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L'harmonisation des normes relatives à la formation et à l'emploi dans l'espace uemoa


par Gbètoho Albert BOCO
Université d'Abomey-Calavi - Master 2 en Droit International et Organisations Internationales (DIOI) 2014
  

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SECTION 2 : Des obstacles à l'uniformisation des pratiques

En tenant compte des facteurs social, technologique, économique et politique, les Communautés Economiques Régionales (CER) de façon globale sont loin d'avoir atteint leurs objectifs de développement régional274. On peut en déduire que des obstacles se dressent devant les organisations d'intégration dans l'atteinte de leurs objectifs. Il faut reconnaître que le droit communautaire ouest-africain n'est pas assez connu par les populations à qui les services sociaux sont destinés. On constate que, assez souvent en Afrique, l'esprit intégrateur intéresse moins le corps social pour être l'apanage des administrations publiques et des dirigeants politiques275. La faible connaissance des normes communautaires par les citoyens de l'espace est une des faiblesses des phénomènes d'intégration276. Toutes ces remarques mises ensemble expliquent l'ignorance des populations qui sont souvent à l'origine des obstacles à l'uniformisation des pratiques qui traduisent les entraves relatives à la libre circulation (Paragraphe 1). Cela débouche le plus souvent sur des protections discriminatoires (Paragraphe 2) qui sont d'ailleurs légion dans la communauté.

Paragraphe 1 : Au sujet de la libre circulation

La liberté de circulation et le droit d'établissement sont la clé sans laquelle il n'y a pas d'intégration. Le droit de se déplacer librement sans entrave, le droit de résidence, le droit d'établissement et la libre prestation de services sont effectifs pour plusieurs professions comme celles d'avocat, de médecin, de pharmacien, d'architecte, d'huissier, de commissaire-priseur. Mais la libre circulation des personnes et des biens dans l'espace rencontre des difficultés dans sa mise en oeuvre. Elles sont souvent d'ordre juridique et résultent du Traité lui-même qui permet aux Etats membres de justifier certaines entraves, voire d'en créer. D'autres naissent des pratiques

274GBAGUIDI (Ochozias A), « Cinquante ans d'intégration régionale en Afrique : Un bilan global », Techniques financières et développement, 2013, p. 48.

275 SOW (Abdoulaye), « La diffusion du droit communautaire ouest-africain », Civitas Europa, 2 N°37, 2016, p. 352.

276 Ibidem.

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instaurées par certaines administrations chargées de les appliquer et enfin, d'autres découlent des Etats membres eux-mêmes jaloux de leur souveraineté277. De façon globale, il faut remarquer que l'étendue du principe de la libre circulation est restrictive (A). Cette restriction est plus visible dans la mise en application des textes relatifs à la formation et à l'emploi des citoyens et des professions libérales (B) dans l'espace.

A- L'étendue restreinte du principe de la libre circulation

Le principe de la libre circulation des personnes et des biens est accordé sous réserves aux limitations justifiées par des motifs d'ordre public, de sécurité publique, de santé publique ou pour d'autres raisons d'intérêt général278. En effet, les articles 79 et 91 du Traité modifié279 énoncent ces réserves. Or, les notions mentionnées sont extensibles à la volonté dans lesquelles les Etats membres peuvent ranger ce qu'ils veulent pour limiter la jouissance des principes ainsi consacrés280. Les raisons tirées de la moralité

277 KANE Hamidou Salifou, « Troisième rencontre inter-jridictionnelle des cours communautaires de l'UEMOA, la CEMAC, la CEDEAO, et de l'OHADA : "La libre circulation des personnes et des biens dans l'espace UEMOA" », Dakar, Cour de Justice de l'UEMOA.

278 Ibidem.

279 L'article 79 dispose que : Sous réserve des mesures d'harmonisation des législations nationales mises en oeuvre par l'Union, les Etats membres conservent la faculté de maintenir et d'édicter des interdictions ou des restrictions d'importation, d'exportation et de transit, justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé ou de la vie des personnes et des animaux, de préservation de l'environnement, de protection des trésors nationaux ayant une valeurs artistique, historique ou archéologique et de protection de la propriété industrielle et commerciale.

Les interdictions ou restrictions appliquées en vertu de l'alinéa précédent ne doivent constituer ni un moyen de discrimination ni une restriction déguisée dans le commerce entre les Etats membres. Les Etats membres notifient à la Commission toutes les restrictions maintenues en vertu de l'alinéa premier du présent article. La Commission procède à une revue annuelle de ces restrictions en vue de proposer harmonisation ou leur élimination progressive.

L'article 91 quant à lui indique que:

1) Sous réserve des limitations justifiées par des motifs d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique, les ressortissants d'un Etat membre bénéficient sur l'ensemble du territoire de l'Union de la liberté de circulation et de résidence qui implique :

- l'abolition entre les ressortissants des Etats membres de toute discrimination fondée sur la nationalité, en ce qui concerne la recherche et l'exercice d'un emploi, à l'exception des emplois dans la Fonction Publique; - le droit de se déplacer et de séjourner sur le territoire de l'ensemble des Etats membres ;

- le droit de continuer à résider dans un Etat membre après y avoir exercé un emploi.

2) Le Conseil, statuant à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres et sur proposition de la Commission, après avis conforme du Parlement, arrête dès l'entrée en vigueur du présent Traité, par voie de règlement ou de directive, les dispositions utiles pour faciliter l'usage effectif des droits prévus au paragraphe 1.

3) Selon la procédure prévue au paragraphe 2, le Conseil adopte des règles :

a) précisant le régime applicable aux membres des familles des personnes faisant usage de ces droits ;

b) permettant d'assurer aux travailleurs migrants et à leurs ayants droit, la continuité de la jouissance des prestations susceptibles de leur être assurées au titre des périodes d'emploi successives sur le territoire de tous les Etats membres ;

c) précisant la portée des limitations justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique.

280 Ibidem.

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publique, de l'ordre public et de la sécurité publique renvoient à la notion dégagée par la CJCE281 sur la préservation des intérêts essentiels de l'Etat. En effet, la CJCE s'est fondée sur de l'article 36 du traité relatif au fonctionnement de l'UE qui permet aux Etats membres de porter atteinte à la libre circulation des marchandises pour rendre cet arrêt282. Cet article prévoit des cas dans lesquels il est permis de porter atteinte à cette liberté phare de l'Union européenne. La libre circulation des marchandises peut être entravée légalement pour des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique mais aussi au nom de la protection de la santé et de la vie des hommes, des animaux et des plantes

Par exemple, en matière de libre circulation des marchandises, le principe est limité. En effet, la faculté que conservent les Etats membres de maintenir et d'édicter des interdictions ou restrictions d'importation, d'exportation et le transit est justifiée par des raisons prévues par l'article 79 du Traité de l'UEMOA. En matière de libre circulation des capitaux, selon la BCEAO283 les Etats membres peuvent en effet prendre des mesures pour prévenir les infractions à leur législation fiscale, avoir des statistiques sur les mouvements des capitaux et s'opposer à ces flux par des restrictions pour diverses raisons.

Les contrôles administratifs excessifs sur les axes routiers par la police, la douane, la gendarmerie, les agents des eaux et forêts, les syndicats constituent autant d'entraves non seulement à la libre circulation des personnes mais aussi à la libre circulation des biens. Les ombrages à la libre circulation sont également d'ordre politique. En effet, ces problèmes sont généralement liés à la question de la souveraineté des Etats dans le processus d'intégration. En exemple, dans le domaine du commerce international, il est

281 CJCE, n° C-7/78, Arrêt de la Cour, Regina contre Ernest George Thompson, Brian Albert Johnson et Colin Alex Norman Woodiwiss, 23 novembre 1978. Cf. CJUE, Cour, 23 nov. 1978, Thompson e. a. C-7/78. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CJUE/1978/CJUE61978CJ0007. (Consulté le 21 mai 2019 à 15 heures 32).

282 Une interdiction d'exporter des pièces en alliage d'argent d'un Etat membre qui, ayant eu cours légal dans cet Etat, n'ont plus cours, mais dont la fonte ou la destruction est interdite sur le territoire national, adoptée en vue d'empêcher que la fonte ou la destruction n'ait lieu dans un autre Etat membre, est justifiée par des raisons d'ordre public au sens de l'article 36 du traité. Cf. https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A61978CJ0007. (Consulté le 23 mai 2019 à 19 heures 31).

283 La Banque Centrale, une institution spécialisée de l'UEMOA (Art. 41 du Traité modifié) apporte une dérogation à la libre circulation des capitaux en soumettant à l'autorisation ou à des limitations, le transfert des capitaux hors UEMOA.

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généralement admis que la liberté de mouvement des capitaux est un des facteurs de leur promotion. Mais cette liberté se heurte à l'influence du principe de la souveraineté des Etats. En effet, tout Etat est souverain, et parce qu'il est souverain, il détermine sa politique économique et organise librement son espace économique. Il définit également la politique qu'il entend suivre tans vis-à-vis des opérations d'investissement qu'envisagent ses nationaux en territoire étranger que vis-à-vis des opérateurs d'investissement qu'envisagent les étrangers sur son territoire284.

Ces mêmes restrictions de la liberté de circulation s'observent abondamment dans l'espace bien que les principes de base relatifs à la libre circulation des personnes et des biens soient affirmés par le traité et repris par plusieurs normes pour leur mise en oeuvre285. Il faut aussi noter que ces restrictions s'observent également dans les universités et centres de formation où les citoyens doivent bénéficier des formations. Cette limitation s'observe ensuite au niveau de la liberté d'établissement pour certaines professions.

B- Les restrictions aux conditions et à la liberté d'accès à la formation et à l'emploi dans les Etats

Selon Jean Monnet286, l'intégration ne peut prospérer en dehors des milieux de formation ; elle ne peut non plus être viable sans la participation des professionnels. L'exemple de l'UE est indicatif en ce sens que la création d'un espace européen de l'enseignement supérieur, le développement des cursus intégrés ainsi que la mobilité des étudiants et des enseignants ont magistralement, consolidé et renforcé le sentiment d'appartenance à une même histoire, à une même culture et à une civilisation commune au sein des Etats membres287. Cette acception possède des restrictions majeures en droit communautaire. C'est le cas de l'UEMOA où les articles 92 et 94 du Traité

284 KANE Hamidou Salifou, ibibem.

285 Ibidem.

286 Jean Monnet, est un fonctionnaire international français, banquier international, promoteur de l'atlantisme et du libre-échange. Initiateur de de la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier, il est considéré comme un des « pères de l'Europe ».

287 SOW (Abdoulaye), op. cit., p. 354.

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énoncent des réserves relatives à la libre circulation notamment en matière d'établissement. En effet, le droit d'établissement est soumis à des formalités puis limité dans sa mise en oeuvre effective par la faculté donnée aux Etats à l'article 94 du Traité. Ledit article prévoit que : « les Etats membres peuvent maintenir des restrictions à l'exercice par les ressortissants d'autres Etats membres ou par des entreprises contrôlées par ceux-ci de certaines activités lorsque ces restrictions sont justifiées par des raisons d'ordre public, de santé publique, ou pour des raisons d'intérêt général ».

Si le Traité lui-même met des balises juridiques à la liberté d'établissement dans l'espace, les Etats membres de l'Union peuvent profiter de ce silence et avancer des arguments pour limiter cette liberté. Dans ce cas, des menaces permanentes guettent les citoyens pour le libre exercice de leur profession dans l'espace. Par exemple, les formalités d'établissement que ce soit pour les avocats, les experts comptables, les architectes, les pharmaciens ou les chirurgiens-dentistes peuvent être « alourdies » à dessein, à l'intérieur des Etats membres afin de décourager toute installation.

De même, diverses allégations peuvent être avancées pour décliner une autorisation d'exercer à un ressortissant d'un autre Etat membre de l'Union. Bien que des voies de recours soient prévues contre de tels agissements288, elles ne sont pas souvent utilisées par les citoyens de la communauté. Pour pallier à telles situations, l'Union devrait éditer plus de règlements que les autres modes de normes. En effet, en droit communautaire, le règlement est traditionnellement présenté comme l'acte directement applicable par excellence ; il est d'ailleurs la seule norme communautaire à laquelle les traités reconnaissent expressément cette qualité289.

288 Ibidem.

289 RIDEAU (Joël), op. cit., p. 872.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe