3.3.1.2 Résultats empiriques : la
non-intégration socio-économique influe positivement sur les
aspirations migratoires
Le contexte du pays d'origine et celui dans lequel se trouve
le migrant dans le pays de destination sont les deux grands facteurs qui
entrent en jeu dans la décision de migration et le processus qui en
résulte (Lee, 1966 :50). L'émigration secondaire est
forcément liée au contexte dans lequel se trouve le migrant dans
le pays de destination. En d'autres termes, lorsque les objectifs pour lesquels
la migration a été envisagée ne sont pas atteints dans le
premier pays de destination, les aspirations migratoires naissent et
l'émigration secondaire devient une alternative.
Par ailleurs, l'intégration des migrants dans les pays
d'accueil relève d'un processus multidimensionnel. Ce processus est
à la fois politique, socio-culturel et économique. Les migrants
qui s'intègrent facilement du point de vue socio-culturel et ou
économique dans leurs premières destinations sont moins enclins
à envisager une émigration secondaire (Toma et Castagnane,
2015).
Parlant de l'intégration sociale, Beenstock (1996) a
confirmé dans son étude sur les immigrants en Israël que
l'émigration secondaire n'est pas nécessairement due au
chômage mais plutôt à des facteurs d'intégration
sociale tels que la langue et le logement. De même, Humphries et al.
(2009) ont trouvé que l'intention d'une émigration secondaire des
infirmières philippines et indiennes d'Irlande vers le Canada, les
États-Unis et l'Australie s'expliquait par l'accès à la
résidence permanente et à la citoyenneté.
Outre l'intégration sociale, l'intégration
économique, sur le marché de l'emploi, est la plus
envisagée par les migrants à court terme ; l'émigration
étant dans la majorité des cas une décision personnelle ou
familiale prise pour un motif économique (Drechsler et Gagnon, 2008).
Mais cette intégration sur le marché de l'emploi est, pour les
migrants, tout un processus parsemé d'obstacles relatifs aux
discriminations, à la reconnaissance de diplôme et au
déclassement professionnel.
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L'accès à l'emploi, au Canada par exemple, est
fonction de générations (Boudarbat & Ebrahimi, 2016). Les
jeunes immigrés qui sont arrivés après l'âge de 10
ans (Génération 1) ou au plus 10 ans (Génération
1.5) sont les plus défavorisés par rapport à ceux qui sont
nés au Canada avec au moins un parent canadien (Génération
2) ou de deux parents canadiens (Génération 3). En Europe par
contre, Flahaux (2013 :45) constate que l'intégration des migrants sur
le marché de travail européen a connu des variations
considérables non pas seulement en fonction des pays de destination et
d'origine, de la période mais aussi de la qualification des migrants,
eux-mêmes au-delà des discriminations, de problème de
reconnaissance des diplômes et les barrières de la langue.
De ce qui précède, il apparait important de
noter que l'intégration économique des migrants dans les pays de
destination s'inscrit dans un modèle de société. Celle-ci
peut être égalitaire ou discriminatoire, à des niveaux
différents. Les migrants rencontrent moins de difficultés dans le
processus de leur intégration lorsque la société est
relativement égalitaire parce qu'ils bénéficient de la
reconnaissance de leur qualification, s'insèrent dans le marché
de l'emploi et développent un sentiment d'appartenance, garantie de leur
installation presque définitive dans le pays de destination. Cette
situation est loin d'être aisée dans une société
discriminatoire où le déclassement professionnel et un taux de
chômage se posent avec intensité. Dans un tel contexte
-d'échec d'intégration économique-, les migrants aspirent
à trouver mieux ailleurs et l'émigration secondaire trouve tout
son sens. De plus, il apparait important de savoir: qu'en est-il de
l'intégration socio-économique des migrants d'origine africaine
en particulier en Belgique ?
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