Les zinnodes sont idéalement des entités d'une
centaine de personnes qui travaillent à une création
cohérente pour la Zinneke. Ce sont les unités narratives de la
parade. Elles sont parfois le fruit d'une seule association, mais de
préférence issues d'une collaboration. Elles sont normalement
indépendantes artistiquement et capables de s'organiser. Elles doivent
présenter un projet artistique original regroupant les
différentes disciplines travaillées avec soin. Cependant, les
coordinations artistique et associative du zinnopôle sont là pour
les soutenir en cas de besoin29. Les zinnodes sont de
préférence bruxelloises. Les groupes extérieurs sont
néanmoins les bienvenus à condition qu'ils ne suscitent pas
l'aide financière du zinnopôle30.
Au sein du zinnopôle sud-ouest31, la taille
idéale de chaque zinnode a été ignorée pour
respecter les collaborations spontanées qui se sont mises en place
dès la remise des projets pour la parade 2004. On retrouve donc de 35
à 270 personnes par zinnode ce qui n'a pas été sans
créer de problèmes.
Ce zinnopôle s'est composé de 6 zinnodes et
comportait environ 550 participants de tout bord et tout horizon.
Le monde est un village
La première zinnode est « le monde est un village
» portée par le CEC Pré en Bulle de Chapelle-lez-Herlaimont.
Elle montre les différents corps sociaux qui composent la ville : les
corps mobiles du jour et de la nuit représentant les travailleurs
toujours pressés, stressés et en équilibre instable, le
corps arc-en-ciel représentant la mutliculturalité urbaine, les
chapardeurs et les gens de l'ombre représentant les
28 Interview de France Gilmont du 14/05/04
29 Cahier des charges zinneke (annexe 2)
30 Interview de Katy Pylyser du 26/07/04. Il y a
cependant des exceptions à la règle, comme à la
majorité des règles zinnekes.
31 Je me suis ici concentrée sur le zinnopôle
sud-ouest que je connais mieux de par mon observation participante.
marginaux, tous surveillés et manipulés par les
maîtres de la ville et leurs serviteurs qui règnent du haut de
leurs échasses. Les techniques utilisées sont la jonglerie, le
monocycle, les échasses, la pyrotechnie et les percussions.
Le groupe avait participé à la Zinneke Parade
2000 au sein d'une collaboration avec une association de La Louvière.
L'entente entre les deux associations s'était fortement
érodée au cours de la préparation et c'est dans un
contexte de grande tension que s'était déroulée la
parade... de quoi couper l'envie de toute nouvelle tentative Zinneke. Mais un
artiste du groupe a travaillé seul dans un autre groupe pour la parade
suivante et les multiples possibilités offertes par la Zinneke l'ont
convaincu que << le Pré en bulle » ne devait pas se
décourager à cause d'une première mauvaise
expérience. La collaboration en 2003-2004 avec le zinnopôle
sud-ouest convint mieux au fonctionnement de l'association : écoute et
respect de la créativité de chacun, échange de
groupe...C'est finalement très satisfaits de leur deuxième
Zinneke que les animateurs et participants du Pré en bulle ont rejoint
Chapelle-lez-Herlaimont le 8 mai.
Suite à sa parade 2000, le groupe a
préféré mener un projet sans collaboration directe avec
d'autres associations. L'éloignement géographique est de plus un
handicap pour les coordinateurs associatifs du zinnopôle qui ne
connaissent que le milieu culturel de Bruxelles voire de leurs quartiers et ne
peuvent donc susciter des alliances en province.
Ordre et désordre
La deuxième zinnode est << ordre et
désordre » du CEC Ecole du Cirque de Gembloux et du CEC Atelier
Sorcier de Lonzée en partenariat avec le CC du Cinéma royal de
Gembloux. Ils ont traité le thème du corps dans la ville par
l'utilisation d'une tête géante séparée en deux
profils qui subit le cycle du réveil, de l'attaque des bactéries
urbaines, du grand nettoyage puis du sommeil. La collaboration entre l'Ecole du
Cirque et l'Atelier Sorcier a donné lieu à un échange de
techniques et de connaissances entre les circassiens et les plasticiens pour
aboutir à la réalisation d'un spectacle commun. Les deux
associations ont donc gardé leur public habituel mais ont élargi
leurs activités. Des jongleurs se sont ainsi retrouvés à
faire du papier mâché et des peintres du diabolo, chacun devant se
surpasser pour arriver à un niveau commun. Cette émulation est
bénéfique car elle repousse les
limites des capacités individuelles tout en confirmant
chacun dans la technique qu'il maîtrise le mieux.
Movimiento de ida y vuelta
La troisième zinnode se nomme « movimiento de ida
y vuelta », « mouvement d'aller-retour ». Elle est portée
par l'asbl Effusions de Culture et un grand nombre de partenaires : les
écoles communales P18 et P21, l'institut technique Marius-Renard, les
asbl Tonada, Mandacaru, Matalumbo, Couleurs Parents et Un Pont plus loin ainsi
que le Centre Espagnol de Formation et d'Action et la fanfare Nuevo Horizonte.
Sont ainsi regroupées des institutions qui ont un public
intéressé par une participation à la Zinneke et
différentes asbl d'artistes qui ont menés des ateliers ouverts
à tous ou dans les institutions précitées. Le projet
correspond tout à fait à la logique zinneke qui consiste
notamment à créer des rencontres et à amener les artistes
aux gens qui n'y ont pas forcément accès.
L'idée narrative est une reprise des carnavals andins
dans un mélange culturel des esprits mythiques européens et
latino-américains. On retrouve ainsi, autour des pèlerins
percussionnistes, des diables-guerriers danseurs, des sorciers et
sorcières, des elfes et des arlequins. Sont utilisées les
techniques de danses andines, de commedia dell'arte, de flamenco, de bombos et
aussi des créations vestimentaires. Cette zinnode fut une grande source
de soucis pour l'équipe de coordination au cours du processus. En effet,
outre des tensions dues à une histoire commune assez houleuse et
à des influences politiques (cf. 4.4.), le projet a mis
énormément de temps à se mettre en place surtout par
manque d'un coordinateur artistique au sein de la zinnode.
Cette zinnode est en fait assez paradoxale. D'une part, elle
a atteint le nombre idéal d'une centaine de participants, a lancé
des ateliers ouverts dans lesquels le processus de rencontres zinneke sont
souvent les plus forts, a fait travailler les artistes directement avec les
participants : autant de points qui font partie des objectifs de la Zinneke et
n'ont été réalisés au sein du zinnopôle
sud-ouest presque que dans cette zinnode et la zinnode
E-volution@bru.be. D'autre part,
ils n'ont que très peu respecté le travail sur le long terme, la
communication du projet aux partenaires pour une compréhension globale,
l'éveil de la créativité des participants, la
collaboration des participants aux différents préparatifs dont
les costumes... autant
d'autres idéaux de fonctionnement qu'affectionne
particulièrement le zinnopôle sud-ouest.
Recirqu'lâge
La quatrième zinnode est << recirqu'lâge
» de Cirqu'conflex en partenariat avec le CEC La Maison des Enfants, Le
Cactus, Le TCC Accueil et l'Ecole Marius-Renard. Ce groupe a voulu mettre en
évidence le cycle de la consommation, de l'utilisation brève et
frénétique au recyclage en passant par le ramassage des ordures.
Tout cela autour d'une planète bleue un peu perdue qui tente tant bien
que mal de reprendre le dessus. Les techniques utilisées sont les
percussions, la jonglerie, le monocycle, l'équilibre sur boule, les
échasses et la capoeira.
L'association Cirqu'conflex participe à la Zinneke
Parade depuis la première édition. Son parcours n'a pas toujours
été facile : en 2000, ils ont participé à un projet
très ambitieux regroupant beaucoup d'associations au sein du
zinnopôle sud et pour lequel ils ont eu l'impression de consacrer trop de
temps et d'énergie aux détriments de leurs autres
activités. En 2002, ils ont recommencé suite aux nombreuses
demandes de leurs participants dans un projet cette fois beaucoup plus modeste
et sans collaboration avec d'autres associations pour leur zinnode. En 2004,
ils ont gardé ce modèle restreint mais en l'ouvrant un peu aux
collaborations : celles qu'ils ont de manière récurrente au sein
de leur association comme l'école Marius Renard ou le TCC accueil mais
aussi à d'autres comme le Cactus et la maison des enfants.