WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Dématérialisation du service public. étude du lien entre médiation numérique et l’action sociale.


par Lauriane DEBAQUE
Université Toulouse Jean Jaurès - Master 1 Sciences de l'Education et de la Formation 2019
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

UFR Sciences, Espaces, et Société
Département Sciences de l'Education et de la Formation
Master 1 en Sciences de l'Education et de la Formation

Parcours Encadrement de Services dans la Santé et le Social
Année universitaire 2019/2020
Université Toulouse Jean Jaurès

Dématérialisation du service public :

Etude du lien entre médiation numérique et l'action sociale

Lauriane DEBAQUE

21509775

Sous la direction de Laurent TALBOT - Maître de conférences Sciences de l'éducation Présidente du jury : Michèle SAINT JEAN - Maître de conférences Sciences de l'éducation

2

Remerciements

Pour commencer, je tiens à remercier toutes celles et ceux qui ont participé, de près comme de loin, à l'éveil de ce questionnement sur les liens entre l'action sociale et le numérique. Les encouragements donnés, les opportunités proposées, les échanges réalisés, ... m'ont permis de faire évoluer ce questionnement et m'ont aidée à construire mon projet professionnel.

Je voudrais, par ailleurs, exprimer ma gratitude à tous les professionnels qui ont participé à cette réflexion en m'accordant du temps pour des échanges formels comme informels. Ceux-ci m'ont été précieux.

Merci également à mes collègues d'avoir mis en exergue mon appétence certaine pour le numérique et de l'avoir laissé éclore au sein de ma pratique professionnelle. Vos regards m'ont permis de me construire professionnellement. Merci pour la confiance accordée notamment par l'acceptation des changements vers un numérique facilitateur de pratiques. Je sais au combien le changement peut être vecteur de stress. Votre ouverture d'esprit me rend d'autant plus fière des valeurs que nous essayons de véhiculer.

Merci à Marie pour son enthousiasme et ses aides ponctuelles mais précieuses.

Je suis également reconnaissante envers Laurent TALBOT, mon directeur de mémoire, qui a su trouver les mots justes pour que cette recherche aboutisse. Il a eu la patience de laisser mon regard mûrir. Je remercie également Madame SAINT-JEAN pour son rôle de présidente du jury.

Je terminerais par remercier mes proches. En particulier mon conjoint pour sa patience, son soutien et son regard extérieur. Cela a été essentiel pour la prise de recul nécessaire à cet exercice.

Merci à mes parents et ma marraine, pour leur soutien inconditionnel, leurs regards diverses et leur amour sans faille. Vos relectures m'ont été essentielles.

3

Sommaire

Remerciements 2

Sommaire 3

Introduction 4

Partie 1. Eléments de contexte 6

Chapitre 1. L'action sociale : de l'assistance à une injonction à l'autonomie 6

Chapitre 2. La transition numérique : de la révolution à l'injonction 14

Partie 2. Eléments de problématisation 20

Chapitre 3. L'inclusion numérique : des fractures multiples 20

Chapitre 4. La médiation numérique : une réponse à la révolution numérique 25

Partie 3. L'enquête 33

Chapitre 5. Méthodologie 33

Chapitre 6. Traitements et analyses de données 40

Conclusion générale 55

Références 57

Annexes 63

Lexique 72

Table des matières 74

Résumé 76

4

Introduction

Educatrice spécialisée depuis cinq ans, j'occupe actuellement un poste de coordinatrice dans le champ de l'insertion. Parallèlement à mon goût pour le social, j'ai une réelle appétence pour les Technologies de l'Information et de la Communication (TIC). Avec un entourage familial aimant l'informatique, j'ai pu grandir en découvrant rapidement les avantages des nouvelles technologies : communiquer avec des membres de la famille à l'étranger, créer des montages vidéo à partir des photographies de vacances, ... Immergée dans ces possibilités et de nature curieuse, le numérique a souvent été, pour moi, un outil permettant de répondre à différents besoins.

Bien qu'ayant, auparavant, donné des cours d'informatique notamment de traitement de textes et/ou d'images ainsi que de messagerie ; c'est à la Haute Ecole de Bruxelles DeFré, en formation, que j'ai pu faire les premiers liens entre le social et les TIC. J'ai été sensibilisée à l'éducation aux médias ainsi qu'aux différentes approches du message médiatique. J'y ai révisé les compétences numériques de base en les mettant en lien avec les problématiques sociales pouvant être rencontrées dans mon secteur d'activité.

Au cours de mon parcours professionnel, l'outil numérique m'est rapidement apparu essentiel dans le quotidien des travailleurs sociaux et dans le cadre de l'accompagnement auprès des usagers. La prise de connaissance du programme « Action Publique 2022 » ne m'a pas laissé indifférente. J'ai été, de plus en plus régulièrement, amenée à accompagner au numérique pour l'ouverture de droits, les démarches d'insertion professionnelle mais aussi et simplement pour le lien social. Ainsi, je me suis progressivement aperçue des difficultés, des craintes, des réticences et des inégalités provoquées par le numérique que ce soit du côté des personnes accompagnées que celui des travailleurs sociaux. Ces différentes observations me questionnent et suscitent un désir de recherche sur l'impact de la dématérialisation du service public sur les pratiques des travailleurs sociaux.

Quel est le rôle des travailleurs sociaux face au développement des TIC et l'arrivée de problématiques sociales comme la fracture numérique ? Ces derniers sont-ils en capacités de répondre aux nouveaux besoins des usagers ? En ont-ils les moyens ? Tant de questions qui m'interpellent et m'amène à me demander :

La dématérialisation du service public inaugure-t-elle une évolution positive en faveur de l'empowerment des citoyens ou préfigure-t-elle d'un retour à une logique d'assistance ?

5

Nous pouvons dire que mes expériences personnelles et professionnelles façonnent mon objet de recherche. L'ignorer serait nier mon implication de « chercheuse » et de praticienne du travail social. L'émergence de mon questionnement de recherche résulte de l'analyse de mon parcours.

Avec pour objectif de faire émerger une problématique précise, il sera question, dans une première partie, de définir le contexte de la recherche. Nous étudierons, à partir d'une approche socio-historique, l'action sociale de ses origines à aujourd'hui. Cette étude nous amènera à mettre en évidence la professionnalisation de l'action sociale et le changement de paradigme de l'assistance vers l'accompagnement. Nous verrons que l'injonction à l'autonomie instaurée par les pouvoirs publics nous poussera à nous intéresser à la notion d'empowerment. Le contexte de révolution numérique sera étudié et l'injonction au numérique provoquée par la dématérialisation du service public sera mis en perspective.

Dans une seconde partie, nous verrons comment la transition numérique vient impacter l'empowerment des citoyens. Par l'étude plusieurs recherches, nous aborderons le sujet de la fracture numérique ou plutôt des fractures numériques. Il s'agira de mettre en évidence les difficultés rencontrées par les professionnels de l'accompagnement face à la transformation numérique. Il sera alors temps d'étudier le champ de la médiation numérique, ses dispositifs, ses acteurs et de nous questionner sur ses liens avec l'action sociale.

Le balisage de l'ensemble de ces notions nous mènera à nous demander :

En quoi une relation entre l'action sociale et la médiation numérique serait un vecteur en faveur de l'empowerment des citoyens ?

Les liens, ainsi que leurs qualités, entre médiation numérique et l'action sociale seront étudiés au travers des regards et des discours d'acteurs de la médiation numérique.

Nous procèderons, dans une troisième partie, au recueil, au traitement ainsi qu'à l'analyse des données. Les onze entretiens réalisés auprès de professionnels de la médiation numérique apporteront des éléments empiriques à la recherche.

Viendra le temps de conclure cette recherche, qui, je pense, se verra être à ses prémices.

6

Partie 1. Eléments de contexte

Chapitre 1. L'action sociale : de l'assistance à une injonction à l'autonomie

Les politiques sociales, l'intervention sociale, le travail social : les définitions sont diverses. Elles s'entremêlent ou bien se confrontent. L'ensemble est à replacer dans le champ plus vaste de l'action sociale au sein duquel j'ai choisi de situé mon objet de recherche.

L'action sociale, bien qu'ancienne, s'est structurée au fil des différentes crises de la société telles que les guerres et les révolutions. La révolution industrielle, en particulier, a marqué un tournant important vers sa professionnalisation. De Robertis (1994) précise que nous sommes passé de l'assistance (au XIXème siècle), à l'aide et la protection (entre 1904 et 1930), au suivi (entre 1930 et 1945), à la prise en charge (entre 1946 et 1970), puis à l'approche globale et à la notion d'intervention (entre 1970 et 1985) et finalement à l'accompagnement à partir de 1985.

1.1.L'action sociale au coeur de la révolution industrielle : de l'assistance à l'accompagnement

Bien qu'elles puissent s'inspirer de la Grèce Antique, les origines de l'action sociale sont vagues. Celles-ci sont évoquées, plus précisément, dans le contexte de la révolution industrielle (1820-1910). En effet, au début du XIXème siècle, l'action sociale se résume aux oeuvres de bienfaisance ainsi qu'à la charité induite par la religion et la philanthropie (Pascal, 2014). Le bénévolat est de rigueur : il n'y a pas de titres professionnels. L'assistance est au coeur des pratiques. Selon son étymologie, l'assistance est définie comme l'action d'« être présent auprès de quelqu'un » ; il s'agit d'aider en servant, de secourir (CNRTL, Assister). En effet, l'aide sociale est définie comme « l'ensemble des oeuvres d'assistance et de bienfaisance régies par les collectivités publiques » (CNRTL, Aide). Nous remarquons le terme d'aide qui renvoie bien à l'idée de charité. Ces définitions nous apportent un éclaircissement sur les pratiques prépondérantes de l'action sociale au cours la période préindustrielle.

Les années passent, et, au cours de la révolution industrielle, une transition s'opère entre l'engagement religieux et la professionnalisation de l'action sociale. Au début du XXème siècle, les premiers centres sociaux sont créés, leurs buts sont de préserver la santé des individus et de parvenir à limiter les éventuelles épidémies. En 1922, Mademoiselle Delagrange fonde l'Association des travailleuses sociales et revendique des valeurs « non politiques et non

7

confessionnelles » (Baudain, Pommier, & Pommier, 2015, p. 3). L'action sociale rompt ainsi avec la bienfaisance et la charité. La fin de cette transition s'effectue nettement à partir de 1938 avec la création du diplôme d'État d'assistante de service social (2015). De fait, la professionnalisation de l'action sociale est reconnue par l'État, et ce, à l'aube de la seconde Guerre Mondiale.

La période d'après-guerre est celle d'un fort développement des actions sanitaires et sociales. L'action sociale renforce son rôle : répondre aux besoins individuels et familiaux d'une population fragilisée. Le terme de prise en charge, fortement lié au secteur sanitaire, apparait. Il désigne « le fait de prodiguer des soins à un patient » mais renvoie également au fait de « se substituer à autrui » et d' « assumer une responsabilité » (Lintern@ute). La prise en charge contribuait à une stigmatisation des classes inférieures dans un rôle de dépendance et de soumission. Nous précisons qu'en psychologie, la dépendance est définie comme l' « état d'une personne qui est ou se place sous l'autorité, sous la protection d'une autre par manque d'autonomie » (CNRTL, Dépendance). La notion de prise en charge induirait donc l'idée que l'individu manquerait d'autonomie et qu'une forme de dépendance pourrait se dégager de la relation avec les assistants. Ces derniers devraient pallier au manque d'autonomie dans un principe de réparation (Paul, 2004). Djaoui (2002, p. 107) émet l'idée que « dans cette volonté d'aider se révèle un désir de réparer. On veut réparer ce qui a été détruit, mal formé, mal-aimé, méprisé, opprimé. » Nous comprenons qu'en se substituant à l'Autre ainsi qu'en se sentant responsable de ce dernier, les assistants sont amenés à prendre une posture de savant, de sauveur ; créant ainsi une dépendance et une soumission de la personne prise en charge. Ce dernier est alors perçu comme inférieur, placé sous l'autorité, la protection d'un être supérieur.

Par la suite, les Trente Glorieuses s'avèrent être une période de reconstruction puis de croissance pour l'action sociale. Grâce aux divers financements et au rapprochement avec le monde universitaire et les sciences humaines, un travail théorique et réflexif est entrepris. C'est ainsi que des pratiques sont théorisées et des diplômes reconnus ou réformés. Le terme travail social apparait au cours des années 1970 ; la professionnalisation de l'action sociale est ancrée. L'Etat poursuit la reconnaissance de cette dernière et tente de d'éclaircir son rôle : le 30 juin 1975, la loi N°75-535 relative aux institutions sociales et médico-sociales vient confirmer l'identité du secteur social et médico-social par rapport au secteur sanitaire. Donnant suite à cette distinction, le secteur social et médico-social s'ordonne.

8

La loi N°2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant la loi de 1975 vient préciser que l'action sociale « tend à promouvoir, [...] l'autonomie et la protection des personnes, la cohésion sociale, l'exercice de la citoyenneté, à prévenir les exclusions et à en corriger les effets. » (Legifrance, 2002). Cette loi permet de clarifier la place de l'usager : celui-ci est au coeur de la prise en charge. Dans un contexte social laissant plus de place à la participation active et à l'initiative de l'usager, la notion de d'assistance connote fortement d'une attitude passive à l'autre et devient péjorative.

Dans leur article, Kertudo et Vanoni (2014, p. 8) définissent le travail social comme « un processus organisé d'accompagnement des personnes et des groupes, visant à leur faire retrouver leur autonomie. ». La finalité du travail social est d'augmenter l'autonomie de l'individu par des interventions qui permettent d'aider sans assister, de soutenir sans dominer (Chambon, David, & Devevey, 1982) : une rupture s'opère avec l'assistance.

1.2.L'action sociale aujourd'hui : l'accompagnement entre injonction à l'autonomie et levier d'empowerment

Au cours des années 70, le travail social reconnu, la crise économique dû au choc pétrolier de 1973 a soumis les pratiques sociales à une remise en question (Le Bossé, Dufort, & Vandette, 2004, p. 91). Il a été question, comme l'évoque Paul (2016, p. 25), de « repenser le fonctionnement d'un Etat-providence qui, par sa logique distributive, a conduit à l'assistanat des couches de population répertoriées, catégorisées ». L'assistance n'est plus de rigueur et laisser place à l'accompagnement.

Qu'entendons-nous par accompagnement ? L'étymologie du verbe accompagner : accum-pagnis, ac (vers), cum (avec), pagnis (pain) renvoie à la notion de partage. A partir de cette étymologie, Paul (2012) nous donne la définition suivante : « Se joindre à quelqu'un / pour aller où il va / en même temps que lui ».

Dans leur ouvrage, Ion & Ravon (2005, p. 81) exposent l'accompagnement comme une démarche ne pouvant être construite sans le consentement de l'usager. Ils précisent qu' « accompagner, c'est faire un bout de chemin avec l'autre, et non pour ou malgré lui ; lequel est considéré comme une personne à part entière, un acteur plutôt qu'un patient. ». Ainsi, nous comprenons que l'accompagnement s'exerce au sein d'une relation et qu'il est un processus ou l'Autre n'est pas perçu comme dépourvu ou insuffisant. Cette définition est

9

confirmée et complétée au sein du Dictionnaire de l'enseignement et de l'éducation spécialisée où « l'accompagnement mise sur les capacités des personnes à développer leur autonomie, [il] doit permettre l'émergence du désir, moteur actif de la démarche à entreprendre et permettre à l'autre de trouver des moyens de réaliser ses objectifs individuels. » (Fuster & Jeanne, 2004). Cela nous précise que l'accompagné est acteur de son projet.

Paul (2016, p. 25) précise que nous serions donc passé « d'une logique de réparation, centrée sur les manques les déficiences, les retards, [...] à une logique d'optimisation, valorisant les capacités et les ressources ». L'accompagnement devient progressivement un phénomène social qui gagne tous les secteurs professionnels. Ce terme est introduit dans le vocabulaire professionnel et vient peu à peu à être utilisé par les pouvoirs publics. Elle ajoute que : « l'accompagnement est une commande sociale, c'est souligner qu'il s'inscrit dans une nouvelle logique sociale, les politiques sociales sont maintenant des politiques d'accompagnement qui s'appuient sur une nouvelle norme, l'autonomie.» (Paul, 2011, p. 61). L'autonomie est commande sociale qui se déploie à travers une relation contractuelle ou l'implication est recherchée : les acteurs sont partenaires. Les politiques d'insertion mettent en évidence cette nouvelle norme et instaure une forme d'injonction à l'autonomie (Duvoux, 2009).

Des dispositifs d'accompagnement se mettent en place. Prenons l'exemple du Revenu Minimum d'Insertion (RMI), le contrat d'insertion a pour objectif d'impliquer l'individu dans sa démarche de réinsertion professionnelle et sociale. Toute personne demandant cette allocation s'engage à participer aux actions nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle. La notion d'autonomie devient alors paradoxale : « les personnes sont invitées à se débarrasser des liens de dépendance pouvant constituer une entrave à leur autonomie, mais cet appel à l'agir et au rôle d'acteur peut rendre à son tour dépendant et limiter l'autonomie des personnes peu prêtes à cette démarche. » (Alberola & Dubéchot, 2012, p. 147). Liée contractuellement à un accompagnement, cette injonction à l'autonomie est devenue paradoxale. L'individu peut devenir dépendant de cet accompagnement et avoir des difficultés à acquérir le niveau d'autonomie recherchée.

Pour les politiques publiques, l'autonomie à acquérir est proche de ce que l'on appelle l'autonomie sociale qui « correspond à l'idée de bénéficier d'un certain confort matériel de base notamment en termes de logement, de santé... » (Chauffaut & David, 2003). Néanmoins, dans la société, l'autonomie est plus généralement perçue comment une « notion de liberté

10

individuelle » (2003). Paul (2011, p. 61) défini l'autonomie comme : « l'aptitude d'une personne à s'intégrer de manière individuelle dans la société par opposition à la situation d'assistance de tiers et des pouvoirs publics [...]. Le terme d'autonomie correspond ici à la capacité à s'autogérer. » Le terme autonomie renvoie à la capacité de l'individu de faire des choix dans sa vie. « L'objectif est alors de permettre aux personnes de résoudre par eux-mêmes leurs propres problèmes, mais en les accompagnant. Ainsi accompagner vise à permettre la prise en charge de soi par soi. » (Paul, 2012). En ce sens, elle s'approche de la notion de pouvoir d'agir.

Les commandes sociales et sous sa forme injonctive rendent la notion d'autonomie peu à peu négative. Elle est progressivement négligée et donne place au pouvoir d'agir, à la capacité d'agir qui renvoient à la notion anglosaxonne d'empowerment, qui, quant à elle, a une image plus positive. « Le contexte d'origine de [l'empowerment] est à situer dans le cadre de l'action de mobilisation collective et des mouvements sociaux aux États-Unis dans les années 1960-1970, en particulier dans les luttes, fondées sur des revendications citoyennes, contre la discrimination raciale et pour les droits des femmes... » (Rhéaume, 2019, pp. 127-129). C'est au cours des années 2000 que cette notion fait son apparition en France.

« L'empowerment articule deux dimensions : celle du pouvoir qui constituent la racine du mot et celle du processus d'apprentissage pour y accéder. » (Bacqué & Biewener, 2015, p. 16). Au regard de ces deux dimensions, la traduction en français est complexe. « Les termes autonomisation, émancipation ou capacitation s'ils indiquent bien un processus ne font cependant pas référence à la notion de pouvoir qui constituent la racine du mot, les expressions « pouvoir d'agir » où « pouvoir d'action » ne rendre quant à elle pas compte du processus pour arriver à ce résultat et de sa dimension collective » (Bacqué & Biewener, p. 17).

En effet, l'autonomisation peut être définie comme un processus qui mène à acquérir plus d'autonomie. Bacqué et Biewener (Bacqué & Biewener, p. 307) nous précise : « le projet néolibéral d'autonomisation vise à produire un individu entrepreneur, consommateur, sujet efficace et responsable, agissant selon un rationalité présumée universelle du calcul coût/bénéfice. » Nous comprenons ici tout le sens de la logique d'optimisation de l'Etat évoquée par Paul. Néanmoins, bien que l'empowerment a une visée de transformation de l'individu, ce ne sont pas les mêmes individus qu'il s'agit et ce ne sont pas les même subjectivités qui sont mises au travail. » (Bacqué & Biewener)

11

L'émancipation, quant à elle, renvoie à une idée de liberté. Il s'agit de couper avec la dépendance, de s'affranchir d'une autorité (CNRTL, 2020). Cette définition est marquée par une idée d'éloignement : il ne s'agit pas là de participer au fonctionnement de la société, elle désigne une démarche d'affranchissement personnelle ou collective (Lee, 1994). La capacitation, « désigne la capacité qu'on les gens de gagner du pouvoir d'agir sur leur vie » (GIS M@ARSOUIN, 2017). Cette définition peut donner l'idée que certaines personnes seraient capables et d'autres non.

Le pouvoir d'agir « passe tant par la capacité à participer à vie sociale et politique, que par le fait de saisir des opportunités pour se former, augmenter son pouvoir d'achat, s'insérer professionnellement » (GIS M@ARSOUIN). Le pouvoir d'agir « passe tant par la capacité à participer à vie sociale et politique, que par le fait de saisir des opportunités pour se former, augmenter son pouvoir d'achat, s'insérer professionnellement » (2017). Dans ces déclinaisons, nous constatons l'absence de la notion de processus.

L'empowerment peut être défini comme un processus d'apprentissage, d'évolution permettant de gagner en autonomie, en capacité, en connaissances, en compétences, .... Ce gain offrant la possibilité de participer au développement et au fonctionnement de la société.

L'empowerment, par son image positive, devient progressivement l'objectif recherché par l'accompagnement social. Le décret n° 2017-877 du 6 mai 2017 (Legifrance, 2017) relatif à la définition du travail social met en évidence cette évolution en précisant que :

Le travail social vise à permettre l'accès des personnes à l'ensemble des droits fondamentaux, à faciliter leur inclusion sociale et à exercer une pleine citoyenneté. Dans un but d'émancipation, d'accès à l'autonomie, de protection et de participation des personnes, le travail social f...] participe au développement des capacités des personnes à agir pour elles-mêmes.

Ce décret clarifie la loi du 2 janvier 2002. Il insiste sur la notion d'autonomie et met en avant la visée d'émancipation : la personne est considérée comme sujet actif. Nous comprenons que les travailleurs sociaux ont pour mission d'accompagner les personnes vers une autonomisation. En ce sens, ce décret nous amène à comprendre que le travail social agit en faveur de l'empowerment des citoyens.

12

Selon le Haut Conseil en Travail Social (2018) , il peut se décliner selon trois aspects :

- « Le pouvoir de » : développement individuel des compétences personnelles (confiance en soi, estime de soi, sentiment d'utilité, sens critique...)

- « Le pouvoir avec » : capacité à agir avec les autres, et sur son environnement

- « Le pouvoir sur » : pouvoir du citoyen à agir sur les politiques sociales, voire participer à leur transformation

Ces aspects apparaissent comme différents niveaux. Le niveau micro avec le pouvoir de qui concerne l'individu, le niveau méso avec le pouvoir avec comprenant l'individu et son environnement et le niveau macro avec le pouvoir sur qui concerne l'individu, son environnement et l'ensemble de la société. Nous pouvons donc dire qu'il s'agit de gagner en autonomie, en confiance en soi avant de pouvoir agir autour de soi et avec son environnement ce qui, par la suite, permettrait d'agir collectivement sur la société.

Dans leur article, Le Bossé, Dufort et Vandette (2004, p. 96), construise une grille d'évaluation de l'empowerment d'après plusieurs dimensions dont la motivation à agir, le sens du contrôle perçu et le sentiment d'efficacité personnel. Ces critères évaluables nous interpellent sur le fait que l'empowerment semble évaluable, il y a donc des degré d'empowerment. Cela nous renvoie également au différents niveaux précités. De plus, la construction de cette grille d'évaluation nous fait remarquer que l'empowerment dépend de la motivation à agir, du sentiment d'efficacité personnel... Il convient de dire que les prérequis à un plus grand empowerment sont la confiance en soi, l'estime de soi, la motivation... au même titre que le consentement est un prérequis à l'accompagnement. Bacqué & Biewener (2015, p. 117) nous précise que l'empowerment serait « un processus socio-politique, articulant l'acquisition d'une conscience de soi, d'une estime de soi d'une conscience critique et le développement de capacités individuelles avec l'engagement, la mobilisation et l'action collective pour une transformation sociale. » Il s'agit d'acquérir, dans un premier temps, une capacité et une volonté à agir pour s'extraire des lien de dépendance et aller vers une autonomisation et une participation sociétale.

13

Synthèse du chapitre 1

Lors de la période préindustrielle, l'action sociale relevait de la charité et du bénévolat. L'assistance étant de rigueur. L'individu dans le besoin était perçu « comme objet à réparer, problème à résoudre, dossier à traiter » (Paul, 2004) : il était assisté, pris en charge. La révolution industrielle et la période d'après-guerre ont accru le développement de l'action sociale : il est question de répondre à de nouveaux besoins. C'est un tournant dans le processus de professionnalisation de l'action sociale. Des lois sont venues la reconnaître, l'encadrer et la clarifier. Les pratiques ont évolué. L'individu est progressivement perçu comme « sujet actif, autonome et responsable » : l'accompagnement est le nouveau mot d'ordre. Les politiques sociales s'organisent : l'autonomie est l'objectif recherché ; les dispositifs d'accompagnement se multiplient : il est alors question d'injonction à l'autonomie. Perçue négativement, la notion d'autonomie laisse place à celle d'empowerment. Les travailleurs sociaux ont pour mission d'accompagner le processus d'évolution permettant de gagner en autonomie, en connaissances, en compétences et d'avoir la capacité d'agir au sein et pour la société.

Plus récemment, nous avons connu une nouvelle révolution : la révolution numérique. Cette dernière bouscule les pratiques personnelles comme professionnelles. Nous allons voir comment cette révolution vient agiter l'action sociale et peut freiner l'empowerment des citoyens.

14

Chapitre 2. La transition numérique : de la révolution à l'injonction

Comme nous venons de le voir, la révolution industrielle a incité notre société, et ici l'action sociale, à s'organiser, se structurer. Depuis quelques années, les technologies numériques prennent de plus en plus de place dans notre quotidien. Les Technologies de l'Information et de la Communication (TIC) bouleversent notre société : elles redéfinissent nos modes de fonctionnement dans notre vie personnelle et professionnelle ; elles modifient nos façons de communiquer, d'accéder à la connaissance, de produire, etc. Nous parlons de révolution numérique. Cette révolution n'épargne pas l'action sociale qui doit faire face à ce que l'on appelle la transition numérique.

2.1.De la révolution numérique à la dématérialisation

Tout d'abord, qu'entend-on nous par numérique ? Le terme numérique est employé par opposition à analogique : il définit le codage, le stockage et la transmission d'informations sous forme de chiffres. En effet, le traitement numérique de l'information utilise le mode binaire (CNRTL, Numérique). Ce terme est utilisé en informatique ; l'informatique étant la science du traitement rationnel et automatique de l'information. Au sein de ce travail, nous utiliserons le terme numérique comme « le mode contemporain et dominant de traitement de l'information. » (Meyer, 2014, p. 55).

Les Technologies de l'Information et de la Communication désignent l'ensemble des technologies permettant de traiter des informations numériques et de les transmettre. Elles représentent tous les outils à notre disposition en termes de télécommunication, d'informatique, d'audiovisuel, de bureautique, de logiciel, d'internet, de multimédia... (Baumann, 1996-2020)

La révolution numérique a démarré en 1970 par l'invention du microprocesseur, de l'ordinateur, des logiciels, des réseaux et d'internet. Aujourd'hui, ces technologies ne cessent de se développer : nous le constatons avec la robotique, les objets connectés mais également avec l'Intelligence Artificielle (IA). L'ensemble de ces évolutions impactent les divers secteurs d'activités. Elles sont notamment visibles dans les secteurs du commerce avec l'achat en ligne ; de la santé avec l'utilisation des objets connectés pour le suivi de patients, de la robotique en assistance aux professionnels ; de l'éducation avec l'e-learning en complément du système académique, etc. Nous parlons de « transition numérique ». Il est question d'un

15

processus qui permet aux entreprises d'intégrer les TIC au sein de leurs activités. Cette transition devient indispensable pour la compétitivité des organismes. Elle présente plusieurs enjeux pour ces derniers.

Pour commencer, la transition numérique offre la possibilité d'une meilleure collaboration entre employés. Elle permet une organisation et communication transparente au quotidien mais également à distance, en télétravail : comme bon nombre de personnes ont pu l'expérimenter récemment en raison de la crise sanitaire. Elle présente des enjeux d'ordre économiques. En effet, cette transition permet l'accès à des connaissances ; l'automatisation d'actions et un gain en performance qui entrainent une réduction des coûts possible. De plus, transformer l'organisation grâce au numérique permet de gagner en attractivité mais également de rester compétitif. Enfin, d'un point de vue écologique, il faut également souligner les enjeux parce que nombre de sociétés, nombre d'associations, de services se sont lancés dans des démarches de développement durable. Ces structures peuvent, réduire leurs consommations en bénéficiant de solutions de type CLOUD (stockage de serveurs informatiques distants) par exemple ; mais aussi grâce à la dématérialisation.

La dématérialisation peut être définie par deux opérations. La première consiste en la numérisation de documents afin qu'ils soient sous format électronique. La seconde s'effectue par la création d'un document nativement électronique (Julian, 2016). Elle gagne de plus en plus les établissements publics et privés de France. Elle se répand et accélère au sein de tous les services essentiels à notre quotidien : banques, santé, scolarité, logement, énergie, mobilité...

A la suite de diverses commandes sociales, pour des raisons de traçabilité et de production de données statistiques, le développement des techniques informatiques s'est systématisé. Puis, dans un souci de partage d'informations au sein des équipes et de continuité de service, l'utilisation de dossiers et de fichiers numériques s'est étendue. Il est à noter que l'informatisation des dossiers permet une simplification de partage d'informations, une traçabilité des données, des échanges et une rapidité d'accès aux informations par la centralisation de ces dernières (Chrétien, Gilson, Janssen, & Picavet, 2018).

L'action sociale n'échappe pas à ces changements. L'Etat se saisit pleinement de ces évolutions et des avantages offerts par la dématérialisation : il décide de dématérialiser le service public.

16

2.2. La dématérialisation du service public : vers une injonction au numérique

Dès 2013, le Gouvernement annonce un choc de simplification des démarches administratives. Le 7 octobre 2016, le Gouvernement instaure une loi dite numérique. Un des objectifs de cette loi est d' « adopter une approche progressiste du numérique, qui s'appuie sur les individus, pour renforcer leur pouvoir d'agir et leurs droits dans le monde numérique » (Legifrance, 2016). Pour ce faire, la loi s'organise autour de trois axes : « la circulation des données et du savoir, la protection des individus dans la société du numérique et l'accès au numérique pour tous ». Nous constatons ici une volonté de l'Etat d'impliquer l'ensemble des individus à ces évolutions technologiques ainsi qu'un souhait de dynamiser le pouvoir d'agir. Un an plus tard, en octobre 2017, le Gouvernement lance le programme "Action Publique 2022" visant la transformation de l'administration publique. Ce programme a pour objectifs : « 100 % de services publics dématérialisés à horizon 2022 et améliorer la qualité des services publics en travaillant à la simplification et la numérisation des procédures administratives pour les usagers » ( Gouvernement.fr, 2018). Par « procédures administratives » nous entendons ici toutes démarches visant l'ouverture et le maintien de droits sociaux. Cette ambition se justifie, par l'idée que la dématérialisation des procédures administratives permettrait de simplifier l'accès aux informations ou aux documents administratifs en supprimant les files d'attentes des services publics. Ainsi, elle permettrait d'améliorer l'accès aux droits de certains usagers et de lutter contre le non-recours dû à la complexité actuelle des démarches.

De nos jours, la déclaration d'impôts ainsi que le paiement de ces derniers s'effectuent en ligne. Concernant la Caisse Nationale d'Allocations Familiales, les demandes d'aide sociale sont dématérialisées. Les inscriptions à Pôle Emploi, les commandes de carte d'identité, les demandes de remboursement à la sécurité sociale, les demandes de logement social, etc... sont dématérialisées (Baena & Rachiq, 2018, pp. 69-70). Les guichets ferment, les accueils physiques se font sur rendez-vous et sont à demander en ligne et les demandes doivent être préremplies via des formulaires dématérialisés. Le numérique devient omniprésent et « tend à devenir une clé d'entrée pour toute vie administrative, scolaire, professionnelle voire sociale » (Meyer & Delahaye, 2017, p. 16). Les citoyens sont donc soumis à une forme d'injonction au numérique. Avec le lancement du programme Action Publique 2022, l'Etat souhaite dynamiser le pouvoir d'agir des citoyens. Néanmoins ce souhait s'avère être en contradiction avec cette injonction au numérique.

17

Comme pour l'injonction à l'autonomie instaurée par la mise en place du contrat RMI, par ce programme, l'Etat contraint les citoyens à acquérir une certaine autonomie numérique.

Dans leur rapport Les bénéfices d'une meilleure autonomie numérique, Baena et Rachiq (2018, pp. 23-24) nous font part des plus-values d'une plus grande autonomie numérique pour divers domaines :

- économie : les sites d'e-commerce permettent d'accéder à des prix parfois plus attractifs ; - emploi et formation : la maîtrise des outils numériques permet d'augmenter le nombre d'emplois pour lesquels une personne est qualifiée. Les sites de recherche d'emploi peuvent réduire le temps nécessaire aux démarches et donc la durée du chômage ;

- inclusion sociale et bien-être : internet permet de réaliser des gains de temps importants dans de nombreux domaines. Les réseaux sociaux et les applications de messagerie peuvent réduire l'isolement ;

- relation avec les services publics : de nombreuses démarches administratives peuvent être réalisées en ligne, permettant de limiter les déplacements physiques et donc gagner du temps.

Nous sommes forcés de constater qu'une meilleure autonomie numérique favoriserait l'empowerment du citoyen. En effet, une meilleure employabilité, un gain de pouvoir d'achat, une participation active à son environnement... sont autant d'éléments signalants que l'autonomie numérique est vectrice d'empowerment.

Cependant, nous avons vu que l'empowerment se développait théoriquement à partir de motivation à agir et de sentiment d'efficacité personnel. La contrainte faisant du numérique un passage obligé à toutes démarches pourrait quant à elle être un frein à l'empowerment. L'Etat semble reproduire le schéma mis en place avec le contrat d'insertion qui masquait une injonction à l'autonomie en cachant l'injonction au numérique par cette volonté de dynamiser l'empowerment.

18

Synthèse du chapitre 2

La révolution numérique, par le biais des nouvelles TIC, offre de nouvelles possibilités ; elle amène des changements de pratiques. Elle pousse les particuliers, les entreprises et les différentes organisations à revoir leur fonctionnement, leur organisation, leur gestion, etc... La dématérialisation, est un des grands changements apportés par cette révolution, elle touche tous les secteurs d'activité. L'Etat s'en saisit pour revoir l'organisation et l'offre du service public. C'est ainsi que, mettant en avant une volonté de simplification des démarches et de dynamisation du pouvoir d'agir, l'Etat lance un plan visant la dématérialisation totale des procédures administratives. Ce plan amène de nouveaux besoins comme l'autonomie numérique et met en exergue une nouvelle injonction : celle du numérique. En effet, les nouvelles technologies deviennent indispensables à la vie dans la société. La dématérialisation de l'ensemble des secteurs d'activité et de surcroit celle du service public fait du numérique un passage obligé pour toute inclusion au fonctionnement de la société. Cette dématérialisation peut entrainer le développement de l'empowerment comme elle peut le freiner.

19

Conclusion de la partie 1

La révolution industrielle, par ses bouleversements et l'apparition de nouveaux besoins, a incité l'action sociale de s'organiser, se structurer. La période d'après-guerre a permis à l'action sociale de se professionnaliser. Les pratiques sociales, l'assistante en particulier, ce sont vues être remises en question. L'accompagnement est devenu la nouvelle norme. La visée d'autonomie est devenue l'objectif commun qui a permis aux politiques d'insertion de se structurer et aux dispositifs d'accompagnement de se déployer. Les relations contractuelles se sont développées et l'autonomie a pris peu à peu une forme d'injonction.

L'empowerment, notion plus positive apparait, et peut être défini comme un processus d'apprentissage, d'évolution permettant de gagner en autonomie, en capacité, en connaissances, en compétences, .... Et ainsi de participer à la société. En ce sens nous retenons la définition de Bacqué et Biewener (2015, p. 310) « un processus socio politique qui articule une dynamique individuelle d'estime de soi et de développement de ses compétences avec un engagement collectif et une action sociale transformative. »

Depuis quelques années, nous connaissons un nouveau bouleversement : la révolution numérique. Cette dernière vient créer de nouveaux besoins, elle modifie les pratiques. L'action sociale n'est pas épargnée.

L'Etat se saisit des évolutions induites par la transition numérique et met en place la dématérialisation du service public. Cette dématérialisation instaure une injonction au numérique, contraint à l'acquisition d'une autonomie numérique.

L'autonomie numérique recherchée par les pouvoirs publics permettrait de favoriser l'empowerment. Cependant, le caractère injonctif de ce numérique omniprésent, le manque de consentement des usagers ne pourraient-ils pas initier un retour à une forme de dépendance ? Comme la révolution industrielle qui l'a précédée, la révolution numérique ne viendrait-elle pas créer de nouveaux besoins ? Des questions qui nous invitent à nous demander :

La dématérialisation du service public inaugure-t-elle une évolution positive en faveur de l'empowerment des citoyens ou préfigure-t-elle d'un retour à une logique d'assistance ?

20

Partie 2. Eléments de problématisation

Chapitre 3. L'inclusion numérique : des fractures multiples

Nous avons pu voir que la révolution numérique avait conduit à la dématérialisation dans un bon nombre de secteur d'activité et qu'il en était de même pour le service public.

Par cette dématérialisation, l'Etat a pour objectif de dynamiser le pouvoir d'agir des citoyens. Néanmoins, la fracture numérique déjà présente pourrait s'étendre en raison de l'injonction au numérique que la dématérialisation provoque. Les publics en situation de précarité en raison de leurs situations sociales, financières mais aussi leurs handicaps ou leurs déficiences ne risqueraient-ils pas d'être poussés vers les portes de l'exclusion ? Quel impact la dématérialisation a-t-elle sur l'accompagnement social effectué par professionnels de l'action sociale ?

3.1. Quand la fracture numérique se cumule avec la fracture sociale

L'enquête Capacity (GIS M@ARSOUIN, 2017) nous indique que la population éloignée du numérique compte environ 14 millions de personnes et représente 28 % de la population française des plus de 18 ans. Cette enquête nous précise que 16% de la population française de plus de 18 ans est considérée comme non-internaute, 99% d'entre eux ont plus de 50 ans. Quant au 84% d'internautes, qui ont utilisé Internet au moins une fois dans les trois derniers mois, elle distingue quatre groupes de population en fonction de leur rapport au numérique :

· Les hyperconnectés (31%). Ils ont de bonnes compétences numériques, ils se déclarent à l'aise avec l'utilisation d'Internet. Ces personnes utilisent Internet de manière diversifié, pour l'apprentissage et l'information, mais aussi pour le divertissement et la consommation.

· Les utilitaristes (38%). Ils ont des compétences numériques, ils sont plutôt à l'aise sur Internet. Il s'en serve pour se divertir s'informer ou communiquer, pour consommer... mais de manière moins intensive et systématique que les hyperconnectés.

· Les internautes traditionnels (17%). Ils ont de faibles compétences numériques mais se sentent à l'aise sur Internet. Leurs usages sont moins diversifiés que les profils précédents.

· Les distants (14%). Ils manquent de compétences numériques de base, ils ne se sentent pas à l'aise dans leurs usages sur Internet. Ils s'en servent pour se divertir.

21

Lorsque nous prenons en considération la diversité de la population ainsi que les problématiques sociales comme les situations de handicap et/ou de déficience, d'illettrisme, de précarité ; l'accessibilité au numérique pour tous est à questionner. Ces publics, pouvant être relativement autonome dans leurs démarches administratives matérialisées peuvent facilement être fragilisés par la dématérialisation du service public. Leur capacité à agir pour eux même peut être impactée par le manque d'accessibilité que cela soit par le manque de matériel et/ou de connaissances et compétences.

L'illectronisme, autrement dit l'illettrisme numérique, découle de l'illettrisme ; il désigne l'absence de connaissances clés en matière de numérique. Les résultats de l'enquête sur l'illectronisme (CSA Research, 2018) indiquent que 15 % de la population française (âgée de 18 ans et plus) rencontrent des difficultés avec les nouvelles technologies. La simplification des démarches offerte par la dématérialisation et annoncée par l'Etat ne semble pas réaliste. Selon le rapport Baromètre du numérique 2017 (CREDOC, 2017), cela concerne aussi les jeunes, car un quart des 18/25 ans déclarent craindre les démarches administratives en ligne. En effet, bien que possédant un smartphone et surfant sur les réseaux sociaux, les jeunes peuvent se retrouver en difficulté pour ouvrir des droits à la sécurité sociale ou au RSA, ces démarches peuvent nécessiter d'un apprentissage spécifique. La fermeture des guichets d'accueil ne semble pas être en adéquation avec la volonté de l'Etat de dynamiser le pouvoir d'agir.

L'enquête réalisée par le Défenseur des droits (2019) montre que la dématérialisation des services publics viendrait simplifier l'accès aux droits de la majorité des personnes mais que des difficultés fréquentes, qui touchent 12 % des usagers, se concentrent sur un public jeune, vulnérable et/ou en situation de précarité, peu à l'aise dans les démarches administratives. Ce public fragilisé est aussi le plus susceptible d'abandonner les démarches à la suite de difficultés. Le risque est que la dématérialisation des démarches administratives s'accompagne d'une augmentation du non-recours aux droits contrairement à ce qui peut être souhaité par l'Etat.

Le non-recours renvoie à « toute personne éligible à une prestation sociale qui ne la perçoit pas » (Warin, 2016). Les chercheurs de l'Observatoire des non-recours aux droits et aux services (Dewez, 2018) précisent que la dématérialisation de l'administration publique peut accentuer deux sortes de non-recours :

22

- la non-réception des prestations par une personne qui va connaître un incident en remplissant en ligne un formulaire pour l'ouverture de ses droits, et dont la démarche va s'arrêter net, faute de dialogue avec un agent.

- la non-demande pour certaines personnes qui refusent le principe même de la dématérialisation ou qui n'ont pas confiance et qui expriment leur désaccord avec le système en ne demandant pas le service ou la prestation auxquels elles ont droit.

Enfin, Meyer et Delahaye (2017, p. 16) mettent l'accent sur un élément non négligeable de cette fracture numérique en demandant « pourquoi [les personnes éloignées du numérique] devraient-elles subir l'exploitation de leurs données là où les personnes les plus incluses en limiteront les accès ». En effet, les publics les moins aguerris dans les usages sont également ceux qui auront le plus de difficultés à protéger leur données. Cela montre bien que leur capacité à agir pour eux-mêmes est restreinte par le manque de connaissances et compétences numériques.

3.2. Quand les acteurs sociaux sont face à leur propre fracture

Nous venons de mettre en évidence différentes problématiques rencontrées par les personnes, impactant leur accès, leur compréhension et leur utilisation des TIC ; celles-ci étant pourtant de plus en plus essentielles à l'accès aux droits. Nous constatons que l'injonction au numérique peut, créant bon nombres de besoins, peut rendre les citoyens dépendant d'une aide sociale. C'est ainsi que les citoyens se voient solliciter les diverses structures de l'action sociale.

Un regroupement d'associations s'alarmait en 2016, dans une tribune que
la dématérialisation constitue un facteur d'exclusion supplémentaire :

La dématérialisation des services publics fait d'Internet un passage obligé pour accéder à ses droits ; ces publics en difficulté affluent déjà vers les guichets d'aide sociale. Ils viennent chercher de l'aide pour s'inscrire [...] ou pour actualiser leurs droits. Les effectifs étant insuffisants pour traiter ces demandes croissantes d'accompagnement, ils sont redirigés vers les associations de solidarité et auprès des professionnels de l'accompagnement social » (Collectif à l'initiative d'Emmaus Connect, 2016).

Les travailleurs sociaux se retrouvent alors acteurs de première ligne face aux fractures numériques des publics. Ils se trouvent interpelés par les quelques cinq millions de Français identifiés par Emmaüs Connect comme étant à la fois en situation d'exclusion numérique et

23

sociale. Cependant, ces professionnels de l'accompagnement social n'ont pas été préparés, formés à ces nouvelles demandes.

Dans son travail de recherche, Della Torre (2017, p. 32) met en évidence la dichotomie existante entre le travail social : profession de la relation humaine avec des valeurs comme l'importance du sensible, de l'intime ; et les nouvelles technologies représentées comme abstraites et désincarnées, qui connotent fortement d'une approche de la robotique et donc d'une forme de déshumanisation. Cette dichotomie s'avère être un premier frein dans l'acceptation de la dématérialisation pour les acteurs sociaux.

Avec l'objectif d'étudier le sujet choisi et la volonté de prendre de la distance sur mes propres préjugés, j'ai réalisé une enquête exploratoire par questionnaires (Annexe 1). Celle-ci a été diffusée en ligne et a obtenue 320 réponses de la part de divers professionnels de l'action sociale. Etant le champs professionnel le plus impacté par la dématérialisation des démarches administratives, j'ai fait le choix d'étudier les réponses des professionnels de l'insertion (61 réponses). D'après l'échantillon sélectionné :

- 93.4 % pensent que l'accompagnement au numérique fait partie intégrante de l'accompagnement social

- 70.5 % ne sont pas formés au numérique

- 24.6% pensent ne pas avoir assez de connaissances numériques pour accompagner les usagers vers une autonomie dans la réalisation des démarches administratives en ligne. Cette étude exploratoire met en avant que les travailleurs sociaux, bien qu'actifs sur Internet, puisque répondant à cette étude mis en ligne sur les réseaux professionnels, sont en manque de connaissances et de formations à l'accompagnement numérique.

Les travailleurs sociaux, par le manque de compétences numériques cumulé aux difficultés de la personne, peuvent se retrouver en difficulté dans leur propre domaine de compétence et peuvent être amenés à faire « à la place ». Ayant pour objectif l'autonomie des usagers, les pratiques d'accompagnement au numérique peuvent questionner les professionnels qui sont amenés à faire à la place et non avec (Chrétien, Gilson, Janssen, & Picavet, 2018). Avec son questionnaire (484 questionnaires exploités) en ligne diffusé au niveau national en 2015 auprès d'intervenants sociaux, l'étude « Connexions Solidaires » d'Emmaüs Connect (Davenel, 2016) indique que 75% des professionnels affirment faire les démarches numériques à la place de l'usager. Nous constatons, par cette étude, que la dématérialisation du service public peut entrainer un retour à l'assistance : le pouvoir d'agir des usagers est altéré. Effectivement,

24

bien que les intervenant sociaux privilégient en général l'accompagnement avec, ils constatent, en matière de numérique, une perte d'autonomie des personnes :

La non-prise en compte des niveaux de compétences numériques des usagers les rend de plus en plus dépendants d'un accompagnement par un travailleur social. Ce qui va à l'encontre de la mission première du travailleur social, qui est de permettre usagers de s'autonomiser dans leurs démarches et leurs parcours socio-professionnels. (Emmaüs Connect, 2017, p. 72).

Synthèse du chapitre 3

Les études abordées ici permettent de mettre en évidence la présence prégnante de la fracture numérique. Bien qu'étant, il y a quelques années, une fracture numérique basée sur l'accès au numérique en raison d'un équipement trop coûteux ou complexe, il conviendra de dire que cette fracture semble se réduire. D'après l'INSEE (2019), l'équipement des ménages en tablette tactile serait passé de 2% en 2011 à 42% en 2017. Elle reste néanmoins belle et bien présente, nous avons pu le voir lors de la crise sanitaire. En effet, nombre de structures n'étaient pas équipées pour le travail, nombre de jeunes n'étaient pas équipées pour les cours à la maison. Une autre fracture numérique est progressivement apparue : celle liées aux usages. Comme nous venons de le voir, l'illectronisme touche 17% de la population (INSEE). Ces difficultés numériques peuvent engendrer un non-recours aux droits et alors impacter négativement l'empowerment des citoyens. Ces derniers se retrouvent dépendants des guichets d'aide sociale qui ferment peu à peu leurs portes. Les citoyens se retrouvent à interpeller les travailleurs sociaux.

Cependant les professionnels de l'action sociale se trouvent eux-mêmes en fracture quant aux usages. Mettant en avant une déshumanisation de leur métier, ils peuvent rejeter les changements induits par la transition numérique. En manque de compétences numériques, ils se retrouvent en difficulté dans leurs accompagnements et sont amenés à faire à la place des usagers. Cette difficulté peut donc engendrer un retour à l'assistance. Les citoyens ne sont ainsi pas encouragés à se débarrasser du lien de dépendance afin de gagner en autonomie.

Suite à ces difficultés repérées, des dispositifs d'accompagnement au numérique émergent sur les territoires. C'est le cas au sein des médiathèques, des centres sociaux ou bien encore au coeur d'associations. Nous entendons parler de médiation numérique.

25

Chapitre 4. La médiation numérique : une réponse à la révolution numérique

Comme nous l'avons vu précédemment, les politiques publiques, avec leur souhait de transformation numérique du service public, poussent de plus en plus vers différents portails en ligne. Néanmoins, il ne faudrait pas que cela pousse vers la porte de l'exclusion.

L'e-inclusion, comme le rappelle la CNNum (Meyer, 2014, p. 126), désigne la manière dont les technologies de l'information et de la communication contribuent à développer la participation de tous à la société. Cette dernière devient un objectif qui reste marginal dans les politiques publiques : l'insertion par le numérique semble confiée aux mains des territoires locaux. C'est dans ce mouvement initié par la transition numérique que se situe la médiation numérique.

4.1. La médiation numérique : une pratique mise en place au travers de dispositifs

« La médiation numérique désigne la mise en capacité de comprendre et de maîtriser les technologies numériques, leurs enjeux et leurs usages, c'est-à-dire développer la culture numérique de tous pour pouvoir agir dans la société numérique. » (MedNum, 2015). En ce sens, elle est au service de l'inclusion numérique et met en avant la dynamique d'empowerment. La médiation numérique permettrait un apprentissage axée sur la pratique et les usages des TIC. Cet apprentissage augmenterait la capacité des citoyens à agir dans la société.

Dans son article, Gervais (2017, p. 29), médiateur numérique, nous précise que « l'utilisation en conscience des outils numériques devient une condition indispensable pour exercer sa citoyenneté et renforcer sa capacité d'agir. Il n'est plus seulement question de former des publics aux outils, aux usages et aux enjeux numériques, mais de les accompagner en tant que citoyens dans la société numérique. ». Précédemment, nous avons vu que l'empowerment des citoyens pouvait être réduit en raison d'un manque de connaissances et de compétences numériques. La médiation numérique apparait comme une réponse adaptée à ce nouveau besoin. Cette dernière se pratique au sein de lieux dédiés tel que les Espaces Public Numérique (EPN).

Les EPN sont nés en France au milieu des années 1990. Ils avaient pour objectif de rompre avec la fracture sociale du numérique. En effet, parmi les enjeux des années 90 se posait la question de l'accès aux technologies multimédias connectées. Le matériel était onéreux, d'une utilisation complexe et la connexion aussi rare que chère. L'idée des EPN était, avant tout, de rendre

26

accessible le numérique et internet car leur accès n'était pas démocratisé. Cette fracture s'est en partie amplifiée en 2004 avec l'arrivée du Web 2.0 et son florilège d'outils et services web plus interactifs et collaboratifs. (TILIOS Initiatives, 2020). Entre temps, le PAGSI a permis d'aboutir à la charte des EPN qui a fait émerger des centaines d'espaces en France. Cette émergence a permis des recrutements soutenus par le dispositif « Emploi Jeunes » au détriment des acteurs en place, de leur reconnaissance et de leur professionnalisation.

En 2010, le taux important d'équipement numérique des ménages a requestionné l'existence des EPN. Au-delà des problématiques d'accès, il y a des problématiques d'usages et de pratiques. Dans leurs travaux, Meyer & Delahaye (2017, p. 11) indiquent que « les pratiques renvoient aux fonctionnalités idéelles des technologies numériques, à toutes les possibilités réelles ou potentielles qu'elles nous offrent mais dont nous utilisons souvent qu'une infime partie. En revanche les usages sont ce que la personne fait ou peut faire réellement de cette technologie, soit par choix et habitudes, soit par ignorance des autres. » Les besoins étant moins axés sur l'accès à internet que sur l'accompagnement des pratiques et des usages, les EPN ont transformé le "P" de Public en Pratiques : Espace de Pratiques Numériques. Ce dernier donne accès, à tous, à un équipement et un accompagnement aux usages numériques. Il met le projet au coeur du processus, et l'utilise comme prétexte à l'accompagnement au numérique. Il organise des ateliers autour de projets en exploitant les TIC. Le terme de médiation numérique prend alors tout son sens.

Bien que des lieux comme les EPN soient des lieux spécifiques pour la pratique de la médiation numérique, celle-ci prend forme au sein de différents lieux comme les médiathèques, les centres sociaux, les centres de formation, les associations, etc. Plus récemment et afin d'accompagner les citoyens face aux nouveaux besoin, l'Etat a mis en place un nouveau dispositif : les Maisons de Services au Public (MSAP).

Expérimentées de 2010 à 2013 sur certains territoires puis déployées par la suite, les MSAP sont des lieux de services de proximité : « les habitants peuvent être accompagnés dans leurs démarches administratives : emploi, retraite, famille, social, santé, logement, énergie, accès aux droits, ... » (Maison des services au public, 2018). Avec pour objectif d'éviter la multiplicité de guichets uniques, l'octroi du label MSAP permet d'unifier les points d'accueils.

Portées par une association, une collectivité ou bien par la Poste, les MSAP sont composées à minima de deux des six opérateurs partenaires de ce dispositif : Pôle Emploi, la CNAM, la CNAV, la CNAF, la CCMSA et La Poste (CGET, 2017). Néanmoins, « si chaque maison doit

27

conventionner avec les opérateurs partenaires de la politique publique, une place importante est laissée aux partenariats annexes - avec d'autres acteurs institutionnels et associatifs locaux - afin de répondre au mieux au besoin des populations du territoire. » (Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales , 2019). Chaque MSAP s'adapte à son territoire et construit son « offre de services » en identifiant les besoins du territoire au sein duquel elle s'implante.

Les MSAP peuvent être vues comme un dispositif d'accompagnement mis en place en parallèle de la dématérialisation du service public. Les dispositifs étant « ce qu'une société met en oeuvre pour lutter contre ce qui, pour elle, fait problème » (Foucault, 1975, cité par Paul, 2016, p. 22). En effet, « une Maison de Services Au Public est un espace associant systématique présence humaine et accès aux outils numérique. Les agents des maisons de services au public sont formés - par les opérateurs ainsi que par l'Etat et ses partenaires - aux actions de médiation sociale et numérique, afin de lutter contre l'illectronisme et favoriser l'inclusion numérique. » (CGET, 2017).

Très récemment, visant une montée en gamme des MSAP, l'Etat a changé le label pour celui de « France Services ». En effet, l'hétérogénéité de l'offre de service des MSAP a peu à peu fait mûrir l'idée qu'une harmonisation des services permettrait au label une meilleure visibilité et éventuellement un meilleur impact. C'est pourquoi, « France Services permet de trouver dans chaque guichet polyvalent, un socle minimum de services garantis et un accueil identique. » (Bercy Info, 2020). Il sera possible de solliciter les services de, non pas deux minimum comme pour les MSAP mais bien, neuf opérateurs partenaires : la Direction générale des finances publiques, le ministères de l'Intérieur, le ministère de la Justice, la Poste, Pôle emploi, le Conservatoire National des Arts et Métiers, la Caisse Nationale des Allocations Familiales (CNAF), l'assurance retraite et la Mutualité Sociale Agricole (MSA) (Bercy Info). Au-delà de ce socle de services garantis, les collectivités peuvent déployer des offres de services complémentaires. De nouveaux partenariats sont prévus par l'État pour enrichir en continu l'offre de services.

Les guichets des espaces France Services ont pour missions (Bercy Info) d'apporter :

- une information de premier niveau ;

- un accompagnement au numérique pour en favoriser l'apprentissage et en développer les usages ;

28

- une aide aux démarches en ligne ;

- des prestations de conseils pour la résolution des cas complexes en s'appuyant sur un correspondant au sein des réseaux partenaires.

« Chaque France Services devra disposer de deux personnes formées à l'accueil du public et capables d'apporter une réponse pour les démarches du quotidien. » (Gouvernement, 2019). Ces dispositifs créer des emplois d'agent-médiateur. Entre l'agent d'accueil et le médiateur numérique, il est intéressant se demander quelles sont les compétences attendues des professionnels recrutés sur ces espaces : une maitrise des droits sociaux alimentée par une formation des opérateurs partenaires, une maitrise des technologies de l'information et de la communication mais également un sens de l'accompagnement, de la pédagogie et de l'adaptabilité au regard de la pluralité des publics pouvant solliciter de l'aide ? En ce sens, ces professionnels ne seraient-ils pas un savant mélange de médiateur numérique et de travailleur social ?

4.2. Médiateur numérique : un champ professionnel en construction ?

Nous avons pu voir que suite à la révolution numérique et en raison de ses impacts, un nouveau métier se manifeste : celui de médiateur numérique. Bien que pas toujours nommé comme tel, en raison d'un probable manque de reconnaissance vis-à-vis du métier, qui, somme toutes, est assez récent ; les actions de médiation numérique pratiquées par les divers professionnels sont assez semblables : accompagner citoyens dans l'usages des TIC.

Comme l'action sociale d'avant-guerre, la médiation numérique est pratiquée par des bénévoles, des emplois précaires... En effet, si le recrutement d' « emplois-jeunes » avaient pu déjà se faire pour les EPN il y a quelques années, il s'agit, aujourd'hui encore, d'un secteur au sein duquel il n'est pas surprenant de rencontrer des bénévoles, des jeunes en services civiques ou bien encore des employés en contrat à durée déterminée. Le caractère précaire des emplois proposés au sein de ce champ professionnel laisse à penser que ce dernier n'est pas encore reconnu.

La précarité des contrats, et les dispositifs qui les portent : emploi-jeune, service-civique... questionnent également sur l'existence d'une offre de formation en lien avec la réalisation des missions spécifiques liées à la médiation numérique. En effet, il apparait de premier aborde que la formation de médiateur numérique n'existe pas spécifiquement en tant que telle. Il s'agirait

29

de formations courtes (emplois-jeunes), de formation sur le terrain à partir d'appétences ou de curiosité (services-civiques et professionnels autodidactes). De plus, concernant la mise en place des dispositifs précités : MSAP et France Services, la formation est abordée comme étant une formation continue auprès des opérateurs de services publics, il s'agirait donc d'une formation essentiellement technique.

Un médiateur numérique a pour mission l'accompagnement aux usages des TIC dans un objectif d'autonomisation, d'empowerment. Il s'agit alors, comme nous l'avons vu précédemment, d'être à côté de l'Autre, d'éveiller ses capacités et l'émergence du désir, moteur actif de la démarche à entreprendre, afin de lui permettre de trouver des moyens de réaliser ses objectifs. (Fuster & Jeanne, 2004). Chatel (2002) définit l'enseignement comme le fait de « tenter de faire apprendre quelque chose à autrui », en ce sens l'accompagnement mis en place par les médiateurs numériques se rapprochent des pratiques d'enseignement.

Néanmoins, l'accompagnement proposé par les médiateurs numérique peut avoir certaines

limites. Dans son article, Gervais (2017, p. 25) évoque une situation que nous pouvons prendre

comme exemple de limites rencontrées :

Magda est polonaise, logée dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale pour femmes (CHRS) [et] suivie par un travailleur social. Quand Magda vient, on lui procure un accès à internet. Si elle désire faire une démarche administrative, nous l'accompagnons. [...] Mais, de plus en plus, les démarches se complexifient et l'accompagnement de l'usager relève davantage des missions du travailleur social que de celles du spécialiste des usages numériques. Expliquer comment envoyer un courriel est une chose. Envoyer un courriel à la Banque de France à propos d'un dossier de surendettement que l'on souhaite voir réexaminé, ce n'est plus de l'ordre de la médiation numérique.

Cet exemple nous permet de mettre en lumière la nécessité d'un partenariat entre les acteurs de l'action sociale et ceux de la médiation numérique. Effectivement, bien des partenariats soit obligatoires avec les opérateurs de l'Etat, ils ne sont pas suffisants pour l'analyse et l'accompagnement d'un besoin social dans sa globalité et sa complexité. Les médiateurs numériques peuvent se retrouver en difficulté face à une situation sociale complexe tout comme les travailleurs sociaux se retrouvent en difficultés quant à l'usage des technologies de l'information et de la communication.

30

Un maillage territorial semble nécessaire pour la réalisation des missions de chacun dans une cohérence qui semble-t-il ne peut être que bénéfique aux usagers. Lors de la mise en place des dispositifs tels que les France Services, l'Etat sembler laisser au territoire la liberté de s'organiser, de coordonner ses acteurs ; mais qu'en est-il réellement ? Un partenariat s'établit-il avec les structures de l'action sociale ? Les structures sociales sollicitent-elles ces nouveaux dispositifs ? Il conviendra dans la suite de cette recherche d'étudier cette relation.

Synthèse du chapitre 4

La médiation numérique, ou autrement dit, l'accès et l'acquisition de compétences numérique de base, se pratique depuis l'apparition des TIC. Ayant connu, dans un premier temps, des difficultés d'accès : matériel complexe, équipement trop onéreux, connexion à Internet impossible (zones-blanches), limitée ou trop onéreuse, ... les citoyens sont aujourd'hui plus confrontés à des difficultés d'usages, de pratiques. Les Espaces Publics Numériques deviennent Espace de Pratique Numérique.

En parallèle, l'Etat, visant à réduire les guichets uniques de services publics en unifiant les opérateurs au sein d'un lieu unique, met en place les MSAP. Il s'agit, de surcroit, de dispositifs avant tout pensés pour les territoires ruraux, l'objectif étant de faciliter l'accès aux services publics. Les MSAP ont la mission d'accompagner les citoyens aux usages numériques et aux démarches administratives en ligne. Ce dispositif peut se présenter comme une réponse à la dématérialisation du service public et à la fracture numérique que cette dernière peut accroitre.

Néanmoins, la formation des professionnels reste à questionner. Celle-ci n'est pas réellement identifiable. De plus, les médiateurs numériques ne semblent pas formés à l'accompagnement de personnes en difficultés sociales diverses. Ils peuvent se retrouver en difficulté dans l'accompagnement d'une situation complexe nécessitant une orientation vers un professionnel de l'action sociale.

31

Conclusion de la partie 2

Nous nous demandions précédemment si la dématérialisation du service public pouvait inaugurer d'une évolution positive en faveur de l'empowerment des citoyens ou préfigurer d'un retour à une logique d'assistance. L'apport d'éléments théoriques a permis de problématiser cette question de départ.

Nous avons vu qu'au même titre que l'injonction à l'autonomie mis en place au travers de dispositifs tel que le contrat RMI (maintenant appelé RSA), la dématérialisation du service public laissait place à une injonction au numérique. Cette dernière est cachée derrière un communication positive en faveur de l'empowerment. Mis en avant par le programme Action Publique 2022 et le déploiement de dispositifs tels que les MSAP et France Services, l'empowerment est plus que recherché : c'est un but à atteindre. La médiation numérique permettrait d'atteindre cette objectif. La dématérialisation du service public se présente, à première vue, comme étant en faveur de l'empowerment. Néanmoins, l'injonction au numérique provoquée par cette dématérialisation est à questionner. Les citoyens ayant acquis un certain pouvoir d'agir n'auraient-ils pas le droit, le pouvoir de refuser le développement des TIC dans leurs vies ? Le libre-choix en serait-il pas vecteur d'empowerment ?

La fracture numérique est prégnante au sein de la population française. En effet, l'illectronisme touche 17% de la population (INSEE). Cette fracture s'avère être un frein à l'empowerment des citoyens qui, se retrouvant en difficulté, peuvent renoncer à leurs droits ou solliciter les dispositifs existants. Il est alors question de solliciter les dispositifs de l'action sociale ou bien, lorsque qu'ils sont connus et repérés, les dispositifs de médiation numérique.

Dans le premier cas, les professionnels de l'action sociale peuvent être en difficulté face à ces nouvelles demandes. Nous avons vu qu'ils pouvaient, eux aussi, se trouver fracture numérique. Les encombres qu'ils rencontrent risquent donc de les encourager à retourner à une posture d'assistance et ainsi de ne pas favoriser l'empowerment des citoyens.

Dans le second cas, les acteurs de la médiation numérique, peu voire pas formés aux problématiques sociales, peuvent se retrouver en difficulté avec des personnes parfois très éloignées du numérique, qui n'ont pas forcément l'envie d'apprendre. Ils peuvent donc répondent aux besoins exprimés, par l'assistance, afin de rassurer la personnes quant aux usages du numérique et dans l'objectif que celle-ci ne renonce pas à ses droits.

32

Dans les deux premiers cas, la dématérialisation du service public préfigure d'un retour à l'assistance. Celle-ci renvoie à des pratiques non professionnalisées et met en avant un risque d'accroissement de la dépendance des citoyens, ce qui est en inadéquation avec le souhait de dynamiser l'empowerment.

Cependant, ces deux entités, que sont la médiation numérique et le travail social, ont pour objectif commun d'agir en faveur de l'empowerment. Elles ont pour mission d'accompagner à l'autonomie. De plus, les difficultés que chacune rencontre apparaissent comme pouvant être réduites par l'autre. Une complémentarité entre le travail social et la médiation numérique se dessine.

Les éléments de cette recherche nous amènent à problématiser la question de départ et à nous demander : en quoi une relation entre la médiation numérique et l'action sociale réduirait le risque de retour à l'assistance et agirait en faveur de l'empowerment des citoyens ?

Une première hypothèse consisterait à essayer de réduire le risque de non-recours aux droits. Il conviendrait, comme le préconise diverses études, de maintenir une possibilité de réaliser les démarches administratives en version matérialisée. De plus, les professionnels de l'action sociale, souvent premiers acteurs sollicités, pourraient accompagner les citoyens les plus éloignés à « aller vers » les lieux de médiation numérique.

Une deuxième hypothèse serait de construire le réseau médiation numérique ainsi que la formation. La reconnaissance du métier, sa professionnalisation, la mise en place de formation pourrait offrir, en plus d'un certaine légitimité, la possibilité aux médiateurs numériques d'être formés à l'accompagnement de publics divers.

Enfin une troisième hypothèse, liée aux précédentes, serait de structurer le partenariat entre les acteurs de l'action sociale et ceux de la médiation numérique par territoire. Les professionnels de l'action sociale pourraient agir en complémentarité lorsque les médiateurs numériques se retrouvent en difficulté avec situation sociale complexe et inversement les médiateurs numériques seraient un soutien aux travailleurs sociaux quand ils sont en difficulté avec l'utilisation du numérique.

Une collaboration entre ces deux entités serait favorable à l'empowerment des citoyens dans la mesure où les freins rencontrés par ces derniers seraient réduits.

33

Partie 3. L'enquête

Chapitre 5. Méthodologie

5.1. Choix du recueil de données

L'affinement et l'étayage de notre objet de recherche se sont construits au cours de cet exercice. Concernant le recueil de données, l'observation a rapidement été mise à l'écart. En effet, l'objet même de notre recherche émerge d'observations et il me paraissait compliqué de prendre la distance attendue par cet exercice en utilisant ce recueil de données. De plus, l'observation étant indispensable au travailleur social, il s'agit d'un outil connu que j'ai eu l'occasion d'utiliser dans le cadre de ma formation. Bien que notre recherche soit fortement liée à mon parcours professionnel et ma profession en elle-même, il m'est paru indispensable d'utiliser un recueil de données me permettant de prendre du recul ; qui plus est de me permettre d'acquérir de nouvelles connaissances en appréhendant une nouvelle méthode.

J'ai hésité et fait des allers-retours réguliers entre le questionnaire et l'entretien. Dans un premier temps, le questionnaire attirait toute mon attention. Avec le recul, je pense que mon esprit scientifique avait besoin de chiffres pour se rassurer de l'intérêt de la recherche choisie. C'est ainsi que je me suis lancée, par le biais d'une occasion professionnelle, dans la réalisation d'un questionnaire diffusé auprès des travailleurs sociaux via les réseaux sociaux (Annexe 1). J'ai pu récolter des données et tenter de les analyser. Je me suis rendu compte que le questionnaire n'avait pas été assez préparé et élaboré. Néanmoins, cette démarche m'a permis de redynamiser ma recherche et m'a encouragée à approfondir mes éléments théoriques et problématiques afin d'identifier clairement mon objet de recherche et a enrichi la construction du recueil de données. Suite à la restructuration de notre objet de recherche, je me suis dirigée vers l'entretien. L'étayage réalisé m'a permis d'éclaircir mon questionnement et d'identifier la recherche d'éléments qualitatifs, de l'ordre de l'avis, du ressenti, du sentiment... et non des éléments quantitatifs offerts par le questionnaire.

L'outil choisi pour tenter de répondre de façon empirique à la problématique est donc l'entretien. Cette approche qualitative présente un intérêt majeur, notamment celui de ne pas imposer les cadres de pensée du chercheur aux personnes interviewées. Les entretiens seront de type semi-directifs pour m'accompagner dans l'apprentissage de ce nouveau savoir-faire

34

qui consistera à « accompagner l'interviewé dans sa démarche d'auto-interrogation, d'autoréflexion et d'explicitation » (Masson E. &.-1., 2010). Ce choix méthodologique trouve également son point d'ancrage au travers de deux exigences : « D'une part, l'interviewer doit maintenir le sujet dans le cadre de l'entretien et faire aborder tous les thèmes prévus. D'autre part, il doit faire en sorte de favoriser la libre expression des sentiments et l'évolution de la pensée » (Moliner & Guimelli, 2015, p. 62). La dimension semi-directive me sécurisera dans cette première expérience de chercheur tout laissant la possibilité de voir émerger des points qui n'auraient pas été pensés. En effet, l'échange de l'entretien offre des possibilités d'ouvertures et peut nous permettre d'entrevoir d'autres questionnements quant à notre objet de recherche.

Les onze entretiens seront conduits auprès de professionnels oeuvrant dans le champ de la médiation numérique et travaillant au sein des lieux identifiés par la recherche : Espaces Publics Numériques (EPN), médiathèques, MSAP, centres-sociaux, association, ... Il s'agira d'aller à la rencontre d'intervenants présentant des profils variés que ce soit en termes de genre, de diplôme, d'expérience professionnelle, de contexte institutionnel ou de territoire. La construction de l'échantillon, présentée ci-après, se réalise en référence aux choix des indicateurs formels repérés pour la rédaction de la grille d'entretien. Ces métadonnées sont les suivantes : genre, tranche d'âge, diplôme, poste occupé et territoire de la structure. Les indicateurs relatifs à la profession, à la structure et au territoire où s'exercent les missions sont relativement simples à panacher dans cet échantillon. Les autres métadonnées sont plus aléatoires du fait du caractère volontariste de la démarche d'enquête.

Tableau synthétique de l'échantillonnage

Poste

(expérience) /

Structure

Animateur multimédia (1 an)

Médiateur numérique (15 ans)

Animatrice de réseau (2 ans)

Animatrice de réseau (12 ans)

Animatrice de réseau (1 an)

Médiateur numérique (2ans)

Médiateur numérique (9 ans)

Animateur

Innovation et
Développement (13ans)

Animatrice MSAP (2ans)

Chargée de projet

(2ans)

Chargé de

projet formation (3ans)

EPN

Entretien 1 31 ans Loire (42)

Entretien 2

47 ans Nord (59)

 
 
 
 
 
 
 
 
 

CCAS

 
 
 
 
 
 

Entretien 8 38 ans

Nord Pas-de-
Calais (59)

 
 
 

Médiathèque

 
 
 
 
 
 

Entretien 7 52 ans Drome (26)

 
 
 
 

MSAP

 
 
 
 
 
 
 
 

Entretien 9 40 ans Ain (01)

 
 

HUB

 
 

Entretien 3 28 ans

Maine et
Loire (49)

Entretien 4 41 ans Drome (26) Ardèche

(07)

Entretien 5 40 ans Guyane (973)

 
 
 
 
 
 

Association spécialisée Projet au sein d'un IRTS

 
 
 
 
 

Entretien 6

31 ans Bouche-du-Rhône (13)

 
 
 
 
 

Association spécialisée Projet de territoire Projet de formation

 
 
 
 
 
 
 
 
 

Entretien 10 28 ans Val-de- Marne (94)

Entretien 11 32 ans Val-de- Marne (94)

5.2. Construction de la grille d'entretien

La grille d'entretien est présentée en annexe (Annexe 2). L'entretien démarre par le repérage d'un certain nombre de variables indépendantes qui pourraient expliquer certains éléments de réponse : le genre, l'âge, le niveau de diplôme et l'ancienneté sur ce poste. J'ai fait le choix d'une entrée dans l'échange par le parcours professionnel afin de mettre la personne en confiance et de créer une relation favorisant les échanges. Par la suite, viendra stratégiquement la question 3 qui interroge sur l'offre de formation autour de la médiation numérique. Les questions 4 et 5 permettront de poursuivre l'échange progressivement. Il s'agira de cibler les missions précises de l'intervenant et d'avoir plus de précisions sur les caractéristiques des personnes rencontrées. Puis, la question 6 recentre l'entretien sur notre thématique : la dématérialisation du service public et interroge sur les pratiques mis en place pour l'accompagnement aux démarches administratives. La question 7 pourra nous permettre d'identifier si un partenariat notamment avec les acteurs de l'action sociale est mis en place. Les questions 8 et 9 mettront en évidence la seconde thématique centrale de la recherche : l'empowerment. Ces questions, en lien avec l'aspect sociétale, voir politique, permettront de recenser l'avis de l'intervenant sur ce qu'on pourrait appeler la commande sociale et sur son ressenti de professionnel. Il semble en effet pertinent de comparer ces deux niveaux de réponses. La question 10 nous permet d'aborder une ouverture sur notre sujet en le reliant à l'actualité de crise sanitaire. L'entretien se conclut avec une ouverture, une possibilité laissée à l'intervenant de questionner cet espace d'échange en proposant, pourquoi pas, de nouvelles pistes d'étude.

Tableau récapitulatif de la grille d'entretien

Questions

Justifications

1- Genre et âge

Structure et localisation Poste et ancienneté

Les facteurs psychosociaux sont à prendre en compte pour l'analyse.

Est-ce que l'âge, l'ancienneté sur le poste, la localisation géographique changent le discours ?

2- Quel a été votre parcours

professionnel ? Comment vous a-t-il
conduit à votre poste actuel ?

L'analyse du parcours professionnel pourrait permettre d'identifier les origines professionnelles (issues du numérique ? du social ? autre ?) ainsi que le parcours de formation. Nous pourrons en savoir plus sur l'identité des médiateurs numériques.

3- Que diriez-vous de l'offre de formation en lien avec la médiation numérique ?

Il s'agira d'identifier si une offre de formation existe, si elle est connue et/ou pensée par les acteurs. Cela mettra en questionnement notre théorie d'un métier pas encore reconnu et d'une offre de formation peu existante.

4- Pouvez-vous me présenter vos missions, vos actions au quotidien ?

Les précisions sur les missions permettront d'évaluer si l'accompagnement aux démarches administratives fait partie des missions du médiateur numérique.

Il s'agira de mettre en lien le discours et la théorie évoquée de l'assistance et de l'accompagnement.

Les médiateurs sont-ils amenés à faire à la place de l'usager et si oui pour quelle raison ? manque de formation ? manque d'expérience ?

5- Pouvez-vous décrire le public que vous recevez ?

La connaissance du public reçu nous permettra d'identifier le type de public sollicitant ces dispositifs. Il sera question d'essayer de voir si ce public pourrait être similaire au public reçu dans les associations d'insertion sociale. Le public des lieux de médiation numérique sont-ils dans une démarches volontaire d'apprentissage ou sont-ils contraints sachant que le consentement est un prérequis à l'empowerment.

6- Quelles actions proposez-vous quant à

l'accompagnement aux démarches
administratives ?

Cette question permet de recentrer la réflexion sur la dématérialisation du service public. Elle nous permettra de savoir si l'interviewé est acteur principal de notre problématique ou s'il en est extérieur, s'il rencontre des freins

 

38

 

ou des leviers... Il s'agira de voir si l'injonction au numérique instaurée par la dématérialisation peut conduire à un retour à l'assistance et être un frein à l'empowerment.

7- Comment s'organise vos missions en

lien avec les acteurs du territoire ?
Constatez-vous des leviers ? des freins ?

Cette question nous permettra d'avoir une idée du partenariat, du réseau en place sur le territoire et avec les associations et de voir si les médiateurs numérique sont amenés à solliciter ou être sollicités par l'action sociale ? Nous rappelons ici qu'agir en collectif sur son environnement est un aspect d'empowerment.

8- Par son programme Action Public 2022 et la mise en place des dispositifs comme

les EPN, l'Etat souhaite favoriser

l'empowerment. Que pensez-vous du
souhait de l'Etat ?

Recherche du point de vue politique de l'interviewé sur le souhait de l'Etat de dynamiser l'empowerment. Rêve ou réalité ? Quelles différences peuvent ressortir entre les souhaits politiques et les souhaits d'acteurs de terrain ? Quel freins ou leviers politiques à l'empowerment ?

9- En lien avec vos missions, comment vous situez vous par rapport à ce souhait de l'Etat ?

Recherche du point de vue personnel de l'interviewé sur la question de dynamiser le pouvoir d'agir. Les médiateurs numériques se considèrent-il acteurs de l'empowerment comme les professionnels de l'action sociale le sont par l'accompagnement ?

Quel freins ou leviers de terrain à l'empowerment ?

10- Dans quelle mesure la crise sanitaire a eu un impact sur vos missions et sur la médiation numérique en général ?

Recensement des avis « à chaud » concernant les impacts de la crise sanitaire sur la médiation numérique. Comme le choc pétrolier de 1973 et la crise économique qui en a suivi, la crise du coronavirus ne pourrait-elle pas être un déclic pour repenser les politiques d'inclusion numérique ?

11- Souhaitez-vous ajouter quelque
chose ?

Cette question permet à l'interviewé de s'exprimer s'il le souhaite.

 

5.3. Déroulement des entretiens

En raison du contexte de crise sanitaire et pour des commodités géographiques, les onze entretiens (Annexe 3) ont été conduits par le biais d'outils visiophoniques en période de déconfinement. La majorité des personnes interviewées étaient à domicile à l'exception de trois qui ont souhaité répondre à cet entretien depuis lieu de travail. Les entretiens ont débuté par le rappel du cadre éthique de cette recherche : un consentement recherché pour l'enregistrement de l'échange et la confidentialité des données recueillies. Les échanges ont pu se dérouler dans des conditions favorables à l'expression d'une parole libre. Les professionnels interrogés m'ont paru enthousiastes pour évoquer leur métier, leurs pratiques et parfois même leurs questionnements et leurs difficultés. En fin d'entretien, ils ont pu exprimer une certaine satisfaction suite aux échanges en me précisant qu'il était « intéressant de mettre des mots sur les pratiques ».

La communication a, semble-t-il, été facilitée par ma connaissance du sujet et notamment des publics rencontrés, ce qui m'a permis de « lire entre les lignes ». Néanmoins, ce qui peut apparaître comme un atout a dû être manié avec précaution car il convient de garder à l'esprit une neutralité de chercheur, une posture de « non-savoir ». Cet atout peut-être un inconvénient car ma connaissance du sujet, ma position de travailleur social a pu être un frein à la libre expression de leurs pensées au regard du sujet.

Cet exercice m'a permis de prendre la mesure des difficultés de cette méthode empirique. La conduite d'entretien a pour objectif d'accompagner l'Autre dans l'expression de ses propres pensées. Bien que la reformulation, mettant en pratique la non-directivité, soit un outil facilitateur, il est parfois difficile de rester dans la neutralité objective attendue par l'exercice. Il est nécessaire de s'adapter à la personne interviewée : répond-elle trop brièvement ? S'éloigne-t-elle du sujet ? Cherche-t-elle à me déstabiliser ? Ou tout simplement a-t-elle compris la question ? Il m'a été d'autant plus difficile de repérer dans l'immédiateté de l'instant les sous-entendus et les non-dits afin de rebondir dessus pour permettre leur expression. Cela ne m'a pas empêché de m'y essayer, parfois avec maladresse mais je ressors grandie de cette expérimentation et riche de nouveaux savoirs. J'ai pu découvrir ce que Bardin (1997, p. 94) appelle « l'apparence tortueuse, contradictoire, « à trous », avec digressions incompréhensibles, dénégations troubles, retours en arrière, raccourcis, échappées fuyantes ou clartés trompeuses. ». Cet exercice nécessite un savoir-faire et une capacité de prise de recul qui, à mon humble avis, ne peut s'acquérir que par la pratique.

40

Chapitre 6. Traitements et analyses de données

Les éléments empiriques de cette recherche ayant été recueillis, ils ont pu être retranscris (Annexe 3) et des éléments de codage, présentés en annexe 4, ont été intégrés afin de permettre l'analyse catégorielle au travers de l'utilisation du logiciel IRaMuTeQ. Cette analyse « fonctionne par opérations de découpage du texte en unités puis classification de ces unités en catégories selon des regroupements analogiques. » (Bardin, p. 207)

Analyse statistique du corpus par IRaMuTeQ :

Une Classification Hiérarchique Descendante (CHD) selon la méthode de Reinert a ici est

réalisée. L'extraction des quatre classes terminales s'est faite par paliers :

- les classes 1, 21.3% et 2, 13.1%

- la classe 3, 30,7%

- la classe 4, 14.3%) la classe 5, 20.7%

La taille : 30,7% de la classe 3, la plus homogène, est sensiblement proche de la taille des

classes 1 et 2 : 34,4% et des classes 4 et 5 : 35%.

41

Dendogramme - CHD

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

6.1. Analyse des classes 1 et 2 : médiation numérique et démarches administratives

Quelques formes significatives Classe 1 :

Chi2

Mots

Chi2

Mots

 
 
 
 

52.99

-*5_admin

29.81

Individuel

42.25

Caf

29.47

Droit

36.17

Accompagnement

25.77

Besoin

30.8

Social

23.24

Administratif

30.49

Démarche

19.16

Difficulté

Au sein de la classe 1, l'accent est mis sur l'aspect administratif de la question. Etant un des sujets centraux de cette recherche, il n'est pas surprenant de voir la thématique -*5_admin fortement représentée. Il s'agissait de questionner sur les pratiques professionnelles en lien avec la dématérialisation du service public et l'accompagnement aux démarches administratives en ligne. Nous constatons que cette thématique fait appel au vocabulaire relevant de l'accès aux droits : CAF, social, droit, mais également impôts. L'accompagnement aux démarches administratives et plus globalement à l'accès aux droits fait donc bien pleinement partie des missions des professionnels de la médiation numérique.

42

« Alors là pour tout ce qui est permanence administrative c'est surtout de l'accompagnement sur toutes les plateformes administratives que ce soit privé ou public. » (Animateur EPN)

Dans le sens où il « mise sur les capacités des personnes à développer leur autonomie » (Fuster & Jeanne, 2004), l'accompagnement est ici un réel levier d'empowerment. Néanmoins, il arrive que les professionnels adoptent une posture d'assistance et fassent « à la place de ». Nous avons pu voir que ce retour à l'assistance était un frein à l'empowerment.

« L'accompagnement, vous avez plusieurs formules. Vous avez la formule je fais à votre place [...]. Il y a la formule : je vous montre comment faire et vous faites à côté de moi [...] et puis la formule que je vais appeler cours, atelier... » (Médiateur numérique)

« Il y a des gens qui ont besoin d'assistance ou d'accompagnement et on ne peut pas juste les mettre devant un ordinateur en leur disant voilà débrouilles-toi, il faut des gens pour les accompagner. » (Médiateur numérique)

La prépondérance de l'assistance est ici mise en lien avec l'injonction au numérique provoquée par la dématérialisation de service public et renvoie aux termes de besoin.

Il est a noté que les démarches administratives ne sont pas un domaine des plus attrayant. Nombreux sont les citoyens qui considèrent cela comme une tâche, voir une corvée. Un apprentissage efficient part souvent d'un désir, d'une envie et moins d'un besoin. Le manque de consentement sous-entendu ici nous invite à mettre en évidence que l'accompagnement ne se fait avec l'autre, et non pour ou malgré lui (Ion & Ravon, 2005, p. 81). Ce manque d'attrait pour les démarches administratives peut justifier d'un retour à l'assistance et à un lien de dépendance.

De plus, nous remarquons également la présence du terme difficulté. Celui-ci représente aussi bien la situation dans laquelle se trouve les publics mais il fait aussi écho aux difficultés sociales.

« Si la personne est vraiment trop en difficulté c'est qu'elle ne relève pas d'une MSAP, elle relève d'un accompagnement social avec un travailleur social. » (Animatrice MSAP)

Bien que celui-ci n'est que rapidement évoqué, un lien avec le travail social apparait. La présence du social ce mot au sein de cette classe laisse à penser que les démarches administratives seraient un point commun de la médiation numérique et du travail social. L'enjeu d'une relation entre la médiation numérique et travail social est ici mis en avant.

43

Le terme social, associé à celui de difficulté laisse à penser que la relation évoquée n'est pas simple. Nous comprenons que celle-ci, paraissant comme évasive, n'est pas formalisée.

« La difficulté quand on parle du social [...], c'est où commence la médiation numérique, où elle se termine, où commence le travail social, comment essayer d'imbriquer un petit peu parce que la frontière n'est pas si évidente. » (Animatrice de réseau)

La mission des médiateurs numériques parait être celle d'un accompagnement technique aux outils numériques. Il s'agit d'être l'intermédiaire entre la personne, son besoin et l'outil numérique permettant de répondre à ce besoin. Pour tout ce qui est l'aspect plus social du besoin exprimé ; le motif préférable lors d'une demande de régularisation par exemple ; ces missions relèveraient du travail social. Néanmoins, il n'est n'y aisé ni souhaitable de morceler l'accompagnement notamment d'une telle démarche. Il serait dommageable pour la personne qu'elle préremplisse le formulaire de demande de régularisation en ligne avec un médiateur numérique tout en allant voir un travailleur social pour des conseils sur le motifs de régularisation le plus adapté sans qu'une coordination adaptée s'organise entre ces deux professionnels. Leur complémentarité est ici indéniable.

Quelques formes significatives Classe 2 :

Chi2

Mots

Chi2

Mots

 
 
 
 

80.31

Télétravail

34.62

Énormément

53.25

Internet

27.05

Fonctionner

43.34

Numérique

26.58

Révélateur

40.31

-*10_covid

21.01

Nécessaire

39.82

Apprendre

17,23

Equiper

La classe 2 est moins prégnante : 13,1%. Cela est explicable par la thématique à laquelle elle renvoie : -*10_covid. La crise sanitaire a été évoqué comme une possibilité d'ouverture sur l'évolution de la médiation numérique. Il a été question de voir les perceptions des impacts de cette dernière au sein de ce champ professionnel. Sans surprise le mot télétravail est largement représenté : cela a été le quotidien de nombreuses personnes durant cette période. De plus, il s'agit là d'une mise en situation ou l'usage du numérique est nécessaire voir impératif. Ce contexte a été l'occasion de s'interroger sur l'équipement des télétravailleurs ainsi que les savoir-faire.

44

Les autres mots associés à cette classe nous montrent que la crise sanitaire a été un révélateur. Elle semble avoir été révélatrice d'un besoin d'apprentissage pour l'ensemble des citoyens.

« Ça va être révélateur de la carence de compétences qu'il y avait en France. [...] Cette crise-là [...] a été révélatrice juste qu'on avait oublié d'apprendre aux gens de faire les choses qu'on allait leur demander. » (Animateur multimédia)

« Si on n'apprend pas aux gens à télétravailler, bah ils ne vont pas télétravailler d'eux même, ils ne vont pas eux même pondre leurs outils [...]. Ce que montre le télétravail c'est qu'en gros si on n'a pas une méthode, le travail ne va pas être ultra efficace, si derrière on n'a pas un service cloud qui répond bah ça ne marchera pas très bien. » (Chef de projet formation)

La crise sanitaire semble avoir permis une certaine prise de conscience sur l'importance du numérique, du besoin de montée en compétence pour une autonomie numérique. Elle vient accentuer ou plutôt révéler les besoins créés par la révolution numérique. La crise sanitaire a mis en exergue le besoin de la médiation numérique auprès des usagers comme des professionnels.

« [La crise sanitaire] a mis le doigt sur le besoin vital de médiation numérique et d'accompagnement des publics. » (Animatrice de réseau)

Nous pouvons émettre l'hypothèse que cette crise sanitaire sera, au même titre que la guerre lors de la période industrielle, vectrice d'une nouvelle structuration et peut être d'une professionnalisation. Comme le choc pétrolier de 1973 qui a fait émerger des dispositifs d'accompagnement, cette épidémie pourra peut-être être le moteur d'une organisation, d'une structuration de la médiation numérique.

6.2. Analyse de la classe 3 : médiation numérique et formation

Quelques formes significatives Classe 3 :

Chi2

Mots

Chi2

Mots

 
 
 
 

43.23

-*2_parcours

30.67

*age_m40

40.44

-*4_formation

29.78

Professionnel

38.17

Médiateur numérique

25.11

Technologie

37.85

Formation

23.85

Former

32.67

Bac

21.22

Animateur_multimédia

32.11

Niveau

17.42

*bac_m3

45

Au sein de la classe 3, les thématiques -*2_parcours et -*4_formation sont représentées. Il s'agissait dans un premier temps d'avoir des éléments sur les parcours professionnels ayant conduit à la médiation numérique puis dans un second temps de recueillir des informations sur l'offre de formation en médiation numérique.

Bien que n'apparaissant pas spécifiquement dans cette analyse de texte automatisée, les échanges et l'analyse de ces derniers m'a permis de constater que les professionnels interrogés n'étaient, généralement, ni issus de l'informatique ni du social à proprement parler.

« J'avais commencé des études qui n'avait absolument rien à voir : c'était dans les langues étrangères mais j'ai toujours été attiré par tout ce qui est informatique [...]et j'ai toujours aimé transmettre ça dès que je pouvais. (Animateur multimédia)

« J'ai fait des études de philosophie. » (Animatrice MSAP)

« J'ai un parcours euh... plutôt orienté autour de la géographie. » (Chef de projet)

« Je ne suis pas du tout issu enfaite du secteur pour faire très très simple. Euh alors moi à la base j'ai commencé à étudier la biochimie en Sciences Techniques Laboratoire en formation technologique en trois ans ensuite j'ai bifurqué sur plutôt le spectacle pendant cinq ans. » (Chef de projet formation)

Devant tant de disparité, il a été question de s'interroger sur leurs liens : la majorité d'entre eux ont un parcours dans l'animation et se revendiquent comme étant issus de l'éducation populaire.

« Pour que vous sachiez à peu près d'où est ce que je viens c'est-à-dire absolument pas du tout du milieu puisque que j'ai un BAC de musique, je suis musicien de formation. [...] Je suis embauché dans une MJC pour être animateur [...]. C'est là que je découvre ce que j'appellerais la fibre de l'éducation populaire. C'est un des marqueurs qui fait mon parcours. » (Médiateur numérique)

« Animateur du cyber centre [...], l'accompagnement des personnes en difficulté. Il y a vraiment ces deux cotés-là qui m'intéressaient vachement et puis du coup tout le reste en ce qui concerne d'une façon plus globale l'éducation populaire quoi. » (Animateur de réseau)

Concernant la formation, force est de constater que les moins formés, représentés par la métadonnée *bac_m3, ainsi que les plus jeunes, représentés par la métadonnée *age_m40, évoquent la formation et principalement les métiers d'animateur multimédia et de médiateur numérique. De plus, les professionnels les plus formés (*bac_p3) et les plus expérimentés (*exp_p5) semblent être arrivés dans la médiation numérique par opportunités suite à des

46

appétences en informatique et/ou en animation. Les concernant ils évoquent la formation comme étant peu existante et peu structurée. Néanmoins elle semble pensée, réfléchie notamment par les têtes de réseaux.

« Le soucis du mot médiateur numérique c'est que ce n'est pas reconnu en tant que profession aujourd'hui à part entière parce qu'on n'identifie pas bien la formation qu'il faut faire pour devenir médiateur numérique, parce qu'aujourd'hui en fait devenir médiateur numérique c'est peut-être avoir une double casquette avoir été animateur socio-culturel et avoir une appétence sur cette question-là. Euh... Moi c'est un peu ça, ça partait d'une appétence voilà. » (Animatrice de réseau)

« On est justement sur ces réflexions globales de comment former à la médiation numérique aussi, comment on peut mettre en place une formation professionnalisante sur ces questions-là pour que ce métier soit reconnu à part entière quoi. » (Animatrice de réseau)

« Nous avons créé une formation pour permettre à des personnes en BAC infra-BAC de devenir potentiellement médiateur numérique donc c'est un domaine sur lequel on travaille. » (Chef de projet formation)

Cependant, bien que cela ne soit pas dit comme tel, l'organisation de la formation de médiation numérique semble prendre forme. En effet, suite aux échanges, j'ai pu constater une certaine échelle de niveaux qui pourraient ressembler à la suivante :

- Les animateurs multimédia, niveau BAC, sont chargés d'animer des ateliers collectifs sur bases de contenus préconçus et proposer des accompagnements individuels de premier niveau ;

- Les médiateurs numériques, niveau BAC+2, en charge de l'adaptation des contenus aux différents publics et du partenariat local. Ils peuvent être chargés de l'accompagnement individuel de certaines problématiques plus complexes.

- Les animateurs de réseau, chargés de mission et chargés de projet, de niveau BAC+3 à niveau BAC+5, structurent et animent le réseau de médiation numérique ainsi que l'offre de formation. Ils stimulent et coordonnent le partenariat et répondent aux différents appels à projet en lien avec leur territoire.

47

Spécificité et Analyse Factorielle des Correspondances (AFC) de la métadonnée *bac :

Cette Analyse Factorielle des Correspondances (AFC) nous montre que les moins formés (-*bac_m3) sont au plus proche de la personne et des usages tandis que les plus formés (-*bac p3) sont dans les projets, les réponses aux appels à projet et le questionnement.

6.3. Analyse des classes 4 et 5 : médiation numérique, politique de territoire et partenariat

Quelques formes significatives Classe 4 :

Chi2

Mots

Chi2

Mots

 
 
 
 

86.26

Question

38.32

-8_politique

75.21

Politique

35.31

Souhait

54.49

Conscience

25.94

Frein

42.31

Argent

24.11

Illettrisme

41.42

Réalité

23,51

Eloigner

Au même titre que la classe 2, la présence moins importante de la classe 4 (14,3%) s'explique car elle évoque une thématique précise qui est -*8_politique. L'aspect politique semble être un frein à l'essaimage de la médiation numérique qui peut néanmoins se transformer en réel levier.

48

« Là je vais parler des freins politiques c'est qu'en général vous allez dans une municipalité, vous n'avez pas d'élus au numérique, vous n'avez personne, vous n'avez pas d'interlocuteur officiel à qui vous adresser. [...] Quand on nous disait quel était le public prioritaire on avait dit mais faut commencer par les élus parce que c'est eux qui décident des politiques publiques qu'ils vont mettre sur leurs territoires. » (Médiateur numérique)

« Le principal levier et le principal écueil c'est le soutien politique ou non. » (Animatrice de réseau)

Cette thématique -*8_politique interrogeait les interviewés sur leur avis concernant le souhait de l'Etat, émit dans la loi numérique du 7 octobre 2016, de dynamiser l'empowerment des citoyens en dématérialisant le service public avec le programme Action Public 2022. La majorité des acteurs s'accordent à penser que ce souhait n'est pas en adéquation avec la réalité du terrain.

« Aux grand mots, grandes ambitions, grandes volonté qui sont très louables mais qui sont aussi très visibles politiquement, ça fait bien mais [...] il y a aussi des effets, des effets d'annonce des effets de discours je pense. » (Animatrice de réseau)

« Le souhait : il est joli. C'est un très beau souhait après entre le souhait et la réalisation c'est... non, je pense qu'il y a un gros gap à franchir entre les deux... Oui c'est très important de vouloir que les personnes on va dire deviennent de plus en plus autonomes, [...] le problème c'est qu'ils ont tous lancé mais ils ont pas du tout prévu l'accompagnement nécessaire, pas du tout. » (Médiateur numérique)

L'empowerment apparait dans ces échanges comme étant un effet de communication, cela laisse à penser qu'il s'agit d'une stratégie politique d'enjoliver la réalité de l'injonction au numérique. L'Etat vise « l'empowerment au sens employé par la Commission européenne, c'est-à-dire avant tout axé sur l'acquisition de compétences numériques de base fluidifiant l'employabilité et l'expansion des recours à l'e-administration et à l'e-commerce. » (Turet & Oulahbib, 2017).

« C'est dix-sept millions de personnes qui se considère éloignée du numérique ou pas à l'aise dans les démarches, l'empowerment c'est quand même un stade au-dessus, c'est comment le citoyen peut intervenir sur la politique publique. » (Chargé de projet)

« Enfin il y a plusieurs niveaux dans l'empowerment en fonction du public auquel on s'adresse maintenant tant qu'on pourra faire gagner en autonomie [...] n'importe quel public ça sera déjà un pas mais je pense qu'effectivement le numérique c'est un moyen de faciliter tout ça. » (Animatrice de réseau)

49

L'empowerment, bien qu'étant vu comme un objectif présomptueux de l'Etat, semble malgré tout perçu comme objectif à poursuivre par les professionnels. En effet, ils se considèrent, comme acteurs favorisant l'empowerment. Ils précisent agir en ce sens et pour cet objectif bien qu'ils soient soumis à divers contraintes de terrain.

« Je pense en effet que ma place est très ancrée dans l'empowerment par le numérique. On forme des gens qui vont former ou accompagner d'autres gens donc là-dessus oui oui j'en suis convaincu. » (Médiateur numérique)

« L'empowerment c'est super quand les personnes ont envie d'apprendre [...]. Après le problème justement avec cette dématérialisation [...], c'est qu'aujourd'hui on veut faire entrer dans des processus d'apprentissage des personnes qui n'ont pas forcément envie d'apprendre, qui n'ont pas forcément envie d'être outillés. » (Animatrice de réseau)

Cette dernière citation fait écho au caractère injonctif de la dématérialisation du service public. Cette injonction n'est pas en adéquation avec la volonté de favoriser l'empowerment car elle renvoie à une démarche contrainte et non consentie. Comme nous l'avons vu, la motivation à agir est un des piliers de l'empowerement.

Quelques formes significatives de la classe 5 :

Chi2

Mots

Chi2

Mots

 
 
 
 

91.4

Territoire

33.1

Association

78.21

Réseau

29.68

Partenariat

62.48

MSAP

29.06

*bac_p3

54.45

Appel_projet

27.06

Collectivité

41.2

Hub

23,17

Territorial

Enfin, pour la classe 5, il est important de souligner que le vocabulaire utilisé fait référence à la question de territoire ainsi qu'au réseau de proximité telle que les MSAP. La médiation numérique est une problématique de territoire qui se construit grâce notamment au montage de projet et à la structuration du réseau partenarial.

Le partenariat est abordé avec les opérateurs de service public tel que la CAF, la CPAM, les impôts, Pôle Emploi, la MSA ... Les Hub, nouvellement arrivés, ont pour objectif de structurer le réseau territorial et développer le partenariat.

50

Néanmoins, le partenariat avec le travail social, la mise en réseau avec les travailleurs sociaux ne ressort pas spécifiquement lors de cette analyse. Il en va peut-être de la remise en cause de ma grille d'entretien semble-t-il pas assez élaborée autour de cette question. De plus, l'ensemble des personnes interviewées ont pu consulter mon profil professionnel en ligne et il va de soi que ma profession de travailleur social a pu être un frein dans leur appropriation de cette question. Néanmoins, cette thématique a pu être abordée et voici quelques citations sur le sujet :

« Souvent c'est plus des accords tacites on va dire non officiels avec les structures d'accompagnement. » (Animateur multimédia)

« Sur notre territoire ça ne fonctionne pas très bien ça. C'est qu'on a des travailleurs sociaux de territoire et un service de territoire avec qui on arrive pas du tout à se coordonner, [...] on n'arrive pas à communiquer. » (Animatrice MSAP)

« Nous ce qu'on souhaite leur apporter à la fois des compétences [...], leur faire comprendre qu'ils ne sont pas seuls, qu'il y a un écosystème sur les territoires sur lequel ils peuvent renvoyer. [...] Mais sans rentrer dans l'effet ping-pong où l'on perd les gens en cours de route quoi. » (Animatrice de réseau)

« Pour ce qui est des travailleurs sociaux, seul l'IRTS PACA, Corse PACA [...] a mis en place un module autour [du numérique] mais pour l'instant c'est la seule, c'est un peu limite, un peu juste. » (Animatrice de réseau)

Le partenariat entre les acteurs de la médiation numérique et les acteurs sociaux, bien qu'il apparaisse comme essentiel, semble avoir des difficultés à se mettre en place. Cette recherche a cependant pu me permettre d'établir des pistes de réponse quant à l'impact positif d'une relation entre la médiation numérique et l'action sociale sur l'empowerment des citoyens.

Les territoires présentant des prémices de questionnements et de partenariats sont les départements possédant un Hub, une tête de réseau de la médiation numérique. Ces dispositifs semblent agir en faveur de l'empowerment dans le sens où ils permettent de favoriser le maillage territorial et la coordination partenariale.

De plus, la région PACA, comme précédemment citée, a inclus un module de médiation numérique à ces formations de travailleurs sociaux. L'acculturation de chacun apparait comme étant une porte d'entrée à l'évolution des pratiques.

Il semblerait donc que les professionnels de l'action sociale aient besoin d'être sensibilisés voire formés à la médiation numérique et que les professionnels de la médiation numérique soient accompagnés, guidés dans la construction d'un réseau partenarial territoriale.

51

Conclusion de la partie 3

Il s'agissait dans cette partie de mettre en place une méthodologie de recherche nous permettant de recueillir et d'analyser des éléments, ici empiriques, dans l'objectif de faire évoluer notre réflexion.

Le choix de l'entretien comme recueil de données s'est fait assez naturellement. Néanmoins, il convient de revenir sur la méthodologie liée à ce choix. Il n'a pas toujours été facile de maintenir la distance attendue par cet exercice. Bien qu'ayant conscience de mon implication personnelle et professionnelle pour ce sujet, la construction de la grille d'entretien et la conduite d'entretien se sont avérés être de réels exercices au sein d'un processus d'apprentissage ne se faisant pas à court terme. La neutralité recherchée permettant aux personnes interviewées d'être le moins influencées possible a été difficile à maintenir tout au long de ce travail. En effet, le paradoxe pouvant être présenté par la formulation de questions assez précises pour cibler l'objet de recherche mais pas trop précises pour ne pas orienter les réponses n'a pas été facilement apprivoisable. Là aussi, je pense qu'il convient d'être assez expérimenté pour maintenir le niveau de neutralité attendu. En effet, le repérage des non-dits, des sous-entendus, les invitations à leur verbalisation ou reformulation est un exercice qui demande une prise de recul et une maitrise certaine pour éviter de projeter ses propres interprétations.

Bien qu'étant apprentie chercheuse, je pense que ma profession de travailleur social a pu être un biais à la conduite de cette recherche. J'ai pu rencontrer et interviewer des professionnels engagés professionnellement qui se sont questionner à leur tour sur mon intérêt pour leur secteur d'activité, la majorité d'entre eux ayant vu sur les réseaux ma profession.

Néanmoins, les échanges ont pu se faire et il apparait que nous en sommes globalement tous ressortis satisfaits et grandis. Afin de vivre pleinement cette exercice et d'en comprendre d'avantage les rouages : les éléments récoltés, bien que leur recueil puisse être discutables, ont été analysés à l'aide du logiciel IRaMUteQ.

Il s'agissait, tout au long de ce travail de recherche, de s'interroger sur une possible relation entre l'action sociale et la médiation numérique et son intérêt en faveur de l'empowerment. Nous avons pu voir, dans un premier temps, que l'analyse des classes 1 et 2 venait confirmer les difficultés mis en évidence par la dématérialisation du service public : difficultés dans les usages, difficultés sociales mais également les difficultés rencontrées par les professionnels et mis en exergue par le contexte de crise sanitaire et le déploiement du télétravail. Les difficultés

52

mise en avant marquent la nécessité d'accompagner l'empowerment numérique de chaque citoyen. L'analyse de ces classes et plus précisément la classe 2 nous évoque le besoin d'apprentissage engendré par la transition numérique.

L'analyse de la classe 3 quant à elle, renvoie à la question de la formation des acteurs de la médiation numérique. Une offre de formation structurée permet une professionnalisation du métier. Cette dernière ne semble pas encore très claire, néanmoins elle apparait comme indispensable au développement de cette activité. En effet, il s'agirait de clarifier le rôle des médiateurs numériques, de leur permettre une légitimité notamment auprès de l'action sociale ; mais aussi de définir leurs pratiques et leur cadre d'intervention permettant à chacun d'identifier leur place. D'autant plus qu'en considérant qu'en s'appropriant la définition de Bru (2001), sur les pratiques enseignantes : « mettre en place des situations didactiques, pédagogiques, matérielles, temporelles, relationnelles, affectives... susceptibles de favoriser l'apprentissage », nous remarquons que les pratiques du travail social et de la médiation numérique sont étroitement liées.

L'analyse des classes 4 et 5, pour finir, évoquent les contraintes politiques et l'aspect territorial du sujet. Le souhait de l'Etat de dynamiser l'empowerment est vu comme présomptueux. Les questions politiques, notamment auprès des élus locaux, territoriaux semblent être un frein au développement de la médiation numérique et donc un frein à l'empowerment. La question territoriale est également abordée en lien avec le partenariat qui semble indispensable pour dynamiser l'empowerment. Les pouvoirs publics répondent à cela en déployant des dispositifs tels que les MSAP ou les France Services. Au sein de ces dispositifs, un partenariat avec les opérateurs de services publics est présent mais beaucoup moins avec le travail social.

Les éléments d'analyse révèlent qu'effectivement, une relation médiation numérique / action sociale peut apporter une dynamique en faveur de l'empowerment mais sous certaines conditions. Ces dernières font écho aux trois aspects de l'empowerment (Haut Conseil du Travail Social, 2018) :

- Le pouvoir sur, pouvant être considéré comme le niveau macro de l'empowerment : chaque citoyens peut participer à la transformation sociale. Le maillage territorial et le partenariat permettent d'agir en ce sens ;

53

- Le pouvoir avec, au niveau méso, il s'agit d'avoir la capacité à agir avec les autres, et sur son environnement. La formation des professionnels, l'acculturation et l'interconnaissance apparaissent comme des enjeux majeurs de ce niveau ;

- Le pouvoir de, au niveau micro, renvoie au développement individuel des compétences personnelles qui est l'objectif encouru par l'accompagnement des acteurs.

Au niveau macro, bien que la question de la relation entre l'action sociale et la médiation numérique n'ait été que peu abordée pour diverses raisons : grille d'entretien peu dirigée sur la question, relation peu existante, biais présent de par ma fonction de travailleur social... ; celle-ci semble être essentielle à la dynamique d'empowerment. Elle offrirait la possibilité d'une transformation sociale.

En effet, nous avons mis en évidence les difficultés rencontrées par les travailleurs sociaux qui reconnaissent être en manque de compétences numériques ; de plus, nous avons remarqué que les acteurs de la médiation numérique pouvaient se retrouver en difficulté et avoir besoin de faire appel aux compétences des travailleurs sociaux. Ces besoins laissent à penser qu'une relation de complémentarité entre ces deux entités permettrait de favoriser l'empowerment des citoyens accompagnés. L'interconnaissance des acteurs de territoire permet de pouvoir réorienter et ainsi agit en faveur de l'empowerment des citoyens qui peuvent être informés. Le déploiement des MSAP et prochainement des France Services va permettre de faire évoluer ce maillage territorial notamment pour les services publics. De plus, les Hub Territoriaux ont pour missions de structurer le réseau de médiation numérique et d'établir un réseau partenarial. Le maillage territorial apparait comme essentiel à l'empowerment.

Au niveau méso, la question de la formation des médiateurs numériques semble cruciale. Plus les acteurs seront formés, moins ils se retrouveront dans des situations de difficulté, moins ils seront tentés par l'assistance et plus l'empowerment pourra être favorisé. En effet, des pratiques définie, une légitimité accordée par un rôle détaillé permettraient aux médiateurs numériques de clarifier leur place et ainsi d'agir sur leur environnement. La reconnaissance de leur métier, sa professionnalisation est importante. Comme la professionnalisation de l'action sociale qui s'est faite au cours de la révolution industrielle et dans un contexte d'après-guerre, nous pouvons nous laisser croire que la professionnalisation de la médiation numérique verra le jour, pourquoi pas dans un contexte de post crise sanitaire ?

Au niveau micro, il convient de favoriser la confiance en soi, l'estime de soi des citoyens afin de leur permettre d'entrer dans un processus d'apprentissage leur offrant la possibilité de

54

développer leurs compétences en l'occurrence numérique. Il est à noter que le développement de compétences numériques permet le développement d'autres compétences.

Nous concluons cette partie en nous rappelant que « l'empowerment désigne un processus socio-politique qui articule une dynamique individuelle d'estime de soi et de développement de ses compétences [micro] avec un engagement collectif [méso] et une action sociale transformative [macro]. (Bacqué & Biewener, 2015) Une relation entre l'action sociale et la médiation numérique permettrait de développer une action sociale transformative. Celle-ci dépend d'un engagement collectif ne serait-ce que pour une interconnaissance de ces deux entités. Interconnaissance qui pourrait aboutir à une structuration de l'offre d'accompagnement proposer aux usagers. Accompagnement dont l'objectif est la montée en compétences individuelles de chaque citoyen.

55

Conclusion générale

C'est au moment de conclure ce travail que je me rends compte que cette recherche a été une quête de sens personnelle. Partant d'appétences personnelles et professionnelles, il a été question, tout au long de cette recherche d'étudier les liens entre la médiation numérique et l'action sociale. Il était sûrement question de chercher à savoir si ces deux appétences pouvaient m'aider à construire mon projet professionnel sans être vues comme indépendantes l'une de l'autre.

Le premier lien identifié entre ces deux entités a été l'objectif qu'elles poursuivent : l'empowerment. Cela a été l'élément central du questionnement : comment la relation travail social / médiation numérique s'organise autour de cet objectif commun.

L'approche socio-historique utilisée pour cette étude a notamment permis de mettre en lumière la construction parallélique des deux entités. Cette approche et le cadre théorique utilisés m'ont permis de faire évoluer ma distance professionnelle et d'élargir mon regard. Cette prise de recul, bien que nécessaire dans ma vie professionnelle, n'a pas toujours été simple à prendre vis-à-vis de cette recherche. Je pense avoir eu des difficultés à acquérir la méthodologie demandée par cet exercice. Issue d'une formation technique et naviguant en plein coeur de mon sujet, il m'a été difficile de me distancier du terrain afin de conceptualiser les éléments empiriques pouvant être repérés. Néanmoins, cet exercice, ayant été une première, s'est avéré formateur, bien plus que je ne l'aurais imaginé. C'est un apprentissage bénéfique et complémentaire à ma formation initiale. Mon regard d'apprentie-chercheuse, au fil de cette recherche, a éclot. Je pense que la maitrise de cet exercice demande de l'entrainement : au même titre que l'observation s'affine, la conduite d'entretien se travaille et évolue avec l'expérience.

Si le sujet s'est avéré passionnant, il a été n'a pas toujours été simple de rester centrée sur ma problématique en raison de la constante évolution du numérique. Il s'agit d'un sujet dynamique qui éveille l'intérêt. Il m'est arrivé parfois d'avoir l'impression que ma recherche n'était pas légitime. Elle a nécessité une prudence d'ordre épistémologique permettant de ne pas surinterpréter les données recueillies et traitées au travers de la méthode Reinert. Ma connaissance avérée du travail social, mon expérience professionnelle et mon appétence conséquente pour la transition numérique m'ont contrainte à réfréner une part de subjectivité

56

en m'efforçant, à chaque étape, de prendre le recul nécessaire pour conférer à ce travail une certaine valeur heuristique.

Pour finir, cette enquête bien qu'elle puisse confirmer des hypothèses évoquées et qu'elle a pu faire évoluer mon regard d'apprentie-chercheuse comme mon regard de professionnelle, m'amène à me rappeler qu'« on ne trouve jamais ce que l'on cherche. Voir même, on trouve le contraire de ce que l'on cherche. On croit trouver la clé et on trouve quelque chose qui relance ou renverse le problème » (Morin, 2005, p. 140). Si je suis venue chercher des réponses à mes questionnements professionnels, je clôture ce travail avec de nouvelles interrogations :

- Quel impact la crise sanitaire peut avoir sur l'empowerment numérique de citoyens ?

- Quelle professionnalisation pour la médiation numérique ?

- Quelle est la plus-value de la formation numérique réalisée auprès des travailleurs sociaux au sein de l'IRTS PACA et des cours d'éducations aux médias dispensés lors de la formation des travailleurs sociaux en Belgique ?

- Quelles sont les représentations sociales du numérique chez les élus et quelles influences sur leurs prises de décision ?

57

Références

Barreyre, J.-Y., & Bouquet , B. (2006). Nouveau dictionnaire critique d'action sociale. Paris: Bayard.

Alberola, É., & Dubéchot, P. (2012). LA NOTION D'AUTONOMIE DANS LE TRAVAIL SOCIAL L'exemple du RMI/RSA. « Vie sociale »(N° 1), p. 145 à 156. Récupéré sur https://www.cairn.info/revue-vie-sociale-20

Alberola, É., & Dubéchot, P. (2012). La notion d'autonomie dans le travail social: L'exemple du RMI/RSA. Vie sociale, pp. 145-156. doi:10.3917/vsoc.121.0145

Bacqué, M.-H., & Biewener, C. (2015). L'empowerment, une pratique émancipatrice ? La Découverte / Poche.

Baena, A., & Rachiq, C. (2018). Les bénéfices d'une meilleure autonomie numérique. France Statégie.

Baena, A., & Rachiq, C. (2018). Les bénéfices d'une meilleure autonomie numérique . FRANCE STRATEGIE.

Bardin, L. (1997). L'analyse de contenu . Paris: PUF.

Baudain, P., Pommier, C., & Pommier, N. (2015). Réussir son concours ASS-EJE-ES-ME - 2016. Sètes.

Baumann, A. (1996-2020). Définition de NTIC (nouvelles technologies de l'information et de la communication). Consulté le Avril 21, 2019, sur Dictionnaire juridique: https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/ntic-nouvelles-technologies-de-l-information-et-de-la-communication.php

Bercy Info. (2020, 06 26). France Services : les services publics près de chez vous ! Consulté le 07 2020, sur Ministère de l'Economie, de la Finances et de la Relance: https://www.economie.gouv.fr/particuliers/france-services#:~:text=Le%20label%20%%AB%20France%20Services%20%%BB% 20permet,un%20panier%20commun%20de%20services.

Bru, M. (2001). Etudier les pratiques enseignantes : les raisons d'un choix. Les Dossiers des Sciences de l'Education .

Cerfon, D. J.-F. (2011). Dépendances Enjeux déontologiques. Ordre National des Médecins

Conseil National de l'Ordre. Consulté le Mars 4, 2019, sur https://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/synthese_dependance.pdf

CGET. (2017, 02 07). Maisons de services au public. Consulté le 06 2020, sur CGET: https://cget.gouv.fr/thematiques/services-au-public/maisons-de-services-au-public

Chabin, M.-A. (2017, Avril 10). Différence entre numérisation et dématérialisation. Consulté le Avril 21, 2019, sur Convergence:

https://archivistesqc.wordpress.com/2017/04/10/numerisation/

58

Chambon, J.-L., David, A., & Devevey, J.-M. (1982). Les Innovations sociales. Paris: Presses universitaires de France.

Chatel, E. (2002). L'incertitude de l'action éducative : enseigner une action en tension. Dans J. Beaudoin, & J. (. Friedrich, Théories de l'action et de l'éducation (pp. 179-202). Bruxelles: De Boeck Université.

Chauffaut, D., & David, E. (2003, Sepembre). LA NOTION D'AUTONOMIE DANS LE

TRAVAIL SOCIAL : EXEMPLE DU RMI. CAHIER DE RECHERCHES(186).

Chrétien, D., Gilson, S., Janssen, M., & Picavet, N. (2018). La dématérialisation des démarches administratives, un nouvel enjeu pour les travailleurs sociaux. Institut Régional du Travail Social Hauts-de-France. Hauts-de-France: Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale. Consulté le Avril 21, 2019, sur http://hauts-de-france.drjscs.gouv.fr/sites/hauts-de-france.drjscs.gouv.fr/IMG/pdf/cahiers_drjscs_201810_-_dematerialisation_travailleurs_sociaux_irts.pdf

Christine Lebel, E. R.-C. (2018, Février 15). Émergence d'une grille d'analyse de l'accompagnement des stagiaires pour améliorer la formation à l'enseignement. Innovation et recherche : métamorphose de la formation enseignante ? HEP Vaud. Consulté le Avril 21, 2019, sur https://www.researchgate.net/profile/Stephane_Colognesi/publication/323202238_Em ergence_d%27une_grille_d%27analyse_de_l%27accompagnement_des_stagiaires_po ur_ameliorer_la_formation_a_l%27enseignement/links/5a85cb00458515b8af88fd92/E mergence-dune-grille-dan

CNIL. (2018, Juillet 10). Règlement européen sur la protection des données : ce qui change pour les professionnels. Consulté le Avril 21, 2019, sur https://www.cnil.fr/fr/reglement-europeen-sur-la-protection-des-donnees-ce-qui-change-pour-les-professionnels

CNRTL. (2020, 05 10). Emancipation. Récupéré sur CNRTL: https://www.cnrtl.fr/definition/%C3%A9mancipation

CNRTL. (s.d.). Aide. Consulté le Avril 21, 2019, sur Centre Nationale des Ressources Textuelles et Lexicales: http://www.cnrtl.fr/definition/aide

CNRTL. (s.d.). Assister. Consulté le Avril 21, 2019, sur Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales: http://www.cnrtl.fr/definition/assister

CNRTL. (s.d.). Dépendance. Consulté le Avril 21, 2019, sur Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales: http://www.cnrtl.fr/definition/d%C3%A9pendance

CNRTL. (s.d.). Numérique. Consulté le Avril 21, 2019, sur http://cnrtl.fr/definition/academie9/num%C3%A9rique

CNRTL. (s.d.). Posture. Consulté le Avril 21, 2019, sur http://www.cnrtl.fr/definition/posture

59

Cohésion Territoriale. (2020, 06 08). France Services. Consulté le 07 2020, sur Ministère de a Cohésion Territoriale et des Relations avec les Collectivités Territoriales: https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/france-services

Collectif à l'initiative d'Emmaus Connect. (2016, Avril 11). La numérisation facteur d'exclusion pour ceux qui cumulent précarité sociale et numérique. Le Monde. Consulté le Avril 21, 2019, sur Le Monde: https://www.lemonde.fr/idees/article/2016/04/07/la-numerisation-facteur-d-exclusion-pour-ceux-qui-cumulent-precarite-sociale-et-numerique_4897781_3232.html

CREDOC. (2017). Baromètre du numérique 2017.

CSA Research. (2018). Enquête sur « L'illectronisme » en France. SYNDICAT de la presse sociale. Consulté le Avril 21, 2019, sur https://www.csa.eu/media/1772/csa-pour-sps_illectronisme_26062018.pdf

Davenel, Y.-M. (2016). Le numérique au sein de l'Action sociale dans un contexte de dématérialisation : politiques d'établissements, pratiques des professionnels et accompagnement au numérique des usagers. Paris: Emmaüs Connect (Les études Connexions Solidaires). Consulté le Avril 21, 2019, sur https://www.inclusion-numerique.fr/wp-content/uploads/2016/04/%C3%89tude_Le-num%C3%A9rique-au-sein-de-lAction-Sociale-dans-un-contexte-de-d%C3%A9mat%C3%A9rialisation.pdf

De Robertis, C. (1994). Méthodologie de l'intervention en travail social. Presses de l'EHESP.

Défenseur des droits. (2019). Dématérialisation et inégalités d'accès aux services publics. Consulté le Avril 21, 2019, sur https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/rapport-demat-num-21.12.18.pdf

Della Torre, L. (2017). NTIC et travail social dans le secteur associatif : crise de sens ou outil de professionnalisation ? Recueil Alexandries Collections Masters. Récupéré sur http://www.reseau-terra.eu/article1402.html

Dewez, A. (2018, Juin). Le non-recours aux droits sociaux des publics vulnérables. Cergy-Pontoise. Consulté le Avril 21, 2019, sur https://odenore.msh-alpes.fr/documents/dossier_non-recours_v2.pdf

Djaoui, E. (2002). Les organisations du secteur social. Approche psychosociologique. Paris: Editions ASH.

Duvoux, N. (2009). L'autonomie des assistés. Paris: PUF.

Emmaüs Connect. (2017). Les connexions d'Emmaüs Connect : de l'enquête anthropologique aux interfaces inclusives. Villeurbanne: Presses de l'enssib. doi:10.4000/books.pressesenssib.2078

Espaces Publics Numériques à Paris. (2020, février 2). Espaces Publics Numériques à Paris. Récupéré sur epn-paris: http://www.epn-paris.org/qui-sommes-nous/

60

Freud, S. (1972). Introduction à la psychanalyse. Petite bibliothèque Payot.

Fuster, P., & Jeanne, P. (2004). Dictionnaire de l'enseignement et de l'éducation spécialisés. Paris: Bordas pédagogie.

Gervais, L. (2017). Itinéraire d'un animateur d'espace public numérique (EPN). Cahiers de l'action(48), pp. 23-29. doi:10.3917/cact.048.0023

GIS M@ARSOUIN. (2017). Premiers résultats de l'enquête Capacity sur les usages numériques des Français. Consulté le Avril 21, 2019, sur https://laboratoire.agencedunumerique.gouv.fr/wp-content/uploads/sites/2/2017/03/Rapport-1rs-resultats-Capacity.pdf

Gouvernement. (2019, 06 14). 2 000 maisons France Service d'ici à 2022. Consulté le 06

2020, sur Gouvernement: https://www.gouvernement.fr/2-000-maisons-france-service-d-ici-a-2022

Gouvernement.fr. (2018, Octobre 30). Action Publique 2022 : pour une transformation du service public. Consulté le Avril 21, 2019, sur https://www.gouvernement.fr/action/action-publique-2022-pour-une-transformation-du-service-public

Haut Conseil du Travail Social. (2018). Pourquoi et comment les travailleurs sociaux se saisissent des outils numériques ? Consulté le février 02, 2020, sur http://solidarites-sante.gouv.fr /travail social

INSEE. (2019). L'économie et la société à l'ère du numérique. Récupéré sur INSEE: https://www.insee.fr/fr/statistiques/4238583?sommaire=4238635

Ion, J., & Ravon, B. (2005). Les travailleurs sociaux. Paris: Editions La Découverte.

Julian, O. (2016). La mise en place de la dématérialisation des dossiers de personnel des établissements de France : de l'état de projet à leur communication. Toulouse: Université Toulouse Jean Jaurès. Consulté le Février 26, 2020, sur http://dante.univ-tlse2.fr/1514/1/Julian_Ophelie_2016.pdf

Karsz, S. (2011). Pourquoi le travail social ? Définition, figures, clinique. Paris: Dunod.

Kertudo, P., & Vanoni, D. (2014). Politiques sociales, action sociale, travail social : revue de questions pour une prospective. Recherche sociale(211(3)), p. 8. doi:10.3917/recsoc.211.0006.

Le Bossé, Y., Dufort, F., & Vandette, L. (2004, Avril). L'évaluation De L'empowerment Des Personnes: Développement D'une Mesure D'indices Psychosociologiques Du Pouvoir D'agir (MIPPA). Canadian journal of community mental health. doi:10.7870/cjcmh-2004-0007

Lee, J. (1994). The empowerment approch to social work pratice. New York: Columbia University Press.

61

Legifrance. (2002, Janvier 2). Loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale. Consulté le Avril 21, 2019, sur https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000215460

Legifrance. (2016, Octobre 7). LOI n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Consulté le Avril 21, 2019, sur Légifrance: https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000033202746& categorieLien=id

Legifrance. (2017, Mai 6). Décret n° 2017-877 du 6 mai 2017 relatif à la définition du travail social. Consulté le Avril 21, 2019, sur https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000034633906& categorieLien=id

Lemay, M. (1993). J'ai mal à ma mère. Paris: Editions Fleurus.

Lintern@ute. (s.d.). Prise en charge. Consulté le Avril 21, 2019, sur L'internaute: https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/prise-en-charge/

Maison des services au public. (2018, 10 30). Missions & services proposés. Consulté le 06 2020, sur Maison des services au public:

https://www.maisondeservicesaupublic.fr/node/28

Masson, E. &.-1. (2010). Dire et taire : l'intersubjectivité dans l'entretien de recherche. . Bulletin de psychologie, 5-13. doi: https://doi.org/10.3917/bupsy.505.0005

Masson, E. (2016, Septembre). L'entretien en profondeur et l'appréhension du sens commun. Les représentations sociales. Théories, méthodes et applications. Paris: De Boeck Supérieur.

Masson, E. (2016). L'entretien en profondeur et l'appréhension du sens commun. Dans G. Lo Monaco, S. Delouvée, & P. Rateau, Les représentations sociales. Théories, méthodes et applications (pp. 103-106). Louvain-la-Neuve: De Boeck Supérieur.

MedNum. (2015). La médiation numérique ? Consulté le 05 10, 2020, sur Portail de la médiation numérique: http://www.mediation-numerique.fr/presentation-mediation-numerique.html

Meyer, V. (2014). Les Technologies numériques au service de l'usager...au secours du travail. Bordeaux: Les études hospitalières.

Meyer, V., & Delahaye, S. (2017, Novembre/Décembre). Médiations numériques et travail social : de quoi parle-t-on ? (L. C. l'Actif, Éd.) L'impact des TIC et du numérique sur les pratiques professionnelles en ESSMS(498-499), p. 16.

Mias, C. (s.d.). ED0022 LA FORMATION ET L'INSERTION. Consulté le mars 4, 2019, sur http://coursval.free.fr/coursL3/sept/ED22-ChMIAS-LaFormationEtLinsertion(Katell).pdf

62

Mias, C., & Piaser, A. (2016). Les représentations professionnelles. Dans G. Lo Monaco, S. Delouvée, & P. Rateau, Les représentations sociales. Théories, méthode et applications (pp. 319-322). Louvain-la-Neuve: De Boeck Supérieur.

Milgram, S. (2013). Expérience sur l'obéissance et la désobéissance à l'autorité. Paris: Editions La Découverte.

Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales . (2019, 06 14). Maisons de services au public. Consulté le 06 2020, sur Cohésion territoriale: https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/maisons-de-services-au-public

Moliner, P., & Guimelli, C. (2015). Les représentations sociales. Grenoble: Presses Universitaires de Grenoble.

Morin, E. (2005). Introduction à la pensée complexe. Paris: Editions du Seuil.

Pascal, H. (2014). Histoire du travail social en France. De la fin du XIXe siècle à nos jours.

PRESSES DE L'ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES EN SANTÉ PUBLIQUE.

Paul, M. (2004). L'accompagnement : une posture professionnelle spécifique. Paris: L'Harmattan.

Paul, M. (2011). L'accompagnement : entre autonomisation et territorialisation . Consulté le Avril 21, 2019, sur https://www.crefe38.fr/IMG/pdf/maela_PAUL_accompagnement_automatisation_et_t erritorialisation.pdf

Paul, M. (2012). L'accompagnement comme posture professionnelle spécifique. L'exemple de l'éducation thérapeutique du patient. Recherche en soins infirmiers(110(3)). doi:10.3917/rsi.110.0013

Paul, M. (2016). La démarche d'accompagnement : Repères méthodologiques et ressources théoriques. Paris: De Boeck.

Rhéaume, J. (2019). Pouvoir d'agir. Vocabulaire des histoires de vie et de la recherche biographique, pp. 127-129.

Rohart, J.-D. (2008). Carl Rogers et l'action éducative. Lyon: Chronique sociale.

TILIOS Initiatives. (2020, Février 2). Espace Public Numérique. Récupéré sur Movilab: https://movilab.org/wiki/Espace_Public_Num%C3%A9rique

Turet, A., & Oulahbib, N. (2017). 2 000 emplois d'avenir en espace public numérique : Vers des dynamiques maîtrisées de qualifications et d'employabilités pour ouvrir les métiers de la « médiation numérique » aux enjeux des usages du numérique. Cahiers de l'action,. doi:10.3917/cact.048.0031

Vanesse, A. (2008). Ecouter l'autre. Tant de choses à dire. Lyon: Chronique sociale.

Warin, P. (2016). Le non-recours aux politiques sociales. Grenoble: Presses universitaires de Grenoble.

63

Annexes

Annexe 1 : Questionnaire préparatoire

Les usages du numérique chez les travailleurs sociaux

Etes-vous ?

El Une femme El Un homme

Dans quelle tranche d'âge vous situez-vous ?

El 18 - 24 ans El 35 - 39ans

El 25 - 29 ans El + de 40 ans

El 30 - 34 ans El + de 50 ans

Dans quel département travaillez-vous (Précisez le numéro) ?

Dans quel champ travaillez-vous ?

El Handicap

El Insertion

El Protection de l'enfance

El Autre

Au sein de quel type de structure travaillez-vous ? (Ex : CHRS, CHU, Centre Maternel, SAVS, MDS, CCAS, Accueil de jour, Foyer...) ?

Etes-vous formez aux usages numériques ?

El Oui El Non

Connaissez-vous le programme "Action Public 2022" concernant la transformation du service public ?

El Oui El Non

Quelle place prend le numérique dans votre quotidien professionnel ? El Pas du tout importante

El Peu importante

q

64

Moyennement importante

q Importante

q Très importante

Comment qualifieriez-vous vos compétences numériques dans le cadre de votre travail ?

q Très faibles Elevées

q Faibles Très élevées

q Moyennes

Savez-vous créer une adresse mail ?

q Oui Non

Vous savez créer une adresse mail. Faites-vous cette démarche avec les personnes que vous accompagnez ?

q Oui Non

Connaissez-vous mesdroitssociaux.gouv.fr ?

q Oui Non

Vous connaissez mesdroitssociaux.gouv.fr. L'utilisez-vous dans un cadre professionnel ?

q Oui Non

Connaissez-vous France Connect ?

q Oui Non

Vous connaissez France Connect. Le conseillez-vous aux personnes que vous accompagnez ?

q Oui Non

Connaissez-vous le Cloud-Solidaire Reconnect ?

q Oui Non

Vous connaissez le Cloud-Solidaire Reconnect. L'utilisez-vous dans le cadre professionnel ?

65

E Oui E Non

Savez-vous déclarer les impôts en ligne ?

E Oui E Non

Vous savez-déclarez les impôts en ligne. Faites-vous cette démarche avec les personnes que vous accompagnez ?

E Oui E Non

Savez-vous naviguer sur CAF.fr ?

E Oui E Non

Vous savez naviguez sur la CAF.fr. Accompagnez-vous les bénéficiaires à cette navigation ?

E Oui E Non

Savez-vous naviguer sur AMELI.fr ?

E Oui E Non

Vous savez naviguer sur AMELI.fr. Accompagnez-vous les bénéficiaires à cette navigation ?

E Oui E Non

Conseillez-vous la prise de rendez-vous administratifs (Préfecture, Mairie, Ambassade...) en ligne ?

E Oui E Non

Conseillez-vous la prise de rendez-vous médicaux en ligne ?

E Oui E Non

Savez-vous réaliser une demande de logement sociale en ligne ?

E Oui E Non

Vous savez réaliser une demande de logement social en ligne. Faites-vous cette démarche avec les personnes que vous accompagnez ?

El Oui El Non

Pensez-vous que l'accompagnement au numérique fait partie intégrante de l'accompagnement social global ?

El Oui El Non

Pensez-vous avoir assez de connaissances numériques pour accompagner les bénéficiaires vers une autonomie dans leurs démarches administratives en ligne ?

El Oui El Non

Est-ce que vous vous sentez-vous prêt pour la dématérialisation des démarches

administratives ?

El Pas du tout

El Un peu

El Moyennement

El Prêt

El Parfaitement

De quoi auriez-vous besoin pour vous sentir parfaitement prêts face à cette

transformation numérique ? (Plusieurs réponses possibles)

El Formation

El Accompagnement

El Communication

El Matériel

El Référent numérique

El Classeur ressource composé de fiche-action

El Autre

66

Souhaitez-vous ajouter un commentaire, une remarque ?

67

Annexe 2 : Grille d'entretien

Vous avez accepté que nous puissions échanger sur la dématérialisation du service public. Ce qui m'intéresse dans le cadre de cette recherche, c'est de mieux comprendre les impacts de cette dématérialisation notamment sur le pouvoir d'agir des citoyens. Les observations que vous avez pu faire dans le cadre de vos missions devraient me permettre d'avoir un regard plus juste sur la question. Si vous le permettez, je vais donc vous poser quelques questions auxquelles je vous invite à répondre en toute liberté ! Les réponses restent bien entendu confidentielles et ne serviront que la recherche.

1) Dans un premier temps, j'ai besoin de quelques éléments vous concernant :

GENRE : Homme Femme

ÂGE :
STRUCTURE :

EPN Tiers Lieux Association Médiathèque Autre

Département et ville (question non posée) :

2) Quel a été votre parcours professionnel ? Comment vous a-t-il conduit à votre poste actuel ?

Dernier diplôme obtenu :

Année d'obtention :

Intitulé exact du poste :

Ancienneté sur le poste :

3) Que diriez-vous de l'offre de formation en lien avec la réalisation de vos missions ?

4) Pouvez-vous me présenter vos missions, vos actions au quotidien ?

5) Pouvez-vous décrire le public que vous recevez ? (Comment se présente-t-il à l'espace ?)

6) Quelles actions proposez-vous quant à l'accompagnement aux démarches administratives ?

7) Comment organisez-vous vos missions en lien avec les acteurs du territoire ? Constatez-vous des leviers ? des freins ?

8)

68

Par son programme Action Public 2022 et la mise en place des dispositifs comme les EPN, l'Etat souhaite favoriser l'empowerment. En partant du principe que l'empowerment est un processus d'apprentissage permettant de gagner en connaissances, en compétences, en autonomie, permettant de participer au développement de la société, que pensez-vous du souhait de l'Etat ?

9) En lien avec vos missions, comment vous situez vous par rapport à ce souhait de l'Etat ?

10) Dans quelle mesure la crise sanitaire a eu un impact sur vos missions ?

11) Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?

Annexe 4 : Enregistrements et retranscriptions des entretiens

Voir DRIVE

70

Annexe 4 : Dictionnaire pour l'analyse de donnée sur IRaMuTeQ

*age_m40 : modalité âge variable moins de 40 ans

*age_p40 : modalité âge variable plus de 40 ans

*bac_m3 : modalité niveau de formation variable moins que BAC+3

*bac_p3 : modalité niveau de formation variable BAC+3 et plus

*ent_ : modalité entretien variable numéro de l'entretien

*exp_m5 : modalité années d'expérience variable moins de cinq ans

*exp_p5 : modalité années d'expérience variable plus de cinq ans

*sex_ m : modalité genre variable homme

*sex_ f : modalité genre variable femme

-*2 parcours : Quel a été votre parcours professionnel ? Comment vous a-t-il conduit à votre

poste actuel ?

-*3_missions : Pouvez-vous me présenter vos missions, vos actions au quotidien ?

-*4_formation : Que diriez-vous de l'offre de formation en lien avec la réalisation de vos

missions ?

-*5_admin : Quelles actions proposez-vous quant à l'accompagnement aux démarches

administratives ?

-*6_public : Pouvez-vous décrire le public que vous recevez ? (Comment se présente-t-il à

l'espace ?)

-*7 partenariat : Comment organisez-vous vos missions en lien avec les acteurs du territoire ?

Constatez-vous des leviers ? des freins ?

-*8_politique : Par son programme Action Public 2022 et la mise en place des dispositifs

comme les EPN, l'Etat souhaite favoriser l'empowerment. En partant du principe que

l'empowerment est un processus d'apprentissage permettant de gagner en connaissances, en

compétences, en autonomie, permettant de participer au développement de la société, que

pensez-vous du souhait de l'Etat ?

-*9 perso : En lien avec vos missions, comment vous situez vous par rapport à ce souhait de

l'Etat ?

-*10_covid : Dans quelle mesure la crise sanitaire a eu un impact sur vos missions ?

-*11_ouverture : Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?

Agence du Numérique : agence_numérique

Aidant Connect : aidant_connect

Animateur multimédia : animateur_multimédia

71

Appel à projet : appel_projet

Assemblée nationale : assemblée_nationale

Auvergne Rhône Alpes : auvergne_Rhône_Alpes

Centre social : centre_social

Chambre de commerce : chambre_commerce

Chambre de l'agriculture : chambre_agriculture

Chambre des métiers : chambre_métier

Chef de projet : chef_projet

Contrat-aidé : contrat_aidé

Demandeur d'emploi : demandeur_emploi

Education Nationale : éducation_nationale

Education populaire : education_populaire

Emploi-jeune : emploi_jeune

Fracture numérique : fracture_numérique

Inclusion numérique : inclusion_numérique

Lien social : lien_social

Médiateur nuémrique : médiateur_numérique

Médiation numérique : médiation_numérique

Mission locale : mission_locale

Mission Société Numérique : mission_société_numérique

Offre d'emploi : offre_emploi

Pass numérique : pass_numérique

Pôle Emploi : pôle_emploi

Porteur de projet : porteur_projet

Recherche d'emploi : recherche_emploi

Réseaux sociaux : réseaux_sociaux

Service civique : service_civique

Traitement de texte : traitement_texte

Travail social : travail_social

Travailleur social : travailleur_social

Zone-blanche : zone_blanche

72

Lexique

ADSL : Asymmetric Digital Subscriber Line

AFC : Analyse Factorielle des Correspondances

AFPA : Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes

ANCT : Agence Nationale de la Cohésion des Territoires

ANTS : Agence Nationale des Titres Sécurisés

AMELI : Assurance Maladie

AS : Assistante Sociale

BAC : Baccalauréat

BTS : Brevet de Technicien Supérieur

CAF : Caisse d'Allocations Familiales

CARSAT : Caisse d'Assurance Retraite et de la Santé Au Travail

CATIC : Conseiller et Assistant en Technologies de l'Information et de la Communication

CCAS : Centre Communale d'Action Sociale

CCMSA : Caisse Centrale Mutualité Sociale Agricole

CDD : Contrat à Durée Déterminée

CERN : Centre Européen de Recherche Nucléaire

CHD : Classification Hiérarchique Descendante

CIF : Congé Individuel de Formation

CLIC : Centre Local d'Information et de Coordination

CNAF : Caisse Nationale d'Allocations Familiales

CNAM : Centre National des Arts et Métiers

CNAV : Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse

CNED : Centre National d'Enseignement à Distance

CPAM : Caisse Primaire d'Assurance Maladie

CRP : Centre de Réadaptation Professionnelle

CV : Curriculum Vitae

DEJEPS : Diplôme d'Etat Jeunesse, Education Populaire et Sport

DEUST : Diplôme d'Etudes Universitaires Scientifiques et Technologiques

DUT : Diplôme Universitaire de Technologie

EDS : Espace Départemental des Solidarités

EHPAD : Etablissement d'Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes

73

ENT : Espace Numérique de Travail

EPI : Espace Public Internet

EPN : Espace de Pratiques Numériques

FABLAB : LABoratoire de FABrication

FLE : Français Langue Etrangère

GRETA : GRoupement d'ETAblissement

IA : Intelligence Artificielle

ICI : Innovons pour la Citoyenneté sur Internet

INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques

IRTS : Institut Régional de Travail Social

LADAPT : Association pour l'insertion sociale et Professionnelle des personnes handicapées

MJC : Maison des Jeunes et de la Culture

MMI : Métiers du Multimédia et de l'Internet

MOOC : Massive Open Online Course

MSAP : Maison de Service Au Public

MSN : Mission Société Numérique

NTIC : Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication

PACA : Provence Alpes Côte d'Azur

PME : Petite et Moyenne Entreprise

RGPD : Règlement Général sur la Protection des Données

RMI : Revenu Minimum d'Insertion

RSA : Revenu de Solidarité Actif

RSE : Responsabilité Sociétale des Entreprises

SDF : Sans Domicile Fixe

TIC : Technologies de l'Information et de la Communication

TPE : Très Petite Entreprise

USB : Universal Serial Bus

VAD : Visite A Domicile

VAE : Validation des Acquis d'Expérience

WI-FI : Wireless Fidelity

74

Table des matières

Remerciements 2

Sommaire 3

Introduction 4

Partie 1. Eléments de contexte 6

Chapitre 1. L'action sociale : de l'assistance à une injonction à l'autonomie 6

1.1. L'action sociale au coeur de la révolution industrielle : de l'assistance à

l'accompagnement 6

1.2. L'action sociale aujourd'hui : l'accompagnement entre injonction à l'autonomie et

levier d'empowerment 8

Synthèse du chapitre 1 13

Chapitre 2. La transition numérique : de la révolution à l'injonction 14

2.1. De la révolution numérique à la dématérialisation 14

2.2. La dématérialisation du service public : vers une injonction au numérique 16

Synthèse du chapitre 2 18

Conclusion de la partie 1 19

Partie 2. Eléments de problématisation 20

Chapitre 3. L'inclusion numérique : des fractures multiples 20

3.1. Quand la fracture numérique se cumule avec la fracture sociale 20

3.2. Quand les acteurs sociaux sont face à leur propre fracture 22

Synthèse du chapitre 3 24

Chapitre 4. La médiation numérique : une réponse à la révolution numérique 25

4.1. La médiation numérique : une pratique mise en place au travers de dispositifs 25

4.2. Médiateur numérique : un champ professionnel en construction ? 28

Synthèse du chapitre 4 30

Conclusion de la partie 2 31

Partie 3. L'enquête 33

Chapitre 5. Méthodologie 33

5.1. Choix du recueil de données 33

5.2. Construction de la grille d'entretien 36

5.3. Déroulement des entretiens 39

Chapitre 6. Traitements et analyses de données 40

6.1. Analyse des classes 1 et 2 : médiation numérique et démarches administratives 41

6.2. Analyse de la classe 3 : médiation numérique et formation 44

75

6.3. Analyse des classes 4 et 5 : médiation numérique, politique de territoire et partenariat

47

Conclusion de la partie 3 51

Conclusion générale 55

Références 57

Annexes 63

Annexe 1 : Questionnaire préparatoire 63

Annexe 2 : Grille d'entretien 67

Annexe 4 : Enregistrements et retranscriptions des entretiens 69

Annexe 4 : Dictionnaire pour l'analyse de donnée sur IRaMuTeQ 70

Lexique 72

Table des matières 74

Résumé 76

76

Résumé

Le numérique, omniprésent au sein de notre société, redéfini les pratiques personnelles et professionnelles. Nous avons pu le constater récemment lors de la période de confinement : cet outil est devenu indispensable à la continuité pédagogique, au maintien de liens sociaux, à la mise en place du télétravail, etc. La crise sanitaire a pu remettre en perspective la présence de la fracture numérique. Fracture également mis en exergue par la dématérialisation du service public. C'est dans ce contexte que s'inscrit cette étude.

Il a été question de se demander en quoi une relation entre l'action sociale et la médiation numérique permettrait de réduire les pratiques d'assistance et de favoriser l'empowerment des citoyens. Un échantillon de médiateurs numériques a été interrogé. Bien que cette étude ait été menée sur un échantillon restreint, elle soutient l'hypothèse qu'une interconnaissance entre les acteurs de l'action sociale et de la médiation numérique est indispensable à la réalisation des pratiques d'accompagnement.

Abstract

Digital technology, omnipresent in our society, has redefined personal and professional practices. We were able to see this recently during the confinement period: this tool has become essential for educational continuity, for maintaining social ties, for setting up teleworking, etc. The health crisis has been able to put the presence of the digital divide into perspective. A fracture also highlighted by the dematerialization of the public service. It is in this context and in connection with the professional context of social action that this study takes place.

The focus of this dissertation was on the relationship between social action and digital mediation. Would this relationship make it possible to reduce assistance practices and promote the empowerment of citizens? A sample of digital mediators was interviewed. Although this study was carried out on a small sample, it supports the hypothesis that mutual knowledge between the actors of social action and digital mediation is essential for the realization of support practices.






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon