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Le Droit applicable aux joint-ventures

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par Tongkin HUOY
Université Jean Moulin Lyon 3 - DEA 2006
  

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§2. Les indices de localisation des joint-ventures

L'article 4, paragraphe 5, de la Convention laisse au juge une certaine marge d'appréciation pour déterminer lui-même le centre de gravité du contrat. Il s'agit de regrouper les points de contact afin de rechercher le pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits. La Convention de Rome, comme les Conventions de La Haye de 1955 et de 1978, prescrive au juge de tenir compte d'un élément de rattachement unique révélateur des liens les plus étroits304(*). Pourtant, dans le contrat de joint-venture, cela est loin d'être facile. En effet, on ne peut que constater la pluri-localisation objective de cet accord de base305(*).

Malgré cette pluri-localisation, plusieurs indices pertinents de la localisation objective du contrat de joint-venture pourront être retenus : le lieu d'exécution, le pays d'accueil du joint-venture, le lieu de la prise de décision stratégique..., etc. Dans le souci de l'unité du droit applicable, certains auteurs proposent de déterminer parmi ces indices l'indice le plus significatif306(*). De toute façon, l'indice le plus significatif ne serait pas le même selon que les joint-ventures sont d'investissement (A) ou de coopération (B).

A. Les joint-ventures d'investissement

Initialement le joint-venture est développé dans le but de réaliser des investissements internationaux307(*). À la différence du joint-venture de coopération, le joint-venture d'investissement désigne celui qui accompagne la réalisation d'un investissement dans un pays déterminé308(*). Le lieu d'exécution, par définition unique, a donc son importance considérable dans le joint-venture d'investissement.

À propos de la recherche de l'indice de localisation de ce type de joint-venture, les doctrines ne sont pas partagées à ce que le pays d'accueil de l'investissement constitue l'indice de rattachement ayant la valeur localisatrice prépondérante. En effet, c'est dans le pays d'accueil que se situe le centre de gravité ou le groupement de points de contacts du joint-venture d'investissement. Il est soulevé également que l'opération d'investissement - but principal du joint-venture d'investissement - est réalisée dans ce pays d'accueil. De même, le pays d'accueil est le siège du rapport de droit entre les partenaires. C'est donc le pays d'accueil qui possède incontestablement les liens les plus étroits avec l'opération d'investissement309(*). Cette solution est très proche de celle donnée par la Convention de Washington qui affirme la force d'attraction du droit local en matière de contrat international de construction310(*).

Dans la pratique de l'arbitrage du commerce international, l'application du droit national du pays d'accueil a été à maintes reprises affirmée par les arbitres internationaux. Dans une sentence de la CCI no 4095 en 1984311(*), un joint-venture international d'investissement a été créé dans le domaine des hydrocarbures. Suite à l'opposition entre les parties sur le droit applicable, le Tribunal arbitral procède à la localisation du contrat en vertu des différents indices de rattachement. Il décide en l'espèce que l'État d'accueil présente les liens les plus étroits avec le contrat puisque d'abord la société commune a été créée dans ce pays ; et ensuite, le contrat de joint-venture a été conclu et exécuté dans cet État. D'ailleurs, dans une célèbre affaire dite « Les plateaux des pyramides »312(*), les arbitres déclarent le droit égyptien applicable puisque les accords ont été conclus et majoritairement exécutés en Égypte. De même, dans une sentence ad hoc du 31 mai 1988313(*), un joint-venture a été créé entre Qatar et plusieurs compagnies occidentales pour l'exploration et la production du pétrole au Qatar. Les arbitres ont déclaré le droit qatari applicable aux motifs que le Qatar était le pays de la réalisation de l'investissement.

Le raisonnement ne sera pas le même en ce qui concerne la recherche des indices de la localisation des joint-ventures de coopération.

B. Les joint-ventures de coopération

Contrairement au joint-venture d'investissement, le joint-venture de coopération n'accompagne pas la réalisation d'un investissement dans un pays déterminé. Il est extrêmement difficile de déterminer le droit applicable aux joint-ventures de coopération par le biais de la localisation par groupement de points de contact314(*). Le lieu d'exécution du contrat n'aurait pas de valeur locatrice importante pour le joint-venture de coopération car ce dernier requiert par définition plusieurs lieux d'exécution315(*). L'application de ce critère de rattachement au joint-venture de coopération n'a pour effet que de soumettre à des lois différentes des différentes obligations des parties. D'où l'idée que l'homogénéité paraît parfois indispensable pour le contrat est rompue316(*). Existe-t-il des indices prépondérants de localisation plus adaptés au joint-venture de coopération ?

D'après B. Goldman, la société commune devrait être l'indice prépondérant pour la détermination du droit applicable au joint-venture (de coopération). Autrement dit, pour lui, il faut recourir à la loi du siège social de la société commune317(*). Cette solution a été vivement critiquée. D'abord, cette solution est contraire à la volonté négative des parties, qui excluent implicitement la loi de la société318(*). De plus, le choix d'un pays d'implantation du siège social est souvent opéré dans le but purement fiscal. Ce siège ne présente toujours pas de véritable lien avec l'opération. Il n'occupe pas toujours le centre de gravité au nom de l'opération. De même, la société commune n'est qu'un simple instrument de la réalisation de l'opération de joint-venture. On trouve parfois que le joint-venture implique l'utilisation de plusieurs sociétés dans des États différents319(*).

Dans la sentence no 4095320(*) de 1984, les arbitres ont refusé de considérer le lieu d'implantation de la société commune comme le critère de rattachement objectif prépondérant de l'accord de base (protocole d'accord). En effet, certes il existe des rapports entre le protocole d'accord et les statuts de la société (commune), mais le protocole d'accord avait été conclu avant même l'adoption des statuts de la société. Il a ajouté que ces statuts ne pouvaient avoir d'effet rétroactif sur la localisation objective du protocole d'accord.

Face à l'absence de l'indice prépondérant, la doctrine a proposé une solution alternative. Dans son cas pratique proposé, O. Sandrock321(*) recourt à une solution hiérarchisée. Selon lui, le centre de gravité du contrat de joint-venture pourrait être à l'administration centrale du joint-venture ; à défaut, le lieu de rencontre régulière entre les partenaires ; à défaut du centre unique, le lieu désigné par d'autres facteurs par exemple l'établissement de la société commune. Cette solution est souple et adaptable pour la recherche du droit applicable eu égard à la diversité de situation du joint-venture de coopération. On trouve en effet quelques indices hiérarchisés de la localisation du joint-venture de coopération. Il s'agit premièrement du lieu de la prise de décision stratégique, qui peut être le lieu de la conclusion de l'accord de base, du lieu de la réunion de l'assemblée générale des associés de la société commune, ou le lieu de rencontre entre des partenaires322(*). Deuxièmement, il s'agit du lieu de la prise des décisions de gestion quotidienne. Enfin, il s'agit du lieu de l'exploitation de l'entreprise commune, mais il peut être aussi pluriel323(*).

En tous cas, il ne devrait pas retenir un rattachement fixe. À ce propos, un auteur conclut qu'il s'agit de retenir un indice qui pourrait être écarté si une autre loi présente des liens plus étroits (article 4.5 de la Convention de Rome). Il ajoute que la loi du lieu où s'exerce le contrôle conjoint de l'entreprise commune doit être présumée la plus proche324(*).

Vu cette pluralité des indices de la localisation des joint-ventures, il serait concevable de recourir aux règles transnationales pour assurer l'uniformité et l'efficacité de l'ensemble contractuel.

* 304 P. Mayer, V. Heuzé, Droit international privé, Montchrestien, 7e éd. 2001, p.488, n. 724

* 305 Gaby CHAHINE, La joint venture sociétaire internationale, Thèse préc. p.296.

* 306 Valérie Pironon, Les joint ventures..., Thèse préc. p.379 ; Gaby CHAHINE, La joint venture sociétaire internationale, Thèse préc. p.296.

* 307 Pironon, thèse préc., p.361.

* 308 Valérie Pironon, thèse préc. p.381, no 758.

* 309 Gaby CHAHINE, thèse préc. p.296.

* 310 P. Glavinis, Le contrat international de construction, Joly 1993, p.527, spéc. p.539, no 643. (cité par Pironon, p.380).

* 311 Sentence CCI, affaire no 4095 du 21 février 1984, Yearbook, (VI) 1986, p.149 (citée par V. Pironon, thèse préc. p.380)

* 312 Sentence CCI, affaire no 3493 du 16 février 1983, Yearbook (VI) 1984, p. 111 (G. Chahine, thèse préc. p.296).

* 313 Sentence ad hoc du 31 mai 1988, Yearbook, 1990, p. 31

* 314 Valérie Pironon, thèse préc., p.381.

* 315 Gaby CHAHINE, La joint venture sociétaire internationale, thèse Montpellier I, 2004, no. 563, p. 298.

* 316 Bernard Audit, Droit International Privé, Economica, 3e éd. 2000, no 164, p.147.

* 317 B. Goldman, « Données générales des joint-ventures », in Dissolution d'une joint venture et l'arbitrage commercial international, CCI Newsletter, no 10, 1993, p. 35 et s. (cité par Pironon, thèse préc. p.381)

* 318 Valérie Pironon, « Les joint ventures, ... », Thèse préc., no758, p. 381

* 319 Les faits dans l'arrêt du 9 février 1998 de la 1ere cour civile Tribunal fédéral suisse (cité par Pironon, thèse préc. p.381.)

* 320 Sentence précitée.

* 321 O. Sandrock, « Termination of joint venture: problems of conflict pf Laws », in CCI Newsletter, 1993, no10, p.44. (cité par Pironon, thèse préc. p.383)

* 322 Valérie Pironon, Les joint ventures,..., Thèse préc., p.382.

* 323 Ibid., p.383.

* 324 Ibid.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille