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Les transformations métropolitaines de Marseille

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par Grégoire Cizeron
Université Paris-Est Marne la vallée - Master Urbanisme, aménagement, transport spécialité stratégies métropolitaines 2013
  

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D. L'EPAEM : un jeu d'acteurs complexe dans une métropole complexe

Marseille est une ville qui suite aux délocalisations d'une partie du port, a connu de nombreux problèmes notamment sociaux. Aggravée en parallèle par un désengagement des politiques sur certains territoires, la situation marseillaise est problématique au début des années 1990. Néanmoins, l'État se décide pour intervenir ; nous allons donc plus précisément nous intéresser à la manière dont celui-ci intervient en étudiant le mode de gouvernance de l'EPAEM, puis nous verrons quels sont les autres acteurs publics et privés qui sont associés.

A. Mode de Gouvernance de l'EPAEM

Comme nous l'avons vu dans la première partie, l'Établissement Public d'Aménagement EuroMéditerranée fut créé le 13 octobre 1995, suite aux rapports Masson et Weiss. Bien que le projet ne soit pas encore bien défini, l'établissement public est tout de même mis en place et s'appuie sur une logique partenariale, suivant un schéma novateur.

Mobilisant très fortement sur les collectivités, l'EPAEM associe l'État, la région PACA, le département des Bouches-du-Rhône, MPM et la ville de Marseille. Si l'on s'intéresse aux financements de l'établissement public, il est prévu que l'État apporte 50 % de ceux-ci, que 25 % des financements soient soutenus par la ville de Marseille, et que le département et la région contribuent à hauteur de 10 % chacun au financement de l'EPAEM. MPM complète le financement avec un apport de 5 % du total. Bien qu'étant une opération d'intérêt national, la répartition du capital témoigne de la volonté d'État de ne pas assumer seul la responsabilité financière et politique du projet.

Figure 20 : Schéma de répartition des financements de L'EPAEM

10 %

25 %

10 %

5 %

50 %

État Ville Région Département MPM

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En associant ainsi les différentes collectivités au projet, l'État a souhaité engager une nouvelle forme de coopération entre acteurs locaux, en créant par là de nouvelles dynamiques. Ainsi dans un contexte post-décentralisation, l'État n'a pas offert un projet urbain totalement finalisé à la ville, mais il a permis d'instaurer un cadre institutionnel pouvant servir de bases pour une discussion entre les grands acteurs de l'aménagement.

« L'étude du jeu des acteurs tendrait ainsi à confirmer l'hypothèse d'une tentative de l'État de placer aujourd'hui Marseille dans une situation de non-retour qui obligerait, par la suite, les acteurs locaux à porter le projet à son terme » 40.

L'État instaure donc à travers Euroméditerranée un projet et une méthode. Tout en donnant les grandes lignes directrices, celui-ci se pose en coordinateur à travers l'EPAEM. Ce rôle de coordinateur est par ailleurs inscrit à l'article 3 du protocole de partenariat d'Euroméditerranée :

« La mission de l'EPAEM est de veiller à la cohérence du projet en liaison avec les différents maîtres d'ouvrage publics et privés et de réaliser sous sa propre maîtrise d'ouvrage les opérations d'aménagements visées dans le présent protocole » 4 1 .

Ainsi l'exemple de Marseille illustre bien les changements de l'action publique. Il met en avant le poids des dispositifs de coordination d'une action procédurale dans laquelle la mise en cohérence prend beaucoup d'énergie.

« La logique de partenariat dans les opérations d'aménagement ne modifie pas seulement les relations entre les acteurs, mais les acteurs eux-mêmes. Désormais chacun est centré sur la relation avec les autres avant de l'être sur sa propre tâche » 42.

Bien que plus long à mettre en oeuvre, le projet est cependant mieux accepté par les différents acteurs publics, car ceux-ci vont être impliqués dans le Conseil d'Administration de l'EPAEM. Avec une répartition proportionnelle au financement des sièges au conseil d'administration, les collectivités sont les vraies garantes de l'opération. Comptabilisant au total 20 membres, le CA de l'EPAEM compte 9 représentants de l'État, relevant de 6 ministères différents, 3 représentants de la ville de Marseille, et deux sièges pour les collectivités restantes. Un représentant du GPMM et une personnalité qualifiée nommée par le Premier Ministre siègent également au Conseil d'Administration de l'EPAEM.

Outil institutionnel dans lequel se prennent les décisions, le CA se réunit deux à trois fois par an, et est préparé par de nombreuses réunions des services techniques des différentes collectivités. C'est dans ces réunions entre services techniques que sont préparées les délibérations et décisions du Conseil d'Administration. De fait les réunions du CA sont souvent consensuelles et enregistrent des décisions et des accords pris en amont.

« Ainsi, théoriquement maître du processus décisionnel, l'EPAEM est en pratique tenu de composer avec ses partenaires locaux, tout en étant jugé seul responsable des transformations engagées sur le site. La situation est d'autant plus complexe que l'EPAEM est contraint, dans son fonctionnement quotidien, de s'appuyer sur des procédures - ZPPAU, OPAH, PRIÉ - dont il n'a pas la

40 B. Bertoncello, J.Dubois, Marseille Euroméditerranée accélérateur de Métropole, p.168.

41 Protocole de partenariat d'Euroméditerranée pour la période 2006-2012, p.6.

42A. Bourdin, L'émergence d'une nouvelle figure de l'aménagement.

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maîtrise, soit parce qu'elles échappent à ses compétences, soit parce qu'elles débordent de son périmètre » 43.

Les collectivités territoriales sont donc les vraies garantes de l'opération. De plus le consensus est obligatoire pour que l'opération suive son cours. La figure d'une maîtrise d'ouvrage forte est aussi remise en cause car l'EPAEM doit ainsi assurer la coordination d'une maîtrise d'ouvrage diversifiée. Il se doit de composer et de coopérer avec les autres acteurs publics. Bien qu'il s'agisse d'une OIN, l'État ne s'est pas comporté en « maître des lieux », mais a favorisé le discours et le consensus. Après plus de 20 ans, ce système a fait ses preuves : il a permis à chaque acteur de dépasser son champ de compétences en décloisonnant celles-ci, et a permis de monter un projet urbain ambitieux dans la cité phocéenne.

Par ailleurs, il faut remarquer que le mode de gouvernance de l'EPAEM a su résister aux aléas politiques. Ayant vu plusieurs gouvernements de bords opposés se succéder, et rassemblant des collectivités territoriales ne partageant pas toujours les mêmes idées politiques, l'EPAEM a su rassembler.

« Le consensus est solide parce que nous sommes partis d'une stratégie générale, fruit de longue discussions, et que nous avons recherché ensuite des solutions adaptées aux solutions particulières des partenaires mais toujours en nous référant à la stratégie définie collégialement » 44.

De plus, le projet urbain contrairement à d'autres villes françaises n'est pas personnalisé en la présence d'un maire ; ceci le renforce sans aucun doute. Le pilotage partenarial droite-gauche annihile toute tentative d'un élu de s'approprier le projet, et comme le confie A.Sorrentino : « L'EPAEM doit rester une structure indépendante de la ville, condition pour que la région et le département reste partenaires ». Contrairement à d'autres villes comme Lyon ou Bordeaux, le maire ne s'est pas identifié au projet urbain, et ne l'a jamais repris à son compte.

Cependant, si jusqu'à maintenant le consensus s'est bien passé, une élue de la ville de Marseille avoue qu' « aujourd'hui les financements ont changé, il faudrait aussi que la répartition au CA change » 45 . Bien que l'opération suive son cours, les rapports de force sont permanents au sein de l'EPAEM. L'État et la ville se confrontent sur le sujet de l'attribution des sièges du CA, ce qui montre aussi une volonté de la ville de s'impliquer plus dans le projet.

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43 B. Bertoncello, J.Dubois, Marseille Euroméditerranée accélérateur de Métropole, p.162.

44 Marseille Euromediterranée, la consultation pour Euromed Center,

45 entretien avec L. Caradec, le 28 novembre 2014.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe