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La thématique de l'environnement dans la jurisprudence de la cour internationale de justice.

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par Serge ITOUROU SONGUE
Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC) - Master II 2011
  

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CHAPITRE 2 :
LA NECESSAIRE CONCILIATION ENTRE PRUDENCE ET HARDIESSE DU JUGE DANS LE TRAITEMENT DU CONTENTIEUX ENVIRONNEMENTAL

La prudence a toujours caractérisé l'activité du juge international, compte tenu de la complexité du cadre dans lequel il opère. En effet, « la Cour s'insère dans un cadre marqué du sceau de la complexité tenant à la diversité et à la pluralité des acteurs - dont elle est - qui interviennent sur la scène juridique internationale »226(*). Elle n'a pas la compétence exclusive dans le traitement du contentieux international et sa compétence dépend de la volonté de l'Etat, car la justice n'est pas obligatoire dans l'ordre international. Le juge international fait donc souvent preuve de beaucoup de prudence afin d'assurer l'adhésion des Etats à la juridiction de la Cour.

Mais dans le domaine du contentieux international de l'environnement, la prudence des juges peut trouver son fondement dans le souci de préserver la stabilité de la structure normative et institutionnelle existante (section 1). Ce souci nait du fait que le droit international de l'environnement remet profondément en cause les règles traditionnelles, notamment en matière de responsabilité internationale227(*). Mais il ne faut pas perdre de vue tout l'intérêt que présente actuellement le droit international de l'environnement qui, de l'avis de Maurice Kamto, « remet l'humanité au coeur du droit international (...) avec en prime une prise en compte hardie des préoccupations et des inquiétudes des temps actuels »228(*). L'importance de ce nouveau droit contraste encore avec sa relative jeunesse et son développement peu poussé, ce qui rend nécessaire l'implication du juge dans le développement du droit international de l'environnement (section 2)

Section 1 : La préservation de la solidité de la structure institutionnelle et normative existante

La crédibilité d'une institution judiciaire dépend largement de la prévisibilité de ses décisions. Les parties auront davantage recours à la juridiction de la Cour si elles sont certaines de la prévisibilité de la procédure et de la jurisprudence. Sur ce point, la C.I.J. bénéficie d'une certaine crédibilité en raison de sa riche expérience en matière d'interprétation et d'application des traités internationaux. L'ouverture sur les considérations écologiques pourrait remettre en cause l'édifice institutionnel et normatif existant, dont l'efficacité a été éprouvée au fil du temps (paragraphe 1). De plus, l'absence d'autonomie et la précision relative des normes de droit international de l'environnement sont de nature à limiter leur prise en compte dans le contentieux international (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'efficacité éprouvée des techniques contentieuses traditionnelles

Comme le fait remarquer le professeur Kamto, « le droit traditionnel dispose de puissants outils théoriques susceptibles d'être adaptés à la protection et à la gestion de l'environnement »229(*). Ainsi sur le plan institutionnel, il ne fait aucun doute que l'organisation institutionnelle classique de la Cour permet de régler les différends environnementaux (A). De même, les normes classiques de droit international permettent d'apurer le contentieux environnemental, du moins en son état actuel (B).

A. L'aptitude de l'organisation institutionnelle de la Cour à régler les différends environnementaux

L'institution par la Cour d'une chambre spéciale pour les questions d'environnement traduit une sorte d'audace institutionnelle, certainement justifiée par l'intérêt que la haute Cour porte aux questions d'environnement. Certes, l'option pour une chambre spéciale met fin aux hésitations de la Cour portant sur le choix entre la constitution d'une chambre de l'article 26 paragraphe 1 et le recours à une chambre ad hoc de l'article 26 paragraphe 2 de statut. Mais compte tenu du bilan fort mitigé des activités de la chambre spéciale - soit aucune affaire traitée après treize années d'existence -, on pourrait conclure à un désaveu de la chambre par les Etats. Tout le contentieux portant sur les questions environnementales reste traité en dehors de la chambre spéciale et selon la procédure classique, notamment le recours à la formation plénière. Le souci pour la Cour de s'adapter au contentieux environnemental en s'écartant quelque peu du cadre institutionnel existant semble ne pas avoir suffisamment tenu compte de l'aptitude de l'organisation institutionnelle traditionnelle à régler les différends environnementaux. Plus encore, « la mise en place d'une juridiction spéciale et nouvelle - la chambre spéciale - résulte d'un choix essentiellement politique dans lequel la préoccupation des juristes professionnels a joué un rôle de catalyseur d'opinion et de pression »230(*).

Mais l'acharnement des juristes pour la création de la chambre spéciale s'est heurté à l'importance du consensualisme dans le contentieux international, notamment pour ce qui est de la composition de la juridiction. En effet, « à la différence d'une chambre ad hoc, une chambre spéciale représente une formation permanente dont la direction relève de la plénière de la Cour : à celle-ci revient l'appréciation discrétionnaire de sa constitution (...) Par ailleurs, la composition est entièrement entre les mains de la seule Cour (...) »231(*). Le recours à la chambre spéciale est donc assez contraignant pour les Etats, ce qui peut justifier leur préférence pour les autres formations de jugement existantes. En effet, « le facteur psychologique est peu favorable à la réalisation de telles initiatives, notamment si elles sont perçues comme une tentative de détournement de la règle de la primauté du consentement juridictionnel »232(*). L'organisation institutionnelle traditionnelle de la Cour prend en considération ce nécessaire consentement à la juridiction, notamment à travers la liberté reconnue aux parties de constituer des chambres ad hoc et de recourir à la désignation des juges ad hoc en l'absence d'un juge de leur nationalité. Bref, la création de la chambre spéciale ne paraît pas nécessaire, compte tenu de l'aptitude de la structure institutionnelle de la Cour à régler les différends environnementaux. En témoignent tous les différends réglés par la Cour dans lesquels les questions environnementales étaient examinées. On comprend dès lors toutes les hésitations qui ont précédées la création de cette chambre, car la Cour doit faire preuve de prudence en tenant compte de l'environnement dans lequel elle opère. La Cour devrait privilégier le renforcement des mécanismes institutionnels existants qui ont déjà fait leurs preuves et qui semblent susciter l'adhésion des Etats, plutôt que de se lancer dans une sorte d'aventure institutionnelle233(*). Cette option permettra de mieux préserver la stabilité de la structure institutionnelle existante.

* 226 Bufferne (J-P), Op. Cit., P.143.

* 227 Dupuy (P-M), Op. Cit., P.8.

* 228 Kamto (M), « Les nouveaux principes du droit international de l'environnement », Op. Cit., P.11.

* 229 Kamto (M), Droit de l'environnement en Afrique, Op. Cit., P.19.

* 230 Ranjeva (R), « Les potentialités des modes juridictionnels internationaux de règlement des différends », Op. Cit., P.274.

* 231 Ranjeva (R), « L'environnement, la Cour internationale de justice et sa chambre pour les questions d'environnement », Op. Cit., P.434.

* 232Ranjeva (R), « Les potentialités des modes juridictionnels internationaux de règlement des différends », Op. Cit., P.274.

* 233 La chambre spéciale pose aussi un problème dans le fonctionnement de la Cour, notamment la possibilité d'un conflit de compétence entre la chambre et la plénière. Pour plus de détails sur la question, lire Ranjeva (R), « L'environnement, la Cour internationale de justice et sa chambre pour les questions d'environnement », Op. Cit., P.441.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault