n° 94/01 du 20 janvier 1994 portant régime des forêts de la faune et de pêche15.

La recherche et la constatation des infractions à certaines règlementations spécifiques (Domaine, contributions indirectes, enregistrement, Eaux et Forêts, etc.) exigeant des compétences et une techniques particulière, il était normal que des agents et fonctionnaires soient dotés de pouvoirs de police judiciaire, au demeurant limités, à la recherche et à la constatation des seules infractions relevant de l'administration à laquelle ils appartiennent. L'arrivée de l'OPJ à compétences spéciales sur le lieu d'un délit ou d'un crime relèvant de son domaine dessaisit d'office l'OPJ à compétences générales.

14 La première cuvée des OPJ à compétence spéciale vient de prêter serment à la Cour d'Appel du centre pour le compte du Ministère des Transports.

15 Cette loi est complétée par l'ordonnance n° 99/1 du 31 août 1999, art. 141-146.

SECTION 2 : L'IMPORTANCE DES POUVOIRS DE L'OPJ DANS LE CADRE DU
PROCES PENAL

Cette étude va nous amener à examiner les pouvoirs de l'OPJ avant la saisine de l'autorité judiciaire (paragraphe 1) et après la saisine de l'autorité judiciaire (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les pouvoirs de l'OPJ avant toute saisine de l'autorité judiciaire

Les pouvoirs de l'OPJ avant toute saisine de l'autorité judiciaire sont au nombre de deux à savoir la diligence des principales enquêtes de police (A) d'abord et d'autres pouvoirs de l'OPJ (B) ensuite.

A- La diligence des principales enquêtes de police judiciaire

L'enquête préliminaire (1) et l'enquête de flagrance (2) sont les principales enquêtes de police judiciaire prévues par le code de procédure pénale camerounais.

1- L'enquête préliminaire

L'OPJ en matière d'enquête préliminaire a un pouvoir très déterminant. Il faut souligner que cette enquête n'était pas définie dans le CIC. Elle était qualifiée d'enquête officieuse. Le CPP lui a consacré la section 3 du titre II. Il y est mentionné que les officiers de police judiciaire (...) procèdent aux enquêtes préliminaires soit sur leur initiative, soit sur instruction du PR (art. 116 CPP).

L'enquête préliminaire a été bien codifiée et permet à l'OPJ la manifestation de la preuve. Il convient d'examiner ici les caractéristiques de cette enquête (a) et le contenu de ses actes (b).

a- Les caractéristiques de l'enquête préliminaire

C'est une enquête à coercition conditionnelle mais qui tend vers une coercition ordinaire.
-Une enquête à coercition conditionnelle :

Les actes de cette enquête ne peuvent être exécutés de manière coercitive à l'encontre d'une personne sans que celle-ci ne l'ait préalablement acceptée, ce qui explique l'économie générale de cette enquête.

Les actes posés ici par l'OPJ doivent faire l'objet d'une information à l'endroit de la personne chez qui l'OPJ doit opérer. Il doit informer le particulier de son droit de refuser la mesure coercitive qu'il entend mettre en oeuvre à son encontre. Tel est le sens de la formule habituellement employée pour une perquisition. Le principe demeure que l'OPJ doit obtenir l'autorisation du particulier préalablement à l'exécution de tout acte de l'enquête préliminaire à peine de nullité de l'acte, voire de poursuite pénale contre son auteur16.

Une jurisprudence constante oblige le juge répressif à vérifier que le consentement du particulier correspond, au-delà de l'apparence, à une réalité17 en s'attachant à vérifier in concreto que le consentement a été donné par une volonté parfaitement informée de sa faculté de refuser l'acte posé18.

16 Ainsi, une arrestation ne peut être opérée sans l'assentiment de la personne arrêtée (Paris 31 oct 1955, Verba : JCP 1956. II. 9092 ; CA Reims 18 mars 1984, Mme FATMI JCP 1985, II, 20422, in S. GUINCHARD et J. BUISSON, «Procédure pénale », Paris, Litec 2000, 864, p. 356.

17 Voir notamment : Cass. Crim 9 juillet 1953, Acheraoui, D 1954, 110, 19 juin 1957, Guérin : D. idem.p 356.

18 Cass.Crim. 28 janvier 1987 : Bull. Crim n° 48.

Le consentement donné est irrévocable, c'est dire que l'acquiescement préalable à l'exécution de l'acte a pour effet d'autoriser définitivement l'exercice de la coercition sans possibilité de rétractation ultérieure.

Cette enquête est exercée par l'OPJ soit sur son instruction, soit sur l'instruction du PR (art. 116 CPP). La compétence territoriale de l'OPJ est étendue sur sa circonscription administrative de compétence définie par la réglementation en vigueur (art. 88 (1) CPP).

Le champ d'application de l'enquête préliminaire quant aux infractions apparaît plus étendu que celui de l'enquête de flagrance, puisque toutes les infractions peuvent faire l'objet d'une enquête préliminaire. Toutes les infractions exclues du champ de l'enquête de flagrance peuvent faire l'objet d'une enquête préliminaire.

Toute personne physique ou morale peut faire l'objet d'une enquête préliminaire sous réserve du respect des règles relatives aux immunités diplomatiques et à l'inviolabilité parlementaire. L'enquête préliminaire apparaît comme l'enquête de droit commun dans la mesure où elle est la seule qui puisse être ouverte pour toutes infractions, sans qu'il soit nécessaire de caractériser préalablement une situation de fait particulier comme dans l'enquête de flagrance.

Aucune durée d'exécution ne lui a été impartie à la différence de l'enquête de flagrance. La seule limite à la mise en oeuvre d'une telle enquête réside dans le fait que pour les mêmes faits, une information a déjà été ouverte.

-L'apparition de la coercition ordinaire :

Le pouvoir de réquisition: l'OPJ peut requérir une personne qualifiée aux fins de procéder à un examen technique ou scientifique. En plus de ce pouvoir reconnu à l'OPJ, celui-ci peut aussi commettre des experts. C'est le cas par exemple lors de la détermination de l'âge

apparent d'un suspect qui ne dispose pas d'une pièce d'identification et qui déclare être mineur. En cas de doute, l'OPJ a le pouvoir de faire appel à un expert19 (art. 92 (2) du CPP).

L'OPJ peut aussi requérir un expert aux fins d'expertise médicale de la personne poursuivie pour des agressions sexuelles ou encore des actes de torture ou de barbarie commis à l'encontre de mineurs, ou encore aux fins d'expertise médico psychologique du mineur qui en est la victime.

L'aménagement d'actes coercitifs: Lorsque l'OPJ obtient une autorisation préalable du PR, une perquisition coercitive peut être opérée chez le particulier sans son assentiment dans le cadre de l'enquête préliminaire (article 93 (1) du CPP). Pour les perquisitions, il y a lieu de souligner qu'au cours de l'enquête préliminaire, la police et la gendarmerie ne peuvent procéder aux perquisitions sans le consentement de l'intéressé. S'ils le font, ils porteront atteinte au principe de l'inviolabilité du domicile.20

L'interpellation coercitive du témoin : le témoin convoqué est tenu de comparaître et de déposer. S'il ne comparaît pas, l'OPJ en informe le PR qui peut décerner contre lui mandat d'amener (article 92 (b) CPP).

b- Les actes de l'enquête préliminaire

Nous avons ici les actes soumis à la contrainte conditionnelle et les actes coercitifs de l'enquête préliminaire.

Les actes soumis à la contrainte conditionnelle : il s'agit du transport sur les lieux21, le constat, l'audition, la garde à vue, la perquisition et la fouille. Pour ce qui est du transport, il pourrait être librement entrepris dans un lieu ouvert à tout public, ou a fortiori sur la voie publique.

19 L'OPJ adresse au médecin légiste une réquisition aux fins de déterminer l'âge apparent du suspect.

20 R. SOCKENG, « Les institutions judiciaires au Cameroun »,2e éd., Douala 1998, p. 105.

21 L'OPJ qui se transporte sur les lieux doit dresser un PV de transport sur les lieux. Voir à ce sujet annexe 7.

Exceptionnellement, le constat d'une infraction peut être opéré de l'extérieur lorsque commise en plein air, cette infraction peut être perçue de l'extérieur d'une propriété22.

L'audition doit respecter les conditions fixées par la loi, à savoir le fond et la forme. L'audition des mineurs23 doit se faire en présence, soit de leurs parents, soit d'un membre de la famille du mineur ou de l'administrateur ad hoc.

La garde à vue du suspect doit être ordonnée par l'OPJ et doit respecter les conditions fixées par la loi (art. 118 et SS du CPP). Selon l'art. 117 du CPP, à la clôture de l'enquête, le suspect qui n'a pas de résidence connue ou qui ne présente aucune des garanties prévues à l'art. 246 (g) est arrêté et conduit devant le PR s'il existe contre lui des indices graves et concordants. Le suspect qui a une résidence connue ou qui présente l'une des garanties prévues à l'article 246 (g)24 est laissé en liberté25. Ici nous constatons que la liberté est le principe et la garde à vue est l'exception. Mais il se pose un problème de résidence du suspect. La loi n'a pas défini ce que c'est que la <<résidence connue ».En plus, nous savons que dans notre pays le processus d'adressage n'est pas aussi performant que celui des pays occidentaux. Le législateur pénal ferait mieux de définir clairement la notion de <<résidence connue » afin que nul n'en ignore. Il existe des personnes qui résident dans les hôtels par exemple. Pourra-t-on parler dans ce cas de résidence connue ? Cette notion fait partie des innovations contenues dans le CPP et pose un problème d'interprétation. Nous pensons que la jurisprudence viendra nous éclairer (cf. la mise en liberté sous caution, art.224 CPP26 ; voir enquête de flagrance).

Lorsque la perquisition et la fouille sont régies par une autorisation du PR, l'assentiment du
maître des lieux n'est pas exigé. Elles doivent respecter les heures légales, à savoir 18 heures et

22 Cass. Crim 4 mai 1994, inédit, 23 août 1994, Mesneuux ; Bull. Crim n° 291.

23 Au Cameroun la majorité pénale est de 18(dix huit) ans

24 L'article 246 g) énonce que la personne arrêtée peut pour sa mise en liberté provisoire << fournir, en vue de garantir sa représentation en justice: soit un cautionnement dont le montant et les modalités de versement sont fixés par le juge d'instruction, compte tenu notamment des ressources de l'inculpé, soit un ou plusieurs garants conformément aux disposition des articles 224 et suivants.

25 Les dispositions des articles 246 g) et 224 (1) du CPP ne s'appliquent pas aux personnes poursuivies pour crime passible de l'emprisonnement à vie ou de la peine de mort (article 224 (2) DU CPP).

26 Voir annexe 1 le PV d'engagement du garant.

06 heures du matin dans un lieu privé. Mais une perquisition commencée avant 18 heures peut se poursuivre jusqu'au delà de cette heure. L'assentiment est exigé pour la saisie de tout objet opéré en dehors de toute perquisition ou encore pour toute saisie incidente (art.94 (1) CPP).

Les actes coercitifs : En matière d'enquête préliminaire le principe est la non coercition des actes posés par l'OPJ. Mais il arrive dans certains cas où l'OPJ serait obligé de contraindre certaines personnes pour la bonne marche de son enquête.

C'est le cas par exemple lorsqu'une personne convoquée ou interpellée, après son audition, s'avère être impliquée dans la commission de l'infraction, objet de l'enquête. Alors, l'OPJ va se voir obligé de la placer en garde à vue tout en respectant les dispositions de l'article 117 du CPP. Ainsi la personne passe de la qualité de témoin à celle de suspecte.

L'OPJ qui dispose du pouvoir de retenir une personne afin de vérifier son identité peut la garder à vue (article 86 du CPP).

2- L'enquête de flagrance

Cette enquête est aussi appelée enquête de flagrant délit. Il ne faut pas se méprendre, cette enquête englobe aussi bien les délits que les crimes dont les commissions sont d'une antériorité récente. Elle a pour fondement l'urgence qu'il y a à requérir les preuves encore existantes, indispensables à la manifestation de la vérité d'une infraction dont la commission est récente27. Le législateur pénal de 2005, vu l'importance de la coercition qu'entraînent les actes de cette enquête, a renforcé le pouvoir de l'OPJ. Seuls les délits et les crimes punis d'une peine d'emprisonnement peuvent faire l'objet d'une enquête de flagrance. Cela nous amène à déterminer les infractions réputées flagrantes (a) et les actes de l'enquête de flagrance (b).

27 S. GUINCHARD et J. BUISSON, op. cit.p 31.

a- La détermination des infractions flagrantes

L'article 103 du CPP distingue quatre sortes de flagrance des délits et des crimes:

-Est qualifié crime ou délit flagrant, le crime ou le délit qui se commet actuellement ou qui vient de se commettre (art.103 (1) CPP). C'est l'hypothèse dans laquelle le crime ou le délit est perçu par le policier ou le gendarme à l'aide de sa vue ou de l'ouie. La commission de l'infraction peut être constatée soit directement, cas le plus indiscutable, soit par la perception d'indices le rendant vraisemblable, tels que l'attitude de la personne. Le délinquant peut être surpris immédiatement après l'infraction, soit qu'il se trouve encore sur le lieu, soit qu'il vienne tout juste de les quitter. Mais comment entendre cette proximité dans le temps? Sous l'empire du CIC, on admettait qu'un délai de 24 heures puisse séparer la commission de l'infraction et sa découverte28. Un délai de quelques heures au plus à partir de la commission de l'infraction est admissible.

Cependant, à partir du moment où l'OPJ a commencé ses investigations, il peut les poursuivre aussi longtemps qu'il estime nécessaire. Il conserve ainsi les pouvoirs que la loi lui accorde en cas de flagrance, à la seule condition qu'il opère toutefois sans discontinue29.

-Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque : après la commission de l'infraction, la personne est poursuivie par la clameur publique (art 103 (2) a) du CPP). La clameur publique se distingue évidemment de la rumeur qui ne saurait légitimer une enquête de flagrance puisqu'elle ne permet que le soupçon. La clameur publique signifie que la victime ou les témoins lancent des cris à l'encontre de l'auteur présumé qui prend la fuite une fois l'infraction commise. On entend souvent le cri « oh ! Voleur, oh ! Bandit ».

-Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque : dans un temps très voisin de la commission de l'infraction, le suspect est trouvé en possession d'un objet ou présente une trace ou indice

28 Crim ; 7 janvier et 30 juin 1932, S. ; 1933, I, 368 et 396.

29 Crim 6 novembre 1986, D ; 1987, Somm., 82 et obs.

laissant penser qu'il a participé à la commission du crime ou du délit.(art.103 (2) b) du CPP ). C'est l'hypothèse dans laquelle une telle personne est remarquée par un policier ou un gendarme qui, ignorant qu'une infraction a été commise, perçoit dans les objets ou indices découverts la commission récente d'une infraction. Au cours d'une perquisition par exemple, un objet qui, semblant avoir une origine frauduleuse, permettrait d'induire l'existence d'un recel30 ou lors d'un contrôle routier, une odeur de cannabis ou de sang humain31.

-Il y a également flagrance lorsqu'une personne requiert le PR ou un officier de police judiciaire de constater un crime ou un délit commis dans une maison qu'elle occupe ou dont elle assure la surveillance. Ici le législateur n'a pas tenu compte du temps. Cela signifie que à tout moment, à n'importe quel moment où l'OPJ ou le PR est requis par l'occupant ou le surveillant d'une maison afin de constater un crime ou un délit, il y a flagrant délit.

Le code de procédure pénale n'a pas cité le cas de découverte de cadavre parmi les infractions flagrantes comme l'avait fait jadis le CIC. Ceci constitue une entorse sérieuse qui, pensons-nous, sera réparée très rapidement par le législateur pénal.

A chaque fois que l'un des cas cités un peu plus haut survient et que l'OPJ est requis, il
doit se transporter sans délai sur les lieux afin d'ouvrir une enquête de flagrant délit. Une fois
l'OPJ saisi, l'enquête de flagrance a une durée de vie propre qui, après avoir été laissée à
l'appréciation de l'autorité judiciaire, est fixée à 15 jours maximum en France par la loi du 09
mars 2004. Au Cameroun, aucun texte ne fixe la durée de l'enquête de flagrance jusqu'à présent.
Il faut dire que l'appréciation dépend évidemment des circonstances de fait. La durée de
consommation de cette infraction n'ayant normalement pas d'incidence, encore que les
infractions continues soient, par hypothèse, toujours flagrantes32. Nous pouvons dire que lorsque
cette commission ne se révèle par aucun indice extérieur objectif, l'OPJ ne peut ouvrir une

30 L'OPJ exécuterait alors une saisie incidente.

31 Cass. Crim. 4 Nov 1999, D. 2000, inf. rap 23.

32 S. GUINCHARD et J. BUISSON, op. cit. p.334.

enquête de flagrance alors même qu'il aurait la conviction, juridiquement analysée en un soupçon, de sa consommation actuelle. C'est le cas des infractions occultes consommées dans un lieu clos auquel l'OPJ n'a pas, en l'état de ses connaissances, légalement accès. Celui-ci sera obligé d'abord d'ouvrir une enquête préliminaire qui lui permettra, éventuellement, par le recueil d'indices objectifs tels que les auditions de témoins, de caractériser un crime ou un délit flagrant. En France, selon une jurisprudence constante, la Cour de Cassation admet le passage de l'enquête préliminaire à l'enquête de flagrance33.

b- Les actes de l'enquête de flagrance

Le législateur pénal de 2005 a accordé d'importants pouvoirs à l'OPJ en matière d'enquête de flagrance, vu la gravité et l'urgence que demande ce genre de procédure. Pour ce faire, les actes posés par l'OPJ doivent obéir, comme tous ceux qui émanent d'une autorité, au principe de territorialité. L'OPJ est compétent dans les limites territoriales où il exerce ses fonctions habituellement (art. 88 (1) du CPP). C'est dire que sa compétence territoriale ordinaire s'étend normalement à l'ensemble de la circonscription dans laquelle il est affecté. Mais tenant compte des nécessités de la pratique, le législateur a prévu des cas d'extension de cette compétence (article 88 (2) du CPP). L'OPJ a une compétence de droit commun pour tous les actes de l'enquête de flagrance. En cas de crime ou de délit flagrant, les actes d'enquête s'imposent aux personnes qui y sont soumises.

L'OPJ a le pouvoir de constater un crime ou un délit flagrant commis sur la voie publique, dans un endroit ouvert au public, voire dans un lieu privé dès lors qu'il est entré légalement. Ceci donne lieu à la rédaction d'un procès verbal ou d'un rapport signé de l'auteur.

33 Cass. Crim 17 mai 1993, Droit pénal, 1994 chron. n° 2.

Le CPP énonce dans son article 104 que : << en cas de crime flagrant, l'OPJ avisé (...) se transporte sans délai sur le lieu du crime et procède à toutes diligences utiles ».

Mais il faut noter à la suite de cet article 104 (1)-a que le législateur a oublié le délit flagrant. Il parle de <<crime flagrant » alors qu'il aurait du dire que << en cas de crime ou délit flagrant, l'OPJ avisé (...) ». Nous n'allons pas croire que le législateur pénal de 2005 assimile déjà le délit flagrant au crime flagrant, ce qui serait regrettable. Le constat d'une infraction peut résulter d'un contrôle d'identité34. Néanmoins une telle obligation (<< se transporter sans délai sur le lieu.. ») qui se situe dans la logique de l'enquête de flagrance fondée sur l'urgence à recueillir des indices encore existant à un moment proche de la commission de l'infraction permet évidemment à l'OPJ compétent de pénétrer coercitivement dans le lieu de l'infraction.

L'OPJ peut demander à un particulier de justifier son identité par tous moyens. Il peut le faire pour identifier toute personne à l'encontre de laquelle existe un indice faisant présumer un crime ou un délit, vu qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête en cas de crime ou délit, ou encore qu'elle est recherchée par la justice (article 86 CPP).

L'officier de police judiciaire peut procéder à l'arrestation de l'auteur présumé d'un crime ou d'un délit flagrant.

Dans le cadre d'une enquête de flagrance, l'OPJ peut procéder à l'audition d'une personne susceptible35 de fournir des renseignements sur les faits en cause. Il peut entendre la victime36, que celle-ci dépose ou non une plainte au cours de son audition, comme toute autre personne extérieure auxdits faits (art.104 (2)-a du CPP). L'OPJ peut également procéder à une confrontation, c'est-à-dire l'audition simultanée de plusieurs personnes aux fins de confronter leurs positions. Il faut noter que lors de cette confrontation, les participants n'ont qu'un seul statut de témoin.

34 Tel est le cas lorsqu'un contrôle d'identité permet de constater la possession d'un faux document d'identité.

35 Voir à ce sujet en annexe 4, le PV d'audition du suspect.

36 Voir PV d'audition du plaignant en annexe 3.

En la forme, l'audition (comme la confrontation) donne lieu à la rédaction d'un procès verbal immédiatement rédigé, signé de son rédacteur et de la personne entendue. L'audition d'une personne anonyme est dépourvue de toute valeur. S'agissant de l'audition d'une personne astreinte au secret professionnel, il convient de distinguer selon que le secret professionnel est général et absolu ou relatif. En effet, seule la personne soumise à un secret général et absolu doit refuser à l'OPJ d'apporter son témoignage sur les faits qu'elle a connus dans l'exercice de sa profession ou de son ministère (cas des ministres du culte, médecins, etc.) à moins qu'elle ne soit elle-même impliquée dans les faits objet de l'enquête, auquel cas l'exercice de ses droits de défense lève cette prohibition. Toutes les autres personnes et notamment les fonctionnaires ne peuvent prétendre s'exonérer de leur obligation de témoigner en invoquant le secret professionnel.

L'OPJ peut procéder à des constatations qui consistent dans l'ensemble des opérations qui, postérieurement au constat, tendent à l'administration de la preuve, au recueil des diverses traces ou indices ou à la saisie des pièces à conviction. Le plus souvent l'apport de la police technique et scientifique est déterminant.

L'officier de police judiciaire peut d'abord, sur les lieux de commission de l'infraction, interdire à toute personne de s'éloigner jusqu'à la clôture de ses opérations (article 104 (2)-a CPP). Il peut aussi au cours de l'enquête convoquer tout témoin37 qui est tenu alors de comparaître. Pour empêcher une éventuelle résistance, le PR peut délivrer à l'encontre du témoin défaillant un ordre de comparution qui pourra être exécuté par l'OPJ coercitivement, au besoin par l'emploi de la force (article 30 (2) CPP).

L'OPJ a le pouvoir de faire des réquisitions38. La réquisition peut avoir deux contenus (art.92 (2) CPP).

37 Voir en annexe 5 le PV d'audition du témoin.

38 La réquisition est l'acte permettant à l'OPJ de solliciter et d'obtenir d'une personne une prestation d'ordre intellectuel ou matériel.

D'abord, il y a la réquisition à personne : Selon le CPP, l'OPJ peut requérir tout expert, éventuellement toute personne susceptible de l'assister pendant une opération déterminée. Elle a pour finalité un examen technique ou scientifique destiné à l'aider dans ses constatations ou, généralement, au cours d'une enquête, dans les domaines les plus divers de la médecine générale, de médecine légale, de la biologie, de la dactyloscopie, de la dactylographie, de la balistique, de la graphologie, de l'informatique, etc. les personnes qualifiées requises, scientifiques ou techniques, devront, sauf si elles sont inscrites sur la liste d'experts, prêter serment par écrit d'apporter leur concours à la justice en leur honneur et conscience39.

Ensuite il y a la réquisition à transport: Le CPP exige qu'elle doit être écrite et l'original doit être laissé au transporteur. La loi donne le pouvoir à l'OPJ de requérir tout passage dans tout véhicule ou moyen de transport maritime, ferroviaire, terrestre ou aérien public ou privé afin de faciliter le transport de l'OPJ lors d'une enquête de flagrance. Cela se justifie avec l'urgence que la loi reconnaît à cette enquête. L'OPJ peut aussi requérir l'obtention d'un concours matériel, voire manuel, indispensable aux constatations ou à d'autres investigations telles que l'ouverture d'une porte, l'opération de terrassement destinée à découvrir un cadavre ou encore le transport d'un cadavre jusqu'à l'institut médico-légal.

Lors d'un contrôle d'identité, la personne à qui l'OPJ demande de décliner son identité peut être retenue sur place ou être conduite dans un service de police ou de gendarmerie afin d'être mieux identifiée. L'art. 86 (1) CPP envisage même une mesure de garde à vue spéciale n'excédant pas 24 heures que peut prendre l'OPJ à l'encontre de cette personne. Mais en France, cette durée ne peut excéder 04 heures (art.78 CPP français). Il faut signaler que dans la pratique cette étape est peu utilisée et une personne interpellée comme auteur présumé d'une infraction flagrante est directement placée en garde à vue par l'OPJ.

39 Voir en annexe 8 le procès verbal de prestation de serment de l'expert devant l'OPJ.

L'officier de police judiciaire peut ordonner des mesures de garde a vue40 lors de l'enquête de flagrant délit. L'art. 104 (2)-b du CPP dispose qu'en cas de crime ou de délit flagrant, l'OPJ avisé peut «user, si nécessaire, de la mesure de garde a vue a l'encontre de toute personne suspecte ». Ce pouvoir qui est exclusivement reconnu a l'OPJ le rend aussi responsable de cet acte grave de privation de liberté. Cet acte aussi grave doit obéir a certaines conditions. Quand un OPJ envisage une mesure de garde a vue a l'encontre d'un suspect, il l'avertit expressément de la suspicion qui pèse sur lui et l'invite a donner toute explication qu'il juge utile. Mention de ces informations est faite au procès verbal (art. 119 (1) CPP)41. Véritable privation de liberté ou simple maintien a la disposition des services de la police pour les besoins de l'enquête, la garde a vue est une pratique policière très ancienne dont la nécessité et l'utilité n'ont jamais été sérieusement contestées42

L'OPJ doit donner au suspect les garanties dont celui-ci bénéficie afin que ses droits soient protégés. C'est l'une des innovations du CPP, a savoir la protection des droits du suspect. A ce sujet, l'art. 122 (3) et (4) du CPP autorise les visites de son conseil, de ses parents et amis aux heures ouvrables. Il se pose un problème de fond en ce qui concerne les heures ouvrables. Le Décret présidentiel de 1993 fixe les heures ouvrables de 07 heures 30 minutes a 15 heures 30 minutes de lundi a vendredi. Est-ce a dire qu'en dehors de ces heures, la personne gardée a vue ne peut plus recevoir les visites ? Quid des jours fériés et des week-ends? Si l'on veut appliquer au sens strict cet article, on risque de violer les droits du suspect gardé a vue alors que le législateur pénal de 2005 a cru les protéger suffisamment. Nous pouvons dire que dans la pratique, les dispositions de l'article 122 (3) du CPP ne sont pas respectées, mais cela arrange tout le monde.

40 La garde a vue est une mesure de police en vertu de laquelle une personne est, dans le cas d'une enquête préliminaire, en vertu de la manifestation de la vérité, retenue dans un local de police judiciaire, pour une durée limitée, sous la responsabilité d'un OPJ a la disposition de qui il doit rester (art. 118 (1) CPP).

41 Voir en annexe 2 le PV de notification de la garde a vue.

42 C'est en effet en ces termes que la jurisprudence, française notamment, définit la garde a vue. Voir a cet effet, Crim. 28 janvier 1992, Bull. crim. N° 32.

L'OPJ doit informer la personne gardée à vue de la durée de sa garde à vue. Elle ne peut excéder 48 heures renouvelable une fois (art. 119 (2) CPP). Ce délai court à partir de l'heure à laquelle le suspect se présente ou est conduit dans les locaux de l'unité de police ou de gendarmerie. Cette heure est mentionnée dans le registre de main courante et dans le procès verbal de l'audition. Cette durée peut être prolongée d'une part en raison de la distance qui sépare le lieu d'arrestation du local de police ou de gendarmerie. Dans ce cas, la prolongation qui est de 24 heures par 50 km doit être autorisée par écrit par le PR et peut l'être exceptionnellement deux fois. Non seulement chaque prorogation doit être motivée, mais encore, la mention y relative doit être faite au PV de constatation comme dispose l'article 120 du CPP. Sur autorisation écrite du PR, ce délai peut, à titre exceptionnel être renouvelé deux fois (art. 119 b) CPP)43.

La durée peut être prorogée d'autre part en raison de l'éloignement de l'OPJ par rapport au PR, c'est-à-dire quand il se trouve éloigné du tribunal et qu'il ne peut atteindre le PR que par voie de communication téléphonique ou autres (art. 125 (1) du CPP). Dans ce cas c'est à l'OPJ de communiquer la décision du PR au gardé à vue. Mais dans le cas où il ne peut atteindre sa hiérarchie, l'OPJ est obligé de remettre le suspect en liberté avec ou sans caution selon les circonstances (art.125 (3) CPP). Le délai de garde à vue est exceptionnellement prorogé de 08 jours en cas de crime ou de délit flagrant ou si le suspect n'a pas de résidence connue ou s'il ne peut fournir une des garanties présentées à l'art. 246 (g) CPP. Mention de cette prorogation est faite au procès verbal comme le dispose l'art.123 (3) du CPP.

Au cours de la garde à vue, des interrogations et confrontations peuvent être pratiquées par l'OPJ. Un PV mentionne leur durée et les temps de repos, car un temps raisonnable doit être accordé au suspect pour se reposer effectivement. Le PV indique le jour, l'heure de début et l'expiration de la garde à vue, ses motifs, si l'intéressé a réclamé le bénéfice de ses droits et les suites accordées à ses demandes. Le PV est émargé et signé par la personne gardée à vue.

43 Pour ce renouvellement, dans la pratique, l'OPJ adresse une correspondance motivée au PR qui peut accepter ou refuser la prorogation de la garde à vue.

A l'issue de la garde à vue, lorsqu'il existe des éléments de nature à motiver l'exercice des poursuites, le PR décide si l'intéressé est remis en liberté ou lui est présenté. Il peut requérir l'ouverture d'une instruction ou saisir la juridiction d'instruction ou de jugement compétente par procédure de comparution immédiate.

L'OPJ peut procéder aux perquisitions44, fouilles et saisies (art.92 (2) du CPP) pendant l'enquête de flagrance. La perquisition n'est prévue par la loi que dans les enquêtes de police et lors de l'instruction. La fouille (art.87 du CPP) peut être définie comme la recherche d'indices dans tous autres endroits qu'un lieu immobilier clos (personne, véhicule, bagages). La fouille ainsi définie peut se faire à toute heure, mais la perquisition doit respecter les heures légales. La personne à fouiller doit être au préalable informée des motifs de la fouille (art.87 (4) du CPP). La perquisition doit obéir à certaines conditions de fond et de forme.

Pour ce qui est des conditions de fond, en matière de crime ou de délit flagrant, l'officier de police judiciaire agit sans mandat (art.93 du CPP). Les perquisitions sont effectuées selon l'article 93 du CPP par l'OPJ et sont interdites entre 18 heures et 06 heures du matin, à moins qu'elles aient commencé avant 18 heures, auquel cas elles se poursuivent au-delà, sur autorisation du PR. Mais celles qui sont effectuées dans un cabinet d'avocat, de médecin, d'étude de notaire, huissier de justice ou au bureau de toute autre personne tenue au secret professionnel sont faites en présence du magistrat compétent comme le dispose l'art. 107 du CPP. En d'autres termes, un OPJ ne peut seul effectuer une perquisition dans les services des personnes suscitées, il faut la présence du magistrat compétent, de l'intéressé lui-même et s'il en existe, un représentant de son organisation professionnelle. Les actes de l'OPJ ont un caractère coercitif et « doivent aussi répondre aux conditions de nécessité et de proportionnalité », ce sont les

44 La perquisition est la recherche dans un domicile ou tout autre lieu des indices ou des pièces à conviction utiles à la manifestation de la vérité.

exigences du Conseil Constitutionnel en France45. C'est dire que toute perquisition, fouille ou saisie ne peut être entreprise que dans un lieu où sont susceptibles d'être découverts des objets ou tout autre indice utile à la manifestation de la vérité (art. 178 (1) du CPP). La condition de nécessité est essentiellement caractérisée par ce lien entre la personne ou le lieu concerné et le dossier de l'enquête. Quant à la proportionnalité, elle est vérifiée par l'étendue de la perquisition ou de la saisie qui doit être également mesurée en fonction du lien précité.

En ce qui concerne les conditions de forme, la personne chez qui les opérations se déroulent doit être présente, et en cas d'impossibilité, les opérations se feront en présence de son représentant ainsi que de ses témoins et le cas échéant d'un autre OPJ ou des agents de police judiciaire (art.93 (4) du CPP). La partie 3 de cet article précise que le maître des lieux, le détenteur des biens à saisir ou leur représentant ont le droit de fouiller l'OPJ avant que celui-ci n'entreprenne la perquisition. L'OPJ doit au préalable l'informer de ce droit et mention est faite au PV, de l'accomplissement de cette formalité46. Sur le champ, l'OPJ doit rédiger un PV de perquisition qui doit être signé de la personne ou son représentant ou les deux témoins et l'OPJ. Il relate l'exécution de la perquisition dont il indique le résultat en décrivant les objets saisis lorsque cette perquisition est positive. Il doit également préciser l'endroit où ils ont été découverts. Ces objets seront immédiatement saisis s'il s'avèrent nécessaires à l'enquête, inventoriés et placés sous scellé à moins que cet inventaire ne présente des difficultés, auquel cas des scellés fermés provisoires peuvent être effectués et seront ouverts en présence de ceux qui ont assisté à la perquisition aux fins de scellés définitifs. Les fiches de scellés devront, ainsi que le PV, être signées par l'OPJ et les assistants à la perquisition et à la découverte des objets.

45 Le Conseil Constitutionnel soumet toute loi portant mesure de coercition à ces principes. CC 12 janvier 1977, déc. N°76-75 DC, 19-20 janvier 1981, déc. 80-127 DC ; 5 août 1993, déc. n°93-323 DC, 5 août 1993 ; 18 janvier 1995, déc. N° 94-352.

46 Avant l'avènement du CPP, il existait des OPJ véreux qui déposaient des objets compromettant au lieu de la perquisition et les récupéraient après disant les avoir trouvés chez le suspect (ex. du cannabis ou la cocaïne).

B- Les autres pouvoirs de l'officier de police judiciaire dans le déclenchement de la
poursuite pénale

L'OPJ peut constater les infractions, rassembler les preuves, rechercher les auteurs et complices et le cas échéant les déférer au parquet (art.82 du CPP). Il reçoit les plaintes et les dénonciations. Il requiert le concours de la force publique, rédige les PV, peut procéder à des contrôles d'identité. Il peut décider de la garde à vue et reçoit les amendes forfaitaires comme le dispose l'art.607 (1) du code de procédure pénale47.

En attendant l'arrivée des carnets à souche comme le précise l'art.611 (1) du CPP sur l'étendue du territoire national, c'est encore le flou total. Nous avons constaté que dans la ville de Bafia et ses environs le parquet de céans a pris une avance sur les autres48. Les agents de police judiciaire et les agents publics investis des attributions de police judiciaire de la localité ont prêté serment et il leur a été distribué les carnets à souche paraphés par le PR ainsi que les PV d'audition du contrevenant49 adopté de commun accord. Vivement que cet exemple fasse tâche d'huile. Pour plus d'efficacité, nous souhaitons que le législateur pénal adopte un texte spécial qui va permettre aux OPJ, APJ et agents publics investis des attributions de police judiciaire de percevoir un pourcentage sur les frais de contraventions infligées aux usagers et que l'OPJ qui perçoit l'amende afin de la reverser au trésor public puisse lui aussi bénéficier d'un pourcentage sur la somme versée50. Ceci pourrait contribuer à atténuer le phénomène de corruption que l'on observe sur nos voies publiques et ailleurs, ce qui freine le développement du pays. En effet si un agent verbalisateur voit qu'il va bénéficier d'un pourcentage sur la contravention qu'il donne à un usager, il lui serait difficile de se laisser corrompre par ce dernier. Ainsi l'avènement des

47 Voir en annexe 6 le PV d'audition du contrevenant au code de la route.

48 Voir en annexe 9 le tableau des infractions à la circulation routière et les taux d'amendes forfaitaires.

49 Voir en annexe 6 le PV d'audition du contrevenant au code de la route.

50 C'est ce qui est pratiqué par exemple en France. Ainsi ce personnel pourrait percevoir ces pourcentages sous forme de prime trimestriellement ou semestriellement.

carnets à souche sur toute l'étendue du pays pourrait améliorer ou alors éviter les abus dont sont souvent victimes les usagers de la route particulièrement. L'art. 611 du CPP a prévu des sanctions en cas de manquement (art. 142 du CP).

L'OPJ peut dans tout lieu public ou ouvert au public faire procéder à la fouille de toute personne soupçonnée de porter une arme ou tout autre objet de nature à servir à la commission d'une infraction (art. 87(1) du CPP). L'OPJ peut requérir directement le concours de la force de l'ordre pour l'exécution de sa mission comme dispose l'art.83 (3) du CPP.

En dehors de toute enquête, l'officier de police judiciaire peut dans tout lieu public ou ouvert au public, arrêter et sans préjudice des dispositions de l'article 83 paragraphe 3, garder à vue pendant une période d'au plus 24 heures, l'auteur d'une contravention qui, soit refuse de décliner son identité, soit indique une identité jugée fausse51 (art.32 CPP)

Paragraphe 2 : Les pouvoirs de l'officier de police judiciaire après la saisine de l'autorité
judiciaire

Au cours de la procédure pénale, l'officier de police judiciaire peut recevoir des instructions du parquet et du juge d'instruction (A), il a aussi le pouvoir de faire exécuter les actes et décisions de justice (B).

A- L'exécution des instructions du parquet et du juge d'instruction

L'officier de police judiciaire peut recevoir au cours de la procédure pénale des instructions du parquet (1) et les délégations de pouvoir du juge d'instruction (2).

51 C'est une mesure de garde à vue spéciale que le législateur pénal a accordée non seulement aux OPJ mais aussi aux APJ. Dans ce cas, ces derniers doivent-ils signer un bon de garde à vue spécial?

1- L'exécution des instructions du parquet

L'OPJ reçoit des instructions du parquet dans le cadre de la procédure pénale. C'est ainsi que le PG peut demander à l'OPJ de recueillir tous renseignements utiles à la bonne administration de la justice (art.134 (2)-c du CPP). L'OPJ peut recevoir du PR mission d'effectuer toute enquête ou complément d'enquête qu'il juge utile comme dispose l'art. 83 (4) du CPP.

La pratique des « soit faire retour52 » (SFR) permet au PR de donner des instructions à l'OPJ. Pour certaines infractions, le PR peut, après déferrement du suspect, faire retourner celui-ci dans l'unité de police ou de gendarmerie afin que le suspect désintéresse la partie plaignante. C'est le plus souvent le cas pour les infractions comme l'escroquerie, l'abus de confiance ou même le vol. Le SFR du PR peut aussi permettre à l'OPJ de compléter certains éléments de l'enquête de police (certificat d'age apparent, certificat médico-légal etc.). L'article 141 b) du CPP est le fondement de cette pratique car il dispose que le PR peut faire retour des PV d'enquête à la police judiciaire pour complément d'enquête.

L'article 141du CPP dispose que le PR saisi, dans les conditions prévues aux art.135, 139 et 140, peut transmettre la dénonciation ou la plainte pour enquête à un OPJ.

2- Les délégations de pouvoir du juge d'instruction : la commission rogatoire

Le juge d'instruction peut procéder ou faire procéder soit par un OPJ, soit par toute personne habilitée, à une enquête sur la personnalité, la situation matérielle, familiale ou sociale de l'inculpé. C'est la substance de l'article 151 (1) du CPP.

52 Le « soit faire retour » peut être défini comme l'ensemble des instructions que le PR inscrit sur le dossier d'un suspect déferré ou non à son parquet dont il renvoie à l'OPJ pour exécution. Le suspect peut ou non accompagner la procédure.

L'article 151 (3) du CPP indique que si le magistrat instructeur se trouve dans l'impossibilité de procéder lui-même à tous les actes d'information, il peut donner commission rogatoire aux OPJ afin de leur faire exécuter tous les actes d'information nécessaires dans les conditions et sous les réserves prévues aux art. 191 et suivants.

Comme nous venons de le voir, l'OPJ peut intervenir dans la phase de l'information judiciaire par le biais de la commission rogatoire que lui donne le juge d'instruction. Pour mieux cerner le domaine de la commission rogatoire (b), la définition au préalable de la commission rogatoire (a) s'impose.

a- Définition de la commission rogatoire

Selon le Nouveau dictionnaire juridique, la commission rogatoire est un acte par lequel le juge d'instruction, dans l'impossibilité de procéder lui-même à tous les actes d'instruction, demande à tout juge et officier de police judiciaire, de faire exécuter tous les actes d'information nécessaires à la manifestation de la vérité, sous réserves prévues par la loi53. Selon le CPP, le juge d'instruction ne peut donner commission rogatoire à un OPJ pour procéder en ses lieu et place aux inculpations, interrogatoire et délivrance des mandats de justice (art.152 CPP).

b- Le domaine de la commission rogatoire

L'OPJ, par une ordonnance qui précise clairement la mission, procède à l'exécution des actes demandés. Elle est datée et revêtue du sceau du magistrat qui l'a délivrée. Le juge d'instruction peut donner commission rogatoire aux fins d'audition d'un individu inculpé, l'audition des témoins, arrestation de certaines personnes. Le domaine des commissions

53 J. GATSI, J.A NDJOCK, J.J. FOMCHIGBOU MBANCHOUT, «Nouveau dictionnaire juridique », PUL, 1ère éd., 2008, page 51.

rogatoires tant en ce qui concerne les personnes que les actes est bien précisé. Celui-ci fixe d'ailleurs le délai dans lequel les actes dressés par le magistrat ou l'OPJ commis doivent lui être transmis. L'OPJ doit exercer les pouvoirs dans les limites de la commission rogatoire (art. 191 du CPP). L'OPJ commis exerce, dans la limite de la commission, les pouvoirs du juge d'instruction mandant.

La commission rogatoire peut être nationale comme nous venons de voir, mais elle peut aussi être internationale. Le juge d'instruction peut la délivrer pour faire procéder à toute mesure d'information judiciaire en pays étranger.

B- L'exécution des actes et décisions de justice

En matière de procédure pénale, l'OPJ a le pouvoir de faire exécuter les actes pénaux de justice (1) ainsi que les décisions de justice (2), c'est la substance de l'article 82 c) et d) du CPP.

1- Les actes pénaux de justice

L'OPJ reçoit de certains magistrats le pouvoir de faire exécuter les mandats de justice, la notification de certains actes de justice.

Pour ce qui est des mandats de justice, l'art. 11 du CPP les définit comme étant des actes écrits par lesquels un magistrat ou une juridiction ordonne la comparution ou la conduite d'un individu devant lui ou elle ; la détention provisoire d'un inculpé, d'un prévenu, d'un accusé ou d'un témoin soupçonné de perturber la recherche des preuves ; l'incarcération d'un condamné ; la recherche d'un objet ayant servi à la commission d'une infraction ou en constituant le produit. On distingue 07 (sept) sortes de mandats de justice. L'OPJ est chargé d'en faire exécuter 04 à savoir : les mandats de comparution, d'amener, de perquisition, et d'arrêt.

La notification consiste à porter un acte juridique à la connaissance d'une personne. Elle est faite par voie administrative, notamment par lettre recommandée avec accusé de réception ou par un OPJ, lequel en dresse procès verbal (art.39 du CPP).

2- Les décisions pénales de justice

L'OPJ est aussi sollicité pour faire exécuter les décisions pénales de justice54. C'est pour cette raison que l'on dit qu'il est en aval de la procédure pénale. L'OPJ doit faire exécuter des contraintes par corps contre les individus condamnés à cet effet. Il doit le faire dans le respect des dispositions du CPP. La contrainte par corps est une mesure qui vise à obliger le condamné à exécuter les condamnations pécuniaires ou à effectuer les restitutions ordonnées par une juridiction répressive. Aux termes de l'art. 227 du CPP, elle est applicable sans mise en demeure préalable à la diligence du ministère public en cas de non exécution des condamnations pécuniaires ou de non restitution des biens. Elle consiste en une incarcération au cours de laquelle le débiteur est astreint au travail.

La surveillance et l'assistance post-pénale sont des pouvoirs reconnus à l'OPJ. Celui-ci est chargé de contrôler les individus condamnés et à qui la juridiction a accordé ce privilège. Elle est autorisée par une ordonnance du juge. Elle consiste à soumettre l'inculpé à des mesures de surveillance judiciaire ou substituer de telles mesures au mandat de détention provisoire en astreignant soit à une ou plusieurs des obligations prévues à l'art. 41 et 42 du CPC. Ce contrôle est exercé par les autorités de police lorsqu'il s'agit d'un individu condamné pour crime ou d'un récidiviste condamné pour délit comme dispose l'article 40 (2) du CPC.

54 Lire à ce sujet S. SOUOP, « Exécution des décisions pénales -commentaire du livre V du CPP-, PUA, Yaoundé, pp 11 et ss.

CHAPITRE 2
LES DIFFICULTES RENCONTREES DANS L'EXERCICE DES
POUVOIRS DE L'OPJ

Seul le pouvoir peut arrêter le pouvoir. C'est dans ce sens que le législateur pénal de 2005 a abondé en mettant des limites aux pouvoirs très importants de l'OPJ dans le code de procédure pénale. Ceci va nous permettre de voir que le pouvoir de l'OPJ a un caractère limité (section 1) avant de passer en revue les difficultés que ce dernier rencontre dans l'accomplissement de sa mission depuis l'avènement du CPP (section 2).

SECTION 1 : LE CARACTERE LIMITE DU POUVOIR DE L'OPJ DANS LE CPP

Ce caractère relatif se matérialise par la prépondérance du pouvoir du PR sur les actes posés par l'OPJ (paragraphe 1) et par la valeur relative des procès verbaux dressés par l'OPJ (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La prépondérance du pouvoir du Procureur de la République sur les actes
posés par l'OPJ

Cette prépondérance s'illustre par le pouvoir de direction des enquêtes reconnues par le législateur au Procureur de la République (A) et surtout la possibilité pour celui-ci de remplacer l'OPJ dans la phase policière du procès pénal (B).

A- Le pouvoir de direction des enquêtes de police par le Procureur de la République

Ce pouvoir de direction est prévu par l'article 78 du CPP qui dispose que la police judiciaire est exercée sous la direction du PR par les OPJ, les APJ et tous les autres fonctionnaires ou personnes auxquels les lois spéciales confèrent des pouvoirs de police judiciaire. En d'autres termes, il faut dire qu'en matière d'enquête de police judiciaire, l'OPJ a pour chef le Procureur de la République. Ce dernier peut à tout moment dessaisir tout OPJ d'une enquête (article 83 al 5 CPP). Dans le cadre de la direction, l'OPJ reçoit des instructions du parquet. Tous les PV de l'OPJ doivent impérativement être envoyés au PR. Il est le seul à les apprécier. Il est juge de l'opportunité des poursuites. Il peut classer sans suite une procédure ficelée et envoyée (à lui) par l'OPJ sans donner des explications à ce dernier. Nous constatons que le pouvoir de l'OPJ s'arrête là où commence celui du PR. La marge de manoeuvre de l'OPJ en matière d'enquête de police est canalisée par le PR. Les instructions du PR parviennent à l'OPJ sous forme de soit faire retour (SFR)55.

Une enquête peut avoir été commencée par un OPJ de la gendarmerie, le PR dessaisit celui-ci au profit de l'OPJ de la Sûreté Nationale et vice versa. Le PR peut à l'intérieur du même corps dessaisir un OPJ au profit d'un autre. Dans ces cas, le CPP à son article 83 al 5 dispose que le PR communique les motifs de sa décision au chef hiérarchique direct de l'OPJ dessaisi.

La loi oblige l'OPJ à transmettre toutes ses procédures au procureur de la république. Ce dernier doit être mis au courant de toutes les enquêtes entreprises par l'OPJ. Comme nous le constatons, le PR non seulement dirige les enquêtes, il est aussi le chef de la police judiciaire. Le CPP lui reconnaît la possibilité de remplacer l'OPJ à tout moment en matière d'enquête de police.

55 Selon l'art 141 du CPP : « le Procureur de la République saisi dans les conditions prévues aux articles 135, 139, et 140, peut faire retour des PV d'enquête à la police judiciaire pour complément d'enquête ».

B- Le remplacement de l'OPJ par le PR dans la phase policière du procès pénal

Selon l'article 137 (3) du code de procédure pénale, le PR peut agir aux lieu et place de tout OPJ. Le législateur pénal reconnaît ainsi au PR le pouvoir d'OPJ. Il peut poser tous les actes d'OPJ. Le PR exerce la police judiciaire en lieu et place de l'OPJ. L'article 111 du CPP dispose qu'en cas de crime flagrant, le PR est compétent pour diligenter l'enquête. L'arrivée du PR sur le lieu de l'infraction dessaisit de plein droit l'OPJ qui s'y trouvait à moins que ce magistrat n'en décide autrement.

En clair, le PR peut procéder aux enquêtes préliminaires et aux enquêtes de flagrance. Il peut en même temps ordonner les gardes à vue.

Paragraphe 2 : La valeur relative des PV dressés par l'OPJ

Les procès verbaux dressés par l'OPJ n'ont valeur que de simples renseignements (A) ; ce qui, selon le code de procédure pénale l'amène parfois à défendre ceux-ci à l'audience (B).

A- La valeur des procès-verbaux

L'article 91 du code de procédure pénale dispose que sauf dispositions contraires de la loi, les PV dressés par les OPJ ont valeur de simples renseignements. Ceci montre la force peu probante des PV dressés par les OPJ lors des enquêtes de police. Ces PV ne s'imposent pas à l'autorité judiciaire qui garde toute sa liberté d'appréciation à leur égard56. De ce qui précède, nous pouvons dire sans risque de nous tromper que les pouvoirs de l'OPJ en matière d'enquête

56 G. MANGIN (Dir.), «Procédure pénale », nouvelle éd. africaine, 1982, Encyclopédie juridique, tome 10, page 197.

de police ne sont pas absolus. Les PV dressés à cette occasion peuvent même être carrément mis de coté par le PR. Surtout si ces PV ne respectent pas les exigences prévues par la loi, ils peuvent même être frappés de nullité.

Mais nous pouvons nuancer nos propos à ce niveau car bien que la plupart des PV de l'OPJ ont valeur de simples renseignements, certains PV font foi jusqu'à preuves contraires rapportées par écrit ou par témoins, des faits qu'ils énoncent. Nous pouvons citer à ce titre les PV constatant les contraventions. D'autres procès verbaux enfin font foi jusqu'à inscription de faux; il s'agit des PV dressés par certains fonctionnaires assermentés investis de pouvoirs de police judiciaire et constatant certaines infractions en matière notamment d'Eaux et Forêt, de chasse et de douane, de transport (dégradation de la chaussée). Les énonciations et affirmations de ces PV ne peuvent être combattues que par la procédure très particulière de l'inscription de faux.

B- La présence de l'OPJ à l'audience pour défendre ses PV

Cette présence de l'OPJ à l'audience était déjà effective dans la partie anglophone de notre pays. Le CPP est venu harmoniser cette pratique sur toute l'étendue du territoire national. A ce sujet l'article 317 du CPP dispose que l'auteur d'un PV ou d'un rapport peut en outre être entendu comme témoin devant le tribunal. Une fois de plus cette situation montre que le pouvoir de l'OPJ n'est pas absolu.

L'OPJ peut être convoqué à l'audience afin de soutenir son PV. C'est par exemple le cas des PV dressés lors des descentes sur le terrain (constatation, perquisition, visites domiciliaires, fouilles, saisies) par l'OPJ. Ce dernier est ainsi cité comme témoin et devient partie au procès pénal. Comme tout pouvoir, celui de l'OPJ ne manque pas de connaître des difficultés. Dans l'exercice de ses pouvoirs, l'OPJ fait face à d'énormes difficultés tel que l'on va le relever dans les lignes qui suivent.

SECTION 2 : LES DIFFICULTES RENCONTREES PAR L'OPJ DANS L'EXERCICE
DE SES MISSIONS

Les difficultés rencontrées par l'OPJ au cours de l'accomplissement de sa mission sont nombreuses. Nous allons les regrouper en deux, à savoir les difficultés matérielles et personnelles (paragraphe 1) et les difficultés face aux usagers (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les difficultés d'ordre matériel et personnel

L'OPJ dans l'exercice de ses missions se trouve le plus souvent confronté à des difficultés sur le plan matériel (A) et des collaborateurs qui ont du mal à s'adapter à la nouvelle donne (B).

A- Les difficultés sur le plan matériel

Le manque du matériel de travail (machine à dactylographier, papiers formats A4, papiers carbones) est une des difficultés que connaît l'OPJ dans l'accomplissement de sa mission. Dans certaines unités de police ou de gendarmerie, nous avons trouvé qu'une demi-douzaine d'enquêteurs se partagent une seule machine à écrire. Ce facteur est un frein considérable dans la célérité des procédures au niveau de ces unités. C'est l'occasion pour nous de lancer un vibrant appel à l'administration afin de doter ces unités de machines à écrire. Les ONG peuvent sur ce plan être bien utiles en faisant des dons, surtout qu'elles sont en partenariat avec leurs homologues occidentaux.

Dans la pratique, les usagers sont souvent sollicités afin de pallier ce manquement, à donner du
papier format aux enquêteurs. Cette pratique est à décrier car un OPJ qui reçoit du papier d'un

suspect ou d'un plaignant n'est plus libre moralement dans la conduite de son enquête. Pour être objectif dans la recherche de la vérité lors de son enquête, l'OPJ doit éviter de recevoir quoi que ce soit venant de l'usager sous peine de tomber sous le coup de la corruption ou de la concussion, prévues et réprimées par le code pénal57.

B- La difficile adaptation du personnel

Certains OPJ ont encore du mal à s'adapter à la nouvelle procédure pénale. C'est aussi le cas du personnel mis à leur disposition. Les vieilles habitudes ont la peau dure. Le nouvel apprentissage s'avère très difficile. Mais avec la multiplication des séminaires de recyclage et d'appropriation, nous avons bon espoir de croire que l'OPJ et son personnel pourront s'arrimer à cette nouvelle procédure qui rompt avec les anciennes pratiques peu orthodoxes.

Paragraphe 2 : Les difficultés face aux usagers

Nous examinerons d'abord le cas du suspect (A) ensuite celui du conseil (B)

A- Le cas du suspect

Certains suspects sont abandonnés à eux-mêmes dans les unités de police ou de gendarmerie. D'autres, au moment de leur audition décident qu'ils ne parleront qu'en présence

57 Voir à ce sujet le code pénal dans ses articles 134 et 142 qui traitent respectivement de la corruption et de la concussion.

de leur avocat58. Après une longue attente, aucun conseil ne se présente. Que doit faire l'OPJ dans ce cas ? Les délais de garde à vue s'épuisent et aucun avocat ne se présente. Certains OPJ se décident à déferrer le suspect au parquet sans leurs dépositions. Il y a dans ce cas vice de procédure car la loi demande qu'avant d'être gardé à vue, le suspect doit être entendu par l'OPJ. Cette situation rend difficile la mission de l'OPJ. Le suspect par cette méthode bloque l'évolution de la procédure car son avocat n'est pas toujours là59. Nous saluons l'arrivée de la loi n° 2009/004 du 14 avril 2009 portant organisation de l'assistance judiciaire au Cameroun. Mais l'assistance judiciaire ne devrait pas rester seulement au niveau des tribunaux et des Cours, elle devrait s'étendre aux unités de police et de gendarmerie. L'administration pourrait commettre des avocats d'office près les unités de police et de gendarmerie afin de pallier ces difficultés60. Les gardés à vue malades ou blessés sont souvent abandonnés par leurs amis et familles. Ils ne peuvent bénéficier d'une alimentation ni des soins médicaux. C'est l'une des difficultés que connaît l'OPJ. Le suspect abandonné, conduit à l'hôpital ne peut recevoir les soins gratuitement car le personnel sanitaire exige le dépôt d'une somme d'argent avant le début des soins61. L'OPJ ne disposant pas de budget à ce sujet. Il existe des cas où le gardé à vue décède faute de soins. Nous pensons que ce droit aux soins médicaux pouvait s'accompagner d'une mesure qui oblige les centres hospitaliers publics à recevoir et à soigner gratuitement les suspects abandonnés à eux-mêmes dans les unités de police ou de gendarmerie.

Une autre difficulté survient lorsqu'il faut nourrir ces suspects abandonnés par leur famille et
leurs amis sans visite. L'article 122 al 4 du CPP dispose que l'Etat assure l'alimentation des
personnes gardées à vue. Toutefois, ces personnes sont autorisées à recevoir quotidiennement de

58 L'article 63-4 du CPP français dispose que « Dès le début de la garde à vue, la personne peut demander à s'entretenir avec un avocat. » Si elle n'est pas en mesure d'en désigner un ou si l'avocat choisi ne peut être contacté, elle peut demander qu'il lui en soit commis un d'office par le bâtonnier.

59 Le CPP français a prévu la commission d'avocat d'office afin de pallier à ce genre de difficulté.

60 En France cette difficulté est réglée par le CPP. Ainsi l'article 63-4 c du CPP français impose à l'OPJ de prendre contact avec l'avocat désigné ou informe par tous moyens et sans délai le bâtonnier de la demande de commission d'un avocat d'office.

61 En dehors du dépôt d'une somme d'argent, il faut bien de l'argent pour l'achat des médicaments au suspect malade.

leur famille ou de leurs amis les moyens nécessaires à leur alimentation et à leur entretien. Au cas où ces personnes n'ont ni visite de leur famille ni de leurs amis, il revient à l'Etat d'assurer leur alimentation. La mise en pratique de ce volet de l'art. 122 du CPP viendra résoudre une des difficultés que rencontre l'OPJ dans l'accomplissement de sa mission.

La promiscuité dans les chambres de sûreté est aussi un réel problème pour l'OPJ. Ces chambres sont le plus souvent très exigues et on y dénombre parfois 30 à 50 voire même 70 suspects serrés dans un local de 3 à 4 mètres carrés. Les chambres de sûreté pour mineurs n'existent pas dans nos unités de police ou de gendarmerie. C'est à peine qu'on en trouve pour le sexe féminin. Ceux-ci se retrouvent dans le même local que les gardés à vue du sexe opposés avec tout ce que cela comporte comme risque de viol. Les mineurs aussi souffrent de la même façon que les gardées à vue de sexe féminin. Nous exhortons les autorités à construire des chambres de sûreté (avec toilettes) différentes pour ces trois catégories de personnes gardées à vue.

B- Le cas du conseil

L'intervention du conseil dans la phase policière de la procédure pénale a été une des grandes innovations de notre code de procédure pénale. Jusqu'ici, le droit à l'assistance d'un avocat n'était admis qu'au cours de l'instruction préparatoire et du jugement. Cette innovation est consacrée par l'art. 116 al 3 du CPP qui dispose que l'officier de police judiciaire est tenu dès l'ouverture de l'enquête préliminaire et, à peine de nullité d'informer le suspect de son droit de se faire assister d'un conseil. Qui peut être conseil au niveau des enquêtes de police? Le CPP parle tantôt de conseil, tantôt d'avocat62. La loi ne définit pas qui peut être conseil. Lors des séminaires d'imprégnation, les intervenants ont dit que tout le monde pouvait être conseil, pourvu que cette personne ait une connaissance en la matière. C'est dire que le conseil n'est pas

62 Le CPP français est clair sur cette question, il parle d'avocat.

réservé exclusivement aux avocats. Pour l'instant, la loi ne parle pas d'incompatibilité entre la casquette de conseil et d'autres fonctions. Les usagers jusqu'à présent pensent que seul l'avocat peut être conseil, mais ils doivent savoir que toute personne compétente peut l'être, pourvu qu'elle maîtrise la matière pour laquelle elle vient assister un suspect.

Certains conseils veulent le plus souvent se faire entendre à la place du suspect, ils veulent même répondre aux questions à la place de leur client. Tout ceci rend difficile la mission de l'OPJ. Il est vrai que le rôle du conseil n'a pas été clairement défini par le CPP. A ce sujet, nous pouvons dire que le conseil ou l'avocat ne saurait transformer l'unité de police ou de gendarmerie en instance de juridiction. Les plaidoiries de l'avocat doivent se faire devant les tribunaux. Face à ces difficultés, un intervenant lors du séminaire de vulgarisation du CPP disait que << l'OPJ doit rester maître de son enquête ». Nous pensons que la jurisprudence viendra clarifier le flou en définissant le rôle du conseil lors de l'enquête de police.

En attendant, l'avocat lors de la phase policière de la procédure pénale doit-il rester muet ou a-til la possibilité de poser des questions ou même de faire des observations. Doit-il se contenter des entretiens avec son client? Contrairement à l'avis du barreau camerounais qui pense que l'avocat doit jouer le rôle traditionnel qui est le sien, notamment assurer la protection de son client, le droit français ne permet pas son assistance aux interrogatoires, pas davantage qu'il n'admet son accès au dossier de l'enquête. Afin d'éviter une paralysie complète et abusive des enquêtes de police, il lui est simplement permis de s'entretenir avec son client pendant une demiheure dans les conditions qui garantissent la confidentialité de l'entretien63. Cette position devrait à notre avis être suivie par la pratique camerounaise. Car cette intervention << à tout moment» dont parle l'art 122 du CPP serait de nature à ralentir la recherche des preuves et à limiter le rendement de l'institution de la garde à vue64.

63 Voir à ce sujet l'article 63-4 du CPP français.

64 M. TIMTCHUENG et R. ASSONTSA, << Le nouveau visage de la garde à vue dans la procédure pénale camerounaise » in Annales de la FSJP op.cit. p.107.

DEUXIEME PARTIE

LE CONTROLE ET LA RESPONSABILITE DE L'OFFICIER DE POLICE
JUDICIAIRE

L'OPJ est un maillon très important dans la chaîne de déroulement du procès pénal au Cameroun. Afin que celui-ci ne puisse abuser des pouvoirs que lui a confié le code de procédure pénale, le législateur pénal de 2005 s'est entouré des textes qui servent de garde-fou afin de mieux contrôler certains dérapages, au besoin même de sanctionner les OPJ réfractaires. L'on assiste ainsi au contrôle de l'activité de l'OPJ (chapitre 1) ; ce qui entraîne sa responsabilité dans l'exercice de ses pouvoirs (chapitre 2).

CHAPITRE 1
LE CONTROLE DE L'ACTIVITE DE L'OFFICIER DE POLICE
JUDICIAIRE

Le législateur pénal de 2005 a accordé d'importants pouvoirs à l'officier de police judiciaire. Pour mieux canaliser l'exercice de ces pouvoirs, il a prévu des mécanismes de contrôle qui doivent amener l'OPJ à respecter les lois et règlements dans les limites territoriales où il exerce ses fonctions habituelles. Ce contrôle peut être exercé non seulement par la hiérarchie de l'OPJ (section 1), mais aussi par les organes indépendants (section 2).

SECTION 1 : LE CONTROLE HIERARCHIQUE

L'officier de police judiciaire dans l'exercice de ses missions peut faire l'objet d'un double contrôle hiérarchique : celui des magistrats du parquet (paragraphe 1), et un contrôle administratif de ses supérieurs directs (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le contrôle exercé par les magistrats du parquet

Ce contrôle est exercé concurremment par le Procureur Général (A) et par le Procureur de la République (B).

A- Le contrôle exercé par le Procureur Général

L'article 134 du CPP précise dans son alinéa 2-a que le PG près la Cour d'Appel assure le contrôle des OPJ et APJ en service dans le ressort de la CA. Il adresse semestriellement au

ministre chargé de la justice un rapport sur leurs activités et leur conduite. Il faut noter que c'est une innovation majeure, puisque actuellement l'OPJ ne peut plus s'autoriser à faire n'importe quoi. La police judiciaire est exercée sous le contrôle et la surveillance du parquet. Afin que ce contrôle soit efficace, le Ministre de la justice garde des sceaux dans sa circulaire n° 24848/CD/9276/DAJS du 23 mai 1990 a prescrit aux PG de demander aux PR de procéder, en plus des interventions ponctuelles, à des visites hebdomadaires de toutes les unités de police et de gendarmerie.

Le PG exerce une surveillance sur le personnel et l'activité de la police judiciaire. Il veille à l'application de la loi sur toute l'étendue du ressort de la CA. Il peut intervenir à tout stade de l'enquête et donner des recommandations aux OPJ (art. 134 (1) du CPP). Le PG contrôle les gardes à vue dans le ressort de la CA dont il est compétent. Mais il faut souligner que rarement ce haut fonctionnaire se déplace. En général il laisse cette tâche au PR et ses substituts. Le CPP va plus loin dans son article 134 (2) quand il précise que le PG apprécie le travail et note chaque OPJ en service dans son ressort. A ce niveau nous émettons des réserves quant à l'applicabilité de ce volet de l'article. Sur le plan pratique l'on se demande bien comment le PG va procéder afin de noter les OPJ de son ressort de compétence. Les OPJ ne dépendent pas du même ministère que les magistrats. Comment va s'opérer la notation? Le PG ne pourra noter l'OPJ que sur le plan de la police judiciaire, car il en est le chef. Nous nous demandons si l' OPJ aura 02 notes, celle de son chef utilisateur et celle du PG ? Cela donne matière à réflexion.

Le contrôle du PG a pour but non seulement d'éviter ou alors d'empêcher certains abus exercés par les OPJ sur les suspects, mais de veiller à ce que ces derniers respectent la procédure. Au Tchad65, la police judiciaire est soumise au contrôle du seul procureur général qui, en cas de négligence ou de faute grave des membres de la police judiciaire, peut dans le premier cas leur adresser un avertissement et, dans le second, saisir les autorités administratives compétentes aux

65 Lire à ce sujet l'ordonnance n° 13/PR/MJ du 9 juin 1967 portant code de procédure pénale du Tchad. Article 180 et suivants.

fins de poursuites disciplinaires66. Au Gabon, le PG a autorité sur tous les officiers de police judiciaires en exercice sur le territoire de la République, il peut prendre, en cas de manquement de ces derniers à leurs devoirs professionnels << toutes mesures utiles pour les suspendre de leurs fonctions en attendant la décision du Garde des Sceaux »67 Nous constatons que contrairement au Cameroun, dans ces pays voisins, le PG peut déclencher la procédure disciplinaire et aussi il dispose du pouvoir d'infliger un avertissement, une suspension à un OPJ aux termes de son contrôle. Le législateur pénal camerounais n'est pas encore arrivé à ce stade. Le PG camerounais dispose du pouvoir de contrôle mais pas encore celui de sanction sur les OPJ.

B- Le contrôle exercé par le Procureur de la République

Ce contrôle qui se manifeste sur plusieurs plans (1), présente aussi des limites (2) que nous allons examiner.

1- Les manifestations du contrôle

L'article 137 du CPP dispose que le PR dirige et contrôle les diligences des OPJ et APJ. Tout comme l'ancien CIC, le CPP reconnaît aussi au PR les prérogatives et les pouvoirs attachés à la qualité d' OPJ. Le PR exerce sur les enquêtes de police un contrôle sur pièce et sur place. Le PR contrôle l'action des OPJ à travers l'étude des procès verbaux qui lui sont transmis par ces derniers. Le PR doit être à mesure, à partir des PV, de vérifier les constatations qui ont été faites et les circonstances qui les ont entourés ainsi que les traces qu'elles ont laissées68.

66 G. MANGIN (Dir.) <<Procédure pénale », nouvelle éd. africaine, 1982, Encyclopédie juridique, tome 10, page 196.

67 Lire à ce sujet l'article 20 c du code de procédure pénale du Gabon.

68 Lorsque certaines formalités ne sont pas respectées par l'OPJ, le PR renvoie les PV à ce dernier afin qu'il puisse les remplir comme il se doit. Nous pouvons citer les cas où l'OPJ n'a pas notifié au suspect sa garde à vue par exemple.

Le PR apprécie les auditions, les confrontations, les questions posées aux suspects, en bref toutes les opérations menées par l'OPJ au cours de l'enquête de police. Ce contrôle se fait aussi au niveau de la garde à vue69. Le Procureur de la République doit faire des descentes inopinées dans les unités de police et de gendarmerie afin de s'enquérir des réalités du respect par les OPJ de la procédure pénale en matière de garde à vue. Le ministre de la justice garde des sceaux à ce sujet, a pris une circulaire70 dans laquelle il prescrit aux magistrats d'inviter les OPJ responsables des unités de police et de gendarmerie à leur adresser des états hebdomadaires des individus gardés à vue. Ces états doivent comporter les mentions suivantes relatives à chaque cas : nom et prénom, profession, date d'arrestation, motif, date d'élargissement ou de déferrement.

Lors des contrôles des chambres de sûreté, les magistrats pourront comparer les indications fournies dans ces établissements avec celles contenues dans les différents registres d'écrou ou de main courante.

Très souvent les visites des magistrats ne sont pas hebdomadaires, elles sont parfois mensuelles et même trimestrielles. Dans les villes de Douala et de Yaoundé, les magistrats sont souvent très inondés de travail au point où les visites et les contrôles des chambres de sûreté sont reléguées au second plan. Pour plus d'efficacité, nous proposons que certains fonctionnaires du ministère de la justice puissent être affectés au parquet et que ceux-ci soient exclusivement désignés à cette tâche et viennent seulement rendre compte au PR dans les grandes agglomérations du pays.

Une autre difficulté est le plus souvent relative au fait que certains OPJ lors des contrôles des chambres de sûreté par les magistrats refusent de leur ouvrir les portes. Certains justifient leur refus par l'absence du chef d'unité ou le fait qu'ils n'ont pas été avisés au préalable de l'arrivée du magistrat. Certains s'opposent carrément aux instructions du magistrat lorsqu'il demande

69 L'article 34 du CPP dispose que les OPJ adressent quotidiennement au Procureur de la République compétent, l'état des personnes gardées à vue dans leurs services.

70 Voir à ce sujet la circulaire n° 9276/DAJS du 1er novembre 1990.

l'élargissement du suspect dont la garde à vue s'avère longue ou illégale au motif qu'ils n'ont pas reçu d'ordre dans ce sens de la part de leur supérieur hiérarchique. D'autres enfin refusent de recevoir les substituts et exigent la présence du PR lui-même. C'est le lieu ici de dénoncer pour le regretter les nombreux incidents qui opposent magistrats et OPJ lors des contrôles des chambres de sûreté. Le cas le plus tristement célèbre est l'affaire LAGASSO71. Cet OPJ a, de concert avec certains de ses collaborateurs, copieusement battu un magistrat qui est allé contrôler la cellule un samedi au commissariat du 1er arrondissement de la ville de Yaoundé. Non contents de le passer à tabac, ils l'ont enfermé pendant des heures dans une cellule où se trouvaient d'autres personnes gardées à vue. L'OPJ fautif fut condamné à deux ans d'emprisonnement ferme. L'officier de police judiciaire doit collaborer et surtout faciliter le passage du PR.

Ce contrôle du PR est d'une importance capitale et apparaît comme la seule garantie dont bénéficient les suspects qui assistent parfois de manière impuissante à la violation de leurs droits.

2- Les limites au contrôle exercé par le PR

Compte tenu de son implication dans l'enquête de flagrance en particulier et dans les enquêtes de police en général, il était nécessaire de l'écarter du contrôle de la régularité de la garde à vue (pour plus d'efficacité) surtout qu'il signe les bons de garde à vue. A titre d'illustration pour la garde à vue ordonnée par le PR dans les unités de police72, nous voyons les suspects passer deux, trois, parfois même un mois sous bon de garde à vue signé de ce haut fonctionnaire. Ces suspects passent le temps à faire des navettes entre le commissariat et le parquet. Tout ceci se fait en violation des dispositions du CPP sur le délai maximum de 08 (huit)

71 Le TGI du Mfoundi a dans son jugement n° 122/crim du 1er mars 1996 condamné ce policier à dix ans d'emprisonnement ferme : la Cour d'Appel du Centre a ramené cette peine à deux ans dans son arrêt n°37/crim du 10 décembre 1996.inédit.

72 Nous avons au sein du commissariat central n° 1 de la ville de Yaoundé une cellule du parquet. Les gardés à vue sont sous bon signé des PR (TPI ou TGI).

jours de garde à vue73. Interrogés, certains nous ont fait savoir qu'ils étaient en information judiciaire. Pourquoi se retrouvent-ils encore sous bon de garde à vue, alors qu'ils devraient être en détention provisoire ? Qui contrôle ces gardes à vue du PR ? Nous soulevons un problème très sérieux sur lequel doivent se pencher nos autorités judiciaires et législatives avant que le pire n'arrive. Cette charge (contrôle de la régularité des gardes à vue) aurait pu être confiée à certains fonctionnaires de la chancellerie spécialement affectés au parquet à ces fins. Ils pourraient rendre compte au PG du déroulement de leurs activités sur le terrain.

Avec sa qualité de supérieur hiérarchique et les pouvoirs d'OPJ que lui confèrent le CPP, il est déjà juge et partie et quelque soient les qualités reconnues à ce grand magistrat, on peut difficilement se contrôler soi-même74. Le législateur aurait mieux fait de laisser tous les pouvoirs d'OPJ aux OPJ exclusivement et laisser que le PR dirige et contrôle, qu'il reste en amont pour mieux exercer ses pouvoirs de chef de la police judiciaire.

Paragraphe 2 : Le contrôle administratif des supérieurs directs de l'officier de police
judiciaire

Le contrôle ici est effectué soit en interne (A) c'est-à-dire à l'intérieur de l'unité ou par un service spécialisé (B) venu des services centraux.

73 Le nommé OUMATE HAMADOU a passé 46 (quarante six) jours en garde à vue dans la cellule du parquet au commissariat central n° 1 de la ville de Yaoundé. Il y est arrivé le 25 mai 2009 sous bon de garde à vue du PR et a été relaxé le 09 juillet 2009. Ce dernier ne faisait que renouveler ce bon jusqu'au jour où il a retrouvé sa liberté. Ces cas sont légion depuis l'avènement du CPP.

74 P.R. DJOUTSOP, « La flagrance des crimes et des délits dans le CPP camerounais », in Annales de la FSJP, Dschang, édition spéciale, tome 11, 2007, p.93.

A- Le contrôle interne

Que ce soit à la gendarmerie ou à la Sûreté Nationale, les chefs hiérarchiques assurent le bon fonctionnement de tous les services non seulement en prévoyant, mais aussi en organisant et coordonnant les efforts de leurs collaborateurs. Ces chefs doivent contrôler l'action des subordonnés. Le contrôle s'effectue tant sur pièces que sur place. Ce contrôle du chef permet à l'OPJ de respecter les droits du suspect se trouvant dans son unité.

B- Le contrôle par un service spécialisé

Le contrôle sur pièce, à raison de la dispersion des unités revêt un grand intérêt. Il s'effectue par l'examen des documents tels que les messages, les rapports et PV reçus des échelons inférieurs.

Le contrôle sur place ou sur le terrain s'exerce sur toutes les parties du service soit en inspection75 annoncée, soit en inspection inopinée. Il est axé sur l'activité du service dans son ensemble. Le but de ce contrôle est de s'assurer non seulement de l'effectivité du service, mais aussi et surtout de la régularité des actes posés par le personnel du service.

Tous ces contrôles sont d'une efficacité avérée pour la protection des droits des suspects et le respect de la procédure lors des enquêtes policières mais n'excluent pas d'autres modes de contrôle aussi importants.

75 On parle ici d' «Inspection des unités » que se soit au sein de la Gendarmerie Nationale ou de la Sûreté Nationale. Cette inspection consiste en la descente dans les unités de police ou de gendarmerie d'une commission venant des services centraux afin de vérifier l'état du personnel, du matériel et les locaux de ces différentes unités. A la fin de ces descentes la commission dresse un rapport qu'elle envoie au chef de corps avec des propositions.

SECTION 2 : LE CONTROLE EXERCE PAR LES ORGANES INDEPENDANTS

Afin de consolider l'Etat de droit et la démocratie au Cameroun, depuis le début des années 90, certains contrôles de type nouveau ont vu le jour avec pour but de renforcer les mécanismes de contrôle existants. C'est ainsi que nous distinguons le contrôle de la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés -CNDH- (paragraphe 1) de celui d'autres contrôles informels (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le contrôle exercé par la Commission Nationale des Droits de l'Homme et
des Libertés (CNDH)

Il faut noter que cette commission est une émanation des pouvoirs publics. Une loi définit la procédure de contrôle (A) et comme toute structure étatique, nous constatons que son efficacité est relative (B).

A- La procédure de contrôle

La CNDH a été créée par la loi n° 2004/016 du 22 juillet 200476. D'après l'article 2 de cette loi, « la commission a pour mission principale la promotion et la protection des droits de l'Homme et des libertés ». Pour atteindre ces buts, la CNDH doit contrôler l'action des OPJ. En outre, il ressort de ce même texte que la CNDH reçoit toutes les dénonciations portant sur les cas de violation des droits de l'Homme et des libertés et en fait le rapport au Président de la

76 La Commission Nationale des Droits de l'Homme et des libertés (CNDH) a remplacé le Comité National des Droits de l'Homme et des Libertés alors régi par le décret n° 90/1459 du 8 novembre 1990.

République, saisit toutes autorités des cas de violation des droits de l'Homme et des libertés, peut procéder en tant que de besoin aux visites de toute sorte d'établissement pénitentiaire, commissariat et brigade de gendarmerie en présence du PR compétent ou de son représentant comme le dispose l'art.2 de la loi précitée. La CNDH a attiré l'attention du gouvernement dès le mois de juin 1992 sur les conditions de la garde à vue qui étaient préoccupantes. Mais en dépit de cela, les conditions qui président à la garde à vue des suspects ont continué à se détériorer. Elles sont caractérisées entre autres par les effectifs pléthoriques dans les chambres de sûreté, elles sont étroites et malsaines. La non existence dans les unités de police et de gendarmerie des cellules pour mineurs et rarement l'existence des cellules pour femmes exclusivement. Dans certaines unités, on a des cellules mixtes, c'est-à-dire composées d'hommes et de femmes.

B- Une efficacité relative

Malgré son pouvoir limité, il faut noter pour le déplorer, l'absence constante de la CNDH sur le terrain. Ses visites ne sont pas inopinées et elles sont le plus souvent annoncées en grande pompe lors des semaines mondiales77 des droits de l'homme. Après ces jours, la CNDH replonge dans sa léthargie légendaire dans l'attente de la prochaine année.

La présence des membres du contrôle a souvent suscité des incidents dans les postes de police et les brigades de gendarmerie. On a vu le 07 mars 1992, à la légion de gendarmerie du centre à Yaoundé, les membres de la commission en mission d'inspection et de contrôle ont été séquestrés dans une cellule en même temps que le substitut du PR qui les accompagnait. Certains gendarmes vont même souvent jusqu'à empêcher l'accès dans leur unité aux membres de la commission, prenant pour raison que c'est un terrain militaire, donc interdit d'accès.

77 Les journées commémoratives des droits de l'Homme ont lieu chaque année du 20 novembre au 10 décembre.

Les contrôles de la commission sont aussi inefficaces à cause du texte qui la crée78. Ce texte ne lui donne pas assez de pouvoirs. Ceux-ci se limitent à de simples constatations. La CNDH ne pouvant adresser ni un blâme à l'OPJ qui s'est rendu coupable d'atteinte aux droits de l'homme et aux libertés individuelles, ni lui enjoindre de faire cesser la violation. Il serait donc souhaitable qu'elle intervienne en amont pour empêcher la violation des droits et libertés et non en aval, c'est-à-dire quand il y a eu atteinte. La CNDH gagnerait beaucoup aussi à être plus présente sur le terrain79. D'autres institutions participent également à cette entreprise.

Paragraphe 2 : Les contrôles informels

Ces contrôles sont dits informels parce qu'ils n'ont pas été prévus par le législateur. Ces types de contrôle sont principalement exercés par les avocats et les membres de la famille du suspect (A) et par les associations privées de la défense des droits de l'Homme et les organismes non gouvernementaux (B).

A- Les contrôles officieux effectués par les avocats et les membres de la famille du

suspect

Le CPP énonce dans son article 122 (3) que la personne gardée à vue peut à tout moment, recevoir aux heures ouvrables la visite de son avocat et celle d'un membre de sa famille ou de toute autre personne pouvant suivre son traitement durant la garde à vue. Il est mentionné plus

78 Les membres sont nommés par décret présidentiel (art.6 in fine de la loi du 22 juillet 2004), leur tutelle reste celui qui les nomme. Ils peuvent être changés à tout moment. Le décret n° 2006/275 du 06 septembre nomme les membres de la CNDH. Ils ont prêtés serment le 09 novembre 2006 devant la Cour Suprême réunie en Assemblée Plénière.

79 La commission doit vulgariser par tous moyens, les instruments relatifs aux droits de l'Homme et aux Libertés et veiller au développement d'une culture des droits de l'Homme notamment au sein des unités de police et de gendarmerie.

haut que le suspect a droit à un conseil, c'est dire que ces différentes personnes peuvent contrôler la procédure pénale tout en veillant à ce que l'OPJ puisse respecter les droits du suspect. Elles peuvent relever certaines violations. La présence d'un conseil au niveau du commissariat ou de la brigade de gendarmerie peut susciter chez l'OPJ la rectification de la façon de procéder. S'il est vrai que le conseil peut amener l'OPJ à changer, le passage des membres de la famille pour des visites au suspect peut aussi permettre à ceux-ci de relever certains manquements dans le respect des droits de l'Homme et des libertés. Dans ce cas, ils peuvent saisir la CNDH afin d'ouvrir une enquête sur les faits constatés, ou alors les membres de la famille peuvent saisir l'autorité compétente afin de faire cesser la violation. S'il est établi que l'intervention ici a une portée limitée, il n'en demeure pas moins vrai que lorsque le conseil, notamment l'avocat, ou la famille agit efficacement, son action est bénéfique pour le respect des droits du suspect. C'est eux aussi qui peuvent déclencher la procédure de libération immédiate d'une personne illégalement arrêtée par le biais de l'habeas corpus (art. 584 du CPP et SS). Ainsi par une simple requête non timbrée, les proches de la personne peuvent saisir le président du TGI du lieu d'arrestation celle-ci ou tout autre magistrat du siège dudit tribunal désigné par lui afin de demander sa libération immédiate.

B- Contrôle exercé par les associations privées de défense des droits de l'Homme et les organisations non gouvernementales (ONG)

D'emblée, il faut dire que ces contrôles sont très restreints alors que les associations et organisations privées chargées de la défense des droits de l'Homme peuvent comme la CNDH dénoncer les violations des droits et des libertés individuelles constatées au cours des enquêtes de police.

En application de la loi n° 90/053 du 19 décembre 1990 portant liberté d'association et de la loi n° 99/016 du 22 décembre 1999 traitant des organisations non gouvernementales, plusieurs organismes autorisés par ces textes spécialisés dans la protection des libertés et droits de l'Homme ont vu le jour au Cameroun. Leur champ de compétence couvre toute l'étendue du territoire national. Au rang de ces associations, nous pouvons citer l'ACAT (Action des Chrétiens pour l'Abolition de la Torture) et l' APDHAC (Association pour la Promotion des Droits de l'Homme en Afrique Centrale) qui travaillent en étroite collaboration avec la CNDH. Leur rôle n'est pas seulement de dénoncer, mais aussi de sensibiliser et former les différents acteurs afin d'assurer une prévention efficace. Vues sous cet angle, les associations et ONG remplissent une fonction particulièrement importante vis-à-vis du respect des droits de l'Homme dans les unités de police et de gendarmerie. Mais il faut noter qu'on les voit rarement dans ces unités afin de jouer le rôle qui est le leur, un rôle très important.

CHAPITRE 2
LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE DE L'OPJ DANS
L'EXERCICE DE SES POUVOIRS

L'OPJ doit exercer sa mission de police judiciaire dans le respect des lois et règlements de la République. Dans le cas contraire, il pourrait voir sa responsabilité engagée (section 1) mais le législateur pénal lui a accordé un privilège de juridiction (section 2).

SECTION 1 : LA RESPONSABILITE DE L'OPJ DANS L'EXERCICE DE SES
MISSIONS

La notion de responsabilité peut être définie comme l'obligation de répondre d'un dommage devant la justice et d'en assumer les conséquences civiles, pénales, disciplinaires etc. (soit envers la victime, soit envers la société).Dans ce sens, elle est subdivisée en responsabilité contractuelle, délictuelle, du fait de l'homme, des animaux etc.

Ainsi, on dira des OPJ qu'ils sont responsables dans la mesure où il incombe à ces derniers l'obligation de répondre des dommages qu'ils auront causé et d'assumer les conséquences civiles, pénales et disciplinaires qui y découleront. Nous examinerons d'abord les cas de mise en oeuvre de la responsabilité de l'OPJ (paragraphe 1) avant de voir la diversité de sanctions prévues par les textes (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les cas de mise en oeuvre de la responsabiité de l'OPJ

Le législateur pénal de 2005 tout en accordant d'importants pouvoirs aux OPJ dans la conduite des enquêtes, a pu édicter un certain nombre de mesures propres à protéger le suspect contre certaines pratiques peu orthodoxes tels que l'arbitraire et les manoeuvres insidieuses et déloyales de certains OPJ. Pendant l'enquête de police, l'OPJ peut violer la procédure (A) ou alors violer les libertés individuelles du suspect (B).

A- La violation de la procédure par l'OPJ

Dès l'ouverture de l'enquête, l'OPJ peut violer certaines règles de procédure. Le législateur du CPP est très exigent pour ce qui est du respect des règles de procédure quand il déclare que certaines mentions doivent obligatoirement apparaître sur les PV dressés par l'OPJ. Le CPP exige que le suspect doit être informé de certaines mentions. Il doit être notifié de sa garde à vue, des motifs de sa présence dans l'unité de police ou de gendarmerie. Le suspect a droit à la défense. L'article 116 (3) du CPP dispose que l' OPJ est tenu, dès l'ouverture de l'enquête préliminaire et à peine de nullité, d'informer le suspect de son droit de se faire assister d'un conseil, de son droit de garder silence. L'OPJ doit observer certaines règles relatives aux perquisitions et saisies dans un cabinet d'avocat (article 106 al. 3), aux autres perquisitions et saisies (art. 100).

B- La violation des libertés individuelles du suspect

La loi n° 58/203 du 26 décembre 1958 n'avait pas accordé une attention aux droits du suspect. De nos jours, la lutte contre l'impunité est au coeur du combat pour l'instauration d'une société plus respectueuse des droits de l'Homme. A travers l'examen de la protection du droit à

la vie, du droit a l'intégrité physique et morale et du droit a la sûreté. Le code de procédure pénale dans son article 37 y a fait une place de choix. Il dispose que toute personne arrêtée bénéficie de toutes les facilités raisonnables en vue d'entrer en contact avec sa famille. Dans son article 122 al2, le suspect ne sera point soumis a la contrainte physique ou morale, a la torture, a la violence, a la menace ou a tout autre moyen de pression, a la tromperie, a des manoeuvres insidieuses, a des suggestions fallacieuses, a des interrogatoires prolongés, a l'hypnose, a l'administration des drogues ou a tous autres procédés de nature a compromettre ou a réduire sa liberté d'action ou de décision, a altérer sa mémoire ou son discernement.

Tout ceci veut dire que le suspect a droit au respect de sa dignité, le droit a l'assistance morale, a l'alimentation, le droit aux consultations et soins médicaux.

La violation de tous ces droits engage la responsabilité de l'OPJ lors de l'enquête de police et ouvre une voie a des sanctions diverses. L'OPJ ne doit pas porter atteinte a l'intégrité corporelle du suspect (torture), a sa liberté (garde a vue abusive, arrestation arbitraire, séquestration), violation de domicile. L'OPJ ne doit pas porter atteinte a la fortune du suspect (vol, rétention sans droit de la chose d'autrui). L'OPJ ne doit pas être auteur (lors des enquêtes de police) des infractions spécifiques telles que la corruption, le favoritisme, la concussion, le refus d'un service dû, abus de pouvoir80.

En bref, l'OPJ dans l'exercice de ses missions peut être auteur des infractions de droit commun qui engagent directement ou indirectement sa responsabilité .Ceci donne lieu a l'application d'une diversité de sanctions.

80 Voir a ce sujet le code pénal camerounais : les articles 134,134 bis, 143, 137, 142,148.

Paragraphe 2 : La diversité des sanctions prévues par les textes

Nous avons des sanctions qui portent selon la loi sur la nullité des actes irréguliers d'une part (A) et sur la personne même de l'OPJ d'autre part (B).

A- La nullité des actes irréguliers

Le CPP a mis sur pied un régime des nullités des actes de procédure certes détaillé, mais en réalité complexe.

Lorsqu'il s'agit de l'inobservation de certaines règles de procédure, des leurres apparaissent plus nombreuses que les lueurs et ceci sur le double plan du caractère de la nullité (1), d'une part, et de la portée de celle-ci (2), d'autre part.

1- Le caractère de la nullité

Les actes irréguliers peuvent être frappés soit d'une nullité absolue, soit d'une nullité relative. Le principe fondamental du droit pénal énonce qu'il n'y a pas de crime, il n'y a pas de peine sans loi (<< nullum crimen, nulla poena sine lege >>).Cela sous entend que toute peine, ou toute sanction doit être prévue par un texte de loi. Le législateur en a tenu compte et sanctionne par la nullité certains actes accomplis en violation de la loi par l'OPJ.

On parle de nullité absolue << lorsque les conditions imposées par la loi sont essentielles et tendent à protéger l'intérêt général, ou l'ordre public, ou les bonnes moeurs >>. La nullité est dite relative << lorsqu'elle sanctionne une règle destinée à protéger une partie de l'acte 81 >>. Ici l'exception doit être soulevée par les parties << in limine litis82 >> et devant la juridiction de

81 Lexique de termes juridiques.d.15è éd.p 424

82 Avant tout débat au fond

jugement. L'art 3 du CPP dispose à cet effet que la violation d'une règle de procédure pénale est sanctionnée par la nullité absolue lorsqu'elle préjudicie aux droits de la défense définis par les dispositions légales en vigueur. Porte atteinte à un principe d'ordre public.

Ainsi en est-il des PV dans lesquels n'ont pas été mentionnés les motifs de la garde à vue et les temps de repos qui ont séparé les interrogatoires, le jour et l'heure à partir desquels le suspect a été soit libéré, soit conduit devant le PR 83(art 124(c) du CPP). L'art 116 al 3 du CPP oblige, sous peine de nullité l'OPJ à informer le suspect de son droit de se faire assister d'un conseil et de son droit de garder silence dès l'ouverture de l'enquête préliminaire. Ces mentions doivent figurer sur le PV sous peine de nullité. Le PV est aussi nul en cas de surcharge, rature, renvoi non approuvé par le suspect (art 90 al 3 du CPP).

Le vice de procédure peut être invoqué par toute personne intéressée, et en priorité par le suspect dans le délai ordinaire des nullités absolues.

Mais il faut dire que le juge garde son pouvoir d'appréciation puisqu'il devra, pour accueillir le grief, s'assurer qu'il a porté atteinte à un principe d'ordre public ou préjudicie aux droits de la défense. Il n'y aurait donc pas lieu à annulation sans grief prouvé.

De même une perquisition qui ne respecte pas les dispositions de l'art 99 du CPP est nulle. L'art 100 du CPP dispose clairement que l'inobservation des formalités prescrites aux articles 93 à 99 est sanctionnée par la nullité de la perquisition. C'est dire que ce PV est nul. Toute méconnaissance des prescriptions de fond ou de forme est susceptible d'entraîner la nullité de la perquisition et des actes subséquents si elle a causé un préjudice à la personne concernée84

83 TIMTCHUENG (M.) et ASSONTSA (R.), op.cit, pp 108-109

84 Cass. Crim. 17 septembre 1996, Véraldi et a. : Juris Data n° 003917, 21 mars 1995. Delon et a. : Rév. Pr. Coll., juin 1995, n° 144 in GUINCHARD (S) et BUISSON (J), op. cit. p. 347

Qu'en est-il des cas pour lesquels le CPP n'a rien prévu ? L'exemple est celui d'un certain nombre de mentions auxquelles le CPP n'attache pas la nullité des PV qui les contiennent ou même celui des gardes à vue qui excèdent la durée fixée par la loi. En se référant à une interprétation a contrario de l'article 3 du CPP, on doit pouvoir dire qu'il n'est pas nécessaire que la nullité ait été prévue, il suffit qu'il y ait violation des droits de la défense, en tout cas comme en droit français, que la violation de la formalité prévue porte atteinte aux droits de celui qui l'invoque ou que la recherche de la vérité s'en trouve viciée85.

2-La portée de la nullité

Il est important de souligner que les actes frappés de nullité font l'objet d'un retrait matériel du dossier de la procédure et ne peuvent être utilisés contre la personne concernée sous peine de poursuite en dommages intérêts contre l'auteur d'une telle utilisation. Il est formellement interdit d'y puiser des renseignements contre la personne concernée (art. 5 du CPP). Mais est-il permis d'en tirer des éléments en sa faveur, malgré l'annulation ? Il faut noter que le législateur pénal a voulu selon nous protéger la victime de l'irrégularité et non pas de la sanctionner.

L'autre réserve quant à l'effet de l'annulation est celle sus évoquée, prévue par l'article 100 al. 2 du CPP, aux termes duquel les objets saisis au cours d'une perquisition déclarée nulle peuvent être admis comme pièces à conviction s'ils ne font l'objet d'aucune contestation.

Quant à l'étendue proprement dite de la nullité, la question qui se pose est celle de savoir si cette sanction n'atteint que l'acte litigieux ou si elle s'étend à toute la procédure subséquente. Sauf disposition légale contraire, la portée des effets de l'annulation est déterminée par la juridiction qui la prononce (art 263 al 2 et 281 al2 CPP).

85M. TIMTCHUENG et R. ASSONTSA, op.cit, p. 109

On retrouve une application de cette règle à l'article 124 al 4 du code de procédure pénale et aux termes duquel l'inobservation des règles relatives à l'interrogatoire d'un suspect gardé à vue, et de celles relatives à l'établissement des procès-verbaux subséquents, entraîne la nullité de toute la procédure d'enquête. Et ceci sans préjudice des sanctions contre l'auteur de l'acte86.

In fine il faut dire que les actes accomplis par un OPJ hors de son ressort territorial ou du ressort territorial du parquet où il exerce ses fonctions non autorisés par le PR de son ressort sont nuls ( art 110 al 1 du CPP ).

B- Les sanctions portant sur la personne de l'OPJ

Nous avons ici les sanctions civiles (1), disciplinaires (2), et pénales (3).

1- Les sanctions civiles

Selon les dispositions de l'article 1382 du code civil, «tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».Cette réparation prend la forme des dommages et intérêts à l' encontre de l'OPJ fautif87

En ce qui concerne la garde à vue abusive dont a été victime le suspect, l'article 236 du CPP dispose que toute personne ayant fait l'objet d'une garde à vue ...abusive peut, lorsque la procédure aboutit à une décision de non-lieu ou d'acquittement devenue irrévocable, obtenir une indemnité si elle établit et qu'elle a subi du fait de sa détention un préjudice actuel d'une gravité particulière. Constitue une garde à vue ou une détention provisoire abusive au sens de l'alinéa 1 ci-dessus : la violation par le PR ou le juge d'instruction, des dispositions des art 218 à 235, 258 et 262 du CPP.

86 Y. MBUNJA « les droits de la défense dans le nouveau code camerounais de procédure pénale », in Annales de la FSJP, op. cit. pages 74 et 75.

87 Dans l'affaire MP c/ EPANDA Richard, officier de police, le juge a condamné ce dernier à 100.000 FCFA d'amende et à 343.643 FCFA de dommages intérêts pour blessures légères au TPI de Bamenda.

A ce propos comment attaquer les gardes à vue abusives du PR ? Comme nous l'avons soulevé plus haut, dans la pratique, le PR signe le plus souvent des bons de garde à vue .Et lorsqu'elles sont abusives, le suspect peut-il aussi engager la responsabilité du PR ?

Nous croyons que cela est possible même si la loi ne le précise pas expressément. Revenant sur l'art 236, nous pouvons relever que le suspect qui a passé plus de 08 jours en garde à vue ne peut revendiquer une indemnité s'il a été mis en liberté après. Il ne peut le faire que s'il a une décision de non-lieu ou d'acquittement devenue irrévocable. Cette situation rend l'application de l'article 236 très difficile. En plus l'indemnité est à la charge de l'Etat qui peut exercer une action récursoire contre l'agent fautif. Le plus difficile est encore que cette indemnité est allouée par décision d'une commission qui statue en premier ressort.

La commission est saisie par voie de requête, dans les 06 mois de la cessation de la garde à vue, de la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive.

L'appel peut se faire devant la chambre judiciaire de la Cour Suprême. Son arrêt n'est susceptible d'aucun recours. Les délais d'appel sont ceux prévus pour le pourvoi en matière civile88.

Il est à noter ici qu'aucun délai n'est imparti à la commission d'indemnisation pour prononcer sa décision après sa saisine. Ce qui risque de rendre cette machine très lente comme c'est le cas pour notre bureaucratie.

Comme nous l'avons dit un peu plus haut, le fondement légal de la responsabilité civile (de l'OPJ) est l'art. 1382 du code civil. Le juge judiciaire est parfois amené à prononcer à l'égard de l'Etat et de l'agent (l'OPJ) poursuivi l'obligation de réparer solidairement le préjudice subi par la victime. Ainsi l'Etat pourra se retourner contre l'OPJ par le biais de l'action récursoire. C'est une mesure qui vise à donner à la victime la certitude du recouvrement de la créance. L'Etat,

88 Soit 30 (trente) jours à compter du lendemain de la signification.

personne morale, peut difficilement disparaître et est à même d'honorer à ses engagements89, même s'il s'écoule de nombreuses années. Ce qui est tout le contraire de son agent90. Mais nous devons aussi noter pour le déplorer, qu'il n'y a pas d'exécution forcée contre l'Etat, ce qui rend l'indemnisation ici plus théorique que pratique.

La violation des droits du suspect peut être appréciée par le juge civil ou par le juge judiciaire dans la condamnation de l'OPJ à payer les dommages et intérêts. Dans ce cas le préjudice peut être moral (a), matériel (b) ou corporel(c). Ce préjudice peut même parfois être moral, corporel et matériel.

a- Le dommage moral

L'article 1382 du code civil aux termes duquel toute personne qui de par sa faute aura causé à autrui un dommage est obligée de le réparer s'applique bien au dommage moral. C'est sur le fondement de cette disposition que le juge peut décider que la douleur éprouvée soit par la victime directe, soit par ses ayants droits puisse mériter réparation. Le dommage moral est constitutif d'une atteinte à un droit de la personnalité. Ce dommage moral peut être la perte d'une chance escomptée, le préjudice esthétique, agrément etc. L'indemnité allouée à la victime en pareille occurrence est baptisée en droit le << pretium doloris91 » (le prix de la douleur). Cette réparation prend la forme des dommages et intérêts à l'encontre de l'officier de police judiciaire fautif92.

89 La Cour d' Appel du Sud a condamné le nommé BOUBAKARI MODIBO pour coups mortels à 2 ans d'emprisonnement ferme avec sursis pendant 5 ans et à payer aux parties civiles la somme de 10 500 000 FCFA à titre de dommages intérêts. La DGSN a été déclarée civilement responsable des condamnations civiles.

90C. NDI, la responsabilité des agents de police pour violation des droits de l'Homme dans le cadre du maintien de l'ordre public au Cameroun, mémoire DEA, campus numérique, Yaoundé, 2007, p.69

91 Locution latine signifiant << le prix de la douleur. Elle désigne les dommages et intérêts accordés en réparation des dommages physiques et moraux subis par une personne.

92 Affaire MP et AYISSI MESSI c/ OLAMA Laurent et AMBELLIE Zacharie, policiers, poursuivis pour torture. A
l'audience du 18 avril 2007, ils ont été déclarés coupables et condamnés à 02 ans d'emprisonnement avec sursis

b- Le dommage matériel

Le dommage matériel est une atteinte aux biens. C'est biens peuvent être détruits, détériorés, ou même se perdre par le fait de l'officier de police judiciaire ou de ses collaborateurs. Certains vont même jusqu'à arracher les objets mis en consigne par le suspect, volent les biens saisis. Nous pouvons aussi citer les cas de rétention sans droit de la chose d'autrui. Tous ces agissements sont susceptibles d'être perçus comme des violations des droits de la personne humaine, source d'un probable responsabilité civile des officiers de police judicaire.

c- Le dommage corporel

Le dommage corporel résulte d'une atteinte à l'intégrité physique93. L'officier de police judiciaire est tenu de réparer le préjudice qu'il a causé, c'est-à-dire les douleurs physiques qu'il a fait endurer à la victime. Cette réparation couvrira tous les frais occasionnés par celles-ci (achat de médicaments, frais d'hospitalisation, d'examen médicaux etc.). Le corps humain étant le support de la vie, les atteintes à l'intégrité corporelle menacent l'existence. La torture peut même parfois aboutir au décès du suspect94. Aussi les réparations civiles prononcées par le juge sontelles à la hauteur du préjudice subi95.

pendant 03 ans et à 50.000 FCFA d'amende chacun et à payer 2 425 000 FCFA de dommages intérêts au TPI d' Ebolowa.

93 L'OPJ EPANDA Richard est poursuivi devant la Cour d'Appel du Nord-Ouest pour blessures simples.

94 Ce fut le cas du jeune NDJOCK MAAH Emile dont nous avons parlé plus haut. Ce suspect avait trouvé la mort après avoir été torturé par des policiers au commissariat de sécurité publique du 3ème arrondissement à Yaoundé en 1997.

95 Affaire MP c/ NGONJO Collins, officier de police, poursuivi pour torture. Cette affaire est pendante devant le TPI du Ndian.

2- Les sanctions disciplinaires

Au cours de l'enquête de police, l'OPJ peut être auteur de certaines infractions de droit commun, on parle aussi de la violation des droits du suspect. Toutes ces infractions peuvent ouvrir voie à une procédure disciplinaire qui, le plus souvent aboutit à des sanctions disciplinaires. C'est pour cette raison que l'article 122 al 5 du CPP dispose que tout manquement, violation, ou entrave à l'application des dispositions du présent article expose son auteur à des poursuites judiciaires sans préjudice, le cas échéant, des sanctions disciplinaires.

Ces sanctions disciplinaires sont le plus souvent prises par les chefs hiérarchiques de l'OPJ ou par le chef de corps de l'OPJ, dans le pire des cas par le Président de la République.

Parlant du chef hiérarchique, est-ce le PR qui dirige et contrôle les actes des OPJ, ou alors est-ce le chef hiérarchique c'est-à-dire le chef direct?

A ce sujet le CPP n'a pas apporté de réponse. Les sanctions disciplinaires jusqu'à ce jour sont prises pour certaines par le chef hiérarchique direct de l'OPJ (chef d'unité) et pour d'autres par le chef de corps ou le Président de la République. Chaque fois que la hiérarchie de l'OPJ est saisie et que les faits sont avérés, ce dernier est passible des sanctions disciplinaires96. Celles-ci varient selon que l'OPJ est de la gendarmerie (a) ou de la Sûreté Nationale (b).

a- Les sanctions disciplinaires contre l'OPJ de la gendarmerie

L'officier de police judiciaire de la gendarmerie ou ses collaborateurs, reconnu coupables de manquements, négligences ou faute professionnelles97 sont passibles de sanctions disciplinaires. D'après le décret n° 2007/199 du 07 juillet 2007 portant règlement de Discipline

96 Nous avons été habitués ces jours à la publication par radio, presse écrite et par la télévision des sanctions disciplinaires infligées aux policiers ou aux gendarmes par leurs hiérarchies respectives.

97 30 jours d'arrêts de rigueur ont été prononcés contre le maréchal des logis chef DAYBAYANSOU Gaston de la brigade Ter de Yagoua pour actes de violence ayant entraîné la mort d'un gardé à vue.

Générale dans les Forces de Défense98, les actes constituant des fautes disciplinaires sont regroupés en 06 (six) catégories. Cette catégorisation des fautes est suivie d'une hiérarchisation des sanctions selon que le concerné est gendarme subalterne (homme de rang) ou un sousofficier ou même un officier (supérieur ou subalterne). Une autre qualification (sanctions mineures et sanctions majeures) complète cette hiérarchisation de sanctions disciplinaires encourues par les gendarmes.

Nous pouvons citer à titre d'exemple en cas de fausse déposition dans une enquête de police judiciaire, les hommes de rang99 s'exposent à 45 jours de prison et les sous-officiers à 60 jours d'arrêts de rigueur100. En cas de négligence dans l'application des règles de protection du secret, 15 jours de cellule pour les hommes de rang et 30 jours d'arrêts simple pour les sous-officiers. Un gendarme qui tente de s'approprier des objets ou effets appartenant à autrui101, la sanction est de 30 jours de cellule pour les hommes de rang et 45 jours d'arrêts simple pour les sousofficiers102.

Cette liste de sanctions disciplinaires des OPJ gendarmes n'est pas exhaustive, ces quelques exemples ne sont qu'illustratifs car en définitive, c'est au chef hiérarchique que revient la décision d'apprécier et de faire appliquer la sanction disciplinaire.

b- Les sanctions disciplinaires contre l'OPJ de la Sûreté Nationale

En ce qui concerne les sanctions disciplinaires, la hiérarchie de l'OPJ de la police dispose d'une panoplie si l'on se réfère au décret n° 2001/087 du 12 mars 2001 portant statut spécial du

98 Voir aussi le Décret n° 60/280 du 31 décembre 1960 fixant les services de la Gendarmerie.

99 Les hommes de rang dans la gendarmerie sont constitués des gendarmes et des gendarmes majors (ce sont des grades).

100 L'adjudant chef EMINI EMINI en service à la Brigade de gendarmerie de Touboro a été sanctionné de 30 jours d'arrêts de rigueur et muté à la légion du Sud-ouest pour séquestration et abus de fonction.

101 Affaire MP c/ NDZOGA Célestine, commandant de Brigade, poursuivi pour abus de confiance : l'intéressé a détourné des biens saisis, l'affaire est pendante devant le TPI du Ndian.

102 20 jours d'arrêts de rigueur pour l'adjudant NJIENJOU Emmanuel pour escroquerie et tentative d'escroquerie.

corps des fonctionnaires de la Sûreté Nationale. Nous pouvons parmi les fautes disciplinaires citer les manquements aux consignes, les fautes relatives à la tenue et à la conduite, le manquement à la subordination hiérarchique, les négligences caractérisées et les fautes personnelles, les fautes contre l'honneur, le devoir de probité (article 94 décret suscité)103. L'article 94 du 12 mars 2001 in fine dispose que le supérieur hiérarchique de l'OPJ apprécie la gravité de la faute et prononce ou propose la sanction appropriée.

Pour ce qui est des sanctions, elles sont au nombre de 17(dix sept), regroupées par ordre de gravité croissante en trois catégories. Nous avons dans cette hiérarchie, les sanctions de première catégorie (la réprimande, le tour de service supplémentaire, la consigne, la cellule, la prison ou la mise aux arrêts de rigueur, la mise à pied sans traitement pour une durée de 1à 7 jours), les sanctions de deuxième catégorie (l'avertissement écrit, le blâme avec inscription au dossier, la mise à pied sans traitement pour une durée de 08 à 20 jours, la radiation du tableau d'avancement ou de la liste d'aptitude, le retard à l'avancement d'une durée d'un (01) an), enfin les sanctions de troisième catégorie (l'exclusion temporaire du service pour une durée de trois (03) mois à un (01) an, l'abaissement d'échelon, l'abaissement de grade, la révocation sans suspension des droits à pension, la révocation avec suspension des droits à pension, la révocation avec suppression des droits à pension).

Il faut noter pour terminer au niveau des sanctions que certaines sont prononcées par le chef du service utilisateur ou le chef d'unité de police sans consultation du conseil de discipline, il s'agit des sanctions disciplinaires de première catégorie (article 116 décret du 12 mars 2001). D'autres comme la radiation du tableau d'avancement et de retard à l'avancement d'une durée d'un an tout comme les sanctions de la troisième catégorie ne peuvent être prononcées qu'après

103 Comme mesures conservatoires, le Président de la République a prononcé le plus souvent des suspensions à l'encontre des OPJ nommés et le chef de corps (DGSN) pour les OPJ non nommés. Ainsi les commissaires de police pour ces fautes ont été suspendus pour trois mois, à savoir OBAM OBAM Jean Michel, BEKOM ESSOMBA François Alexandre, AMOUGOU ATANGANA Moise, OWONA ASSIGA Luc Roger. Dans le même sens, l'officier de police MENGOLO ONDOUA Guy Béatrice a été suspendu pour une durée de trois mois.

consultation du conseil de discipline. Les sanctions disciplinaires de la deuxième catégorie (l'avertissement écrit, le blâme104 avec inscription au dossier, la mise à pied sans traitement pour une durée de 8 à 20 jours) sont prononcées par le chef de corps de la Sûreté Nationale sans consultation du conseil de discipline. Les sanctions (la radiation du tableau d'avancement ou de la liste d'aptitude, le retard à l'avancement d'une durée d'un (01) an105) de la deuxième catégorie et la sanction (l'exclusion temporaire du service pour une durée de trois (03) mois à un (01) an) de la troisième catégorie sont prises par le chef de corps. Les sanctions (abaissement d'échelon, l'abaissement de grade, la révocation sans suspension des droits à pension, la révocation avec suspension des droits à pension, la révocation avec suppression des droits à pension) de la troisième catégorie relèvent de la compétence de l'autorité investie du pouvoir de nomination à savoir le Président de la République (art 120 in fine du décret du 12 mars 2001).

Il revient en ce qui concerne les sanctions disciplinaires, au chef hiérarchique de les apprécier et de les faire appliquer au contraire des sanctions pénales dont le prononcé et l'application sont garantis par le juge judiciaire.

3- Les sanctions pénales

Le juge judiciaire dans le prononcé de sanction, dispose d'une gamme variée de possibilités. Ainsi l'OPJ auteur des infractions telles que l'atteinte à l'intégrité physique (torture (art 132 bis CPC), coups et blessure, meurtre, homicide etc.)106, violences et voies de fait volontaire (coups mortels (art 278 CPC)), atteintes aux libertés (arrestations arbitraire,

104 L'OPJ EKOUMA Fils François en service au commissariat de sécurité publique du 2è arrondissement de la ville de Dschang a eu un blâme pour violence envers une personne conduite au poste.

105 L'OPJ FOTSO Jean Pierre a eu le retard à l'avancement d'un an pour mauvaise utilisation d'une arme.

106 Affaire MP c/ MEZEDJO Eric, NGAMESSI, TSAPI, ZENE Emile et NDOUMBE, gendarmes en service à l'Escadron n° 30 de l' Etat Major de Gendarmerie de Maroua, inculpés de séquestration, viol, blessures légères et omission de porter secours. Cette affaire est à l'information judiciaire devant le juge d'instruction du TPI de Maroua.

séquestrations (art 291 CPC)107, violation de domicile (art 299 CPC), atteintes à la fortune d'autrui (vol art 318 CPC), rétention sans droit de la chose d'autrui), corruption, concussion108, s'expose à des sanctions pénales. Ces mesures vont des sanctions principales (a) aux peines accessoires (b).

a- Les sanctions principales

Au regard du code pénal camerounais, son art 18 (nouveau, loi n° 90/061 du 19 décembre 1990 portant modification de certaines dispositions du code pénal), dispose que les peines principales sont la peine de mort, l'emprisonnement et l'amende.

La peine de mort : la peine de mort demeure un sujet d'une brûlante actualité au sein de l'opinion nationale et même internationale. Le Cameroun fait encore partie du bastion des Etats qui continuent à maintenir cette peine. Aux termes de l'article 23 du CPC, le condamné à mort est exécuté par fusillade ou par pendaison selon l'arrêt portant condamnation.

L'exécution est publique, sauf s'il en est autrement décidé par la décision de rejet du recours en grâce. Le corps du supplicié est remis à sa famille si elle le réclame, à charge pour elle de le faire inhumer sans aucun appareil. Le PV d'exécution et éventuellement un communiqué officiel peuvent être publiés dans la presse.

Un décret fixe l'application de l'art 23 précité109. La décision de rejet de recours en grâce est transmise pour l'exécution par le ministre de la justice au PG près la Cour d'Appel dans le ressort de laquelle le condamné est détenu. L'exécution doit intervenir dans les meilleurs délais. Le gouverneur de région saisi par le PG fixe de concert avec ce dernier les lieu, date, heure de

107 Nous pouvons citer à titre illustratif l'affaire MP c/ ENGUENE Magloire, ex-commissaire de l'Emi-immigration de Garoua, inculpé de blessures et séquestration, cette affaire est encore pendante devant le TPI de Garoua.

108 Voir à ce titre le code pénal camerounais et les différentes peines prévues par le législateur.

109 Publié dans le CPC aux pages 26 à 30.

l'exécution. A ce titre, il prend toutes mesures utiles en requerrant la force armée pour assurer l'exécution de la sentence.

Le rejet du recours en grâce est notifié au condamné par le PG ou son représentant immédiatement avant l'exécution110. Le même magistrat peut surseoir à l'exécution s'il lui est signalé des révélations d'une importance capitale pouvant être source d'erreur judiciaire. Toutefois, en prenant une telle décision, il doit immédiatement rendre compte au ministre en charge de la justice.

Ceux qui assistent à l'exécution sont : le PG ou son représentant, le gouverneur de région ou son représentant, un greffier désigné par le PG ou son représentant, un ministre de culte auquel appartient le condamné désigné par le PG, le personnel nécessaire à l'exécution et au caractère non public de ladite exécution, le ou les défenseurs du condamné. Ceux-ci pouvant assister à l'exécution.

En définitive, si le législateur pénal camerounais continue à maintenir la peine de mort, dans la pratique, et ce depuis environ vingt cinq ans, cette mesure n'est plus exécutée. Elle continue toutefois d'être infligée, mais l'exécution est suspendue de fait.

Dans la réalité, le Président de la République commue régulièrement ces peines en condamnation à vie. La montée en puissance des courants abolitionnistes de par le monde a amené nos dirigeants à mettre en veilleuse l'exécution des condamnations à mort. Nous pouvons aussi signaler que le maintien de cette peine de nos jours se justifie par son caractère hautement dissuasif et surtout comminatoire.

110 Ce droit de grâce présidentielle découle des prérogatives que lui confère l'al 7 de l'art 8 de la constitution du 18 janvier 1996 modifiée par la loi n° 2008/001 du 14 avril 2008. Il convient de souligner que l'exercice de ce droit constitutionnel par le Président de la République n'est possible qu'après consultation du conseil supérieur de la magistrature. Organe dont-il est par ailleurs le président.

L'emprisonnement : un OPJ poursuivi pour violation des droits du suspect dans le cadre d'une enquête de police peut, si le juge retient sa culpabilité être emprisonné111. Selon les dispositions de l'art 24 du code pénal camerounais, « l'emprisonnement est une peine privative de liberté pendant laquelle le condamné est astreint au travail sauf décision contraire et motivation de la juridiction ». Dans l'affaire MP c/ PETALE DJIWANG Michel, maréchal des logis en service à la Brigade de Gendarmerie de Meyomessala, poursuivi pour abus de fonction et blessures légères. Cet OPJ, par jugement du 28 août 2007, a été déclaré coupable et condamné à 24 mois d'emprisonnement ferme avec mandat d'arrêt à l'audience.

La durée de l'emprisonnement varie selon la nature de l'infraction et l'intime conviction du juge112 Ainsi pendant la durée de l'emprisonnement, l'OPJ condamné est astreint au travail sauf si le juge en a décidé autrement encore faut-il que la décision repose sur des arguments de fait et de droit. Si le travail, qui s'exécute souvent sous forme de corvée, est rémunéré, une partie de cette rémunération est reversée au condamné. L'art 25 de la loi n° 78/17 du 29 décembre 1978 sur le pécule dispose que 2/3 du travail du condamné sont affectés au trésor Publique et le 1/3 sera à reverser au condamné à l'issue de l'exécution de sa peine c'est-à-dire au moment de sa libération113.

Les effets de l'emprisonnement quant à l'officier de police judiciaire sont multiples. Si ce dernier est condamné à une peine privative de liberté d'une durée inférieure ou égale à six (06) mois, ou encore avec sursis, celui-ci est repris en service après avoir purgé sa peine. Toutefois, il ne peut prétendre à un rappel de solde ni à une reconstitution de sa carrière.

111 Un jugement du TPI de la Ménoua a condamné deux policiers pour avoir torturé et mis un citoyen en cellule les mains menottées. Voir TPI/jug n° 662 du 28 avril 2006, aff. Ministère Public et NANFACK Etienne c/ BISSENE AMOUGOU et EKOUMA Fils François inédit.

112 L'OP ETOUNDI a été condamné à 03mois d'emprisonnement ferme et 200.000 Frs d'amende, les autres policiers (KAM John, BIMOGA, GREDOUBAI) ont eu 05 ans de prison ferme pour torture. Voir jugement n° 381/crim du 26/08/2003 du TGI du Mfoundi.

113 Mais il y a lieu de souligner que ce pécule est rarement attribué au condamné, le décret d'application de la loi 78/17 suscitée notamment sur les modalités de gestion du pécule n'ayant jamais été pris, la gestion de ces fonds reste très opaque.

En cas de condamnation devenue définitive pour crime ou délit touchant à la torture ou à la probité, notamment pour vol, faux, escroquerie, corruption, détournement de derniers publics, abus de confiance, l'OPJ ne peut être repris en service. Par ailleurs, l'OPJ (de la Sûreté Nationale) condamné à une peine privative de liberté supérieure à six mois, devenue définitive, est traduit devant le conseil de discipline.

L'amende : c'est une sanction pécuniaire obligeant le condamné à verser une certaine somme d'argent au Trésor Public114.

b- Les peines accessoires

Ces peines sont qualifiées d'accessoires parce qu'elles se greffent aux peines principales. Ce sont notamment les déchéances de premier type ainsi que celles de deuxième type.

Les déchéances : Après avoir prononcé la peine principale contre l'OPJ, le juge peut aussi prononcer des déchéances qui font perdre au condamné certaines qualités ou l'exercice de certaines fonctions. L'article 30 du CPC énumère un certain nombre de déchéances. Celles-ci consistent dans la destitution et l'exclusion de toute fonction, emploi ou officier public, l'incapacité d'être juré, assesseur, expert, juré expert. Dans l'interdiction d'être tuteur, curateur, subrogé tuteur, conseil judiciaire, si se n'est de ses propres enfants, ou d'être membre d'un conseil de famille. Les déchéances peuvent aller jusqu'à l'interdiction du port de toute décoration, de servir dans les forces armées ou de tenir une école ou même d'enseigner dans un établissement d'instruction ou d'occuper des fonctions se rapportant à l'éducation ou à la garde des enfants.

114 Voir à ce sujet le « Lexique de termes juridiques 7ème éd. D. Page 28.

Les autres peines accessoires : il s'agit de la publication du jugement et la confiscation du <<corpus delicti ». La publication du jugement est une mesure qui vise à faire connaître à l'opinion la condamnation d'un individu par une juridiction répressive. Par son caractère public, la mesure est de nature à entamer l'honorabilité de la personne poursuivie et finit par jeter du discrédit sur elle dans la société. Dans les cas où le tribunal ou la cour a ordonné la publication de sa décision, celle-ci est affichée pour une durée de deux mois au maximum en cas de condamnation pour crime ou délit.

La confiscation du <<corpus delicti » ou corps du délit vise à empêcher la poursuite même par d'autres personnes de la commission d'une infraction avec les mêmes objets ou instruments. Selon les dispositions de l'art 35 du CPC, << en cas de condamnation pour crime ou délit, le tribunal ou la cour peut ordonner la confiscation de tous les meubles ou immeubles appartenant au condamné et saisis, lorsque ceux-ci ont servi d'instrument pour commettre l'infraction ou qu'ils en sont le produit ». Par exemple des instruments ayant servi à la torture d'individus peuvent être confisqués tout comme peuvent l'être des substances chimiques ayant servi à droguer le suspect.

En résumé, nous allons dire ici que l'OPJ dans l'exercice de sa mission n'est pas au-dessus de la loi en cas d'infraction de sa part, il peut être poursuivi en justice et être frappé des sanctions civile, disciplinaire et même pénale. Pour ce qui est des poursuites pénales, la procédure judiciaire contre l'OPJ n'est pas la même que celle du justiciable ordinaire.

SECTION 2 : LA SELECTIVITE QUANT A L'ORGANE EN CHARGE DE
L'ENQUETE DE POLICE JUDICIAIRE CONTRE L'OPJ ET LE PRIVILEGE DE
JURIDICTION

Avant de voir le privilège de juridiction accordé à l'OPJ par le code de procédure pénale (paragraphe 2), nous allons étudier la sélectivité quant à l'organe en charge de l'enquête de police judiciaire contre l'officier de police judiciaire (paragraphe 1).

Paragraphe 1 : La sélectivité quant à l'organe chargé de l'enquête de police judiciaire
contre l'OPJ

Cette sélectivité est contenue dans une instruction inter ministérielle (A) et nous verrons le cas particulier de la Sûreté Nationale (B).

A- L'instruction inter ministérielle

Une instruction datant du 16 octobre 1964 inter ministérielle sur les rapports entre la gendarmerie115, l'armée et la police a décidé dans sa partie III sur les règles de compétence en ce qui concerne les infractions aux lois et règlements qu'en cas d'incident ou d'infraction auquel des gendarmes ou des militaires et des civils, sont mêlés, l'enquête revient à la gendarmerie. Toute plainte ou dénonciation adressée par des civils à la police pour un incident ou une infraction mettant en cause un gendarme ou un militaire est envoyée au service de gendarmerie compétent.

115 Circulaire interministérielle n° 8/VP/6/INT/2308/MINFA/362/PS/S du 16 octobre 1964, détermine la compétence de chacun des deux corps uniquement en fonction de l'auteur de l'infraction.

En cas d'incident ou d'infraction mettant en cause des policiers et des civils la poursuite de l'enquête revient à la police. Toute plainte ou dénonciation adressée à la gendarmerie pour un incident ou une infraction mettant en cause un policier est envoyée au service de la police compétent.

En cas d'incident ou d'infraction mettant en cause des gendarmes, des militaires,des policiers et des civils, la gendarmerie et la police sont respectivement saisis des faits intéressant leurs représentants116.

La finalité même de cette instruction a pour but de mettre un terme aux incidents malheureux (qui sont souvent arrivés) entre ces différents corps afin que règne entre eux une franche coopération dans l'intérêt supérieur de la Nation camerounaise.

B- Le cas particulier de la Sûreté Nationale

Dans le cas particulier de la Sûreté Nationale, il convient de noter qu'après avoir effectué les diligences relatives à l'enquête de police judiciaire contre l'officier de police judiciaire, le chef de corps dispose d'un pouvoir d'appréciation de l'opportunité de déférer le policier fautif. Ainsi une circulaire du Délégué Général à la Sûreté Nationale n° 0013/DGSN du 11 mars 1982 au sujet des poursuites judiciaires contre les fonctionnaires de la police dispose que : « en cas de poursuites judiciaires dirigées contre les fonctionnaires de la police, soit pour des faits qui leurs sont personnellement imputables, soit pour des actes accomplis dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, ceux-ci ne peuvent être déférés au parquet qu'après avis du chef de corps auquel la procédure doit être communiquée d'urgence pour lui permettre de statuer ». Ce que nous pouvons noter ici c'est que cette circulaire avait été prise au moment du parti unique, période où l'Etat était tout puissant, on ne parlait pas de droit de l'Homme et les libertés

116 Voir à ce sujet cette circulaire pour plus de détails sur les règles de coopération entre la Sûreté Nationale, la gendarmerie et l'armée.

individuelles n'étaient pas garanties. Le DGSN qui doit statuer en dernier ressort si le policier doit être déféré ou non au parquet, peut opter pour la dernière solution et que fera la victime ? Cette circulaire permet au chef de corps de la police de bloquer le contentieux pénal des fonctionnaires de police. Cela pose un sérieux problème. Mais nous souhaiterions que le chef de corps de la police laisse la justice s'exercer en toute liberté en évitant de l'entraver. Cette circulaire ne cadre pas avec le contexte actuel de notre société. Il faut aussi noter que à cette période une tension régnait entre la police et la justice au point où un chef d'unité était allé enlever certains de ses collaborateurs traduits en justice en pleine audience. Mais de nos jours cette circulaire a du mal à s'appliquer car nous sommes dans un Etat de droit et la garantie des libertés individuelles est son credo. Nous sommes tous égaux devant la loi.

Paragraphe 2 : Le privilège de juridiction accordé à l'OPJ et l'efficacité relative des
poursuites pénales contre l'OPJ réfractaire

Le législateur pénal compte tenu de la difficile mission qu'il a accordée à l'OPJ, a permis à ce dernier de bénéficier du privilège de juridiction en cas de poursuite pénale contre lui (A) ce qui pose le problème de l'efficacité relative des poursuites pénales contre l'OPJ réfractaire (B).

A- Le privilège de juridiction accordé à l'OPJ

L'article 634 al 2 du CPP dispose que lorsqu'un préfet ou autre chef de circonscription administrative ou un officier de police judiciaire a commis un crime ou un délit dans l'exercice et même hors de l'exercice de ses fonctions, le PR transmet le dossier au PG pour en saisir le Président de la Cour d'Appel compétente. Celui-ci désigne le parquet chargé de diligenter les poursuites et la juridiction de jugement pour en connaître.

L'al 3 du même article précise que dans les cas prévus aux al 1 et 2, la poursuite, l'instruction et le jugement doivent être confiés à de juridictions de l'ordre judiciaire autres que celle de la province (région), département, de l'arrondissement, ou du district117 selon le cas, où le mis en cause exerce ses fonctions.

L'OPJ rejoint dans ce cercle très fermé les magistrats qui étaient les seuls à bénéficier du privilège de juridiction avant l'avènement du CPP. Ce traitement privilégié s'analyse par le fait que lorsqu'un OPJ a commis un crime ou un délit dans l'exercice et même en dehors de l'exercice de ses fonctions, il n'est pas justiciable du tribunal dans le ressort duquel il est en service. Les avocats de la DGSN ont soulevé avec succès l'incompétence du juge du TPI centre administratif de Yaoundé dans les affaires contre CP Pamela FOMENIA et inspecteur de police principal INACK d'une part et CP NKOUIDJA et inspecteur de police Brichard TAGOUE d'autre part pour privilège de juridiction. Dans les deux affaires, les CP NKOUIDJA et PAMELA en tant qu'OPJ ont bénéficié des dispositions de l'art 634 (2) du CPP sur le privilège de juridiction. Le PR devrait transmettre leurs dossiers au PG afin qu'ils saisisse le Président de la Cour d'Appel du centre, celui-ci pourrait désigner le parquet chargé de diligenter ces procédures et la juridiction de jugement compétente pour en connaître. Le président de la Cour d'Appel pourrait envoyer ces affaires dans un département autre que celui du Mfoundi mais à l'intérieur de la région du centre car ces OPJ sont en fonction dans le département du Mfoundi. Le privilège de juridiction a aussi guidé le juge dans l'affaire MP c/ TOCHE KAMGA, commissaire de police, ex-commandant du groupement de la voie publique au commissariat central de Sangmélima, poursuivi pour torture, abus de fonction, séquestration arbitraire. A l'audience du 13 juin 2008, le tribunal s'est déclaré incompétent pour privilège de juridiction et a

117 Tous les districts ont été érigés en arrondissements et les provinces ont changé de dénomination, elles sont devenues des régions. Il n'existe plus de district au Cameroun.

renvoyé le Ministère Publique à mieux se pourvoir118. Qu'en est-il des OPJ qui ont une compétence régionale ou nationale ?

Le privilège de juridiction se justifie en raison de la très grande étendue de pouvoirs dont jouissent les OPJ. En les jugeant dans leur circonscription de fonction, cela peut être de nature à soulever des passions dans les deux sens. Dans un sens, l'opinion peut lui être favorable s'il avait bonne réputation, dans l'autre, elle peut lui être défavorable, son action dans la localité n'ayant pas été très appréciée.

En tant qu'auxiliaire du PR, un manque d'objectivité dans la recherche de la vérité peut se faire ressentir si c'est le même parquet qui est encore saisi afin de diligenter la procédure. Le privilège de juridiction permet dans l'esprit de la loi d'avoir plus d'équité et d'objectivité que ce soit à l'égard de l'OPJ fautif que pour la partie victime.

Mais d'un autre côté, le privilège de juridiction va pousser les justiciables à trop dépenser. A titre d'exemple, un OPJ en service dans le département du Moungo avec compétence départementale voit l'affaire contre lui envoyée dans le département de la Sanaga Maritime ou du Nkam. Le déplacement de l'OPJ et de la partie civile va coûter bien cher surtout que ce n'est pas à la première audience que l'affaire sera tranchée. Nous pensons que les juges vont le plus souvent prendre en compte la situation d'indigence qui caractérise le justiciable camerounais pour vite trancher.

B- L'efficacité relative des poursuites pénales contre l'OPJ réfractaire

La procédure pénale contre l'OPJ réfractaire n'est pas aussi simple. Ceci se justifie par les contours et les étapes que doivent traverser les victimes ou leurs ayants droits afin que ce dernier soit traduit devant la justice. Comme nous le constatons, les poursuites contre l'OPJ ne

118 Voir Rapport du Ministère de la Justice sur l'état des droits de l'Homme au Cameroun en 2007, page 34.

peuvent vraiment aboutir qu'avec la bénédiction de son chef de corps. Le plus souvent l'OPJ est affecté loin du lieu où il a commis son forfait dit-on pour sa propre sécurité alors qu'au fond c'est dans le but de le soustraire à la justice. L'officier de police judiciaire qui bénéficie selon la loi du privilège de juridiction, chaque fois qu'il est cité devant un tribunal, doit recevoir l'assentiment de sa hiérarchie pour s'y rendre. Cette situation relativise l'efficacité des poursuites contre l'OPJ réfractaire. En réalité, ce dernier n'est pas un justiciable ordinaire. Il faut noter au terme de cette analyse que la hiérarchie de l'officier de police judiciaire joue un rôle très important dans ce processus.

CONCLUSION GENERALE

L'OPJ joue un rôle très important dans le déroulement du procès pénal. Il constate les infractions, rassemble les preuves, recherche les auteurs et complices et, le cas échéant, les défère au parquet, tant qu'une information judiciaire n'est pas ouverte.

L'officier de police judiciaire exerce sa mission de police judiciaire dans le respect des lois et règlements dans les limites territoriales où il exerce ses fonctions habituelles.

L'OPJ a le pouvoir d'opérer dans le cadre de l'enquête préliminaire ou celle du flagrant délit selon des attributions déterminées.

Dans le cas d'urgence ou de crime ou de délit flagrant, le législateur a prévu l'extension de la compétence de l'OPJ, afin de lui permettre de poursuivre ses investigations dans le ressort où il n'exerce pas habituellement ses fonctions.

Au problème de savoir quelles sont les garanties prévues par le code de procédure pénale afin de permettre à l'officier de police judiciaire d'accomplir sa mission dans le respect de l'équilibre entre les droits de la personne poursuivie et l'intérêt de la société, il semble judicieux de faire un constat : le législateur pénal de 2005 dans sa nouvelle «distribution des cartes» aux acteurs du procès pénal a mis un point d'honneur sur le cas de l'OPJ.

Cette consécration a permis à ce dernier de voir son pouvoir se renforcer.

Il apparaît clairement qu'entre la nécessité de protéger la société contre la criminalité et le souci de préserver la dignité humaine y compris dans la personne des pire criminels présumés, se trouve tout simplement l'Homme119.

Dès lors, la conciliation de ces deux impératifs qui semble être la préoccupation du législateur dans le code de procédure pénale se résume à la recherche d'un équilibre délicat qui exige de la part de l'OPJ plus de professionnalisme et plus d'humanisme.

119 J.P.S NKENGUE, op. cit. p. 240

Face à cette exigence, la lutte contre l'impunité des personnels chargés de l'application de la loi notamment l'OPJ est de plus en plus mise en exergue par l'autorité étatique.

Le législateur pénal de 2005 a ainsi ménagé la carotte et le bâton en ce qui concerne l'OPJ. La carotte est considérée ici comme les pouvoirs très importants que le code de procédure pénale a consacrés à l'OPJ. Le bâton est l'ensemble des textes de lois qui sanctionnent les OPJ réfractaires.

Le CPP vient ainsi rompre avec les anciennes méthodes qu'utilisait l'OPJ dans l'exercice de ses missions. Certes, les vieilles habitudes ont la peau dure, mais l'OPJ est en train d'effectuer sa mue. Toujours est-il que le contexte et l'évolution de la société l'oblige à se vêtir de nouveaux habits afin qu'il ne soit pas en déphasage avec la réalité.

Tout ceci pourrait permettre à l'OPJ de mieux concilier la lutte contre la criminalité et le respect des droits de l'Homme afin que l'ordre public puisse régner durablement. L'OPJ doit faire sienne cette pensée de VAUVENARGUE selon laquelle : « on ne peut être juste si on n'est pas humain. ». Nous pouvons dire sans risque de nous tromper que le législateur pénal de 2005 a humanisé la procédure pénale au Cameroun. Reste aux différents acteurs de l'appliquer judicieusement car à quoi sert un bon texte s'il n'est pas mis en pratique.

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5- GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (Dir.), Lexique de termes juridiques, D. Paris 1988, 7è éd., 483 pages.

6- GUINCHARD (S.) et BUISSON (J), Procédure pénale, Paris Litec 2000, 864 pages

7- LARGUIER (J.), Manuel procédure pénale, 17ème éd. Paris, D. 1999, 254 pages

8- MANGIN (G.) (Dir.), Procédure pénale, nouvelle éd. Africaine, (Encyclopédie juridique) tome 10,1982, 352 pages

9- PRADEL (J.), Procédure pénale, 9ème éd. Paris Cujas 1997, 894 pages

10- RIVERO (J.), Les libertés publiques : Les droits de l'Homme, tome 1, 16ème éd., PUF 1991, 320 pages

II- OUVRAGES SPECIAUX

1- AHMADOU (O.), Code de Lois pénales, collection textes usuels, 2ème éd. PUA, 2006, 472 pages

2- AZIBERT (G.), Code de procédure pénale 2002, 14è éd., Paris Litec 2001-VII, 1570 pages

3- BLANDIN (J.), Le Bagage complet de l'agent de police judiciaire nouvelle éd., 1969, 490 pages.

4- BOUBOU (P.), Code de procédure pénale annoté et indexé et textes complémentaires, éd. avenir, Douala mai 2006, 509 pages.

5- CATHALA (F.), Cette police si décriée, éd. champ de mars 1971.

6- FAI NAPOLEON (Y.), La police judiciaire <<Mission », Yaoundé mars 2000, 285 pages

7- MARANGE (J.), Les libertés publiques, PUF, Paris, 6ème éd. 1995, 127 pages

8- PONDI (P.), La police au Cameroun, éd. CLE, Yaoundé 1988, 226 pages

9- SOCKENG (R.), Les institutions judiciaires au Cameroun 2è éd., groupe saint François, Douala 1998, 245 pages.

10- SOUOP (P.), Exécution des décisions pénales : commentaire du livre V du code de procédure pénale, 2007, PUA, 101 pages.

11-TCHAKOUA (J.M.), (Dir.), Les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise, 2007, volume 1, PUA, 394 pages.

III- ARTICLES

1- ANOUKAHA (F.), << La liberté d'aller et de venir au Cameroun depuis le nouveau code de procédure pénale », in Annales de la FSJP, université de Dschang, Cameroun, tome 11, 2007, pp 5-19.

2- BESSON (A), << La police judiciaire et le code de procédure pénale », D. 1958, pp 129-144.

3- BOKALLI (V.E.), << La protection du suspect dans le code de procédure pénale », Revue africaine des sciences juridiques, volume 4, pp 9-29.

4- NKENGUE (J.P.S.), << L' OPJ, l'enquête de police et la torture », in Les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise, 2007, volume 1, pp 223-240.

5- TCHAKOUA (J.M.), << La considération de l'intérêt social et de la paix publique en matière de poursuite : conjecture autour de l'article 64 du code de procédure pénale », in Les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise, 2007, volume 1, pp 81-104.

6- YAWAGA (S.), << La garde à vue », in Les tendances de la nouvelle procédure pénale camerounaise, 2007, volume 1, pp 55-79.

IV- THESES ET MEMOIRES

1- BEZAVATAK, << La garde à vue », mémoire de Maîtrise en droit privé, Ngaoundéré, 2001.

2- EBOUPEKE (L.) <<L'assistance judiciaire au Cameroun », thèse de doctorat 3è cycle, Yaoundé, 1988.

3- MINKOA SHE (A.), << Essai sur l'évolution de la politique criminelle au Cameroun », thèse de Doctorat en droit, Strasbourg, 1987.

4- NDI (C.), << La responsabilité des agents de police pour violation des droits de l'Homme dans le cadre du maintien de l'ordre public au Cameroun », Mémoire de DEA, Campus numérique, Yaoundé, 2007, 83 pages.

5- NGA ESSOMBA (S.T) <<La présomption d'innocence dans le procès pénal Camerounais », Mémoire de DEA, option Droit privé fondamental, 2004, Université de Douala, 77 pages.

6- SIL SIKANA (Y.A.F.), << Les Services de police et le respect des droits du suspect gardé à vue », Mémoire pour l'obtention du diplôme de commissaire de police, Yaoundé, 2003, 40 pages.

V- TEXTES JURIDIQUES

1- Loi n° 2005/007 du 27 juillet 2005 portant code de procédure pénale au Cameroun.

2- Loi n° 65-LF-24 du 12 novembre 1965 et loi n° 67-LF-1 du 12 juin 1967 portant code pénal au Cameroun.

3- Loi n° 2008/001 du 14 avril 2008 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 2 juin 1972.

4- Loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la constitution du 2 juin 1972.

5- Loi n° 2004/016 du 22 juillet 2004 portant création, organisation et fonctionnement de la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des libertés.

6- Code civil applicable au Cameroun, Jus and Data, 1998, 822 pages

7- Décret n° 2001/087 du 12 mars 2001 portant statut spécial du corps des fonctionnaires de la Sûreté Nationale.

8- Code d'Instruction Criminel et justice militaire 2ème éd. MINOS, 2002-2003, 680 pages

9- Décret n° 60/280 du 31 décembre 1960 sur le service de la Gendarmerie modifié par les Décrets n° 63/DF/3 du 8 janvier 1963 et n° 67/DF/75 du 21 février 1967.

10- Décret n° 2007/199 du 07 juillet 2007 portant règlement de discipline générale dans les forces de défense.

11- Loi n° 94/01 du 20 janvier 1994 portant régime des forêts, de la faune et de la pêche.

12- Ordonnance n° 72/5 du 26 août 1972 portant organisation judiciaire militaire, telle que modifiée par la loi n° 90/048 du 19 décembre 1990.

13- Décret n° 2002/003 du 04 janvier 2002 portant organisation de la DGSN.

14- Loi n° 2009/004 du 14 avril 2009 portant organisation de l'assistance judiciaire au Cameroun.

15- Code de procédure pénale applicable en France, 46e éd. Dalloz, 2305 pages

16- Décret n° 2001/181 du 25 juillet 2001 portant organisation de la Gendarmerie Nationale

VI- BIBLIOGRAPHIE ELECTRONIQUE - www. oboulot com. : mémoire on line

ANNEXES

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE 1

PREMIERE PARTIE : L'ETENDUE DE LA NOTION D'OFFICIER DE POLICE

JUDICIAIRE ET L'IMPORTANCE DE SES POUVOIRS MAIS

RELATIFS DANS LE CPP ..6
CHAPITRE 1 : L'ETENDUE DE LA NOTION D'OPJ ET L'IMPORTANCE DE SES

POUVOIRS DANS LE CPP

7

SECTION 1 : L'étendue de la notion d'officier de police judiciaire dans le CPP

8

PARAGRAPHE 1 : La diversité des personnes ayant la qualité d'OPJ

.8

A- L'extension de la qualité d'officier de police judiciaire à d'autres personnes

..8

1- Les OPJ relevant de la Gendarmerie Nationale

9

2- Les OPJ relevant de la Sûreté Nationale

.10

B- L'acquisition de la qualité d'OPJ par certaines magistrats

.11

PARAGRAPHE 2 : Certains fonctionnaires sont investis d'un pouvoir spécifique d'OPJ

.11

A- La détermination de ces corps de fonctionnaire

..11

B- Le domaine limité de leurs interventions

12

 

SECTION 2 : L'importance des pouvoirs de l'OPJ dans le cadre du procès pénal

13

PARAGRAPHE 1 : Les pouvoirs de l'OPJ avant toute saisine de l'autorité judiciaire

13

A- La diligence des principales enquête de police judiciaire

13

1- L'enquête préliminaire

13

a- Les caractéristiques de l'enquête préliminaire

.14

b- Les actes de l'enquête préliminaire

.16

 

2- L'enquête de flagrance

18

a- La détermination des infractions flagrantes

19

b- Les actes de l'enquête de flagrance

21

B- Les autres pouvoirs de l'OPJ dans le déclenchement de la poursuite pénale

29

PARAGRAPHE 2 : Les pouvoirs de l'OPJ après la saisine de l'autorité judiciaire

30

A- L'exécution des instructions du parquet et du juge d'instruction

30

1- L'exécution des instructions du parquet

31

2- Les délégations de pouvoir du juge d'instruction : la commission rogatoire

31

a- Définition de la commission rogatoire

32

b- Le domaine de la commission rogatoire 32

B- L'exécution des actes et décisions de justice 33

1- Les actes pénaux de justice 33

2- Les décisions de justice 34
CHAPITRE 2 : LES DIFFICULTES RENCONTREES DANS L'EXERCICE DES

POUVOIRS DE L'OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE 35

SECTION 1 : Le caractère limité du pouvoir de l'OPJ dans le CPP 35

PARAGRAPHE 1 : La prépondérance du pouvoir du Procureur de la République sur les actes

Posés par l'OPJ 35

A- Le pouvoir de direction des enquêtes de police par le PR ..36

B- Le remplacement de l'OPJ par le PR dans la phase policière du procès pénal ..37

PARAGRAPHE 2 : La valeur relative des procès verbaux dressés par l'OPJ .37

A- La valeur des procès-verbaux 37

B- La présence de l'OPJ à l'audience pour défendre ses PV 38

SECTION 2 : Les difficultés rencontrées par l'OPJ dans l'exercice de ses missions ..39

PARAGRAPHE 1 : les difficultés d'ordre matériel et personnel .39

A- Les difficultés sur le plan matériel ..39

B- La difficile adaptation du personnel 40

PARAGRAPHE 2 : Les difficultés face aux usagers 40

A- Le cas du suspect .40

B- Le cas du conseil .42

DEUXIEME PARTIE : LE CONTROLE ET LA RESPONSABILITE DE L'OPJ 44

CHAPITRE 1 : LE CONTROLE DE L'ACTIVITE DE L'OPJ ..45

SECTION 1 : Le contrôle hiérarchique 45

PARAGRAPHE 1 : Le contrôle exercé par les magistrats du parquet .45

A- Le contrôle exercé par le Procureur Général ..45

B- Le contrôle exercé par le Procureur de la République 47

1- Les manifestations du contrôle 47

2- Les limites du contrôle exercé par le PR 49

PARAGRAPHE 2 : Le contrôle administratif des supérieurs directs de l'OPJ ...50

A- Le contrôle interne ..51

B- Le contrôle par un service spécialisé ..51

SECTION 2 : Le contrôle exercé par les organes indépendants 52

PARAGRAPHE 1 : Le contrôle par la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des

Libertés (CNDH) 52

A- La procédure de contrôle .52

B- Une efficacité relative .53

PARAGRAPHE 2 : Les contrôles informels 54

A- Les contrôles officieux effectués par les avocats et les membres de la famille du suspect 54

B- Contrôle exercé par les associations privées de défense des droits de l'Homme Et les organisations non gouvernementales (ONG) 55
CHAPITRE 2 : LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE DE L'OPJ DANS

L'EXERCICE DE SES MISSIONS 57

SECTION 1 : La responsabilité de l'OPJ dans l'exercice de ses missions ..57

PARAGRAPHE 1 : Les cas de mise en oeuvre de la responsabilité de l'OPJ ..58

A- La violation de la procédure par l'officier de police judiciaire 58

B- La violation des libertés individuelles du suspect 58

PARAGRAPHE 2 : La diversité des sanctions prévues par les textes .59

A- La nullité des actes irréguliers 60

1- Le caractère de la nullité .60

2- La portée de la nullité .62

B- Les sanctions portant sur la personne de l'OPJ 63

1- Les sanctions civiles 63

a- Le dommage moral 65

b- Le dommage matériel 66

c- Le dommage corporel 66

2- Les sanctions disciplinaires ..67

a- Les sanctions disciplinaires contre l'OPJ de la Gendarmerie ..67

b- les sanctions disciplinaires contre l'OPJ de la Sûreté Nationale .68

3- Les sanctions pénales 70

a- Les sanctions principales .71

b- Les peines accessoires .74
SECTION 2 : La sélectivité quant à l'organe en charge de l'enquête de police judiciaire contre l'OPJ et le privilège de juridiction 76

PARAGRAPHE 1 : La sélectivité quant à l'organe chargé de l'enquête de police judiciaire

contre l'OPJ 76

A- L'instruction inter ministérielle ..76

B- Le cas particulier de la Sûreté Nationale 77
PARAGRAPHE 2 : Le privilège de juridiction accordé à l'OPJ et l'efficacité relative des

Poursuites pénales contre l'OPJ réfractaire 78

A- Le privilège de juridiction accordé à l'OPJ 78

B- L'efficacité relative des poursuites pénales contre l'OPJ réfractaire ...80

CONCLUSION GENERALE ...81

BIBLIOGRAPHIE 84

ANNEXES 88

TABLE DES MATIERES 89






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