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Le régime de l'administration transitoire des territoires en droit international.

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par Luc Yannick ZENGUE
Université de Yaoundé II (SOA) - Diplôme d'études approfondies en droit international public et communautaire 2007
  

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1- L'article 81 de la Charte

La soumission de certains territoires à l'administration fiduciaire avaient lieu d'après le régime de la tutelle, « en vertu d'accords particuliers »185(*) dénommés « accords de tutelle »186(*) ; accords auxquels pouvaient être partie l'organisation, puisque l'article 81 indique clairement que « l'autorité chargée de l'administration » peut être entre autres, « l'organisation elle-même ». Mais dans la pratique, malgré la pertinence des articles 79 et 81, les Nations Unies n'ont jamais pu conclure directement un accord de tutelle, encore moins assurer les responsabilités d'administration. Elles se sont simplement contentées de jouer un rôle de supervision. La troisième possibilité offerte par l'article 81, celle de la désignation de l'O.N.U. en tant qu'autorité administrante, n'a pas connu d'application après l'échec du projet du Statut permanent du territoire de Jérusalem en 1949. Elle ne correspond pas non plus au rôle de l'organisation mondiale en Namibie187(*). En réalité, la question de la désignation de l'autorité administrante a été réglée par la façon dont l'article 79 a été interprété et appliqué : Chaque Etat consentant participer à la tutelle s'est auto-désigné comme autorité administrante. Il faut cependant noter que cette interprétation de l'article 79 connaît une exception dans le cas de la Somalie où l'O.N.U. désigne l'autorité administrante188(*).

De tout ce qui précède, il ressort que le chapitre XII, et en l'occurrence, l'article 81, prévoit explicitement la possibilité pour les Nations Unies d'administrer directement un territoire. L'organisation ne s'est pas prévalue de ce droit ; toute chose qui ne la rend pas insusceptible d'exercer des prérogatives de puissance publique sur un territoire. La non jouissance d'un droit n'emporte pas l'inexistence dudit droit.

Eu égard à la désuétude du chapitre XII de la Charte, la possibilité offerte par l'article 81, risque ne pas reçue favorablement dans le cadre de l'administration transitoire qui nous intéresse. Quoiqu'il en soit, en dehors de l'article 81, il ya une possibilité pour les Nations Unies d'assurer l'administration directe d'un territoire.

2- En dehors de l'article 81

Pour mieux cerner la faculté pour les Nations Unies d'administrer directement un territoire en dehors du cadre de l'article 81, il nous semble indiqué de nous référer aux précédents pertinents des Nations Unies, notamment les cas du Territoire Libre de Trieste (TLT), de la région de Jérusalem et de la Namibie.

La mise en place d'un régime international autre que celui de la tutelle est envisagée pour la ville de Trieste et son Hinterland en 1947. Les puissances signataires du traité de paix avec l'Italie du 10 février 1947, confient au Conseil de sécurité des Nations Unies, la tâche de garantir, « l'intégrité et l'indépendance » du TLT. Le «Statut Permanent du Territoire Libre de Trieste » est soumis au Conseil pour approbation avant la signature du traité. Il en résulte la première discussion au sein des Nations Unies sur la capacité de l'ONU à administrer directement un territoire en dehors du cadre du régime de la tutelle. Le point fondamental du débat concerne la conformité avec la Charte, des responsabilités du Conseil issues du Statut permanent de Trieste189(*). Invoquant l'article 24 de la Charte, le Secrétaire général de l'ONU affirme que la portée des pouvoirs transférés par les Etats membres au Conseil, s'étendent au niveau des responsabilités en cause190(*). Selon le Secrétaire général adjoint, Monsieur SOBOLEV, « [l]es mots : `responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales', rapprochés des mots : `agit en leur nom' [art. 24], constituent en fait une délégation de pouvoirs d'une portée suffisante pour permettre au Conseil de sécurité d'approuver les documents en question et d'assumer les responsabilités qui en découlent »191(*).

Il ressort des interventions sus-évoquées, que les pouvoirs du Conseil vont au-delà des attributs spécifiques de compétences énoncés aux chapitres VI, VII, VIII et XII. Lesdits pouvoirs n'ont donc pour limites que les principes et buts fondamentaux figurant au chapitre I de la Charte. La majorité des Etats se rallièrent à cette interprétation extensive des pouvoirs du Conseil en matière de maintien de la paix192(*). Ce faisant, ils énoncent bien que de manière implicite, une théorie qui deux ans plus tard aurait inspiré, mutatis mutandis, la Cour internationale de Justice dans son Avis consultatif de 1949 sur la Réparation des dommages : la théorie des pouvoirs implicites, fondée sur le recours aux buts et aux fonctions de l'Organisation.

Un rôle principal de l'Organisation des Nations Unies dans l'administration internationale d'un territoire est aussi envisagé pour la région de Jérusalem. C'est l'Assemblée générale, au moyen de sa résolution 181 (II) du 29 novembre 1947, qui en a l'initiative. Elle partage le territoire palestinien en deux Etats avec en plus une zone internationalisée placée sous le contrôle effectif des Nations Unies. Au sens du projet de Statut spécial, la ville de Jérusalem est constituée en « corpus separatum sous l'administration des Nations Unies »193(*)

En mai 1967, suites aux dérives de sa présence dans le Sud-ouest africain, notamment sa prétention expansionniste, l'Assemblée générale révoque le mandat de l'Afrique du sud194(*) et institue le Conseil des Nations Unies pour la Namibie. Le conseil des Nations Unies, organe subsidiaire de l'Assemblée, est chargé d'administrer le territoire concerné, mais cela n'est pas effectif, l'Afrique du sud ayant refusé de se retirer195(*). La désignation d'un organe des Nations Unies pour administrer un espace terrestre en dehors du régime de la tutelle, n'est pas contestée par les Etats membres (si l'on fait fi des protestations de l'Afrique du sud). La singularité du cas de la Namibie est la mise du territoire sous la responsabilité directe des Nations Unies. Il faisait suite dans cette expérience, aux situations vécues à Jérusalem et en Irian Barat.

Les deux cas que nous venons de présenter n'illustrent en rien une mise en oeuvre des dispositions du chapitre XII de la Charte. Il s'agit tout au contraire des régimes sui generis avec en tant qu'acteurs, des organes agissant pour le compte des Nations Unies196(*). Il est maintenant intéressant d'appréhender la structure strictement onusienne d'administration directe d'un espace terrestre.

Paragraphe 2 : La structure onusienne de l'administration directe d'un espace terrestre

Après avoir exposé le cadre normatif onusien vecteur d'une administration directe des Nations Unies, il convient d'aborder l'identification et l'organisation des structures de l'O.N.U. de ladite administration. Les lignes suivantes peuvent donc s'avérer oublieuses mais non rejetteuses de la participation des structures étrangères à l'ONU dans l'administration directe d'un territoire. L'on distinguera ainsi les instances de direction (A) de celles d'exécution (B).

A. La structure de direction

A l'instar de l'administration interne, l'administration internationale d'un territoire dispose des organes chargés d'élaborer la politique générale. Le Conseil de Sécurité est l'instance initiatrice et instructrice de l'administration intérimaire d'un territoire en droit international. Cependant, certaines de ses responsabilités sont déléguées au Secrétaire général.

1- Le Conseil de Sécurité des Nations Unies

Le Conseil est l'un des six organes principaux de l'ONU. Il s'agit d'un organe propre à travers lequel l'organisation s'emploie à atteindre les buts fixés par les Etats qui lui ont transmis une part de leurs compétences. En vertu de la Charte, le Conseil se pose comme un directoire mondial contesté. En effet, pour monsieur Pierre GERBERT, la Charte prévoit un « régime directorial » avec le Conseil, alors que la résolution Dean Acheson de 1950 établit un « régime d'Assemblée »197(*). Les deux régimes s'opposent finalement tout en permettant aux Nations Unies de trouver un certain équilibre institutionnel interne ; équilibre institutionnel qui rencontre le désaccord des « Cinq Grands ». L'on s'aperçoit au cours de ces années que lorsqu'il est épargné des caprices du veto, le Conseil peut tout faire sauf changer une femme en homme. C'est le visage que présente le Conseil dans la décision et le management d'une administration intérimaire.

En effet, la mise en place d'une « présence internationale » ressort de la compétence exclusive du Conseil198(*). D'ailleurs, la résolution du Conseil instituant l'administration transitoire constitue la principale feuille de route pour les autorités chargées d'implémenter les prescriptions du Conseil. Elle en indique les modalités pratiques, les fins et les objectifs. Dans cette logique le Conseil ne lésine pas sur les moyens nécessaires, se montrant parfois très autoritaire. Monsieur MILLET-DEVALLE souligne par exemple que le Conseil a imposé l'autonomie à la population du Kosovo, sans l'aval de la République fédérale de Yougoslavie199(*). Pour sa défense, le Conseil peut faire appel à deux arguments cumulatifs : La légalité et la légitimité. En ce qui concerne le premier, les résolutions du Conseil prises dans le cadre du chapitre VII ont une valeur obligatoire. Quant au second argument, une administration transitoire est souvent décidée avec l'assentiment de la communauté internationale généralement exprimé dans des accords spécifiques tels les accords de Rambouillet sur la question du Kosovo.

Dans l'optique de s'éviter un engorgement, le conseil transfert au Secrétaire général des Nations Unies, la responsabilité de la supervision du déploiement de la « présence internationale ».

2- Le Secrétaire général des Nations Unies

En dehors de son organe plénier (l'Assemblée générale) et son organe restreint (le Conseil), l'ONU est doté d'un organe de direction administrative chargé de la mise en oeuvre des délibérations et décisions des autres organes. Cet organe a primordialement la responsabilité de la gestion des services administratifs de l'organisation. Pouvant être collectif dans d'autres organisations internationales, il est individuel à l'ONU et prend la dénomination de Secrétariat général, sous la responsabilité d'un Secrétaire général.

Le Secrétaire général des Nations Unies est le chef de l'organe administratif de type bureaucratique de l'ONU. Il est le centre d'impulsion et l'animateur au quotidien de l'activité onusienne. Toute chose qui ne peut que favoriser le recours à sa personne pour le déploiement d'une administration internationale. Une dizaine d'années prés le l'avènement de l'ONU, l'on observe une croissance remarquable du rôle su Secrétaire général probablement due à l'augmentation rapide du nombre des Etats membres amenant les Nations Unies à se monter « conquérantes ». La fonction de Secrétaire général atteint son apogée avec monsieur Dag HAMMARSKJÖLD et décline au cours du second mandat de monsieur U THANT. L'histoire indique que l'importance et, partant, l'efficacité de cet organe sont tributaires d'une double recette : « Ne jamais entrer en conflit avec un Etat important de l'organisation ni avec la majorité, et ne pas surestimer les possibilités du Secrétaire général et de l'ONU »200(*). L'irrespect de cette double consigne aurait été la principale cause de la débâcle d'un bon nombre de Secrétaires généraux.

Quoiqu'il en soit, le Secrétaire général est une pièce plus qu'indispensable dans le puzzle de l'administration transitoire des territoires en droit international. En effet, la structure de la mission civile pour ne parler que d'elle, «  s'articule autour d'un rôle fondamental dévolu au Secrétaire général »201(*). Celui-ci confirme ainsi sa magistrature influente au sein de l'ONU. C'est lui qui de manière concrète, établit sur le terrain une administration intérimaire sur un territoire donné. Pour ce faire, il agit avec le concours des organisations internationales compétentes202(*). Le Secrétaire est souvent prié de « nommer, en consultation avec le Conseil de Sécurité, un représentant spécial »203(*) qui le supplée sur le terrain. Le Secrétaire général reçoit des informations de son représentant spécial, en dresse un rapport qu'il soumet au Conseil. Ce rapport contient généralement un certain nombre de propositions en vue de résoudre les problèmes relevés.

Les organes que nous venons de présenter peuvent être considérés comme la structure centrale de l'administration intérimaire. Il reste maintenant à aborder la structure déconcentrée formée par les instances d'exécution.

* 185 Voir article 75 de la charte

* 186 Voir article 81 de la Charte

* 187 HENRY (J-R), « L'article 81 », in COT (J.P.) et PELLET (A.) La charte des Nations Unies, Commentaire article par article, 2éme éditions, Economica, Paris, 1991, p. 1164

* 188 HENRY (J-R), « L'article 81 »,Ibid., p. 1163

* 189 KOLB (R.), Op. Cit., p. 71

* 190 Nations Unies, Conseil de sécurité, Procès-verbaux officiels, Deuxième année, Quatre-vingt-onzième séance, 10 janvier 1947, p. 44

* 191 Ibid., p. 45

* 192 Voir les positions des délégués de l'URSS, des Etats-Unis, de la Pologne, du Royaume Uni, de la France et de la Chine, in Nations Unies, Conseil de sécurité, Procès-verbaux officiels, Deuxième année, Quatre-vingt-neuvième séance, 7 janvier 1947, p. 9, 11, 14 15 et 16

* 193 Article 1 du projet de Statut pour la ville de Jérusalem

* 194 Voir LUCCHINI (L.), « La Namibie, une construction des Nations Unies », AFDI, vol. XV, 1969, pp. 355ss; ZACKLIN (R.), « The Problem of Namibia in International Law », RCADI, tome 171, 1981-II, p. 233ss.

* 195 LUCCHINI (L.), Ibid., pp.366s.

* 196 Voir en ce qui concerne le TLT, le rapport transmis au Conseil de tutelle, cité par KELSEN (H.), in The law of the United Nations, Op . Cit., p. 687

* 197 GERBERT (P.), Op. Cit., p. 280

* 198 GARCIA (T.), Op. Cit., p. 61

* 199 MILLET-DEVALLE (A.-S.), « Le rôle de l'ONU dans le conflit du Kosovo » in Colloque La sécurité internationale et les enseignements du conflit du Kosovo, 25-26 novembre 1999, Nice, IDPD, 2000, p. 43

* 200 GERBERT (P.), Op. Cit., p. 282

* 201 KOLB (R.), Op. Cit., p. 45

* 202 Voir Résolution 1244, paragraphe 10

* 203 Ibid., paragraphe 6

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon