Paragraphe IV : Les limites et difficultés du
CSST
Toutes les mines d'or industrielles ont respecté
l'obligation de mettre en place un CSST. Cependant, si dans certains cas le
CSST fonctionne bien en dépit de quelques limites et difficultés,
on est en droit de s'interroger sur l'effectivité du fonctionnement de
certains CSST dans les compagnies minières, qui n'arrivent pas à
tenir régulièrement des réunions ou qui se
réunissent sans élaborer des rapports ou des PV écrits.
C'est le cas du CSST de la mine de Youga qui a fait plus de douze
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mois sans se réunir. Selon le président du CSST
interentreprises de la mine d'Inata, l'absence de rencontre s'explique par
l'efficacité du service de SST dans la prévention des RP à
tel point qu'ils n'ont plus de problèmes de SST à traiter lors
des réunions mensuelles. Ils ont atteint en fin décembre 2011cinq
millions (5 000 000) d'heures de travail effectif sans AT nécessitant un
arrêt de travail25. Le dysfonctionnement des CSST de certaines
mines d'or peut s'expliquer suivant les cas par les limites et/ou
difficultés suivantes :
s le non engagement réel du chef d'entreprise et des
représentants du personnel à faire fonctionner le CSST dans
certains cas ;
s la méconnaissance des attributions et du rôle du
CSST par l'employeur et les membres même dans la plupart des cas ;
s la non implication du CSST dans la résolution des
problèmes de sécurité dans certaines mines ;
s le manque de motivation des membres du CSST ;
v' l'indisponibilité de certains membres lors des
réunions pour raison de repos hebdomadaire (break) ;
v' l'absence de programme d'activités et la non tenue
régulière des réunions ou activités du CSST ;
s la non élaboration de rapport ou PV écrit des
réunions tenues et l'absence de bilan annuel empêchant ainsi le
suivi et l'évaluation;
v' l'insuffisance des capacités des
représentants du personnel par manque de formations en SST et en
technique d'élaboration des rapports et PV. Les comités
n'arrivent pas à identifier les RP ni à procéder à
leur analyse. Ils ne sont pas en mesure non plus de faire l'analyse des
conditions de travail. En outre, vue leur faible niveau d'instruction en la
matière et la complexité des tâches, il leur est
très difficile de parvenir à une bonne inspection de
l'établissement ou visite des lieux de travail (VLT)26 ;
s l'absence de budget pour le CSST est une limite car toute
action onéreuse doit être inscrite d'abord dans les
prévisions de l'employeur ;
25Cumul du nombre d'heures de travail effectif de
l'ensemble des postes de travail. Un AT avec arrêt de travail a
été enregistré le 30/12/2011 à la mine d'or d'Inata
et ramène ainsi ce nombre à zéro à cette date
26article 5 de l'arrêté conjoint
N°2008-002/MTSS/MS/S G/DGSST du 06/01/2009
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s le non renouvellement du mandat dans les délais requis
après expiration.
A ces difficultés de fonctionnement que rencontrent les
CSST dans les mines d'or s'ajoutent certaines limites ou insuffisances de
l'arrêté conjoint N°2008- 002/MTSS/MS/SG/DGSST du 06/01/2009
sur les points suivants :
s l'inadaptation de la composition des CSST interentreprises
et celle des mines et carrières aux réalités des mines qui
regroupent plusieurs entreprises soustraitantes ou prestataires (article 7)
;
s les difficultés d'interprétation de
l'arrêté notamment l'article 7 point 2 (composition du CSST dans
les mines d'or industrielles en tant que chantiers à long terme) et la
désignation des représentants du personnel parmi les
délégués (du personnel et/ou syndicaux) on non, ce qui
peut être contesté27 ;
s la limitation du nombre des représentants du
personnel à six (06) ainsi que l'indexation aux catégories
professionnelles (agents de maîtrise, cadres et ouvriers,
employés) au regard des grands effectifs dans les mines d'or
industrielles;
s la protection accordée aux représentants du
personnel ne couvre pas tous les membres du CSST notamment l'ingénieur
sécurité des mines ou le responsable de sécurité de
la mine, le responsable du service de santé au travail et toute autre
personne ; une telle situation est de nature à limiter leur engagement
aux côtés des autres membres surtout quand il s'agit de relever
les manquements de l'employeur.
Ces difficultés de fonctionnement sont doublées
d'un climat social tendu et délétère dans certaines mines
d'or marqué par des revendications salariales et des grèves qui
handicapent le bon fonctionnement des CSST.
Cependant il est à noter que les dysfonctionnements des
CSST ne sont pas le propre du secteur minier seulement mais d'ordre
général. Selon les statistiques de la Direction
Générale de la SST en 2007, sur un total de 600 entreprises
assujetties à l'obligation de mettre en place un CSST, seulement 16%
environ ont effectivement mis en place des CSST. Par ailleurs, moins du quart
de ces CSST sont fonctionnels28.
27voir paragraphe 2 de la section I du présent
chapitre sur la composition du CSST 28 PNT, décembre 2011,
Page 13.
Selon Mr Ernest LOUROGO, chef du service prévention des
RP de la DRO/CNSS, sur une quarantaine de CSST mis en place dans la ville de
Ouaga, pas plus de trois qui fonctionnent bien et élaborent des
programmes d'activités qu'ils leur transmettent et tiennent
régulièrement des rencontres au cours desquelles ils sont
invités29.
Le CSST est une instance obligatoire dont la mise en place, la
composition et le fonctionnement sont règlementés. Malgré
les difficultés qui entachent son bon fonctionnement dans certains cas,
le comité, joue un rôle important dans la prévention des
risques. Contrairement à ceux qui pensent que le CSST est un doublon
inefficace voire inutile face aux spécialistes du service de
sécurité (ingénieurs de sécurité,
préventionnistes) et du service de santé (médecin et
infirmiers du travail) chargés de la prévention des RP, il
contribue énormément à la préservation de la
santé et la sécurité des travailleurs s'il est
composé de membres engagés, bien formés et qui l'animent
bien. Aussi, il y a tout intérêt à ce que cette instance ne
soit pas seulement une mise en conformité de plus, mais qu'elle soit un
lieu de dialogue, de discussion et de recherche de solutions. Son bon
fonctionnement devrait permettre la remontée des signaux d'alerte sur la
dégradation des conditions de travail et du climat social et donc de
permettre ainsi un traitement préventif des problèmes. Le CSST
devient alors un partenaire incontournable de la politique
générale de prévention de l'entreprise. Au regard de ce
qui précède, il y a nécessité de redynamiser les
CSST dans les mines d'or industrielles afin qu'ils puissent jouer pleinement
leur rôle. Quelles sont les solutions à apporter pour les
redynamiser ? Pour cela, dans le chapitre suivant nous suggérons des
perspectives de renforcement du rôle du CSST dans la prévention
des RP.
29 Propos recueillis lors de la 6ème
édition des 72h de prévention des RP de la CNSS du 14 au 16
décembre 2011 à Koudougou sur le thème : prévenir
les RP, un enjeu de productivité de l'entreprise
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