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Le Parlement et les engagements internationaux de l'état du Cameroun

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par Apollin KOAGNE ZOUAPET
Université de Yaoundé II - Master en relations internationales, option contentieux international 2009
  

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SECTION II : UN ROLE RESIDUEL ET RESTREINT EN DEPIT DE CERTAINES

PREROGATIVES RECONNUES

La principale intervention reconnue à l'Assemblée nationale dans la naissance des engagements internationaux est « l'approbation en forme législative » de l'article 43 de la Constitution (paragraphe I) même s'il s'est développé dans la pratique une diplomatie parlementaire dont la portée n'est pas moins significative (paragraphe II)

Paragraphe I- L'approbation des engagements internationaux à travers la loi de ratification.

Délaissant le débat sur la nature de la loi de ratification47 et ayant déjà évoqué dans les paragraphes précédents les effets et la portée de celle-ci, nous nous intéressons ici à l'étendue de

45 Ibid. pp. 50-51.

46 David Ruzié Op. Cit. p. 12.

47 La doctrine est en effet divisée sur la nature de la loi de ratification : pour certains auteurs tels Duverger, Niboyet ou encore Gervais, la loi autorisant la ratification n'est qu'une « formalité habilitante » en forme de loi dont l'absence de caractère normatif et obligatoire la distinguerait d'une véritable loi. Pour d'autres auteurs tels Luc Saïdj, la notion de norme semble indépendante du nombre de destinataires, du nombre des évènements visés, de la formulation personnelle ou impersonnelle d'une disposition. L'autorisation parlementaire de ratification de traité n'en serait pas moins

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l'autorisation parlementaire qui met en cause le droit d'information du Parlement (A), d'autre part le problème des modalités de l'autorisation parlementaire, qui soulève la question du droit d'amendement des députés (B).

A- Le droit d'information du Parlement

Même s'il y'a quelques années encore le traité n'était pas systématiquement joint au projet de loi autorisant la ratification, désormais le texte même du traité est soumis aux députés en même temps que le projet de loi. Si cette procédure permet une information des députés sur le texte pour lequel l'autorisation de ratifier est requise, l'on doit s'interroger sur la communication des réserves formulées ou à formuler par le Gouvernement à propos de l'accord international soumis à l'examen parlementaire. Le président de la République est-il tenu de communiquer au Parlement les réserves et déclarations et, de manière plus générale, toutes les limitations qu'il envisage d'apporter à l'application des conventions ? Doit-il s'en tenir une fois le vote du Parlement acquis, à ce qu'il a indiqué à l'Assemblée Nationale et, en sens inverse, doit-il accomplir toutes les formalités annoncées ?

Cette question ne s'est pas encore posée devant l'Assemblée nationale du Cameroun mais elle le fût en 1973 devant l'Assemblée nationale française à l'occasion des débats sur la ratification de la Convention européenne des droits de l'homme. Le professeur Jean-Pierre Cot, député socialiste, soutint en séance publique que « les réserves font partie intégrante du traité international, qu'elles doivent être communiquées au Parlement et que le Parlement ne peut délibérer valablement qu'au vu de la totalité de l'engagement international». Le ministre des affaires étrangères, monsieur Michel Jobert, reconnut certes qu'il trouvait « naturel que, dans la mesure du possible, le Gouvernement informe le Parlements des réserves qu'il entend faire » mais tout en précisant que « la formulation des réserves étant une prérogative spécifique de l'exécutif », la communication qu'il avait faite des réserves à la Commission des affaires étrangères n'était qu'une simple information, sans caractère officiel, qui ne portait au surplus que sur « le projet actuel » donc modifiable, des réserves ; si en l'espèce, le ministre s'engageait à ne pas modifier ultérieurement le libellé de ces réserves, il ne s'agirait là que d'un engagement purement personnel,

« normative » en ce sens qu'elle édicte une « règle, un principe de conduite ». Elle n'a pas de caractère impératif parce qu'il n'est pas de la nature des normes d'avoir un contenu juridique impératif, parce qu'il faut distinguer règle et commandement, parce qu'à côté de certaines normes dotées d'un contenu impératif, existent des règles permissives ou habilitantes, qui par définition n'ont pas pour fonction d'imposer. Voir à ce sujet Jean Dhommeaux Op. Cit. p. 834 et suivantes ; Denys de Bechillon Hiérarchie des normes et hiérarchie des fonctions normatives de l'Etat, Paris, Economica, 1996, p. 81 et suivantes ; Luc Saïdj Op. Cit. pp 86-93 ; « L'Assemblée nationale et l'Union européenne », Connaissance de l'Assemblée N° 9, février 1998, p. 32.

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insusceptible d'être considéré comme découlant d'une obligation juridique ; à plus forte raison, ajoutait le ministre, « le Gouvernement ne pourrait accepter que l'autorisation de ratifier qu'il sollicite soit assortie de conditions... il est libre de ne pas faire usage de l'autorisation qui lui a été donnée, de n'en faire usage qu'au moment qu'il juge opportun, ou de ne le faire que de façon partielle en formulant des réserves »48.

La position du Gouvernement camerounais ne devrait pas s'éloigner de celle de son homologue français car si la Constitution impose que le Parlement soit saisi du contenu des engagements internationaux, aucune de ses dispositions n'exige expressément que le contenu soit celui de l'engagement international tel que déterminé par lés éventuelles réserves et déclarations du Gouvernement et comme l'admettait le professeur Jean-Pierre Cot dans son intervention précitée à l'Assemblée nationale française, il s'agit là d'une « lacune de notre droit »49. Mais pour le professeur Luc Saïdj, il s'agirait plutôt d'un silence qu'il semble possible de pallier, par un certain nombre d'indices qui, pris isolément, ne sont peut-être pas toujours décisifs, mais qui tous convergent en un faisceau suffisamment solide pour fonder, au profit du Parlement, un droit d'information qui n'est que la conséquence logique du texte constitutionnel. Ces indices tiennent d'une part aux nécessités du contrôle de constitutionnalité, d'autre part aux exigences du contrôle parlementaire lui-même50.

Les nécessités du contrôle de constitutionnalité découlent du fait que les réserves ou déclarations gouvernementales peuvent avoir une incidence sur la compatibilité entre un traité et la Constitution. D'un côté une réserve ou une déclaration peut rendre un engagement international incompatible avec la Constitution ; d'un autre côté, une réserve ou une déclaration peut rendre un engagement international compatible avec la Constitution. Pour exercer un contrôle efficace et assurer le respect de la Constitution, le président de l'Assemblée nationale et les députés doivent être informés de la réserve ou de la déclaration.

Les considérations propres à l'exigence du contrôle parlementaire sont au moins au nombre de trois selon Luc Saïdj51. La première de caractère général, a trait aux nécessités d'un contrôle démocratique sur la politique extérieure du gouvernement. A une époque où les engagements internationaux revêtent une importance de plus en plus fondamentale, la simple règle démocratique conduirait à ce qu'en dehors même de toute exigence proprement juridique, le Parlement soit

48 Débats rapportés par Luc Saïdj Op. Cit. pp. 22-23.

49 Ibid.

50 Ibid. pp. 113-116.

51 Ibid.

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spontanément tenu informé de tous les éléments propres à former son opinion. [a deuxième exigence du texte constitutionnel est le principe de l'autonomie du pouvoir de contrôle du Parlement. Quelles que soient, sur le plan politique, les bonnes volontés réciproques, il n'appartient pas sur le plan juridique, au contrôlé de déterminer les pouvoirs du contrôleur. Or tel est bien le cas : selon qu'une disposition juridique est incluse dans le traité lui-même ou formulée dans une réserve, selon que cette réserve est émise à la signature ou à la ratification, selon que l'Exécutif juge opportun ou inopportun d'en communiquer la teneur au Parlement, ce dernier est informé ou n'est pas informé, informé partiellement ou complètement, du contenu juridique précis qui découle de la position gouvernementale. [a troisième considération met en jeu les principes de droit public. [a loi relative à la ratification est avant tout une autorisation donnée à un texte juridique précis, qui, dès lors qu'il sera publié, aura une autorité supérieure à celle des lois. Or ce texte juridique précis, ce texte « supra législatif », tel qu'il sera notamment appliqué par le juge, ne sera pas le traité général mais l'engagement international tel que précisé par les réserves et déclarations du gouvernement. Dès lors, permettre la liberté d'action du gouvernement c'est permettre juridiquement au gouvernement de déterminer seul le contenu du droit supra législatif applicable, alors que le « législateur international » lui-même, au moins dans sa volonté première, ne le peut pas puisque son oeuvre est subordonnée à l'assentiment du Parlement ; permettre la liberté d'action de l'Exécutif, c'est permettre à l'Exécutif de prendre sans contrôle parlementaire ni juridictionnel, des actes juridiques qui dans un mécanisme d'édiction purement interne, relèveraient du seul pouvoir législatif, voire du seul pouvoir constituant.

Ainsi au regard de la profonde novation que des réserves peuvent faire subir aux dispositions du traité et afin que l'autorisation parlementaire garde tout son sens52, le président de la République doit communiquer à l'Assemblée nationale le texte même des réserves et déclarations qui seraient faites ou confirmées s'il décidait d'utiliser l'autorisation parlementaire et une fois l'autorisation parlementaire accordée, le président de la République ne peut modifier le contenu de l'engagement en formulant de nouvelles réserves ou déclarations, ou ce qui reviendrait au même, en modifiant le libellé des réserves ou déclarations antérieurement communiquées au Parlement. Ce serait le cas échéant une atteinte directe portée au droit d'information du Parlement ou tout au moins une discourtoisie vis-à-vis de l'Assemblée nationale53.

53 Denys de Bechillon Op. Cit. pp 89-90.

52 Jean Dhommeaux Op. Cit. pp. 840-841.

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Le manque d'information des députés au Cameroun n'est pas toujours imputable au pouvoir Exécutif mais est également dû à l'intérêt très inégal des parlementaires caractérisé par une extrême brièveté des débats ou une absence des débats même si, comme l'ont déjà relevé à maintes occasions les députés, en omettant de déposer la version anglaise du traité, « ce qui ne permet pas à l'ensemble des membres de votre commission des affaires étrangères d'en prendre bonne connaissance »54, ou en ne déposant le traité qu'à quelques jours du délai de ratification obligeant les députés à donner leur autorisation dans l'urgence alors que « l'importance du traité méritait que ce document leur soit distribué longtemps avant la tenue de la commission »55, le gouvernement ne permet pas une totale information des parlementaires en même temps qu'il exclut de fait tout véritable amendement.

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