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La résolution juridique du conflit au Darfour : mise en perspective de l'état de la justice pénale internationale

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par Mohamed HAMDANI
Université Panthéon-Assas Paris 2 - Master 1 de science politique 2010
  

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TITRE 2 : Le Darfour : empiricité d'un nouveau mode de résolution des conflits

Le vote de la résolution 1593 du Conseil de Sécurité marque une étape majeure concernant le rôle conféré à la Cour, rôle accru qui est également caractérisé par l'ébranlement de l'immunité présidentielle d'Omar El Bachir.

CHAPITRE 1 : Le vote de la résolution 1593 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, caractéristique de l'émancipation de la Cour lors du processus de résolution juridique du conflit au Darfour

Selon le Procureur de la CPI Luis Moreno-Ocampo, dans une déclaration du 29 Juin 2005, le renvoi par le Conseil de Sécurité à la CPI de la situation au Darfour constitue une progression de la justice pénale internationale en ce que ce renvoi « a apporté une justice indépendante et impartiale venant confirmer les efforts régionaux et internationaux d'en finir avec les atrocités commises au

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Darfour »44. En effet, à la date du 31 mars 2005, l'Organisation des Nations Unies (ONU) a décidé de référer la situation au Darfour à la CPI par la résolution 1593 du Conseil de Sécurité45.

Quels ont été les raisons de ce renvoi et les caractéristiques de celui-ci concernant la situation au Darfour ?

Ce renvoi constitue une nouveauté car c'est la première fois depuis la création de la CPI que la saisine de celle-ci s'effectue par la voie d'un « référé » (« referral ») du Conseil de Sécurité, les saisines précédentes étant été formulées à l'initiative des Etats eux-mêmes (Ouganda, République démocratique du Congo, etc..). Avant d'analyser minutieusement le vote, il convient de pointer le rôle d'une entité « sous-traitée » par l'ONU, la Commission d'enquête sur le Darfour.

Préalablement, ce sont en effet les résultats de la Commission d'enquête sur le Darfour qui ont permis de faire état de la gravité de la situation, et ainsi d'obtenir un certain nombre d'éléments nécessaire à la poursuite des officiels soudanais et de leurs milices Janjaweeds. Cette commission a établi un rapport « en application de la Résolution 1564 du 18 septembre 2004 »46 . Bien que cette commission ait été mandatée avant le vote de la résolution, le Procureur de la CPI n'a pu obtenir les résultats que quelques jours après le vote de la résolution 1593 à la date du 7 avril 2005. Subséquemment, le document de la Commission contenait des charges allant à l'encontre de 51 suspects pour lesquelles des preuves assez suffisantes révèlent leur responsabilité pénale concernant d'éventuels crimes commis au Darfour. Le 1er juin, le Procureur décida d'ouvrir une enquête47.

Quid du vote de la résolution 1593 ? Si ce vote fut symptomatique du franchissement d'une étape majeure, nous verrons que ce cap fut motivé par des considérations purement politiques, économiques et conjoncturelles.

Les membres permanents du Conseil de Sécurité, composé des Etats-Unis, de la Chine, de la Russie, de la Grande-Bretagne et de la France, dotés du pouvoir de s'opposer à une résolution par un veto, ainsi que les membres non permanents, se sont accordés le 31 mars 2005 à renvoyer la situation au Darfour aux mains de

44 Antonio Cassesse, « Is the ICC still have teething problems ?», Journal of International Criminal Justice, Vol. 4, p434-441, 2006.

45 Résolution 1593 du Conseil de Sécurité adopté lors de la 5158e séance. Alinéa 1er de la Résolution, en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.

46 Rapport de la Commission d'enquête sur le Darfour, contenue dans la lettre adressée le 31 Janvier 2005 au Président du Conseil de Sécurité par le Secrétaire général.

47 Cassesse, p437.

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Luis Moreno Ocampo. 11 votes ont été exprimés en faveur du renvoi à la CPI et 4 abstentions ont eu lieu (Algérie, Brésil, Chine et Etats-Unis)48. En science politique, l'abstention peut revêtir un message politique (différence entre abstentionnistes « hors-jeu » et « dans le jeu »). En l'espèce, l'analyse de l'abstention de la Chine et des Etats-Unis lors du vote nous amène à conclure paradoxalement de l'importance du rôle de la CPI.

En raison de sa tradition du respect des souverainetés et intégrités territoriales des Etats, la Chine s'est abstenu lors du vote. De plus, les officiels chinois ont revendiqués l'idée d'obtenir le consentement des autorités soudanaises49. Comme il fut étudié ci-dessus, il serait illogique au regard de la culpabilité avérée du gouvernement soudanais de laisser le choix à ce dernier quant à l'idée de se voir imposé ou non une enquête internationale de la CPI.

La position des Etats-Unis fut relative à la création d'une juridiction hybride à l'image de celle crée pour le Sierra Leone50. Bien que les Etats-Unis se soient abstenus, ils reconnurent, par la voie de leur ambassadeur auprès de l'ONU, que « ce fut important que la communauté internationale parle d'une seule voix dans l'objectif d'assurer une responsabilité internationale des coupables »51.

La position de ces deux Etats est intéressante puisqu'ils ne sont pas parties au Statut de Rome. Néanmoins, la nature de leurs votes, bien qu'ils pouvaient opposer leur veto, nous conduit à affirmer qu'ils ont reconnus tacitement la compétence de la Cour Pénale Internationale52.

Le vote de ce renvoi et la reconnaissance implicite par deux puissances mondiales majeures, constitue une légitimation de la Cour, en ce que les membres permanents se sont accordés à renvoyer la résolution du conflit à la CPI, renvoi qui ne fut entaché par aucun vote négatif, bien que des Etats non parties au Statut aient voté.

On retrouve ici notre interprétation libérale du positionnement de la CPI dans l'ordre juridique international. Plus précisément, ce vote pourrait être interprété par le néoinstitutionnalisme, une branche du courant libéral qui insiste sur l'importance des institutions internationales. Empiriquement, les Etats ont

48 Nsongurua Udombana, «Pay Back Time In Sudan : Darfur and the International Criminal Court», Tulsa Journal of Comparative and International Law, Vol. 13:1, 2006, p8.

49 Udombana, p.8 et 9.

50 Idem, p.10.

51 Idem, p.11.

52 Idem, p18.

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clairement affichés leur volonté de déléguer à un organe supranational la décision d'enquêter et de résoudre le conflit au Darfour, estimant que, du bilan coût-avantage juridique, adviendrait un gain supérieur en référant à la CPI.

Cette avancée, qui vient rompre avec les tribunaux crées pour des cas circonstanciels (Rwanda, Ex-Yougoslavie), souligne le caractère de plus en plus universel, au regard de ce vote concernant les crimes commis au Darfour.

Le positionnement de la Cour, par le biais de ce vote n'est pas sans lien avec l'individualisation des sanctions et la levée du garde-fou qu'est l'immunité présidentielle.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille