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Le contrôle de la régularité des élections législatives au Cameroun

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par Diane MANDENG
Université de Douala Cameroun - Diplôme d'études approfondies en droit public interne 2005
  

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SECTION II : UN TRAITEMENT DIFFÉRENCIÉ ET INÉGALITAIRE DES CANDIDATS

La démocratie implique nécessairement aujourd'hui comme hier que le peuple exerce son gouvernement par l'intermédiaire de certaines personnes. Ce qui est connu comme la "représentation" repose sur un postulat simple : l'impossibilité pratique de mettre en oeuvre la démocratie directe. D'ailleurs, il est prouvé que le peuple n'est pas le mieux éclairé et que la nature n'a pas donné à tout le monde la capacité de s'occuper des affaires publiques. Aussi, dira Montesquieu à la suite de Monsieur Jean-Jacques ROUSSEAU, que "le peuple est admirable pour choisir ceux à qui il doit confier quelque partie de son autorité... Mais il n'est pas propre à gérer par lui-même". 77(*) L'élection est le moyen par excellence pour le peuple d'intervenir et de participer à la vie de l'État, par la désignation de ses représentants. Ceux-ci ne sont alors au stade des élections que des candidats. Les candidats sont des individus présentés à une élection et investis par un parti politique. Dès lors, ils méritent une attention particulière afin d'être dignes de la légitimité et de la confiance du peuple, et ne pas donner raison à Jean-François REVEL qui remarque à ce propos qu'il suffit à un candidat, si nul et inconnu soit-il, de se trouver, par la grâce des chefs, placé en "bonne position" sur la liste pour "être élu par automatisme arithmétique, sans même avoir fait personnellement campagne". 78(*)

Les candidats doivent ainsi correspondre à un certain modèle, et satisfaire aux conditions d'éligibilité prévues par la loi. Il arrive cependant que les droits des candidats soient violés à travers l'implication excessive de l'administration dans les opérations d'enregistrement des candidats, et dans le déroulement des campagnes électorales (Paragraphe I), les candidats sont aussi lésés dans la garantie de l'exercice de leurs droits par l'imperfection de la loi (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I : L'IMPLICATION EXCESSIVE D'UNE ADMINISTRATION À IMPARTIALITÉ DOUTEUSE

Le Ministère de l'administration territoriale et de la décentralisation au Cameroun a la charge d'organiser les élections. Toutefois, lorsqu'on sait que trop souvent l'administration est acquise au pouvoir en place, on doute quelque peu de son impartialité. En fait, ce doute crée des appréhensions tant du côté des électeurs que des candidats.

Les pouvoirs étendus de l'administration en matière de recevabilité des candidatures et des faits de campagne électorale (A) créent chez les autres candidats une constante suspicion à l'égard du parti au pouvoir qu'on croira toujours plus protégé et privilégié par rapport aux autres partis politiques en lice. D'où la nécessité de confier l'organisation des élections à un organe qui réalise l'adhésion de tous (B).

A - POUVOIRS ÉTENDUS EN MATIÈRE DE RECEVABILITÉ DES CANDIDATURES ET DES FAITS DE CAMPAGNE

Les autorités administratives jouissent de très larges pouvoirs en matière de recevabilité des candidatures et de l'appréciation des incidences de campagne sur le fameux "ordre public". Mais ce n'est pas tant ces pouvoirs qui font problème, mais l'usage qui en est fait et qui peut être constitutif de ce que nous qualifierons de "détournement de pouvoir".

1- Pouvoirs étendus en matière de recevabilité des candidatures

Le contrôle de la régularité des élections implique nécessairement le contrôle de l'éligibilité des candidats. Ce contrôle doit permettre le respect de certaines conditions déterminées par le législateur, et ne devrait souffrir d'aucune manoeuvre visant soit à écarter un candidat soit à favoriser un autre, car comme l'affirme SALOMON, « il apparaît tentant pour le gouvernement d'éliminer au départ ses ennemis ou au contraire de favoriser ses amis en agissant par l'intermédiaire de l'administration sur l'enregistrement des candidatures. » 79(*)

Le Ministère de l'Administration Territoriale et de la Décentralisation à travers les autorités administratives déconcentrées que sont les Préfets et Sous-préfets dispose de la compétence principale. Conformément aux articles 70, 73 et 76 de la loi fixant les conditions d'élection des députés à l'Assemblée Nationale, les déclarations de candidatures sont examinées par le Préfet qui les enregistre et s'assure qu'elles sont conformes ou non aux prescriptions législatives avant de les transmettre au MINATD qui les arrête et les publie au plus tard dans un délai de 20 jours avant le scrutin.

En outre, on note que c'est un organe du contrôle administratif, en l'occurrence la commission départementale de supervision, qui est compétente pour connaître en premier ressort de tous les litiges y relatifs. Le Conseil constitutionnel quant à lui intervient seulement en appel et dans un délai de cinq (5) jours suivant la notification de la décision de rejet de candidature. Il statue dans un délai maximum de (15) quinze jours suivant le dépôt de la requête (article 79 alinéa 1 et 2 de la loi n° 91/020).

L'intervention d'un juge constitutionnel n'exclut cependant pas l'existence de grandes manoeuvres de la part de l'administration qui a gardé « les stigmates du parti unique »..80(*) C'est ainsi que l'on constate des rejets non motivés et non notifiés ; parfois fantaisistes et traduisant l'attitude partisane de l'autorité administrative.

Cette attitude partisane entrave la saine concurrence électorale, empoisonne le bon déroulement de la campagne électorale. Toutefois, les pouvoirs de l'administration ne se limitent pas seulement aux candidatures, car c'est elle qui est chargée de contrôler le déroulement de la campagne électorale.

2- La restriction de la liberté de campagne par une surévaluation de la notion d'ordre public

Les autorités administratives sont compétentes tant en matière d'apposition des documents de campagne que de réunions et meetings. En effet, l'article 81 de la loi attribue au MINATD la fixation du format des bulletins de vote par arrêté. Les textes des circulaires ou des professions de foi et affiches sont soumis à son visa.

Le MINATD agit localement à travers les différentes autorités administratives. De ce fait, ces dernières peuvent refuser le visa à tout texte qu'elles estiment constituant un appel à la violence, une atteinte à l'unité et l'intégrité du territoire national. Il appartient ainsi aux autorités administratives de qualifier un texte d'incitateur à la haine ou non car il n'y a pas de critères qualifiant un texte de révolutionnaire. 81(*)

De même, les réunions ayant pour but d'expliquer ou de commenter les programmes et les professions de foi à l'intention des électeurs doivent être déclarées à l'autorité administrative qui a le pouvoir de les interdire s'il les juge dangereuses pour le maintien de l'ordre public. Il en va de même des messages radio et télévisés.

Cependant, l'on note que l'attribution d'autant de pouvoirs à l'autorité administrative donne lieu à des voies de fait, des chantages et des violences à l'endroit des candidats de l'opposition. Il importe donc que l'on rétablisse l'égalité de traitement entre les candidats afin que la liberté de choix des électeurs soit préservée, et la sincérité du scrutin assurée. Il y a donc lieu pour éviter que la liberté du corps électoral ne soit altérée par des manoeuvres discriminatoires subtiles ou ouvertes de l'autorité administrative, de créer des structures indépendantes chargées de l'organisation des élections.

* 77 Cité par GICQUEL (J). op. cit., P. 103-160.

* 78 Cité par ZARKA (J-C). Les systèmes électoraux. Paris : Ellipses, édition Marketing S.A. 1996. 123p.

* 79 SALOMON (J), Les opérations préparant les élections devant le juge de l'excès de pouvoir, RDP. 1957,p. 606, cité par OUMBE FONE, op. cit.

* 80 Voir dans ce sens le Rapport de l'Observatoire National des Élections sur le scrutin du 30 juin 2002, p. 38.

* 81 Voir les articles 83, 84 et 86 de la loi fixant les conditions d'élection des députés à l'Assemblée nationale.

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